Porte étroite

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En France, une porte étroite[1] ou contribution extérieure est un texte déposé au Conseil constitutionnel par des acteurs de la société civile lors du contrôle « a priori » d'une loi, à l'initiative des acteurs politiques et notamment des parlementaires de l'opposition[2]. Elle vise à soumettre aux membres du Conseil un argumentaire soutenant la constitutionnalité ou l'inconstitutionnalité d’une loi contrôlée a priori, c'est-à-dire avant sa promulgation[3].

Elle est un moyen pour les associations, les entreprises, les syndicats, les citoyens et plus largement la société civile, soit de démontrer l'intérêt de la censure totale ou partielle d'une loi, soit de soutenir sa conformité à la Constitution dans le but de la voir promulguée sans modification[3]. Pour cela, les groupes ou individus estiment les effets que la loi pourrait avoir sur leur situation, leurs intérêts ou activités, lorsqu'elle sera appliquée[3].

Histoire[modifier | modifier le code]

Depuis l'ouverture de cette procédure, les acteurs du contrôle a priori des lois sont multipliés, passant des autorités de saisine à une pluralité de groupes sociaux, politiques, économiques et culturels[3]. Il est très fréquent que des entreprises, des organismes professionnels, des associations ou des syndicats prennent l'initiative d'exposer au Conseil leur point de vue sur tel ou tel aspect de la constitutionnalité de la loi, pour la critiquer ou, au contraire, la défendre[2]. Les contributions participent à l'ouverture du contentieux constitutionnel et à son appropriation par une pluralité d'acteurs[3].

Invisibles aux citoyens jusqu'alors, le Conseil, dans un objectif de transparence et d'ouverture, décide en 2019 de les rendre publiques[4]. Cette pratique demeure cependant floue[3].

Gestion par le Conseil constitutionnel[modifier | modifier le code]

Aucune règle n'encadre cette pratique, qui s'est pourtant développée depuis de nombreuses années[2]. Le Conseil constitutionnel est aujourd'hui seul maître de la réception qu'il entend donner à ces contributions[2]. Elles sont dépourvues de tout statut procédural, à la différence des « interventions » produites dans le cadre de la QPC[2]. Ces dernières entrent en effet dans le cadre d’un « vrai » procès et font l'objet, pour cette raison, d'une réglementation explicite. Produites dans le cadre singulier de ce procès sans véritables parties qu'est le contrôle a priori de la loi, les « portes étroites » offrent une liberté plus grande[2]. Le Conseil peut les lire ou pas, en tenir compte ou pas, et ne délivre aucune information à ce sujet[2].

Impact[modifier | modifier le code]

Les conséquences des portes étroites sur l'écriture de la loi sont assez faibles[3].

Critiques[modifier | modifier le code]

Garance Navarro-Ugé (revue Esprit) regrette un manque de transparence sur l’impact effectif de ces contributions[3].

En outre, la formule n'est pas sans poser un problème au regard de la séparation des pouvoirs : le Conseil ne crée pas le droit, ce qui est le propre du Parlement et du gouvernement[3].

Références[modifier | modifier le code]

  1. Selon l'expression de Georges Vedel dans G. Vedel, « L'accès des citoyens au juge constitutionnel. La porte étroite », La Vie judiciaire, no 2344,‎ 11-17 mars 1991.
  2. a b c d e f et g Denys Béchillon (de), Réflexions sur le statut des portes étroites devant le Conseil constitutionnel, Club des juristes, coll. « Les Notes du Club des juristes », (lire en ligne)
  3. a b c d e f g h et i Garance Navarro-Ugé, « Les portes étroites », Esprit,‎ , p. 24 à 27 (lire en ligne)
  4. « Le Conseil constitutionnel rendra désormais publiques les contributions extérieures qu’il reçoit dans le cadre de son contrôle a priori des lois | Conseil constitutionnel », sur www.conseil-constitutionnel.fr, (consulté le )