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Utilisateur:Loic Golliet/Zenkoku Suiheisha

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Zenkoku Suihei-sha
全国水平社
Logo de l’association
Drapeau à la couronne d'épine de la Zenkoku Suihei-sha
Cadre
But lutter contre les discriminations envers les burakumin
Zone d’influence Japon
Fondation
Fondation 3 mars 1922
Identité
Dissolution
Dissolution 1942

La Zenkoku Suiheisha ("Société nationale pour l'égalisation", ja: 全国水平社) est une organisation du Mouvement de libération des Buraku (Buraku kaihō-undō, 部落解放運動) fondée en mars 1922 et active jusqu'à la Seconde Guerre mondiale au Japon, qui cherchait à lutter contre la discrimination persistante à l'encontre des populations burakumin. Elle est également connue par son acronyme Zensui ou simplement comme la Suiheisha.

La Zenkoku Suiheisha est l'ancêtre du Comité national de libération Buraku et de la Ligue de libération Buraku, qui ont été créés après la Seconde Guerre mondiale[1].

Le "Keikanki", drapeau de la Zenkoku Suiheisha.

Histoire[modifier | modifier le code]

Origine[modifier | modifier le code]

En 1871, à la suite de la restauration Meiji, est proclamée l'ordonnance d'émancipation (Kaihōrei, 解放令) qui aboli officiellement le système de caste qui prévalait dans le Japon féodal. Les distinctions sont formellement levées, les Eta (穢多) et Hinin (非人) sont libérés de leur statut infamant et la loi les reconnaît à l'égal des autres citoyens. Mais en réalité aucune mesure concrète n'est prise, de nombreux buraku ("hameaux spéciaux") restent en place et les discriminations demeurent fortes contre leur population, à cette époque apparaît l'expression "burakumin" pour la désigner. Les préjugés qui la touchent maintiennent cette population dans un isolement social et dans la pauvreté, alors que le Japon connaît un important développement industriel et impérial. Pour résoudre ce problème, le Mouvement de réconciliation (Yūwa undō, 融和運動) est initié. Mais ce mouvement philanthropique met en avant le mauvais environnement et le niveau d'éducation des Buraku comme causes de leur discrimination, il vise donc à améliorer la situation économique des Buraku par l'aide philanthropique des plus riches, et essaye d'éliminer la discrimination en sensibilisant et en recherchant la compassion et la compréhension des personnes extérieures aux communautés buraku.

Après la première Guerre mondiale, dans un climat général d'agitation sociale et impressionnés par la Révolution russe et les émeutes du riz de 1918, des jeunes Buraku qui ne sont pas satisfait par le mouvement de réconciliation existant commencent à envisager un mouvement d'émancipation des burakus par leur propre pouvoir. C'est ainsi que "les jeunes de Kashiwara", Mankichi Saikō, Seiichiro Sakamoto, Kisaku Komai etc., forment la Tsubamekai ("Association des hirondelles", 燕会), qui publie en 1921 le pamphlet « Pour un jour meilleur » (よき日の為めに) pour appeler à la fondation d'une organisation nationale pour œuvrer à leur auto-émancipation[2]. Ce mouvement est nommé Suiheisha en hommage aux Niveleurs (the Levellers) une tendance proto-démocratique du puritanisme active durant la révolution anglaise.

Formation[modifier | modifier le code]

Minami Umekichi à la 3ème Convention nationale de la Suiheisha (mars 1924)

La conférence de fondation de la Zenkoku Suiheisha a lieu le 3 mars 1922 à la salle publique d'Okazaki dans la ville de Kyoto[3], la déclaration adoptée lors de cette fondation est considéré comme la première déclaration au Japon défendant la notion des droits de l'homme. Lors de la convention de fondation, il a également été décidé qu'« aucun mot ou action discriminatoire à l'égard des êtres humains n'est autorisé », et des représentants du monde entier ont exprimé leur joie et leur détermination. Le représentant de la jeunesse, Yamada Kōnojirō, jeune homme de 16 ans, a parlé de la réalité de la discrimination et a déclaré : « Brisons la discrimination. Et faisons un nouveau monde radieux. » Il a également critiqué le mouvement de réconciliation en réaffirmant que la cause de la discrimination se trouvait uniquement du côté des "discriminateurs" et mis l'accent sur la mise lumière et la sensibilisation ainsi que sur la dénonciation des discriminations. Les trois jeunes de Kashiwara à l'initiative de la Tsubamekai sont au premier plan de la fondation, mais c'est Minami Umekichi, un éminent militant Buraku du mouvement de réconciliation de la préfecture de Shiga, qui est nommé comme premier président.

