Faïence de Langeais
La faïence de Langeais est une céramique utilitaire et surtout décorative, qui a été produite à Langeais (Indre-et-Loire) du début des années 1840 à 1919.
Historique
[modifier | modifier le code]Géologie
[modifier | modifier le code]Ce sont les couches argileuses du Sénonien, notamment celles qui se trouvent au hameau de La Rouchouze (ou La Rouchouse)[1], qui ont motivé l'implantation d'un artisanat puis d'une industrie de la céramique à Langeais[2],[3],[N 1].
Fondation et développement industriel : Charles de Boissimon
[modifier | modifier le code]Issu d'une lignée de militaires[4], Charles Héard de Boissimon naît le à Saint-Clément-des-Levées (Maine-et-Loire)[5], où son père possède une usine de carreaux de céramique et de tuiles[6].
En 1839, Charles de Boissimon s'associe avec son oncle maternel par alliance Julien Boislève pour fonder une entreprise de fabrication de briques et carreaux. Ils investissent dans la construction d'un four à Langeais, ville réputée pour ses carrières d'argile et son activité liée à la céramique ordinaire et réfractaire, et dont Casimir Boislève, frère de Julien, est le maire depuis 1830[N 2],[7]. L'implantation est choisie en fonction de critères logistiques : proximité de la Loire, voie de transport, puis de la voie ferrée à partir de 1848[8].
C'est en 1842 que commence la production de faïence d'ornement, qui sera majoritaire à partir de 1850, mais toujours menée en parallèle avec celle de produits réfractaires[7],[9]. Charles de Boissimon a vraisemblablement poursuivi les relations amorcées par son père avec Alexandre Brongniart, directeur de la manufacture de Sèvres, qui étudie l'argile de la Rouchouze en 1843-1844[10].
Le nombre d'ouvriers croit régulièrement : 60 en 1846, 133 en 1863[8]. Cependant, après quelques déboires financiers liés à des diversifications hasardeuses[N 3], les deux associés se séparent et Charles de Boissimon reste seul à la tête de l'entreprise, jusqu'à sa mort en 1879[11].
Poursuite de l'exploitation
[modifier | modifier le code]Son fils Raoul de Boissimon reprend le flambeau, mais dans un contexte de concurrence plus difficile, et il meurt prématurément. Dans le cadre d'une tutelle de leur fils mineur, son épouse continuera un certain temps l'activité, avant de céder en 1909 l'entreprise, qui poursuivra les fabrications sous le nom Dargouge & Granboulan jusqu'en 1919. Àprès cette date, seuls les produits réfractaires seront conservés[11].
Outils de production
[modifier | modifier le code]Après l'investissement des fours, une machine à vapeur en 1846, et à partir de 1852, une roue hydraulique sur la Roumer, permettent d'actionner certaines machines de production[12]. Avant le développement du chemin de fer, l'entreprise s'est dotée de deux chalands pour le transport sur la Loire du charbon et de la production[8].
Caractères stylistiques
[modifier | modifier le code]Techniques de formage
[modifier | modifier le code]Formes tressées : colombins assemblés par de la barbotine ou par une couche d'émail.
Formes moulées : par utilisation de moules en plâtre[13].
Techniques de décors
[modifier | modifier le code]Pâtes colorées : par des oxydes métalliques.
Pâte colorée sur pâte blanche.
Décors peints à la main, ou en impression.
Décors au platine : c'est cette technique qui démarque le plus la faïence de Langeais des productions concurrentes, et qui est encore la plus connue. Charles de Boissimon, constatant que le platine était alors nettement moins cher que l'or ou l'argent[N 4], dépose en 1862 un brevet d'invention qu'il exploitera pour produire des « décors blancs crémeux à rehaut de platine »[14],[15].
Couleurs
[modifier | modifier le code]Les couleurs vont du blanc crémeux au noir, en passant par toutes les nuances de couleurs primaires et secondaires, rehaussées ou non de platine, ainsi que le bleu de cobalt utilisé vers la fin de vie de Charles de Boissimon[16],[17].
Objets produits
[modifier | modifier le code]La liste des objets produits, qu'ils soient utilitaires ou décoratifs, est très longue :
Utilitaires :
- pots à tabac, pots à cigares, pots à pipes
- pots à eau et à lait, cafetières, théières, bols et tasses, chopes, assiettes, sucriers, boîtes à épices, soupières, saucières, terrines, coupes à fruits, beurriers, lampes
Décoratifs :
- vases, jardinières, bouquetières
- cache-pots, corbeilles, vide-poches
- suspensions[18]
Les marques
[modifier | modifier le code]Chronologiquement, la marque la plus fréquente est constituée des initiales CB (Charles de Boissimon), puis DG (Dardouge & Granboulan)[19].
