Holocauste de Kédros

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Holocauste de Kédros
Ολοκαύτωμα του Κέδρους
Image illustrative de l’article Holocauste de Kédros
Mémorial de Kédros

Localisation Crète/Grèce
Coordonnées 35° 12′ 40″ nord, 24° 37′ 26″ est
Date 22 août 1944
Morts 164
Auteurs Generalleutnant Friedrich-Wilhelm Müller
22e division d'infanterie allemande
Géolocalisation sur la carte : Crète
(Voir situation sur carte : Crète)
Holocauste de Kédros
Géolocalisation sur la carte : Grèce
(Voir situation sur carte : Grèce)
Holocauste de Kédros

L'holocauste de Kédros (en grec moderne : Ολοκαύτωμα του Κέδρους / Olokaútoma tou Kédrous) également appelé catastrophe de Kédros, ou holocauste d'Amarí (en grec moderne : Ολοκαύτωμα του Αμαρίου / Olokaútoma tou Amaríou), est la tuerie de masse des habitants civils, de neuf villages, situés dans la vallée d'Amarí, sur l'île grecque de Crète, pendant son occupation par les puissances de l'Axe, durant la Seconde Guerre mondiale. Le massacre est une opération de représailles montée par les forces allemandes nazies[1].

L'opération est menée le par l'infanterie de la Wehrmacht et est suivie de la destruction de la plupart des villages, le pillage du bétail et la destruction des récoltes[2],[3].

Le nombre de victimes grecques est de 164 morts. L'opération est ordonnée par le Generalleutnant Friedrich-Wilhelm Müller, commandant de la garnison de Crète, afin d'intimider la population et dissuader les guérillas locales d'attaquer les forces d'occupation, pendant leur retraite imminente vers La Canée.

Contexte[modifier | modifier le code]

La vallée d'Amarí est située loin des grands centres urbains et connait une faible présence des forces allemandes, pendant l'occupation. Elle fournit un abri à plusieurs militaires du Commonwealth, qui se cachent encore sur l'île. Beaucoup d'autres ont traversé la vallée, en direction de la côte sud, pour être évacués vers l'Égypte. Plus tard, les habitants aident à transporter des fournitures et du matériel pour les résistants qui s'opposent à l'occupation allemande, et leur offrent de la nourriture. Amarí devient un centre important de la résistance crétoise.

Le soutien de la population locale, combiné à la beauté de la région, a conduit les agents du Special Operations Executive (SOE) britannique, alors en service en Crète, à inventer le surnom de Lotus Land pour désigner la vallée d'Amarí[4]. Parmi ceux qui s'y sont abrités, il y a Thomas Dunbabin (en), Xan Fielding et Patrick Leigh Fermor qui utilisent diverses cachettes, sur les pentes voisines. De plus, les ravisseurs du général Kreipe ont passé quelques nuits dans une bergerie d'Amarí, pendant leur marche vers le sud[2],[3].

Au moment de l'opération Kédros, il est clair que l'Allemagne est en train de perdre la guerre. À la fin de l'été 1944, les forces d'occupation ont commencé à planifier leur retrait vers La Canée, où elles resteront jusqu'à leur capitulation, le [2].

Le massacre[modifier | modifier le code]

À l'aube du , plusieurs bataillons d'infanterie allemande (appartenant vraisemblablement au 16e régiment de la 22e division d'infanterie) arrivent dans la vallée d'Amarí. Ils parviennent à encercler les villages qui bordent le côté ouest de la vallée d'Amarí sans être remarqués par leurs habitants. Ces villages sont collectivement appelés les villages de Kédros, à savoir Gerakári, Gourgoúthi, Kardáki, Vrýses, Smilés, Drygiés, Áno Méros et Chordáki (en grec moderne : Γερακάρι, Γουργούθοι, Καρδάκι, Βρύσες, Σμιλές, Δρυγιές, Άνω Μέρος, Χορδάκι). Le village voisin de Krya Vrysi (Κρύα Βρύση) qui sont également encerclés. Dans tous les villages, les raids allemands suivent à peu près le même schéma[1],[5].

Les locaux sont rassemblés, l'identité des hommes est vérifiée, et ceux qui doivent être exécutés sont choisis et conservés séparément. Les femmes reçoivent l'ordre de rentrer chez elles et de récupérer leurs objets de valeur, sous prétexte qu'elles vont faire un long voyage. C'est une ruse pour faciliter le pillage qui va suivre. Les femmes, les enfants et les personnes âgées sont emmenés, tandis que les hommes dont la vie est épargnée sont contraints de marcher vers Réthymnon où ils sont enfermés dans la forteresse, pendant quelques semaines. Après leur départ, des pelotons d'exécution commencent à procéder à des exécutions par groupes. Une fois les exécutions terminées, les cadavres sont arrosés d'essence et mis à feu. Dans certains cas, les exécutions ont lieu dans une maison de village qui est ensuite dynamitée, comme à Gerakári, Vrýses et Áno Méros[6].

