Magistrat des eaux

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Magistrat des eaux
Armoiries du magistrat des eaux de Venise
Histoire
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Type
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Pays
Organisation
Site web
Entrée de la lagune de Venise
près du hameau de Punta Sabbioni.

Le magistrat des eaux (en italien Magistrato alle Acque[1]) est une institution vénitienne créée en 1501 par la république de Venise pour veiller sur la gestion et le respect de sa lagune. Cinq siècles plus tard, sous le même nom, cet organisme est devenu un service de l'État italien, responsable de tout le bassin versant d'Italie nord-orientale.

Le magistrat des eaux en 1501[modifier | modifier le code]

En 1501, la république de Venise décide la mise en place d'un collège de trois exécuteurs des eaux (Savi Esecutori) pour assurer la gouvernance des eaux lagunaires, pouvoir jusqu'alors exercé par le Conseil des Dix. Désignés par le doge, ces trois fonctionnaires sont assistés à partir de 1505, d'un Collège solennel des eaux composé de quinze sénateurs de la République. En 1543, le nombre de ces sénateurs sera élevé à quarante[2], auxquels s'ajouteront les avocats de la commune, un administrateur nommé par le Conseil des Dix[3], un magistrat enquêteur (Inquisitore), et le représentant du doge.

C'est cet ensemble que la Sérénissime désigne, tout au long de son histoire, par le terme de magistrat des eaux. Ce collectif de contrôle unitaire[4] a obligation de se réunir chaque semaine sur convocation du doge[5].

À cet organisme sont confiées la surveillance et l'administration de l'ensemble de la lagune vénitienne et des cours d'eau qui s'y jettent. Il a toute autorité sur les travaux, excavations, manutentions, manœuvres de bonification, modifications temporaires ou définitives, opérés dans la lagune et les fleuves qui l'alimentent. Il exerce son emprise sur le moindre détail concernant l'eau : dans Venise même, pas un pieu de soutènement des maisons ne peut être déplacé sans son autorisation. Le pouvoir considérable du magistrat des eaux[6], sa composition complexe reflètent l'attention que porte la république de Venise au maintien des eaux de la lagune. Celles-ci garantissent en effet la survie de la cité et de son système socio-économique. Elles constituent aussi l'ultime rempart contre une éventuelle menace extérieure, antique crainte des fondateurs de la ville, qui les avait menés à construire celle-ci sur et au milieu des eaux.

Le magistrat des eaux aujourd'hui[modifier | modifier le code]

Acqua alta sur le quai des Zattere le .

Devenu en 1907 institution décentralisée du ministère des Travaux publics italien, le magistrat des eaux est aujourd'hui dirigé par un président nommé par le président de la République italienne sur accord du Conseil des ministres. Il a son siège à Venise et s'occupe de l'ensemble du bassin du Triveneto. Ses compétences s'exercent d'abord sur la région Vénétie et la province de Mantoue. Mais lorsque des travaux extérieurs sont susceptibles d'affecter ce bassin d'intérêt national, elles peuvent s'étendre jusqu'à la province autonome du Trentin-Haut-Adige ainsi qu'à la région de statut spécial Frioul-Vénétie Julienne.

Les attributions de cet organisme concernent, comme il y a cinq siècles, la gestion et la surveillance lagunaire, auxquelles s'ajoutent aujourd'hui les impératives opérations de désensablement, de bonification et de régulation portuaire, tant en matière d'installations que de trafic.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Bien que la traduction littérale soit "magistrat aux eaux", la proposition communément admise par les auteurs français - notamment ceux cités ici en bibliographie - est "magistrat des eaux".
  2. Le mode de renouvellement de ces sénateurs est la cooptation.
  3. En 1530, l'unique administrateur sera remplacé par une structure collégiale de trois membres.
  4. Cette unité du contrôle par le Magistrat des eaux disparut cependant en 1677, à la suite de la création d'une deuxième structure de gestion, les inspecteurs de l'Adige. Le Magistrat des eaux n'avait en effet aucune compétence sur les territoires situés à l'ouest du Mincio, parmi lesquels les villes de Bergame et Brescia, les Vénitiens considérant que leurs cours d'eau ne menaçaient pas la lagune. Une gestion de l'Adige, cours d'eau important, finit cependant par apparaître nécessaire et entraîna la création de ce second organisme. Cf. Eau et développement dans l'Europe moderne, Salvatore Ciriacono, Maison des Sciences de l'Homme, Paris 2004.
  5. Dans la lutte sourde pour le pouvoir au sein de la République vénitienne, le Sénat se substituera au Conseil des Dix en 1551 pour les nominations qui lui appartiennent. En 1582, le Conseil Majeur soustrait également aux "Dix" la nomination des administrateurs.
  6. Le Magistrat des eaux pouvait prononcer des condamnations à mort.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Salvatore Ciriacono, Eau et développement dans l'Europe moderne, Maison des Sciences de l'Homme, Paris, 2004 (ISBN 978-2735110438)
  • Giuseppe Tassini, Curiosita Veneziane (nouvelle édition), Filippi Venezia, Venise, 1964 (ISBN 9788864950631)
  • Pierre Daru, Histoire de la république de Venise, des origines à la bataille de Lepante, coll. « Bouquins », Robert Laffont, Paris, 2004 (ISBN 2-221-91361-2)

Articles connexes[modifier | modifier le code]

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