Quadri-moment

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En relativité restreinte, le quadri-moment[1] (ou quadrivecteur impulsion[1] ou quadri-impulsion[2] ou quadrivecteur impulsion-énergie[3] ou quadrivecteur énergie-impulsion[4]) est une généralisation du moment linéaire tridimensionnel de la physique classique sous la forme d'un quadrivecteur de l'espace de Minkowski, espace-temps à 4 dimensions de la relativité restreinte.

Le quadri-moment d'une particule combine le moment tridimensionnel et d'énergie  :

.

Comme tout quadrivecteur, il est covariant, c'est-à-dire que les changements de ses coordonnées lors d'un changement de référentiel inertiel se calculent à l'aide des transformations de Lorentz.

Dans une base donnée de l'espace-temps de Minkowski, ses coordonnées sont notées , dans la base covariante associée, ses coordonnées sont notées et sont telles que .

Le carré de la pseudonorme du quadrivecteur conduit à la relation d'Einstein[5],[6],[7] :

,

reliant l'énergie, la masse et l'impulsion[7]. Lorsque la masse de la particule libre est non nulle mais que son impulsion est nulle, la relation se réduit à [7]. Lorsque la masse de la particule libre est nulle, comme c'est le cas d'un photon, la relation se réduit à [8].

La 4-impulsion est une des notions introduites par Hermann Minkowski[9],[10],[11].

Dénominations[modifier | modifier le code]

La dénomination « quadrivecteur énergie-quantité de mouvement » reste usitée[12]. Mais, en raison notamment de sa longueur[13], des auteurs lui substituent celle de « quadrivecteur énergie-impulsion »[14],[15] ou de « quadrivecteur impulsion-énergie »[16]. Cela est discutable car « impulsion » devrait être réservé à « l'action d'une force pendant un court intervalle de temps » et ainsi à « une variation de quantité de mouvement »[13].

Relation avec la quadrivitesse[modifier | modifier le code]

Nous savions qu'en mécanique classique, la relation entre l'impulsion et la vitesse de la particule non-relativiste est la suivante :

correspond à la masse au repos.

Nous pouvons généraliser ce concept à quatre dimensions en introduisant la quadrivitesse. Pour une particule dotée de masse non nulle mais ayant une charge électrique nulle, le quadri-moment est donné par le produit de la masse au repos et de la quadrivitesse .

En coordonnées contravariantes, on a , où est le facteur de Lorentz et c est la vitesse de la lumière :

Norme de Minkowski : p2[modifier | modifier le code]

En calculant la norme de Minkowski d'un quadri-moment, on obtient un invariant de Lorentz égal (à un facteur égal à la vitesse de la lumière c près) au carré de la masse au repos de la particule :

Puisque est un invariant de Lorentz, sa valeur reste inchangée par transformations de Lorentz, c'est-à-dire par changement de référentiel inertiel.

En utilisant la métrique de Minkowski :

.

Le tenseur métrique est en fait défini à un signe près. On trouvera dans certains ouvrages la convention au lieu de la convention adoptée dans cet article[N 1]. Les résultats physiques sont évidemment les mêmes quelle que soit la convention choisie, mais il faut prendre garde de ne pas les mélanger.

Conservation du quadri-moment[modifier | modifier le code]

La conservation du quadri-moment dans un référentiel donné[N 2] implique deux lois de conservations pour des quantités dites classiques :

  1. La quantité totale d'énergie est invariante.
  2. Le moment linéaire classique tridimensionnel reste invariant.

On notera au passage que la masse d'un système de particules peut être supérieure à la somme des masses des particules au repos, à cause de l'énergie cinétique. Par exemple, prenons 2 particules de quadri-moment {5 Gev, 4 Gev/c, 0, 0} et {5 Gev, -4 Gev/c, 0, 0} : elles ont chacune une masse au repos de 3 Gev/c2 mais leur masse totale (soit encore la masse du système) est de 10 Gev/c2. Si ces 2 particules entrent en collision et fusionnent, la masse de l'objet ainsi formé est de 10 Gev/c2.