Les jours suivants, les maisons des villages sont pillées puis brûlées ou dynamitées, comme à Kándanos, trois ans plus tôt[7]. Les biens pillés sont récupérés à la Scholi Asomaton et transportés par camions à Kándanos. Les récoltes et le bétail sont confisqués pour être utilisés par les troupes allemandes. Les bandes de résistance locales ne peuvent que surveiller, étant largement en infériorité numérique. George Psychoundakis mentionne dans son livre, The Cretan Runner, que, depuis sa cachette à Ida, il a pu voir la fumée s'élever des villages, pendant plus d'une semaine[8].

Conséquences[modifier | modifier le code]

De nombreux récits de la destruction des villages de Kédros adoptent le récit officiel allemand et cherchent à l'attribuer au fait que les habitants ont donné refuge aux ravisseurs de Kreipe. Ceci est contesté par certains historiens, car l'enlèvement avait eu lieu près de quatre mois plus tôt, le , et la pratique allemande habituelle est de mettre en œuvre des représailles immédiates. Une autre explication est que les Allemands ont détruit Kédros pour terroriser la population locale et réduire le risque d'être attaqués pendant leur retraite imminente, qui a finalement commencé début octobre. Selon les termes de Beevor, « l'opération Amarí était essentiellement une campagne de terreur préventive juste avant que les forces allemandes ne se retirent vers l'ouest d'Héraklion avec leur flanc exposé à ce centre de résistance crétois »[2].

A l'aube du , un détachement local de l'ELAS encercle la Scholi Asomaton et capture la garnison de l'avant-poste allemand qui y était établie. Plus tard, le même matin, deux camions transportant des troupes allemandes envoyées de Réthymnon sont pris en embuscade sur la crête de la ligne de partage des eaux près du village d'Ag. Apostoloi[2]. La bataille qui suit est connue sous le nom de bataille des rivières (en grec moderne : Η μάχη των Ποταμών) ; elle se poursuit le lendemain avec l'arrivée des renforts allemands[9]. La bataille des rivières se termine par la victoire de l'ELAS. 20 à 30 Allemands sont tués et d'autres capturés vivants[9].

Le général Müller est capturé par l'Armée rouge en Prusse-orientale, puis extradé vers la Grèce. Il est jugé à Athènes avec Bruno Bräuer, commandant de la forteresse de Crète, entre 1942 et 1944, pour les atrocités commises sur l'île[8]. Tous deux sont condamnés à mort, le et exécutés par peloton d'exécution, le [10].

Personne d'autre n'a été traduit en justice et aucune réparation n'a été versée aux survivants. Le village de Smilés n'a jamais été reconstruit. L'anniversaire de la destruction des villages de Kédros est commémoré par des événements organisés à tour de rôle dans un village différent, chaque année.

Références[modifier | modifier le code]

  1. a et b Παντινάκης 2008.
  2. a b c d et e Beevor 1991.
  3. a et b Adam Leong Kok Wey 2015.
  4. Fielding 1954.
  5. (el) « Θα τιμηθούν τα ολοκαυτώματα των χωριών του Κέντρους » [« Les holocaustes des villages de Kentros seront à l'honneur »], rethnea.gr,‎ .
  6. (el) « Η Ολοκαύτωση του Κέντρους » [« L'holocauste de Kédros »], Aphiéroma,‎ .
  7. Kazandzákis, Kalitsounákis et Kakridís 1983.
  8. a et b Psychoundakis 1955, p. 177-178.
  9. a et b (el) « La bataille des rivières », sur le site agonigrammi.wordpress.com, (consulté le ).
  10. (en) « History of the United Nations War Crimes Commission and the Development of the Laws of War. United Nations War Crimes Commission », sur le site ess.uwe.ac.uk [lien archivé], (consulté le ).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • (en) Antony Beevor, Crete : The Battle and the Resistance, John Murray Ltd, .
  • (en) Xan Fielding, Hide and Seek : The Story of a War-time Agent, Secker & Warburg, .
  • (el) N. Kazandzákis, N. Kalitsounákis et Kakridís, Έκθεσις της Κεντρικής Επιτροπής Διαπιστώσεως Ωμοτήτων εν Κρήτη [« Rapport du Comité central pour l'identification de la cruauté en Crète »], Héraklion,‎ (lire en ligne).
  • (el) Μανόλης Α. Παντινάκης, Νικητές στο απόσπασμα : το Αμάρι στις φλόγες [« Victoire des forces : Amari en flammes »], Καλαϊτζάκης,‎ (ISBN 978-960-87640-4-0).
  • (en) George Psychoundakis, The Cretan Runner : His Story of the German Occupation, John Murray Ltd, , p. 177-178.
  • (en) Adam Leong Kok Wey, Killing the Enemy : Assassination Operations in World War II, I.B. Tauris, .

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

  • (el) « Γερακάρι, 22 Αυγούστου 1944 » [« Gerakari, 22 août 1944 »], sur greekholocausts.gr (consulté le ).
  • (el) Μαύρη Βίβλος της Κατοχής – Schwarzbuches der Besatzung [« Livre noir de l'occupation »], Athènes (lire en ligne [PDF]).

Source de la traduction[modifier | modifier le code]