Initiative populaire « pour la protection des sites depuis la chute du Rhin jusqu'à Rheinau »

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Initiative populaire fédérale
Pour la protection des sites depuis la chute du Rhin jusqu'à Rheinau
(l'initiative de Rheinau)

Déposée le
Déposée par Rheinau-Komitee

Contre-projet non
Votée le
Participation 51,88 %
Résultat : rejetée[NB 1]
Par le peuple non (par 68,8 %)
Par les cantons non (par 18 6/2)[NB 2]

L'initiative populaire « pour la protection des sites depuis la chute du Rhin jusqu'à Rheinau », dite « l'initiative de Rheinau », est une initiative populaire suisse, rejetée par le peuple et les cantons le .

Contenu[modifier | modifier le code]

L'initiative propose de modifier l'article 24bis de la Constitution fédérale qui assure une utilisation rationnelle des forces hydrauliques pour préciser également que « la beauté des sites doit être ménagée ».

L'initiative introduit également une disposition transitoire annulant l'autorisation de construction de la centrale hydroélectrique de Rheinau.

Le texte complet de l'initiative peut être consulté sur le site de la Chancellerie fédérale[1].

Déroulement[modifier | modifier le code]

Contexte historique[modifier | modifier le code]

La construction d'une usine à Rheinau fait partie du plan général mis en place en 1922 entre la Suisse et l'Allemagne pour rendre le Rhin navigable entre le lac de Constance et Bâle[2]. Ce plan prévoyait toute une série de paliers, dont certains couplés avec des usines au bord de l'eau, afin de compenser les quelque 150 mètres de dénivelé[3].

La concession est accordée par le Conseil fédéral, en accord avec le gouvernement du Land allemand de Bade-Wurtemberg, le avec l'accord de tous les groupes impliqués ; Elle comprend la construction d'un barrage sur le Rhin, d'une centrale avec turbines et d'une galerie de dérivation.

Retardés par la Seconde Guerre mondiale les travaux de construction de l'usine commencent en 1952. C'est alors que se forme un nouveau mouvement d'opposition à Schaffhouse, appelé Rheinau-Komitee[4] qui fait parvenir au gouvernement une pétition munie de 160 000 signatures pour demander une révision de la concession. Cette demande est reprise par le Conseiller national Alois Grendelmeier qui présente une motion demandant le retrait de la concession et l'interruption des travaux jusqu'à ce que la motion soit traitée. À la suite du refus du parlement d'entrer en matière, le canton de Schaffhouse adopte une loi le qui spécifie que « l'utilisation de la chute du Rhin ne doit pas dépasser la mesure actuelle et que le Rhin entre la chute et la frontière cantonale à Nohl ne devra pas être mis en remous ». Cette loi est invalidée par le Tribunal fédéral l'année suivante.

Les opposants à la construction de l'usine lancent alors deux initiatives. Outre celle-ci, une autre est également déposée demandant l'extension des droits populaires lors de l'octroi par la Confédération de concessions pour l'utilisation des forces hydrauliques.

Récolte des signatures et dépôt de l'initiative[modifier | modifier le code]

La récolte des 50 000 signatures a débuté le . L'initiative a été déposée le de l'année suivante à la chancellerie fédérale qui l'a déclarée valide le [5].

Discussions et recommandations des autorités[modifier | modifier le code]

Le parlement[6] et le Conseil fédéral[7] recommandent le rejet de cette initiative. Dans son rapport aux chambres fédérales, le gouvernement statue positivement sur l'acceptabilité d'une initiative populaire pratiquement uniquement constituée d'une disposition transitoire, même si celle-ci n'est pas rédigée « en termes généraux et de façon abstraite » comme le demande la Constitution. Il se déclare également prêt à accepter la modification de l'article 24. Par contre, il refuse de soutenir la disposition transitoire, en particulier lorsqu'elle déclare que la concession aurait été accordée « en violation de l'article 22 de la loi » qui prévoit la prise en compte de la protection de la nature dans les décisions d'octroi de concessions.

Votation[modifier | modifier le code]

Soumise à la votation le , l'initiative est refusée par 18 6/2 cantons[NB 2] (soit tous à l'exception de Schaffhouse) et par 68,8 % des suffrages exprimés[8]. Le tableau ci-dessous détaille les résultats par cantons[9] :

Effets[modifier | modifier le code]

Également présentée en votation le , la seconde initiative déposée par le comité schaffhousois sera également rejetée par l'ensemble des cantons à l'exception de celui de Schaffhouse[10]. Cependant, quelques années plus tard, une Loi sur la protection de la nature et du paysage est créée le dans le but de « protéger, ménager, conserver et entretenir l'aspect caractéristique du paysage et des localités ainsi que les curiosités naturelles et les monuments du pays »[11]. L'ensemble de la région concernée par cette initiative sera portée sur l'Inventaire fédéral des paysages en 1983, alors même que l'usine hydroélectrique de Rheinau est en service depuis 1956 et produit 237 GWh par année[3].

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Selon l'article 139 de la Constitution, une initiative proposée sous la forme d'un projet rédigé doit être acceptée à la fois par la majorité du peuple et par la majorité des cantons. Dans le cas d'une initiative rédigée en termes généraux, seul le vote du peuple est nécessaire.
  2. a et b Le premier chiffre indique le nombre de cantons, le second le nombre de cantons comptant pour moitié. Par exemple, 20 6/2 se lit « 20 cantons et 6 cantons comptant pour moitié ».

Références[modifier | modifier le code]

  1. « Texte de l'initiative populaire fédérale », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  2. Antoine Beyer, « Frontière et ressources partagées : les aménagements hydroélectriques sur le Rhin (France, Suisse, Allemagne) », Géoconfluences,‎ (lire en ligne)
  3. a et b Voir le schéma des centrales sur « Centrales au fil de l'eau - Exemples », sur poweron.ch (consulté le )
  4. (de) « Zustand und Entwicklungspotenzial der Restwasserstrecke beim Kraftwerk Rheinau », sur rheinaubund.ch (consulté le )
  5. « Initiative populaire 'pour la protection des sites depuis la chute du Rhin jusqu'à Rheinau' » (consulté le )
  6. « Arrêté fédéral »  (14 octobre 1954) de la Feuille fédérale référence FF 1954 II 525
  7. « Message du Conseil fédéral »  (13 mai 1954) de la Feuille fédérale référence FF 1954 I 697
  8. « Votation no 173 Tableau récapitulatif », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  9. « Votation no 173 - Résultats dans les cantons », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  10. « Votation no 176 Tableau récapitulatif », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  11. Loi sur la protection de la nature et du paysage (LPN) du , RS 451.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • (de) Eugen Schäppi, Der Kampf ums Kraftwerk Rheinau 1951-1954, Zentralstelle der Studentenschaft,
  • (de) Christoph Graf, Das Kraftwerk Rheinau und die Rheinau-Initiative 1954, Zurich, Juris-Verlag,