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Octroi de mer

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L'octroi de mer est une taxe française, applicable à la plupart des produits importés ou non, en vigueur dans certaines régions d'outre-mer françaises. Cet octroi a été perçu dès 1670 dans la « colonie de Martinique »[1].

« Le principe même de l'octroi de mer est la taxation de biens importés, pour partie non substituables avec des biens produits localement, ou correspondant à une offre locale limitée et ne pouvant satisfaire la demande intérieure. En outre, l'octroi de mer est supposé permettre aux entreprises de consolider leur position sur le marché local, de dégager des marges de manœuvre pour investir et exporter davantage vers le marché de l'Union. »

— Ministère de l'Économie et des Finances[2]

L'octroi de mer est une ressource financière essentielle des communes et collectivités locales dont le conseil régional ou la collectivité territoriale (selon le régime de la région d'outremer concernée) décide des produits taxés et du niveau de taxation, dans les limites fixées par la Décision du Conseil no 2004/162/CE du [3].

L'octroi de mer est perçu par l'administration des douanes[3] ou, pour les colis postaux et depuis le , directement par La Poste[4],[5].

La recette s'élève à près d'un milliard d'euros par an (tous DOM confondus)[3]. En Martinique, l'octroi de mer représente 48 % des rentrées fiscales des communes de moins de 10 000 habitants et 37 % de celles des communes de plus de 10 000 habitants[6],[note 1]. Les conseils régionaux peuvent y adjoindre un « octroi de mer régional » perçu au profit de la région (maximum légal à 2,5 %)[7].

Par ses exonérations spécifiques, le but de l'octroi de mer est de créer une distorsion fiscale afin de protéger la production locale de la concurrence extérieure[8],[9]. Les produits non importés devraient donc en être exemptés. Certains biens, comme des matières premières ou des équipements sanitaires, peuvent bénéficier d'un régime de dérogation. L'article 2 de la loi exempte les personnes dont le chiffre d'affaires annuel relatif à leur activité de production est inférieur à 300 000 euros[1]. L'octroi de mer ne fait pas de différence entre les produits importés depuis le reste de la France ou depuis l'étranger.

La loi régissant l'octroi de mer prévoit la cohabitation d'un régime général et de trois listes annexes de produits bénéficiant d'une taxation spécifique. Ces listes sont propres à chaque région, et sont classées suivant trois lettres, A, B et C, listant les produits pour lesquels l'écart de taxation ne peut dépasser respectivement 10, 20 et 30 points de pourcentage[8],[10]. Toute la documentation officielle est disponible avec le mot-clé « octroi de mer » sur la DataDouane[11].

L'octroi de mer constitue un impôt très ancien, vieux de plusieurs siècles[note 2],[8],[1] qui, à l'origine, taxait à leur arrivée tous les produits arrivant dans les DOM par la mer. Ce régime fiscal est conservé lors de la départementalisation[12].

Cette taxe s'est appliquée uniquement aux produits importés jusqu'à la loi de 1992, prise en application d'une décision du Conseil européen du , qui a étendu la taxation aux productions locales pour mettre en conformité cette taxe avec le principe de non-discrimination contenu dans l'Acte unique européen de 1986.

Cette loi de 1992 a déterminé les modalités du régime fiscal de l'octroi de mer pour dix ans, laissant en particulier aux régions la possibilité d'accorder des exonérations de la taxe aux productions locales pour des motifs de développement économique soumises à l'accord de la Commission européenne. Devant arriver à expiration le , ces modalités ont néanmoins été prorogées d'une année à la demande expresse de la ministre de l'Outre-Mer.

Le , la Commission européenne se prononce en faveur du maintien de ce régime pour une durée de dix ans[8]. En 2004, ce régime a pu ainsi être consolidé pour dix ans par la loi du [13] relative à l'octroi de mer qui autorise des écarts de taxation au bénéfice des productions locales dans des conditions fixées par une décision du Conseil de l'Union européenne du [8] et aménage la répartition du produit de la taxe entre les collectivités bénéficiaires. Ce texte a été complété par le décret d'application no 2004-1550 du relatif à l'octroi de mer[8], publié au Journal officiel et entré en vigueur le .

Le régime est modifié en 2015 en application de la décision du Conseil no 940/2014/UE pour un nombre limité de produits[1].

L'octroi de mer est soumis en 2018 à une question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la Cour de cassation, à la suite d'un procès intenté par deux entreprises de Martinique et Guadeloupe[14]. Le Conseil constitutionnel confirme le la validité de cette loi[15].

En 2024, la Cour des comptes propose une refonte de ce dispositif fiscal, supprimé en France hexagonale depuis 1943 qui fournit près d'un tiers des recettes des collectivités locales d'Outre-mer[2].

Dans un contexte d'inflation généralisée, notamment après celle de 2021-2023, et dans le cadre des manifestations contre la vie chère en Martinique en 2024, cet impôt est critiqué et remis en question, car il influe à la hausse l'indice des prix à la consommation et réduit le pouvoir d'achat de la population dans cette collectivité[16].

Dans le cadre des discussions commerciales menées avec l'Union européenne au nom de La Réunion, l'octroi de mer est considéré par les autres pays comme un obstacle à la concurrence[17]. En 2020 et 2021, le gouvernement français souhaite maintenir le dispositif d'octroi de mer pour sept années supplémentaires, malgré l'opposition européenne[18]. En 2021, une nouvelle décision du Conseil prolonge à nouveau l'octroi de mer pour la période 2022-2027[19].

Selon la Cour des comptes l'octroi de mer contribue « à la hausse des prix pour de nombreux biens de première nécessité, non produits dans les départements et régions d'outre-mer, ou produits dans une proportion limitée » et a « pour effet de maintenir une dépendance aux importations pour garantir un certain niveau de ressources fiscales aux collectivités locales »[2].

