MBenes

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Les MBenes sont une nouvelle famille de métaux de transition bidimensionnels analogues au graphène. Ils ont été mentionnés pour la première fois en octobre 2017 et suscitent de plus en plus d'intérêt dans les domaines des nanomatériaux, de la physique et de la chimie[1]. La formule générale des MBenes est MnB2n-2, où : M est un métal de transition, avec n allant de 2 à 4 et B correspondant à l'atome de bore[2]. Les MBenes ont des structures de type sandwich, avec des couches d'atomes de métal de transition et de bore alternées, la couche la plus externe étant un métal de transition. Ces composés bidimensionnels présentent un potentiel prometteur en raison de leur conductivité électrique exceptionnelle, de la richesse de leur chimie de surface et de leur stabilité exceptionnelle. En outre, les MBenes ont une activité catalytique et des propriétés optiques et thermiques supérieures à celles des MXenes.

Synthèse et structure[modifier | modifier le code]

En général, les MXenes sont obtenus en éliminant sélectivement la couche atomique A dans la phase MAX à l'aide d'acide fluorhydrique ou d'une solution acide de sels de fluorure. Les phases MAX peuvent être décrites par une formule Mn+1AXn , où n = 1,2,3… M représente un métal de transition, A est un élément principalement des groupes 13 ou 14, et X représente le carbone et/ou l'azote. De la même façon, les MBenes sont dérivés des MAB (Métal-Aluminium-Bore), ils sont obtenus en éliminant les couches d’aluminium des MAB. Les phases MAB sont constituées de couches atomiques de métaux de transition et de bore (M-B) entrelacées avec des couches d’atomes d’aluminium (A) mono- ou bilatérales. Le métal de transition (M) dans les phases MAB peut varier, tandis que l’aluminium (A) est généralement présent en raison de ses propriétés chimiques et sa capacité à former des liaisons avec d'autres éléments[3]. Il apporte une stabilité  à ces structures en  2D notamment concernant les espèces suivantes : MAB, M2AB2, M3AB4 ou M4AB6[4]. Par ailleurs, ces phases présentent une structure cristalline avec différents arrangements atomiques (cf. tableau 1). Ainsi, vous trouverez donc dans le tableau suivant différentes structures de MBenes, accompagnées de leur groupe ponctuel de symétrie[5].

Tableau 1 : tableau comportant les différents types de structures de MBenes et leur groupe ponctuel de symétrie[5]
Structure Type Groupe ponctuel de symétrie Exemples de MBenes
MB β-MoB-type Cmmm CrB, MnB, ZrB
M3B4 Ta3B4-type Immm Ta3B4, Cr3B4, Nb3B4, V3B4
M2B3 V2B3/Cr4B6-type Cmcm V2B3 , Cr4B6

Les MBenes sont obtenus à l’aide d’un acide, l'acide chlorhydrique HCl dilué est souvent utilisé, ou d’une base, généralement l'hydroxyde de sodium NaOH. S'ensuit un processus de délamination permettant l’arrangement spécial en sandwich typique des MBenes. Le lien M-A est un lien métallique, donc faible, tandis que le lien M-B possède des propriétés covalentes/métalliques/ioniques, il s’agit donc d’un lien plus fort. L’exploitation des ces différentes forces de liaison permet d’éliminer la couche A et d'ainsi créer des MBenes en 2D. Certains MBenes ont été synthétisés de manière satisfaisante grâce à cette méthode. Par exemple, la gravure chimique de MoAlB par une solution de NaOH à température ambiante pendant 24 heures permet d’éliminer sélectivement les atomes d’aluminium, la couche externe présentant des atomes de molybdène Mo. De la même manière, la gravure chimique de Cr2AlB2 par une solution de HCl dilué à température ambiante et pendant 6 heures permet d’obtenir CrB. Une deuxième méthode de synthèse des MBenes consiste à utiliser de la poudre et de la fragmenter par un procédé solvothermale pour obtenir une nanostructure spécifique. Pour réaliser la gravure, deux réactifs sont alors nécessaires : CH3COOH et H2O2. L’ensemble est chauffé à 160 °C pendant 2 heures dans un réacteur à micro-ondes, lavé puis traité à l'acide hyaluronique[5]. Le TiB est un Mbene 2D stable qui  possède une voie de synthèse bien à lui à partir du Ti2InB2. Celui-ci est placé dans un tube en quartz et sous vide. Pour permettre une séparation optimale des métaux de l’alliage, il faut être à 1 050 °C pendant 6 jours[5]. Les résidus d'aluminium stabilisent alors les MBenes par oxydation. À ce stade, les MBenes avec l’aluminium, subissent une oxydation qui va partiellement éliminer les atomes d’aluminium. Ainsi, nous obtenons des MBenes stables partiellement oxydés contenant des résidus d’aluminium. Ces résidus stabilisent la structure en accordéon de certains MBenes (MoB par exemple)[6].

