Marabunta

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Fourmis du genre Dorylus en déplacement dans une forêt du Kenya.

Marabunta est un mot espagnol qui désigne une migration massive et destructrice de fourmis légionnaires.

Le phénomène est causé par le cycle de développement spécifique des larves de fourmis légionnaires et peut causer des dégâts très importants sur son passage.

Il est représenté à de nombreuses reprises, dans des œuvres traitant de la forêt amazonienne notamment.

Au Brésil, le phénomène est appelé taoca ou tanoca.

Espèces concernées[modifier | modifier le code]

Marabunta n'est pas le nom spécifique d'une espèce de fourmi, mais désigne le déplacement dévastateur des fourmis légionnaires, en particulier celles du genre Eciton, vivant en Amérique centrale et en Amérique du Sud.

Dans la famille des Formicidae américaines, ce comportement est commun à plusieurs sous-familles, comme les Ponerinae, les Leptanilloïdinae, les Leptanillinae, et les Ecitoninae (dont fait partie Cheliomyrmex andicola (de), la fourmi-marabunta).

Causes et début de la migration[modifier | modifier le code]

La fourmi légionnaire a un cycle de vie qui diffère de celui des autres espèces de fourmis, exclusivement sédentaires. Pendant vingt jours, les jeunes fourmis protègent leur reine en formant un essaim (ou « bivouac ») sédentaire. Puis, après l'éclosion des larves qui provoque une augmentation considérable de la demande en nourriture, toute la colonie (qui peut compter jusqu'à 500 000 individus) se met en marche, car le mode de vie sédentaire ne parvient plus à fournir assez de nourriture[1].

Observations et description[modifier | modifier le code]

Lorsqu'une colonie avance, elle est réputée pour son agressivité, son passage étant dévastateur. La colonie ne se déplace pourtant qu'à une vitesse de 200 m sur 24 h, mais la progression est implacable, les fourmis franchissant même les petits cours d'eau en formant des ponts et des radeaux de leurs corps. Armand Reclus, voyageur et explorateur français du XIXe siècle, décrit ainsi le passage de la marabunta, auquel il a assisté pendant son exploration de l'isthme de Panama, avant le percement du canal :

« On dirait un tapis brunâtre et vivant qui se meut et s'agite tout en restant adhérent au sol dont il dessine les moindres accidents… Leurs noires légions couvrent jusqu'à cent pieds carrés de terrain ; elles ne connaissent ni obstacles ni ennemis ; où elles ont passé, il ne reste plus rien : de tout animal au-dessous de la taille d'un rat, il ne faut que cinq minutes pour faire un squelette admirablement nettoyé ; une couvée de poussins n'a pas le temps de s'enfuir, les chiens et les porcs se sauvent éperdus. Quand elles s'approchent d'une maison, il faut leur laisser la place : par les fentes des portes, des fenêtres, des murs, par les interstices des toits, elles envahissent le logis, elles pénètrent partout ; bienheureux si l'on peut, à la hâte, sauver les victuailles ; par contre, une ou deux heures après, on retrouve la case absolument purgée de toutes les vermines qui l'infestaient. Une visite de cazadores est le meilleur des balayages. »

— Armand Reclus, explorateur, in Explorations aux Isthmes de Panama et de Darien (1877), Tour du Monde, 1880

Le phénomène est observé par Dana et Ginger Lamb, un jeune couple d'aventuriers, qui traversent dans les années 1950 la jungle d'Amérique centrale. Ils décrivent comment les fourmis précédées d'éclaireurs ont envahi leur camp, situé à côté d'une petite rivière. Ils se réfugient sur l'autre rive, d'où ils observent la marabunta. Les fourmis progressent en groupe organisé, en transportant et en se passant de l'une à l'autre leur couvain et leurs larves, formant des ponts de leurs corps pour franchir les obstacles, mangeant tout produit comestible, et essayant même de traverser le feu pour atteindre le gibier en train de cuire[2],[3].

Le titre du film Quand la Marabunta gronde laisse penser que le phénomène pourrait avoir un caractère bruyant, ce qui n'est pas confirmé par les observateurs du phénomène. Selon Armand Reclus, « toutes les bestioles s'empressent de détaler ; on entend de tous côtés, à travers les feuilles mortes, le bruissement de ces fugitifs qui s'éloignent en grande hâte de cette phalange hérissée de mandibules ». Dana Lamb, lui, affirme que leur couple a été averti par le silence qui régnait dans la jungle à l'approche de la colonne, et que c'est en partant vérifier autour de leur campement qu'il a découvert les éclaireurs de la marabunta : il était pieds nus et a marché sur une grande fourmi-soldat, qui lui a causé des brûlures. En revanche, Dana Lamb souligne l'odeur forte qui accompagne la vague de fourmi.

La taille de la marabunta, dont dépendent ses capacités de déplacement et de nuisance varie avec les facteurs écologiques locaux. Il n'est pas exclu qu'une énorme marabunta puisse entraîner la fuite des habitants et l'abandon d'un village, comme dans le film Quand la Marabunta gronde. Cependant l'effet bénéfique de la marabunta est souligné par Armand Reclus : selon lui, « toutes les autres « plaies » tropicales non microscopiques disparaissent momentanément ».

Autres significations[modifier | modifier le code]

Le mot marabunta peut aussi désigner une espèce de fourmi en particulier : Cheliomyrmex andicola (de), de la sous-famille des Ecitoninae, qui vit principalement sous la terre dans les jungles tropicales d'Amérique. Elle est de couleur rougeâtre et de taille moyenne. Ses mandibules sont de grands crochets dentelés qui lui permettent de s'accrocher à ses proies. Sa piqûre est extrêmement douloureuse, irritante et paralysante, la douleur ressemble à celle provoquée par les « fourmis de feu ». Elle consomme la chair des vertébrés tels que lézards, serpents et oiseaux, mais aussi d'animaux bien plus gros[réf. nécessaire].

Dans la culture populaire[modifier | modifier le code]

À la télévision[modifier | modifier le code]

Au cinéma[modifier | modifier le code]

Dans la littérature[modifier | modifier le code]

Références[modifier | modifier le code]

  1. « L'angoissante marche des fourmis légionnaires », sur Franceinfo, (consulté le )
  2. Ginger et Ginger 1951.
  3. Ginger et Ginger 1952.
  4. « "Quand la Marabunta gronde" », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le )

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Dana Lamb et Ginger Lamb (trad. de l'anglais par R. Villoteau), Dans la jungle Maya, éditions Julliard,
  • Dana Lamb et Ginger Lamb, Quest for the Lost City [« À la recherche de la cité perdue »],

Articles connexes[modifier | modifier le code]