Expositions
[modifier | modifier le code]Du vivant de Charles de Boissimon
[modifier | modifier le code]Les faïences de Langeais ont recueilli des récompenses aux expositions qui se sont tenues dans les villes suivantes[20] :
- Tours : 1841, 1844
- Angers : 1843, 1848, 1853, 1855
- Paris : 1844, 1849, 1867 (Exposition universelle de 1867), 1878 (Exposition universelle de 1878), et participation sans récompense à l'Exposition universelle de 1855
- Orléans : 1845
- Londres : 1851 (Exposition universelle de 1851 au Crystal Palace)[21]
Au XXIe siècle
[modifier | modifier le code]Expositions permanentes
[modifier | modifier le code]- Musée du Savignéen à Savigné-sur-Lathan[22]
- Musée Loire et métiers à Saint-Clément-des-Levées[23]
- Faïence de Langeais au musée Henri-Mathieu (Bruyères, Vosges)
- Faïence de Langeais au musée de la Franc-maçonnerie (Paris)
Expositions temporaires
[modifier | modifier le code]- Musée du Carroi à Chinon : 2014-2015[24]
- Espace culturel La Douve à Langeais : 2017[25],[26]
Notes et références
[modifier | modifier le code]Notes
[modifier | modifier le code]- Au début du XXIe siècle, une entreprise de taille artisanale y poursuit cette activité.
- Il est également membre du conseil général de l'Indre-et-Loire
- Un projet de pont à péage sur la Loire et des investissements viticoles.
- Il le fait venir du Pérou et du Chili.
Références
[modifier | modifier le code]- Amoureux du vieux Langeais 2011, p. 16-17, 43 (fosse d'extraction de 20 m de profondeur.
- Amoureux du vieux Langeais 2011, p. 5.
- Ministère de l'Écologie, « Les exploitations d'argiles siliceuses sénoniennes de la Rouchouse à Langeais » [PDF], sur webissimo.developpement-durable.gouv.fr (consulté le ).
- Patrick Brunet-Moret, Geneanet, « Ascendants de Charles Héard de Boissimon : jusqu'aux grands-parents », sur gw.geneanet.org (consulté le ).
- Archives départementales de Maine-et-Loire, « Saint-Clément-des-Levées : Naissances, mariages, décès – 1813-1822 » (Acte de naissance de Charles Héard), 6E272/8, sur recherche-archives.maine-et-loire.fr (consulté le ), p. 136.
- Amoureux du vieux Langeais 2011, p. 13.
- Souriau 1996, p. 10.
- Amoureux du vieux Langeais 2011, p. 21.
- Amoureux du vieux Langeais 2011, p. 20.
- Amoureux du vieux Langeais 2011, p. 13, 28-29.
- Souriau 1996, p. 10-12.
- Amoureux du vieux Langeais 2011, p. 18, 20.
- Amoureux du vieux Langeais 2011, p. 29.
- Amoureux du vieux Langeais 2011, p. 20-21, 31-32, 42.
- Souriau 1996, p. 65-95.
- Amoureux du vieux Langeais 2011, p. 42.
- Souriau 1996, p. 5.
- Souriau 1996, p. 32-198.
- Souriau 1996, p. 36-40.
- Souriau 1996, p. 14-19.
- Souriau 1996, p. 10, 14.
- « Le musée du Savignéen : Arts et traditions populaires - Faïence de Langeais », sur museedusavigneen.fr (consulté le ).
- Musée Loire & Métiers, « Faïence de Langeais », sur museeloireetmetiers.blogspot.com (consulté le ).
- Chinon Vienne & Loire – Le Carroi, « Dossier de presse : La faïence de Langeais » [PDF], sur www.chinon-vienne-loire.fr (consulté le ).
- « Les mille faïences de Langeais », La Nouvelle République, (lire en ligne, consulté le ).
- « Exposition : plus de 1000 faïences », sur jlacotte-site.org (consulté le ).
Galerie
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Faïence de Langeais. Vase au décor recouvert de platine -
Faïence de Langeais. Jardinière bleue à décor doré et émaux -
Faïence de Langeais. Vase au corps renflé
Voir aussi
[modifier | modifier le code]Bibliographie
[modifier | modifier le code]- Paul-Jean Souriau, La faïence de Langeais ou Le destin des Boissimon, gentilshommes angevins, Éditions France-Empire, , 248 p. (OCLC 1177119318, présentation en ligne).
- Paul-Jean Souriau, La faïence de Langeais. Tome 2, Paris, Éditions de l'amateur, , 210 p. (ISBN 9782859171919 et 2859171916, OCLC 493631375).
- Amoureux du vieux Langeais, Les faïences de Langeais, Tours, Éd. de la Nouvelle République, (1re éd. 1992), 61 p. (ISBN 9782868811110, OCLC 463506469, BNF 35523083).
Liens externes
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- Ministère de l'Écologie, « Les exploitations d'argiles siliceuses sénoniennes de la Rouchouse à Langeais » [PDF], sur webissimo.developpement-durable.gouv.fr (consulté le )