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Utilisateur:Machapeau/Brouillon

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Pauline Chaponnière-Chaix[modifier | modifier le code]

Pauline Chaponnière-Chaix (Genève 1850-Genève 1934) est l'une des rares femmes à figurer de son vivant dans le Dictionnaire historique et biographique de la Suisse. Elle oeuvre dans le domaine social durant la première partie de sa vie et consacre la deuxième moitié au féminisme genevois, suisse et international. Sa vie est un exemple de ce que des circonstances adverses peuvent changer votre destin.

Enfance et jeunesse[modifier | modifier le code]

Pauline Chaix naît à Genève le 1er novembre 1850 dans un milieu bourgeois et cultivé. Aînée de quatre enfants (en fait elle avait eu une sœur aînée, décédée à deux mois[1]), elle fréquente peu l'école mais encore toute petite apprend seule à lire et sait aussi l'anglais grâce à une amie de ses parents qui l'avait prise en affection. A quinze ans, elle passe une année en Allemagne[2]. C'est donc une Pauline Chaix polyglotte qui, à 18 ans, épouse un cousin éloigné, le banquier Edouard Chaponnière, de dix ans son aîné (la mère de Pauline, Adèle, était née Chaponnière). Mais le jeune homme est gravement malade psychiquement au point que la vie commune devient rapidement impossible. Edouard doit être placé dans une institution spécialisée et meurt en 1878. Ainsi Pauline Chaponnière-Chaix se retrouve-t-elle veuve à 28 ans.

Sœur Pauline[modifier | modifier le code]

A la fin des années 1870, que peut faire une veuve sans enfants de 28 ans issue d'un milieu où les femmes ne sont pas censées travailler? Et surtout, que peut faire une femme qui, comme elle, aimerait se rendre utile? Comme le souligne à juste titre l'historienne Michelle Perrot, "pour des raisons existentielles deuils, sentiment du vide de la vie quotidienne - et éthiques (conscience de l'injustice sociale, désir de se rendre utiles), les/des femmes de la bourgeoisie protestante ont prouvé aux XIXe et XXe siècles un désir d'engagement qui les a poussées à sortir de chez elles et à intervenir dans la Cité"[3]. Pauline Chaponnière-Chaix choisit une des rares voies ouvertes à sa situation: l'insertion dans une communauté religieuse. Deux ans après la mort de son mari, elle quitte la Suisse pour entrer dans la Maison des diaconesses de Reuilly à Paris. Elle s'y occupe d'abord d'enfants défavorisés, période au cours de laquelle elle suit une formation pour s'occuper de délinquantes, ce qui lui permet par la suite de faire des visites aux femmes emprisonnées à St-Lazare. Vu son expérience et le brevet qu'elle a acquis dans le domaine "disciplinaire" (on dirait aujourd'hui pénitentiaire), elle se voit proposer la direction de la prison de Doullens, dans la Somme. "Le service est pénible au physique, usant au moral. Il faut accompagner les corvées des prisonnières dans la cour par tous les temps, exercer une surveillance constante auprès des détenues occupées à la confection de corsets et, plusieurs fois par semaine, coucher en cellule avec surveillance des dortoirs"[4]. Epuisée, elle quitte cette fonction pour prendre la direction des "Ombrages" à Versailles, un pensionnat pour jeunes filles protestantes. Elle en profite pour faire une formation d'infirmière avec diplôme certifié à la clé. En 1893, elle a alors 43 ans, "atteinte d'un rhumatisme grave, elle se voit forcée à demander un congé illimité qui se transforme en démission"[5]. Elle rentre en Suisse et s'installe dans le chalet dominant le lac Léman qu'avait fait construire son mari dans le hameau de Muraz entre Céligny et Crans sur la Côte vaudoise.

Les années féministes[modifier | modifier le code]

Durant ses parisiennes, Pauline Chaponnière-Chaix avait fréquenté et s'était liée d'amitié avec les grandes dames du féminisme français: Sarah Monod, qui a créé les Conférences de Versailles qui donneront lieu à la création du Conseil des Femmes Françaises (CNFF) en 1901, Julie Siegfried et surtout Adrienne Avril de Sainte-Croix[6]. Chacune sera par la suite présidente du CNFF, respectivement du 1910 à 1912, 19122 à 1922 et 1922 à 1932.

C'est donc tout naturellement que, une fois revenue en Suisse, Pauline Chaponnière-Chaix se lie d'amitié avec les féministes genevoises. Encouragée par Emilie Lasserre, alors présidente de l'Union des femmes de Genève, elle adhère à l'association et en prend la présidence de 1902 à 1905. Pendant les années de guerre, elle est vice-présidente de l'Union des femmes et met sur pied, avec Emilie Gourd, un "ouvroir" pour donner du travail aux femmes en difficulté et collabore à toutes les œuvres de secours[7]. Mais dès 1896, son horizon s'était déjà élargi au niveau national puisqu'elle prend la fonction de secrétaire du Comité d'organisation du Premier Congrès des Intérêts féminins tenu à Genève cette année-là. Des amitiés nouées à l'occasion de ce congrès naîtra, en 1900, l'Alliance de sociétés féminines suisses (ASF), organisation faîtière rassemblant une septantaine d'associations féminines suisses, que Pauline Chaponnière-Chaix préside de 1904 à 1911 et de nouveau de 1916 à 1920. En tout, elle aura travaillé 22 ans "avec passion"[8] pour l'Alliance, soit en tant que présidente, soit en tant que membre du comité ou d'une commission.

En 1921 a lieu le Deuxième Congrès des Intérêts féminins, qu'elle organise à Berne avec Helene von Mülinen et Camille Vidart et cette fois, Pauline Chaponnière-Chaix en est la présidente.