Les produits taxés et le niveau des taxes sont fixés localement par les régions ou collectivités uniques[2].

L'octroi de mer en Guadeloupe, qui se divise en 21 sections, 98 chapitres et 485 pages[20], est de 7 % en moyenne[21].

Pour la Guyane, les taux sont les suivants[note 3],[22] :

L'octroi de mer et l'octroi de mer régional (OMR) en Guyane
Produits Production locale Production externe
Régime général 15 % (+OMR 2,5 %) 15 % (+OMR 2,5 %)
Annexe A Mortiers et bétons, ouvrages en ciment 0 % (+OMR 0 %) 8 % (+OMR 2,5 %)
Annexe B Aliments pour bétail, produits en plastique,
ciments, peintures
0 % (+OMR 0 %) 14 % (+OMR 2,5 %)
Yaourts, jus de fruits, eaux et boissons
gazeuses, sable, cailloux, ponts et éléments
de ponts, gravier
0 % (+OMR 0 %) 17,5 % (+OMR 2,5 %)
Poisson congelé, crevettes, riz 0,25 % (+OMR 0,25 %) 18 % (+OMR 2,5 %)
Annexe C Bois brut et première transformation 0,25 % (+OMR 0,25 %) 28 % (+OMR 2,5 %)
Rhum 0 % (+OMR 0 %) 27,5 % (+OMR 2,5 %)

La Martinique dispose de onze taux d'octroi de mer : 0 %, 2 %, 5 %, 7 %, 10 %, 15 %, 20 %, 25 %, 30 %, 40 % (films violents ou pornographiques), 50 % (tabacs).

Ces onze taux sont complétés par trois taux d'octroi de mer régional : 0 %, 1,5 % et 2,5 %[note 4],[23].

À Mayotte, le taux d'octroi de mer appliqué aux produits connaît plusieurs variantes avec plus de vingt-quatre taux différents. En revanche, le taux d'octroi de mer régional est lui de 2,5 %. Le taux d'octroi de mer régional est plafonné à 2,5 % contrairement au taux d'octroi de mer pour lequel aucune limitation n'a été prévue par la loi. Ainsi, le taux d'octroi de mer appliqué à Mayotte oscille entre 0 % et 130 % en fonction des produits[24].

La Réunion

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L'octroi de mer est habituellement de 4 % à La Réunion[21] mais il varie fortement selon la nature du produit (entre 0 % et plus de 60 %)[25]. S'y ajoute un octroi de mer régional de 2,5 %.

Notes et références

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  1. Au profit des communes et du département pour la Guyane.
  2. Perçu dès 1670 en Martinique, sous le nom de « droit de poids ».
  3. La TVA est à 0 % en Guyane.
  4. Le taux de TVA est de 8,5 % en Martinique (taux réduit à 2,1 %).

Références

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  1. a b c et d « Fiscalité douanière dans les départements d'Outre-mer », Direction générale des Douanes et Droits indirects, (consulté le ).
  2. a b c et d Lettre de la DAJ – Octroi de mer : la Cour des comptes propose de refondre le dispositif fiscal, economie.gouv.fr, 20 mars 2024.
  3. a b et c Observatoire de l'outre-mer - Octroi de mer, Ministère de l'Intérieur (France)
  4. Depuis le 1er février, à la Martinique, La Poste réalise le dédouanement des colis qu'elle transporte, franceantilles, 23 février 2022.
  5. Entre l'Hexagone et l'Outre-Mer de particulier à particulier : quels sont les droits et taxes à payer à l'importation ?, La Poste, consulté le 22 mars 2024.
  6. Tableaux Économiques Régionaux Martinique, 2007-2008, Insee, p. 117.
  7. Vade-mecum DGDDI, p. 4.
  8. a b c d e et f Vade-mecum DGDDI, p. 2.
  9. Octroi de mer, cciguadeloupe.com.
  10. Vade-mecum DGDDI, p. 3.
  11. Datadouane : Articles avec le mot clé « octroi de mer », douane.gouv.fr.
  12. Décrets du 27 décembre 1947 et du 30 mars 1948.
  13. Journal officiel de la République française, 3 juillet 2004, pp. 12114 et suivantes.
  14. Julien Delarue, « Le Conseil constitutionnel doit se prononcer sur l'octroi de mer », Journal de l'île de La Réunion, (consulté le ).
  15. Jean-Paul Mélade, « L'Octroi de mer maintenu par le Conseil constitutionnel », La Première, (consulté le ).
  16. « Protestation contre la vie chère à la Martinique : pourquoi l’octroi de mer est-il critiqué ? », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le )
  17. « BREXIT : conséquences pour La Réunion », Témoignages, (consulté le ).
  18. AFP, « La France défendra l'octroi de mer dans les négociations européennes », La Première, .
  19. Notice du décret no 2023-1042 du 16 novembre 2023 (Texte sur Légifrance).
  20. « Tarif d'octroi de mer 2018 en Guadeloupe » [PDF], Direction générale des Douanes et Droits indirects, (consulté le ).
  21. a et b Octroi-de-mer, observatoire-outre-mer.interieur.gouv.fr.
  22. « Octroi de mer - Dossiers thématiques », Ministère des Outre-mer (via Wikiwix) (consulté le ).
  23. Source : Annexe à la délibération 04-1915 du conseil régional de Martinique, cr-martinique.fr, [PDF].
  24. L'octroi de mer, conseil départemental de Mayotte.
  25. Tarif d'octroi de mer de La Réunion (inaccessible).

Articles connexes

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Liens externes

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