Une application pratique en physique des particules de la conservation de la masse au repos permet, à partir des quadri-moments pA et pB de 2 particules créées par la désintégration d'une particule plus grosse ayant un quadri-moment q, de retrouver la masse de la particule initiale. La conservation du quadrimoment donne qμ = pAμ + pBμ, et la masse M de la particule initiale est donnée par |q|2 = M2c2. En mesurant l'énergie et les 3-moments des particules résultantes, on peut calculer la masse au repos du système des 2 particules qui est égal à M. Cette technique est notamment utilisée dans les recherches expérimentales sur le boson Z dans les accélérateur de particules.

Si la masse d'un objet ne change pas, le produit scalaire de Minkowski de son quadri-moment et de la quadri-accélération correspondante Aμ est nul. L'accélération est proportionnelle à la dérivée temporelle du moment divisée par la masse de la particule:

.

Moment canonique en présence d'un champ électromagnétique[modifier | modifier le code]

Il est également utile de définir un moment "canonique" (à 4 dimensions), pour des applications en mécanique quantique relativiste: , qui est la somme du quadri-moment et du produit de la charge électrique avec le potentiel (qui est un vecteur à 4 dimensions) :

,

où le 4-vecteur potentiel est une combinaison entre le potentiel scalaire et le potentiel vecteur du champ magnétique :

.

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. La convention de signe est présente dans Lev Landau et Evgueni Lifchits, Physique théorique, t. 2 : Théorie des champs [détail des éditions], par exemple.
  2. La conservation du quadri-moment signifie que dans un référentiel donné, le quadri-moment total d'un système isolé est conservé. Lorsqu'on change de référentiel, le quadri-moment subit une transformation de Lorentz : . Le nouveau quadri-moment est à son tour conservé dans ce nouveau référentiel, mais n'est pas égal à .

Références[modifier | modifier le code]

  1. a et b Relativité générale et gravitation de Edgard Elbaz, (ellipse 1986), chapitre IV, §4
  2. Lev Landau et Evgueni Lifchits, Physique théorique, t. 2 : Théorie des champs [détail des éditions], §9
  3. Ch. Grossetête, Relativité restreinte et structure atomique de la matière, Paris, Ellipses, , 320 p. (ISBN 2-7298-8554-4), p. 61
  4. Introduction à la relativité de James H. Smith, InterEditions (1968), (2e édition en 1979 (ISBN 2-7296-0088-4) rééditée par Masson : Dunod - 3e édition - 1997 (ISBN 2-225-82985-3)), chapitre 12
  5. Gourgoulhon 2010, chap. 9, sect. 9.1, § 9.1.2, p. 277.
  6. Semay et Silvestre-Brac 2021, chap. 9, § 9.3, p. 173.
  7. a b et c Vafa 2021, chap. 1er, § 1.7, p. 14.
  8. Pérez 2017, chap. 5, sect. IV, § IV.2, p. 95.
  9. Darrigol 2022, chap. 7, § 7.4, p. 219.
  10. Gourgoulhon 2010, chap. 9, sect. 9.1, § 9.1.1, n. historique, p. 275.
  11. Walter 2007, § 2, p. 222.
  12. Provost, Raffaelli et Vallée 2019, chap. 4, sect. 4.3, p. 110.
  13. a et b Le Bellac 2015, chap. 4, § 4.1, n. 2, p. 54.
  14. Semay et Silvestre-Brac 2021, chap. 9, § 9.3, p. 172.
  15. Taillet, Villain et Febvre 2018, s.v. quadrivecteur énergie-impulsion, p. 609, col. 2.
  16. Barrau et Grain 2016, chap. 2, sect. 2.2, § 2.2.4, p. 23.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Histoire des sciences[modifier | modifier le code]

Manuels d'enseignement supérieurs[modifier | modifier le code]

Ouvrages d'introduction[modifier | modifier le code]

Dictionnaires et encyclopédies[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]