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Utilisateur:Egvrsc/Brouillon

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Yvonne Oddon se désole de « supporter de voir épurer les bibliothèques de documentation » et de constater que « tant de siècles après l'inquisition, il était aussi facile de brûler des lecteurs que les livres ! ». C'est pourquoi en 1940 elle est à l'initiative de la création du « Réseau du Musée de l'Homme » (nom homologué après guerre) avec ses collègues Boris Vildé, linguiste et Anatole Lewitsky anthropologue, qui est également son compagnon. Le groupe clandestin se spécialise d'abord dans l'organisation de l'évasion des prisonniers et aviateurs, puis dans le renseignement et dans la transmission de renseignements en Grande-Bretagne.

À ce moment le groupe embryonnaire noue des liens avec pompier de Paris, des avocats, des patriotes bretons, un noyau de Béthune spécialisé en évasion et des intellectuels parisiens notamment le groupe “Les Français libres de France” autour de Jean Cassou.

Ce réseau s'associe rapidement à d'autres groupes de résistants. Le réseau constitué d’au moins 8 groupes distinct dont celui de Germaine Tillion, rédige et diffuse des textes de propagande anti-allemande. Boris Vilde s’impose comme chef de cette organisation. À la naissance de la publication du réseau en décembre 1940, Yvonne Oddon propose de lui attribuer un nom fédérateur : Résistance. Ce nom est choisi par Yvonne, issue d'une famille protestante, elle se souvient du graffiti « Register » (résister) dans la margelle du puits de la Tour de Constance à Aigues-Mortes, gravé par une huguenote nommée Marie Durant, emprisonnée au XVIIIe siècle en raison de sa foi. Possédant peu de moyen, le groupe transporte une vielle machine du musée de l’homme vers un appartement inoccupé et à nouveau vers la chambre de Jean Paulhan pour ronéoter les numéros du journal. La première édition du 15 décembre 1940 s'intitule : « Résister, c’est déjà garder son cœur et son cerveau. Mais c’est surtout agir, faire quelque chose qui se traduise en faits positifs, en actes raisonnés et utiles ».

Le journal "Résistance" sera publié cinq fois jusqu'en mars 1941

Le 10 février 1941, des participants du réseau de résistance sont arrêtés pour propagande anti-national-socialiste et aide à l'ennemi à la suite de la dénonciation entre autres de deux employés. Yvonne est enfermée à la prison du Cherche Midi puis celle de Fresnes. Germaine Tillion prend la place de chef du réseau jusqu'en 1942 où elle sera arrêtée à son tour.

Le 7 février 1942, dix membres du réseau dont Anatole Lewistky sont condamnés à mort par la cour militaire allemande. En février, Yvonne écrit à une amie du musée qui a réussi à échapper à l’arrestation : « Pour moi, je ne m'en tirerai que parce que je suis une femme, ce qui est une injustice de plus ». Mais pour les trois femmes, dont Yvonne Oddon, Sylvette Leleu et Alice Simonet la sentence est suspendue, leur peine de mort est commuée en déportation, et on leur attribue la mention « exécution suspendue ». Elles sont déportées en Allemagne le 16 février 1942 avec 8 autres femmes et 13 hommes. À bord d'un wagon cellulaire de 3ème classe grillagé, ils quittent la gare de l'Est à Paris. Pendant ce temps, le 23 février, Boris Vildé (arrêté deux mois après Yvonne), Anatole Lewitsky et les cinq autres hommes du réseau sont fusillés au Mont-Valérien à Paris.

Yvonne Oddon est incarcérée dans la prison de Karlsruhe, dans une installation pénitentiaire réservée aux femmes condamnées aux travaux forcés sous le régime NN (Nacht und Nebel, Nuit et Brouillard). Le 16 mars 1942, Yvonne et ses deux compagnes sont transférées dans la prison d’Anath. Elles y effectuent notamment des travaux de broderie, de couture, de tricot et de vannerie. Elles se nourrissent d'épluchures, de mauvaises herbes ramassées dans les champs et de produits synthétiques qui les rendent malades. Les trois femmes seront envoyées successivement aux prisons de Lubeck et Cottbus, toujours spécialisées dans le travail des femmes.À cette occasion, elles inventent des chansons pour exprimer leur résistance face à l'oppression. C’est aussi une manière de poursuivre leur résistance en écrivant par exemple « Joyeux Transport », qui raconte l’histoire de détenues « victimes de l'infâme Gestapo », « Pour la gloire légitime de venger notre drapeau », unies par « un même amour de la France » et un « esprit de Résistance » qui « ne sera jamais dompté ». Les 3 femmes seront envoyées consécutivement aux prisons de Lubeck et Cottbus toujours spécialisées pour le travail des femmes. Lorsque la procédure NN toucha à sa fin, les prisonnières furent remises à la Gestapo qui commanda leur transfert au camp de concentration (Konzebtrationslager). Le 20 novembre 1944, Yvonne Oddon est conduite au camp de Ravensbrück. "J'ai vu commettre des atrocités à nos camarades. Tous les matins, il y avait l'appel qui consistait à faire sortir tout le monde, même les malades, pieds nus dans la neige. Il fallait rester là pendant des heures. Parmi nous étaient des malades agonisants que nous devions porter et soutenir pendant la durée de l'appel. J'ai vu mourir des centaines de femmes du typhus et de la dysenterie, faute de soins. Quelques-unes étaient transportées dans un local qui servait d'hôpital ou bien étaient achevées. Tous les jours, les soldats allemands venaient chercher 150 ou 200 femmes qui allaient soi-disant en transport. Mais on ne les revoyait jamais. Je suis certaine qu'elles étaient passées dans les wagons à gaz." Elle sera ensuite déportée Au camps de Mauthausen "Pour effectuer le trajet, nous sommes restées cinq jours et six nuits entassées dans des wagons à bestiaux, avec des vivres pour deux jours. Avant d'entrer, nous sommes restées 16 heures sous une tempête de neige, attendant les formalités d'entrée. À Mauthausen, nous mangions des pommes de terre crues que des camarades qui travaillaient aux champs nous apportaient. Les derniers jours de ma captivité, j'ai vu enfermer des femmes dans la chambre à gaz."

Elle est libérée le 22 avril 1945 par la Croix-Rouge Internationale. À la suite d'un échange négocié entre la Croix-Rouge et Heinrich Himmler, 300 femmes françaises déportées parmi lesquelles se trouvent Yvonne Oddon et la Drômoise Cécile Goldet sont échangées contre 500 femmes allemandes. Ces femmes sont acheminées en Suisse par des camions appartenant à la Croix-Rouge, puis elles traversent la France en train. Yvonne Oddon arrive le 14 avril à la gare de Lyon.

Par la suite, Yvonne Oddon devient membre active du conseil d'administration de l'Association des anciennes déportées et internées de la Résistance (ADIR) et vice-présidente de l'Association nationale des Résistants de 1940 pendant de nombreuses années.