Temps d'écran

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Un enfant utilisant une tablette

Le temps d'écran désigne la somme des temps passés devant les écrans de télévision, d'ordinateurs, de jeux vidéo, ainsi que les tablettes et autres dispositifs portatifs. Il est particulièrement utilisé dans les études et recommandations portant sur l'utilisation des écrans par les enfants. Son augmentation en fait chez ces derniers le principal facteur de sédentarité et de ce fait la première cause de l'obésité infantile[1]. Un temps d'écran excessif est également un important facteur d'isolement social chez l'enfant[2].

Les études scientifiques démontrant les effets négatifs de l'augmentation du temps d'écran sur la santé des enfants poussent progressivement les différentes autorités de santé à recommander une limitation de leur exposition aux écrans. Ainsi, depuis 2019, l'organisation mondiale de la santé (OMS) recommande le bannissement complet des écrans avant l'âge de 2 ans et de limiter le temps d'écran à une heure par jour entre deux ans et cinq ans[3]. Concluant à des risques de retard d'apprentissage et d'exploration du monde, ainsi que des problèmes pondéraux (surpoids, obésité) et de sommeil (retard d'endormissement, réveils nocturnes), l'Académie Américaine de Pédiatrie comme la Société canadienne de pédiatrie choisissent de s'aligner sur les recommandations de l'OMS[4],[5]. En France, face aux données montrant l'impact de la surexposition aux écrans sur le développement du cerveau des enfants, sur leurs capacités d'apprentissage, d’attention et de concentration ainsi que sur leur comportement et leur santé physique, la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives et l'Association française de pédiatrie ambulatoire recommandent d'appliquer la règle des 3-6-9-12[6],[7].

Enquête scientifique[modifier | modifier le code]

La Société Pédiatrique du Canada a mesuré, selon une enquête de 2016, que les parents cherchaient de l'aide en matière d'usage des écrans dans quatre domaines : le temps d'écran, les effets sur la santé et le bien-être, la régulation parentale (le fait, par exemple, d'instaurer des limites), la recherche d'un contenu optimal[8]. Elle en a conclu que la qualité de l'usage des écrans par l'enfant était déterminante, c'est pourquoi cela doit lui être appris[8] et que développer des habitudes de modération du temps d'écran lorsque les enfants sont jeunes est beaucoup plus aisé que de réguler ou de couper l'usage des écrans lorsque les enfants sont plus âgés[8].

Certains troubles tels que l'anxiété, la dépression, un manque de concentration et de curiosité sont parfois causés par les écrans et ceux-ci ont donc un impact[9],[10],[11].

Règle des 3-6-9-12 en France[modifier | modifier le code]

La « Règle des 3-6-9-12 » a été élaborée par le pédopsychiatre Serge Tisseron en 2008 et a été promu par l'Association Française de Pédiatrie Ambulatoire. Elle a pour but de limiter le temps d'écran des enfants. Elle peut se résumer comme suit : pas d'écran avant 3 ans, pas d'appareils numériques personnels avant l'âge de 6 ans, pas de consoles de jeux portables avant l'âge de 9 ans, pas d'accès Internet avant 9 ans, et les réseaux sociaux après 12 ans[12],[13],[14].

Dynamique familiale[modifier | modifier le code]

L’analyse des dynamiques familiales s’appuie, entre autres, sur les rôles des membres d’une même unité familiale. Selon l’étude de Turcotte, l’autorité parentale diminue et le pouvoir est donné aux enfants à l’arrivée des dispositifs électroniques au sein des familles contemporaines alors que leur utilisation est croissante, notamment chez les jeunes[15]. Ces appareils peuvent être responsables de modifications que peut subir la hiérarchie familiale, notamment avec la technoférence, définit par la « technologie qui interfère dans les relations »[15]. La technoférence est parfois présente avant l’arrivée des enfants dans le foyer et, elle occasionne une baisse de la satisfaction des relations sociales et l’augmentation des conflits[15]. Avec la formation de nouvelles familles, la technoférence prend une place considérable alors que les jeunes font un usage important des appareils électroniques modernes (téléphones cellulaires ou mobiles, ordinateurs, lecteur MP3, etc.) et des médias (Twitter, Facebook, Snapchat, Instagram, etc.).

Les conséquences du temps d’écran prolongé[modifier | modifier le code]

Les points de vue de nombreux parents concernant la présence de la technologie à la maison et auprès des enfants sont plutôt variés. [4] La place des appareils est manifestement incertaine alors que les familles contemporaines perçoivent la « pratique numérique [comme étant] sans importance ou […] une perte de temps. »[16] De nombreux parents estiment que les écrans sont sujet à causer chez l’enfant un renfermement de sa personne[16], ils imposent donc une régulation de l’usage des appareils et créeront de nouveaux encadrements pour réduire le temps d’écran, dont la consommation des réseaux sociaux. Des tensions entre les membres de la famille peuvent se manifester avec les parents qui auront de la difficulté à faire respecter des règles établies face aux transgressions des jeunes qui réclament une certaine individualité et une autonomie pour l’utilisation des technologies[16]. Voici quelques règles communes ayant été mises en place par les adultes pour protéger les jeunes d’éventuels dangers rencontrés en ligne[17]: « [l’] obligation d’éteindre les appareils le soir […], limitations des durées de sessions [et même des] priorités mises à la vie de famille […] »[17]. Un usage exemplaire des technologies par le parent est porté à influencer les pratiques quotidiennes des jeunes afin de réduire les risques sur Internet[18].

