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Utilisateur:Everhard/Brouillon/Fascisme et capitalisme

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Le fascisme, tant comme idéologie que comme mouvement et régime politique, est un phénomène complexe qui, historiquement, a pris des formes variables selon le cadre national et la période dans lesquels il s'est développé. Ainsi selon Pierre Milza, « il est impossible de considérer le fascisme comme un phénomène simple et immuable et d'en donner une explication monovalente. En effet, même si l'on s'en tient à une définition étroite en écartant d'une part la thèse totalitaire des sociologues américains et de l'autre l'interprétation large du fascisme considéré comme un cas particulier de la réaction antiprolétarienne, on doit admettre qu'il existe des variantes et des étapes dans le fascisme, ce qui implique deux grands critères de distinction. » ; ces éléments de distinction étant pour l'auteur le critère spatial et le critère temporel[1]. Cette complexité est à l'origine de controverses importantes dans l'analyse des rapports du fascisme au système capitaliste et de sa nature supposément « révolutionnaire »[2] [3].

Le fascisme : une idéologie anticapitaliste ?[modifier | modifier le code]

Vue générale[modifier | modifier le code]

La nature « anticapitaliste » de l'idéologie fasciste et sont explication ont été et continuent d'être âprement discutées. Pour une première famille de pensée, souvent d'inspiration libérale, le fascisme est fondamentalement un mouvement de rejet du capitalisme. Ainsi selon l'historien américain Eugen Weber, « Si il y avait une chose sur laquelle tous les fascistes et les nationaux-socialistes étaient d'accord, c'était bien leur hostilité au capitalisme »[4]. De même pour Stanley Payne, spécialiste du fascisme et du franquisme, l'opposition au capitalisme fait partie de l'essence du mouvement fasciste. Les grandes entreprises doivent ainsi passer sous le contrôle de l'Etat où disparaitre complètement, au profit d'un modèle corporatiste[5]. Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, sur fond théorique de rejet de l'intervention de l'Etat dans l'économie, les théoriciens libéraux de l'École autrichienne d'économie sont allés jusqu'à faire du fascisme une forme dérivée du socialisme. Ainsi selon Ludwig von Mises, « la philosophie des nazis, le parti ouvrier allemand national-socialiste, constitue la manifestation la plus pure et la plus puissante de l'esprit anticapitaliste et socialiste de notre ère »[6]. De même l'économiste Friedrich von Hayek a affirmé qu' « il y a une grande part de vérité dans la formule d’après laquelle le fascisme et le national-socialisme seraient une sorte de socialisme de la classe moyenne »[7]. Dès les années 1930, l'historien et homme politique italien Gaetano Salvemini a également analysé le fascisme comme une forme de socialisme[8]. Sans assimiler les deux mouvements, François Furet soutient que le fascisme et le communisme ont une source commune dans la haine que les jeunes bourgeois ressentent pour eux-mêmes[9].

Tout en admettant que l'idéologie fasciste est caractérisée par un rejet du capitalisme, plusieurs historiens soulignent que la nature de ce rejet est profondément différente des mouvements d'inspiration marxiste. Dans la théorie marxiste, la critique du « mode de production » capitaliste se fonde sur une analyse des contradictions de ce dernier en tant que système économique, associée à la dénonciation de l'exploitation du prolétariat. Ainsi d'après Robert O. Paxton :

« Même sous ses formes les plus radicales, leur rhétorique anticapitaliste [aux fascistes] reste sélective. Alors qu'ils dénonçaient la finance internationale et ses spéculations (outres toutes les autres formes d'internationalisme, de cosmopolitisme et de mondialisation), ils respectaient la propriété des producteurs nationaux qui devaient constituer la base sociale de la nation revigorée. Lorsqu'ils dénonçaient la bourgeoisie, c'était pour lui reprocher d'être trop molle ou individualiste pour édifier une nation forte, et non parce qu'elle dépouillait les travailleurs de la valeur qu'ils ajoutaient. Lorsqu'ils dénonçaient le capitalisme, ce n'était pas pour dénoncer son exploitation, mais son matérialisme, son indifférence à la nation, son incapacité à toucher les âmes. Plus profondément les fascistes rejetaient l'idée que les forces économique furent les grands moteurs de l'Histoire. Pour eux les dysfonctionnements du capitalisme de l'entre deux guerre n'exigeaient pas une refonte complète ; ses maux pouvaient être guéris par l'application d'une volonté politique suffisante à la création du plein emploi et à la productivité.[10] »

