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Maurice Gross

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Maurice Gross (1934-2001) est un linguiste français[1],[2] qui a développé à partir de la fin des années 1960 le lexique-grammaire, une méthode et une pratique effective[3] de description formelle des langues[4],[5],[6].

Maurice Gross. Photo de Vera Mercer
Maurice Gross. Photo de Vera Mercer

Biographie et apports

Maurice Gross travaille à la traduction automatique à l'École polytechnique sans aucune formation préalable en linguistique, et entre ainsi en 1961 comme boursier à Harvard[2], ce qui lui permet de fréquenter le MIT et de faire la connaissance de Noam Chomsky[2] et de Marcel-Paul Schützenberger[4],[6]. De retour en France, il fait de la recherche en informatique au CNRS.

En 1964, il repart aux États-Unis, cette fois à l'Université de Pennsylvanie à l'invitation de Zellig Harris[2], avec qui il va collaborer pendant deux ans, et qu'il considèrera par la suite comme son mentor en matière de linguistique. En 1967, à la Sorbonne, il soutient sa thèse de troisième cycle intitulée L'Analyse formelle comparée des complétives en français et en anglais et va enseigner en faculté à Aix-en-Provence[3], où il connait Jean Stéfanini (de).

En 1969, il soutient sa thèse de doctorat d'État intitulée Lexique des constructions complétives (Université Paris 7), publiée sous le titre Méthodes en syntaxe (Paris : Hermann, 1975), et est élu professeur à l'Université de Vincennes (future Paris VIII), puis en 1975 à l'Université de Paris VII[4]. Il fonde en 1968 le Laboratoire d'Automatique Documentaire et Linguistique (LADL, au CNRS), et en 1977, la revue Lingvisticae Investigationes. Il donne la priorité à des principes de rigueur méthodologique : respect des faits, observation empirique, recensement exhaustif, reproductibilité des expériences[3],[4]. Avec son laboratoire, il décrit systématiquement les phrases simples du français[6], réalisant un dictionnaire fondé sur la syntaxe[1],[4], qui met en évidence les propriétés saillantes des mots afin de faciliter leur analyse syntaxique et leur étiquetage grammatical[1], et qui constitue ainsi un classement raisonné et détaillé de la plupart des unités linguistiques du français[3],[4]. En effet, avant que la grammaire générative n'adopte le principe de projection ou le critère thématique (en), Maurice Gross décide de considérer systématiquement comme interdépendantes les entrées lexicales et les règles grammaticales[3] (d'où le nom de lexique-grammaire donné à la méthode employée et au résultat obtenu). Ses élèves vérifient cette hypothèse de travail sur des langues typologiquement variées : langues romanes et germaniques, grec moderne, coréen, arabe[3], malgache...

À partir des années 80, le LADL multiplie les dépouillements informatisés[2], produisant des dictionnaires morpho-syntaxiques du français, appelés "dictionnaires électroniques"[6]. En parallèle, Maurice Gross, pour qui le modèle de compétence du langage est celui des automates finis[1], développe la notion de grammaire locale[5]. Les grammaires locales, constituées d'automates finis et couplées aux dictionnaires morpho-syntaxiques, permettent l'analyse automatique de textes[3],[5] par le logiciel Intex développé par Max Silberztein.

À la même époque, Maurice Gross travaille sur des problèmes alors négligés par la tradition linguistique, mais qu'il juge au contraire fondamentaux, notamment l'ambiguïté lexicale, les expressions idiomatiques et collocations, les constructions à verbe support (it)[3]. Ainsi, il découvre en 1976 la "double analyse", propriété de certaines constructions à verbe support[5]. Il recense systématiquement les expressions figées[1],[5]. Les recherches assistées par ordinateur menées par Gross sur de grandes quantités de matériau linguistique débouchent sur une image de la langue comme un instrument plus fortement contraint idiomatiquement que librement manipulable[5], et elles sont compatibles avec la déclaration de John McHardy Sinclair (1933-2007) sur la prédominance de l'Idiom principle (phraséologie) sur l'Open Choice Principle (combinatoire libre). Gross décrit le discours comme lexique-grammaire, comme une grammaire dont la formalisation échoue à moins qu'elle ne prenne en compte sa dépendance au lexique. Qui veut décrire complètement la langue doit donc recueillir d'énormes quantités de combinaisons codées.

Maurice Gross meurt d'un cancer en quelques mois[1],[3]. On compte parmi ses élèves[7] Alain Guillet, Christian Leclère, Gilles Fauconnier, Morris Salkoff, Joëlle Gardes, Annibale Elia, Laurence Danlos, Hong Chai-song, Cheng Ting-au, Claude Muller, Éric Laporte, Max Silberztein, Tita Kyriacopoulou, Elisabete Ranchhod, Anne Abeillé, Mehryar Mohri (en), Nam Jee-sun, Jean Senellart, Cédrick Fairon.

Œuvres

Une bibliographie complète des écrits de Maurice Gross est disponible. Voici une brève sélection d’œuvres de Maurice Gross :

Notes et références