Screen-time shaming[modifier | modifier le code]

Melissa Morgenlander, détentrice d'un PhD en études cognitives du Teachers College de Columbia University, et chercheuse spécialisée dans les usages de la télévision, des jeux vidéo et des technologies mobiles au service du développement intellectuel et social des enfants, se refuse à définir une durée quotidienne maximale d'usage des écrans, ainsi qu'un âge en dessous duquel leur usage serait déconseillé[19].

Elle dénonce ce qu'elle appelle le screen-time shaming, qui est un jugement porté de la part de certains parents sur d'autres parents ou leurs enfants. Pour elle, le rôle éducatif d'un parent relativement à l'exposition de son enfant aux écrans dépend d'abord du type de contenu et de la possibilité de partager une interaction sociale avec l'enfant dans le cadre d'un visionnage partagé ou co-viewing[19].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Santélog - Sédentarité, pourquoi l'écran est le premier facteur d'obésité chez l'enfant: « Regarder la télévision et utiliser les écrans est le facteur de mode de vie le plus fortement associé à l'obésité chez l’Enfant, alerte cette équipe de l’Institut de Barcelone pour la santé mondiale (ISGlobal) qui a passé en revue le poids de 5 habitudes de vie dans le développement du surpoids et de l'obésité infantile. »
  2. Santé Log - SANTÉ MENTALE : Temps d'écran et comportement suicidaire : «[...] le Dr Jason Nagata, professeur de pédiatrie ajoute que « la seule utilisation excessive de l’écran suffit à conduire à l'isolement social, à exposer à la cyberintimidation et à entraîner des troubles du sommeil, autant de facteurs négatifs pour la santé mentale ». »
  3. Figaro Santé - L'OMS recommande le moins d' écrans possible pour les moins de 5 ans Agathe Delepaut - 05/07/2019 - «L’organisation mondiale de la santé recommande de bannir les écrans pour les enfants de moins de 2 ans et de limiter à une heure par jour leur usage entre 2 et 5 ans.»
  4. Jenny Radesky et Dimitri Christakis, « Media and Young Minds », Pediatrics, vol. 138, no 5,‎ , e20162591 (PMID 27940793, DOI 10.1542/peds.2016-2591 Accès libre, lire en ligne)
  5. Société canadienne de pédiatrie - Le temps d’écran et les jeunes enfants : promouvoir la santé et le développement dans un monde numérique - 27 novembre 2017 - Limiter le temps d’écran : « Il n’est pas recommandé de laisser les enfants de moins de deux ans passer du temps devant des écrans. Chez les enfants de deux à cinq ans, limiter le temps d’écran quotidien ou régulier à moins d’une heure par jour. »
  6. Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives - Les écrans et les jeux vidéo - 02/12/2021
  7. Association française de pédiatrie ambulatoire - Nos outils - Affiche “Apprivoiser les écrans et grandir” La règle des 3-6-9-12 ans (Affiches destinées aux salles d'attente des cabinets médicaux)
  8. a b et c (en) « Screen time and young children: Promoting health and development in a digital world », Paediatrics & Child Health, vol. 23, no 1,‎ , p. 83–83 (ISSN 1205-7088 et 1918-1485, DOI 10.1093/pch/pxx197, lire en ligne, consulté le )
  9. Guillaume Grallet, « Temps passé devant les écrans : quelques astuces à connaître », sur Le Point, (consulté le )
  10. « Sept heures par jour, le temps d’écran maximum pour les enfants », sur www.pourquoidocteur.fr (consulté le )
  11. « Santé : nous passons deux heures de plus devant nos écrans qu'il y a dix ans », sur Franceinfo, (consulté le )
  12. « La règle « 3-6-9-12 » relayée par l’Association Française de Pédiatrie Ambulatoire (AFPA) | Serge Tisseron » (consulté le )
  13. « Les balises 3-6-9-12+ - 3-6-9-12+ » (consulté le )
  14. « Psychologie. La règle du “3-6-9-12”, pour limiter le temps d'écran de votre enfant », sur www.leprogres.fr (consulté le )
  15. a b et c Claudia Turcotte, Les écrans chez les enfants d'âge préscolaire et leurs habiletés socioémotionnelles : exploration de différents types d'utilisation des écrans et du rôle modérateur de la médiation parentale (Mémoire d'une thèse de maîtrise en service Social), Québec, Canada, Université Laval, , 153 p. (lire en ligne), p. 11
  16. a b et c Barbara Fontar, Agnès Grimault-Leprince et Mickaël Le Mentec, « Dynamiques familiales autour des pratiques d’écrans des adolescents », Enfances, Familles, Générations, no 31,‎ (ISSN 1708-6310, DOI 10.7202/1061777ar, lire en ligne, consulté le )
  17. a et b Bénédicte Havard Duclos et Dominique Pasquier, « Faire famille avec internet : Une enquête auprès de mères de milieux populaires », Enfances, Familles, Générations, no 31,‎ (ISSN 1708-6310, DOI 10.7202/1061779ar, lire en ligne, consulté le )
  18. « Rattrapage du 4 nov. 2019 : L'intelligence des arbres et le fléau de la surpêche », sur ici.radio-canada.ca (consulté le )
  19. a et b Laurent Tessier et Michael Bourgatte, « Usages des écrans, autisme et théorie du screen-time shaming », Celluloid | Video | Education | Digital Humanities,‎ 21-23 mars 2018 (lire en ligne, consulté le )

Annexes[modifier | modifier le code]

Articles de presse[modifier | modifier le code]

  • Martin Untersiger, « Il faut donner à l'enfant un temps global d'écran par jour », le Monde,‎
  • « Screen-time and young children : promotiong health and development in a digital world », Paediatrics & child's health,‎ (DOI 10.1093/pch/pxx197) (en)

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]