Georges L. Mosse a pour sa part caractérisé le fascisme comme une « révolution bourgeoise anti-bourgeoise », réaction radicale à la culture de la modernité engendrée par le développement du capitalisme, mais qui ne cherchait pas à remettre en cause ses fondements économiques[11]. L’historien italien Emilio Gentile soutient pour sa part que « Génétiquement, historiquement et culturellement, l’antithèse entre fascisme, socialisme et communisme est totale » et que « la prétendue affinité génétique entre fascisme et communisme est dénuée de fondement historique », soulignant l’hostilité réciproque de ces mouvements. Pour ce chercheur, « Il y eu dans le fascisme une importante composante idéologique, qui voulait donner un contenu social plus radical et antibourgeois à l’Etat totalitaire, mais sans remettre en cause les structures de ce système politique, sans imaginer une société sans classes et sans Etat de travailleurs libres et émancipés »[12]. Critiquant la comparaison effectuée par François Furet entre le communisme et le fascisme, l’historien israélien Zeev Sternhell affirme que « dans les années qui précèdent la guerre, la pensée de Mussolini se développe dans le sillage des syndicalistes révolutionnaires soréliens, qui ont ceci de particulier qu’ils acceptent le capitalisme et l’idée du profit comme seul moteur de l’activité économique […]. Les syndicalistes soréliens, avec Mussolini devenu en août 1914 leur leader politique officiel, appuyés par la masse des futuristes et des nationalistes qui, de toute façon, vomissent le marxisme, n’avaient pas de solution de rechange au capitalisme et n’en voulaient pas. C’est là un élément fondamental de leur pensée : à la différence des bolcheviks, ils ne croyaient pas que le capitalisme fût la cause de ces maux qu’étaient, d’une part, le phénomène bourgeois, et, d’autre part, la social-démocratie héritière des valeurs libérales et ancrée dans les lumières »[13]. Analysant le nazisme, Bernard Poloni arrive à la même conclusion[14].

L’analyse marxiste du fascisme tend généralement à caractériser ce phénomène comme une violente réaction antiprolétarienne, un instrument entre les mains du capital. Dans cette optique, la phraséologie anticapitaliste du fascisme relève de la démagogie et constitue un leurre pour capter l’électorat populaire. Tandis que la définition officielle du fascisme formulée par le VIIe Congrès du Komintern de 1935 était « la dictature terroriste ouverte des éléments les plus réactionnaires, les plus chauvins et les plus impérialistes du capitalisme financier »[15], des observateurs marxistes comme Antonio Gramsci, Léon Trotski[16], 193 ou August Thalheimer[17], ont produit dans les années 1930 des analyses plus complexes du phénomène, présenté comme un mouvement de convergence entre les aspirations des classes moyennes ruinées par la crise et la volonté de la classe capitaliste de maintenir à tout prix l’état bourgeois. De là, selon ces auteurs, l’apparente contradiction entre la phraséologie pseudo-révolutionnaire du fascisme et son action résolument réactionnaire et anti-ouvrière : persécutions systématiques contre les syndicats et les partis de gauche, brisements de grèves etc. Après la guerre plusieurs historiens marxistes, spécialistes du fascisme, s’inscriront dans cette lignée en défendant des thèses néo-gramsciennes[18],[19],[20],[21]. A partir de cette période, l’historiographie marxiste qui, selon Ian Kershaw, « a apporté une contribution de premier ordre à l’histoire sociale du IIIeme reich »[22], tout en concédant que le fascisme disposait d’une importante autonomie politique vis-à-vis des milieux d’affaires en raison de son origine sociale petite-bourgeoise, ne pouvait être compris autrement que dans le cadre du système capitaliste, comme une réaction à la menace d’une révolution.