La suffragiste[modifier | modifier le code]

Pauline Chaponnière-Chaix est aussi une ardente suffragiste. Avec Auguste de Morsier et Camille Vidart, elle est membre fondatrice de l'Association genevoise pour le suffrage féminin en 1907, première du genre en Suisse. Lors d'une enquête publiée dans Le Mouvement Féministe en 1914, elle exlique comment elle est devenue suffragiste:: "C'est la journée du 22 mars 1896, et le rejet par les électeurs genevois de l'initiative demandant la fermeture des maisons de tolérance de notre vville, qui m'ont convaincue de la nécessité absolue, du devoir même pour toute femme sérieuse, consciente de sa mission dans le domaine moral, de réclamer et d'obtenir le droit de vote. J'ai réalisé ce jour-là, et cela dans une question qui nous touche au premier chef, - puisque les victimes de l'odieuse institution qu'il s'agissait d'abolir sont toutes des femmes, - notre impuissance absolue à faire entendre notre voix, puisque ces voix réclament plus de justice, plus de pureté, - si nombreuses soient-elles, à l'heure des décisions populaires, ne comptent pas"[9].

En janvier 1919, l'Alliance de Sociétés féminines suisses, dont Pauline Chaponnière-Chaix est alors présidente, décide, lors d'une assemblée générale extraordinaire, de prendre position sur la question du suffrage féminin. "Ce furent deux fondatrices, Mlle Helene de Mülinen et Mme Chaponnière, qui tinrent à exposer le sujet, chacune dans sa langue. Elles le firent avec une autorité, avec une conviction, avec une foi, qui emportèrent l'unanimité des suffrages, fait d'autant plus significatif que l'Alliance est composée des sociétés les plus diverses, dont bon nombre n'ont aucun rapport apparent avec le suffrage"[10].

Du national à l'international[modifier | modifier le code]

Pauline Chaponnière-Chaix n'est pas femme à se contenter d'agir localement. Sur son impulsion, l'ASF devient membre du Conseil international des femmes (CIF) en 1903, le CIF étant l'organisation faîtière des associations féminines du monde. Sa connaissance des langues lui permet de rendre de nombreux services, notamment de traduction. En 1908, elle organise l'assemblée extraordinaire du CIF à Genève et obtient des autorités la mise à disposition de la salle du Grand Conseil (le parlement genevois). Quand la présidente du CIF, Lady Aberdeen, démissionne, c'est Pauline Chaponnière-Chaix qui la remplace, de 1920 à 1922[11].

Pauline Chaponnière-Chaix poursuit la même année, 1922, son activité internationale dans un cadre bien différent. Elle est la première femme - et longtemps la seule - à siéger au Comité international de la Croix-Rouge (CICR), fonction qui l'amène encore à Varsovie, Paris, Londres, où elle se rend à 80 ans… Elle est vice-présidente du CICR de 1930 à 1932.

Pauline Chaponnière-Chaix "est une des rares femmes à avoir figué de son vivant dans le Dictionnaire historique et biographique de la Suisse (1924). Malgré son engagement, sa foi chrétienne inébranlable et l'énorme travail qu'elle a abattu tout au long de sa vie, elle est toujours restée une bonne vivante, appréciant la bonne chère et les bons vins[12]. Elle s'éteignit à Genève le 6 décembre 1934 et le cérémonie d'enterrement de cette femme pourtant si connue dans certains milieux eut lieu dans l'inimité de sa maison du chemin Dumas"[13] à Genève.

  1. « Georges Pierre Paul Joseph Raymond CHAIX », sur Société genevoise de Généalogie
  2. A, de Montet, « Engagement sans retour. Pauline Chaponnière-Chaix (1850-1934) », Almanach des Femmes suisses « Femmes d'action 1850-1950 »,‎ , p. 17-27
  3. Michelle Perrot, « Avant-propos. Femmes protestantes au XIXe et XXe siècle », Bulletin de la Société d'histoire du protestantisme français, nos 146/1,‎ (lire en ligne)
  4. A. de Montet, « Engagement sans retour », Almanach des Femmes suisses,‎ , p. 20
  5. A. de Montet, « Engagement sans retour », Almanach des Femmes suisses,‎ , p. 21
  6. Emilie Gourd, « In Memoriam. Pauline Chaponnière-Chaix », Le Mouvement Féministe, no 441,‎
  7. Emilie Gourd, « In Memoriam. Pauline Chaponnière-Chaix », Le Mouvement Féministe, no 441,‎
  8. Emilie Gourd, « In Memoriam. Pauline Chaponnière-Chaix », Le Mouvement Féministe, no 441,‎
  9. La rédaction, « Notre enquête », Le Mouvement Féministe,‎ , p. 11
  10. Emma Porret, « Chronique suisse romande 1918-1919 », Annuaire 1919, Berne, Stämpfli Verlag, vol. 1 « Histoire oubliée. Chronique illustrée du mouvement féministe 1914-1963 »,‎ , p. 263-264
  11. (de + fr) Chantal Magnin, Association suisse pour les droits de la femme, Le combat pour les droits égaux., Bâle, Schwabe, , 422 p., « Pauline Chaponnière-Chaix (1850-1934). International vernetzte Vorkämpferin für die Gleichberechtigung »
  12. A. de Montet, Pauline Chaponnière-Chaix. Engagement sans retour
  13. Martine Chaponnière, « Pauline Chaponnière-Chaix », Les femmes dans la mémoire de Genève, Genève, Ed. Suzanne Hurter,‎ , p. 115