La Zensui a également fait campagne en collaboration avec l'organisation coréenne du Hyeongpyeongsa undong ("Mouvement pour l'équité", co: 형평사 운동) fondée en mai 1923 pour lutter contre la discrimination des Baekjeong (백정), au statut équivalent à celui des burakumin dans le système de caste coréen[4].

Alliance avec le mouvement syndical ouvrier et paysan[modifier | modifier le code]

Jiichirō Matsumoto, second président de la Zensui.

Au moment de sa formation, la Suiheisha considérait la discrimination comme une tradition ancienne et a adopté une politique de « dénonciation approfondie » contre les discriminants, mais le progrès de la campagne de dénonciation a conduit à envisager le risque qu'elle creuse davantage le fossé entre les Buraku et le reste de la population. D'autre part, suite à la "controverse Ana-Bol" (Ana-Boru ronsō, アナ・ボル論争) qui oppose théoriquement les anarchistes et les léninistes au sein du mouvement social, de jeunes militants, comme Kiichi Matsuda, fondent le 11 mai 1923 la Ligue de la jeunesse de la Zenkoku Suiheisha (Zenkoku Suiheisha seinen dōmei, 全国水平社青年同盟) réorganisée en septembre 1925 sous le nom de Ligue prolétarienne de la Zenkoku Suiheisha (Zenkoku Suiheisha musansha dōmei, 全国水平社無産者同盟). Cette formation augmente progressivement son influence au sein de la Zensui en tant que "faction Bol" (boru-ha) en prônant l'inscription de la lutte buraku dans la lutte des classes et l'alliance entre les mouvements ouvriers, paysans et celui de la Suiheisha.

En novembre 1924, la tendance bolchevique de la Zensui parvient à contraindre des dirigeants traditionnels comme Minami et Hirano Shōken à démissionner à cause du "problème d'espionnage" (Minami, Hirano et d'autres avaient été en relation avec des policiers), cette faction prends ainsi le contrôle de la Zensui. Après cela, en 1925, Jiichirō Matsumoto est nommé président du comité central de la Zenkoku Suiheisha. Et en 1926, lors du 5e congrès, une nouvelle politique est adoptée, basée sur la reconnaissance que « la discrimination des Buraku est fondée sur des aspects politiques, économiques et sociaux », pour dénoncer la discrimination au sein de l'armée et de la part du gouvernement et qui cherche à se combiner avec les mouvements sociaux ouvriers et paysans.

Crise du mouvement[modifier | modifier le code]

La prise de direction par la « faction Bol » intensifie la confrontation à l'intérieur de la Zenkoku avec la tendance de droite et avec la « faction Ana », entraînant leur séparation. En octobre 1925, la Fédération de la jeunesse de la Zenkoku Suiheisha (Zenkoku suiheisha seinen renmei, 全国水平社青年連盟) est ainsi formée comme une coalition de ceux qui veulent maintenir les principes à la fondation de la Zenkoku Suiheisha et des anarchistes militant au sein de la Zensui[5]. Le 1er septembre 1926, la Fédération de libération de la Zenkoku Suiheisha (Zenkoku suiheisha kaihō renmei, 全国水平社解放連盟) est formée par des anarchistes de la Fédération de la jeunesse de la Zenkoku Suiheisha[6]. Tandis que l'aile droite, dirigée par Umekichi Minami, scissionne de la Zenkoku Suiheisha en 1927 pour former la Nihon Suiheisha (日本水平社), un mouvement distinct principalement organisé dans la région du Kantō, cette organisation prétendait rechercher un retour aux principes fondateurs de la Zensui par rapport à l'inclinaison gauchiste et prolétarien que le mouvement connaitrait[7].

En conséquence, l'organisation du mouvement Zensui localement et nationalement stagne temporairement, et lors du 11e congrès de la Suiheisha en 1931, la tendance communiste du mouvement qui tenait le bureau central de la Zensui présente l'« Opinion sur la dissolution du Zensui » qui suggère la dissolution du mouvement de libération Buraku dans le mouvement général de la lutte des classes. Ce qui provoque un nouveau débat extrêmement vif.

De la résurrection à l'extinction[modifier | modifier le code]

Pétitionnaires de la Suiheisha à Nara pour l'affaire du procès Takamatsu (1933).

En 1933 le mouvement connaît un regain de vitalité qui met entre parenthèse sa crise interne. Cette année, lors de la 11e Convention de la Zenkoku, le "Comité Buraku" décide d'une ligne politique qui vise à la formation d'une alliance avec les mouvement ouvrier-paysan à travers la lutte pour améliorer les conditions de vie et éliminer la discrimination. Par ailleurs, la même année se déroule la lutte accrue pour la dénonciation du tribunal de Takamatsu, après qu'un homme ayant caché son ascendance buraku avant son mariage ait été condamné pour enlèvement de sa femme. La lutte se développe comme un mouvement populaire de masse pour dénoncer les discriminations. En raison de ces circonstances, le mouvement de la Zensui se dirigeait vers une résurgence[8].