Le fascisme mussolinien[modifier | modifier le code]

Le nazisme[modifier | modifier le code]

Autres mouvements fascistes[modifier | modifier le code]

La politique économique et sociale des régimes fascistes[modifier | modifier le code]

Préservation des hiérarchies sociales et renforcement des classes dominantes[modifier | modifier le code]

L'autonomie croissante des objectifs politiques vis-à-vis des intérêts économiques : l'acheminement vers un état totalitaire[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. [[Pierre Milza, Les fascisme, Seuil, 1985 p.157-158. De même pour l'historien américain Robert O. Paxton, pour comprendre le fascisme, « La solution consiste, au lieu de faire des oppositions binaires, à suivre la relation entre la modernité et le fascisme tout au long de son complexe cours historique. Cette relation diffère spectaculairement selon les époques », Le fascisme en action, Seuil, 2004, p. 26
  2. Pour une synthèse de ces interprétations contradictoires, voir par exemple Emilio Gentile, « Le fascisme fut-il une révolution ? », in Qu'est ce que le fascisme ? Histoire et interprétation, Gallimard, coll. Folio, 2004, p. 145-177.
  3. Plus particulièrement sur le nazisme, voir Ian Kershaw, « Le IIIe Reich, une « réaction » ou une « révolution sociale » ? », in Qu'est ce que le nazisme ? problèmes et perspectives d'interprétation, Gallimard, coll. Folio, rééd. 1999, p. 251-284.
  4. Eugen Weber, Varieties of Fascism, New York, Van Nostrand, 1984, p.47.
  5. Payne, Stanley (1996). A History of Fascism. Routledge. (ISBN 1-85728-595-6) p.10
  6. Ludwig von Mises, Le chaos du planisme, 1947.
  7. Friedrich von Hayek, La roude de la servitude, PUF, p. 86.
  8. Gaetano Salvemini, Under the Axe of Fascism, 1936
  9. François Furet, Le Passé d’une illusion. Essai sur l’idée communiste au XXe siècle, Robert Laffont, 1995.
  10. Robert O. Paxton, Le fascisme en action, p. 22.
  11. Georges L. Mosse, La révolution fasciste,
  12. Emilio Gentile, Qu’est ce que le fascisme ?, p. 98-99.
  13. Zeev Sternhell, Les anti-lumières, Fayard, 2006, p. 175. Robert O. Paxton juge pour sa part que la confusion exprimé par François Furet entre les deux manières d’être antibourgeois (socialiste et fasciste) est due au fait qu’il ne « lit tout simplement pas attentivement les textes », Le fascisme en action, p. 22-23.
  14. « Tant les déclarations des responsables politiques du NSDAP que les faits le montrent clairement : les fondements et les cheminements de la révolution nationale-socialiste sont à l’opposé de ceux, par exemple, de la révolution communiste. Et lorsque certains membres du Parti, comme Ernst Röhm, affirmeront la nécessité de prolonger la révolution nationale par une phase plus sociale, voir socialiste, ils se verront opposer une fin de non-recevoir par Adolf Hitler et les siens, et seront même, pour certains, physiquement éliminés. », Bernard Poloni, « Les premières mesures économiques des nationaux-socialistes ou la révolution insidieuse », in Le National-socialisme, une révolution ?, Presses universitaires du Mirail, 1997, p. 96.
  15. Cité par Ian Kershaw, in Qu’est ce que le nazisme ? problèmes et perspectives d’interprétation, Folio, 1999, p. 44.
  16. Léon Trotsky, Comment vaincre le fascisme
  17. sur August Thalheimer, voir [[Jost Dülffer, Bonapartism, Fascism and National Socialism, JCG, 11, 1976.
  18. Tim Mason, « The Primacy of Politics – Politics and Economy in National Socialist Germany », in ‘’Nazism and the Third Reich’’, New York, 1972, p. 175-200.
  19. Reinhard Kühnl (dir.), Textes zur faschismusdiskussion I. Positionen und Kontroversen, Hambourg, 1974.
  20. Eike Hennig, Thesen zur deutschen Sozial-und Wirtschafts-geschichte 1933 bis 1938, Francfort sur le Main, 1973.
  21. Nicos Poulantzas, Fascisme et dictature. la IIIe Internationale face au fascisme, Paris, 1970.
  22. Ian Kershaw, Qu’est ce que le nazisme, p. 259.