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Utilisateur:Roxonsp/Brouillon

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L'attitude conservatrice[modifier | modifier le code]

L’attitude conservatrice ou disposition conservatrice est une certaine attitude d’un individu face au changement. Elle ne doit pas être confondue avec la doctrine politique conservatrice. Ce comportement n’a pas de lien nécessaire avec la doctrine et peut se retrouver chez tout individu, quelle que soit son affiliation politique.

Michael Oakeshott[modifier | modifier le code]

Cette disposition est théorisée par Oakeshott dans son essai On being Conservative (1962), il se considère lui-même comme un conservateur par disposition. Afin de définir cette disposition qui est donc de penser et se comporter d’une certaine manière et préférer certaines choses, Oakeshott nous donnes quelques traits généraux de cette attitude[1].

Traits généraux de l’attitude conservatrice (selon Oakeshott) : Apprécier ce qui est, apprécier le présent ; instinct humain face à la perte ; attachement à ce qui est proche ; préférer les changements lents et contrôlés ; prudence face à l’innovation ; évaluer le poids des avantages et des inconvénients du changement.[1]

Oakeshott met en lumière un certain attachement au passé bien qu’il insiste sur le fait que le conservateur ne glorifie pas un passé révolu. Cet amour du présent peut être absent lorsque le présent est aride ou tourmenté, là, le conservateur aura recours au passé et à son exploration. Au contraire, cette inclination se manifeste surtout lorsqu’il y a beaucoup de choses à apprécier et encore plus fortement lorsque le risque de les perdre se présente.[1]

« Être conservateur, c’est donc préférer le familier à l’inconnu, ce qui a été essayé à ce qui ne l’a pas été, le fait au mystère, le réel au possible, le limité au démesuré́, le proche au lointain, le suffisant au surabondant, le convenable au parfait, le rire de l’instant présent à la béatitude utopique.»

Face à l’innovation, Oakeshott énumère cinq conditions pour que le conservateur envisage un changement : l’innovation implique une certaine perte et un gain possible, la charge de la preuve revient à l’innovateur ; une innovation croissante est moins risquée qu’un chamboulement ; une innovation qui répond à un défaut ou un déséquilibre spécifique est plus souhaitable qu’une innovation qui découle de l’idée d’une amélioration générale, les innovations minimes et limitées que celles indéterminées et de grandes ampleurs ; il préfère un rythme lent à un rythme rapide afin d’observer et s’ajuster ; importance du moment, moment propice au changement où le risque de conséquences non désirées est limité.[1]

Gerald Allan Cohen[modifier | modifier le code]

Cette disposition conservatrice est également théorisée par G. A. Cohen, qui distingue le small-c conservatism qui correspond à la disposition d’esprit qu’il va théoriser et le large-C Conservatism qui correspond donc à la doctrine politique[2]. Pour Cohen, l’attitude conservatrice se centre principalement sur une théorie des valeurs. Il faut conserver ce qui a une valeur intrinsèque et qui existe, y compris le support particulier de la valeur, il est donc contre l’utilitarisme[2].

« We keep the existing particular valuable things at the expense of not making things in general as valuable as they could be made to be. »

Le conservateur est celui qui reconnait une valeur intrinsèque à l'existence, ce qui rend les choses existantes plus désirables que celles inexistantes. Ainsi, cette vue implique qu'un conservateur doit refuser qu’on remplace une chose (x) par une chose (y) inexistante de valeur équivalente ou supérieur. En effet, bien que le remplacement de (x) par (y) ne provoque pas de perte de valeurs instanciées, le conservateur accorde une valeur existentielle à (x) car cette dernière possède la propriété « d’exister » que (y) ne possède pas.

Son approche de la disposition conservatrice est influencée par le marxisme et l’egalitarianism, lorsqu’il introduit la notion de valeur négative (disvalue), être conservateur c’est vouloir préserver les choses particulières existantes qui ont une valeur intrinsèque et ce n’est pas incohérent avec le fait de vouloir détruire ce qui a une valeur négative comme l’injustice ou l’inégalité.[2] Cohen nous montre donc que l’attitude et la doctrine conservatrice ne sont pas nécessairement dépendante l’une de l’autre.

Autres définitions[modifier | modifier le code]

Ces deux principales positions sur cette disposition conservatrice ont donné lieu à plusieurs tentatives d’affinements de cette théorie, comme ont tenté de le faire McPherson et Nebel.

McPherson insiste sur l’aspect positif du conservateur qui apprécie le bon dans le monde. Celui qui adopte une telle attitude est enclin à découvrir, apprécier, affirmer et conserver ce qui est bon dans le monde tel qu’il est ou tel qu’il nous est présenté.[3] Il oppose le conservateur au radical progressif et au réactionnaire qui n’apprécie pas le monde et veulent à tout prix le changer (soit en le révolutionnant, soit en retournant en arrière).[3]

Nebel, quant à lui, distingue trois sortes de conservatisme dispositionnel : le conservatisme existentiel, qui est essentiellement le conservatisme de Cohen ; le conservatisme attitudinal, qu’il attribue à Scheffler et qui se distingue par l’attitude de la personne envers un objet ; et le conservatisme object-affecting, qui se centre sur l’objet lui-même et non pas seulement sur notre relation à l’objet.[4]

  1. a b c et d (en) Michael Oakeshott, « On Being Conservative », Rationalism in Politics,‎ , p. 35-46
  2. a b et c (en) G. A. Cohen, « Rescuing Conservatism : A defense of existing value », Finding Oneself in the Other,‎ , p. 203-230
  3. a et b (en) David McPherson, « Existential Conservatism », Philosophy,‎ , p. 383-407
  4. (en) Jacob M. Nebel, « Conservatisms about the Valuable », Australasian Journal of Philosophy,‎ , p. 180-194