Cependant, après le début de la guerre sino-japonaise en 1937, une aile de la Zenkoku a activement coopéré à la guerre. Certains membres de l'ancienne Alliance de la jeunesse Zenkoku se sont ainsi "convertis" adoptant l'ambition d'éliminer la discrimination par la construction d'une guerre totale de la communauté nationale réunifiée, comme, entre autres, Zennosuke Asada. La Zensui bien qu'affaiblie poursuit cependant ses activités. Finalement, la Zensui a refusé d'être incorporé à l'Association de soutien à l'autorité impériale (大政翼賛会, Taisei yokusankai) sous le régime de guerre lorsque lui est soumise un ordre de dissolution, et a choisi de disparaître en tant que groupe le 20 janvier 1942[9].

Après la guerre, la reconstruction du mouvement des Suiheisha est discutée lors des pourparlers de Shima en octobre 1945, et en février 1946, des anciens membres de la Zenkoku Suiheisha et des organisations du mouvement de réconciliation se réunissent à Kyoto pour former le Comité national de libération des Buraku (Buraku kaihō zenkoku iinkai, 部落解放全国委員会), devenu la Ligue de libération des Buraku (Buraku kaihō dōmei, 部落解放同盟) en 1955.

Notes[modifier | modifier le code]

  1. 寺木伸明 et 黒川みどり 2016.
  2. (en) Ian Neary, Political Protest and Social Control in Pre-war Japan: The Origins of Buraku Liberation, Manchester University Press, (ISBN 0-7190-2985-6, lire en ligne), p. 63-64
  3. (ja) Tetsuo Mahara, 『新版 水平運動の歴史』 [« Histoire du mouvement Suihei »], Buraku Mondai Kenkyūsho,‎ (ISBN 482982039X), p. 39
  4. « Suiheisha and Hyeongpyengsa (The Records of Cross-Border Solidarity Between Minorities) (2016) – Memory of the World Committee for Asia and the Pacific », sur www.mowcapunesco.org (consulté le )
  5. (ja) Asaji Takeshi, 『差別と反逆 平野小剣の生涯』 [« Discrimination et rébellion : la vie de Hirano Shōken »], Chikuma Shobō,‎ , 339 p. (ISBN 978-4-480-88529-6), p. 219
  6. (ja) Asaji Takeshi, 『差別と反逆 平野小剣の生涯』 [« Discrimination et rébellion : la vie de Hirano Shōken »], Chikuma Shobō,‎ , 339 p. (ISBN 978-4-480-88529-6), p. 226
  7. (en) Neary Ian, Political Protest and Social Control in Pre-War Japan. The Origins of Buraku Liberation, Manchester University Press, (ISBN 0-7190-2985-6), p. 126-127
  8. (en) Ian Neary, Political Protest and Social Control in Pre-war Japan: The Origins of Buraku Liberation, Manchester University Press, (ISBN 0-7190-2985-6), p. 167-170
  9. (en) Ian NEary, Political Protest and Social Control in Pre-war Japan: The Origins of Buraku Liberation, Manchester University Press, (ISBN 0-7190-2985-6), p. 208-211

Références[modifier | modifier le code]

Livres[modifier | modifier le code]

  • Jean-François Sabouret, L'autre Japon: les burakumin, La Découverte/Maspero, , 155 p. (ISBN 2707114138)
  • (en) Ian Neary, Political Protest and Social Control in Pre-war Japan : The Origins of Buraku Liberation, Manchester University Press, , 250 p. (ISBN 0-7190-2985-6, lire en ligne)

Articles d'encyclopédie[modifier | modifier le code]

  • Zenjiro Kawamura " Zenkoku Suiheisha " " Kokushi Daijiten " Tome 8 Yoshikawa Kobunkan, 1987
  • Mouvement de libération de Buraku, ibid., volume 12, 1991
  • Seiichi Iwao, Teizō Iyanaga, Susumu Ishii et Shōichirō Yoshida, « Zenkoku Suihei-sha », Dictionnaire historique du Japon, vol. 20, no 1,‎ 1995, p. 135–136 (lire en ligne).
  • Ian Neary, « Levellers Society (Suiheisha) », Modern Japan: An Encyclopedia of History, Culture, and Nationalism, Routledge, 2013, p.133 (ISBN 978-1-135-63490-2).

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]