Propriétés[modifier | modifier le code]

Conductivité élevée et caractère métallique[modifier | modifier le code]

La présence du niveau de Fermi et d’électrons dans la bande de conduction des h-MBenes (MBenes en conformation hexagonale), causent le caractère métallique intrinsèque des MBenes[7]. Grâce à ce caractère métallique et donc à une délocalisation importante des électrons, les MBenes possèdent une excellente conductivité électrique, un caractère intéressant pour les différentes applications citées dans la prochaine grande partie[5],[7],[8].

Propriété mécanique[modifier | modifier le code]

Les MBenes sont des matériaux bidimensionnels avec une structure plane et sont donc minces. Néanmoins, ils présentent tout de même une rigidité et une élasticité assez importante malgré tout. De plus, leur module de Young est très élevé. Ils sont donc robustes et capables de supporter des contraintes mécaniques assez importantes[6].

Une différence dans ces caractéristiques sont tout de même notables parmi les MBenes eux-mêmes. Les MBenes peuvent être fonctionnalisés en ajoutant certains groupements chimiques comme de l’oxygène, du fluor ou des groupements hydroxyles. L’ajout de ces groupements modifie donc les interactions entre les atomes composant le MBenes. Cette fonctionnalisation leur permet alors une meilleure rigidité et une meilleure élasticité que leurs homologues vierges[8].

Catalyse[modifier | modifier le code]

Du fait de leur petite taille et de leur structure 2D, les MBenes possèdent une grande surface spécifique et un nombre élevé de sites actifs disponibles. Ces sites actifs sont des emplacements où les réactions chimiques peuvent se produire. Ainsi, les MBenes pourraient être très utiles en catalyse comme pour la réaction de réduction du CO2 en CH4[9].

Propriétés magnétiques[modifier | modifier le code]

Les h-MBenes h-MnB, h-TiB, h-CrB et h-VB sont des MBenes qui présentent un caractère antiferromagnétique[7]. Les spins des électrons sont donc antiparallèles et annulent l’aimantation du matériau. D’autres MBenes comme le MnB présentent quant à eux un caractère ferromagnétique[10]. Les moments magnétiques des atomes sont alors alignés dans la même direction, entraînant l’aimantation du matériau.

Applications potentielles[modifier | modifier le code]

Stockage d’énergie[modifier | modifier le code]

Les MBenes sont des matériaux prometteurs pour les batteries Li-ion, offrant une structure favorable à l’intercalation des ions lithium, essentielle pour le stockage et la libération d’énergie. Leur stabilité chimique contribue à la durabilité et à la sécurité des batteries. Avec une capacité gravimétrique théorique élevée, les MBenes pourraient permettre la création de batteries plus légères et à densité d’énergie accrue. Leur conductivité électrique assure un transport efficace des électrons durant les cycles de charge et de décharge, et supportent des taux de charge et de décharge élevés, ce qui est bénéfique pour les applications exigeant une recharge rapide ou une libération d’énergie immédiate.

Ces propriétés font des MBenes un candidat idéal pour améliorer les performances des batteries Li-ion, en particulier en termes de capacité, de vitesse de charge et de sécurité[2].

Supercondensateur[modifier | modifier le code]

Les matériaux des supercondensateurs présentent en général plusieurs défauts tels que : leurs faibles capacités spécifiques lorsqu’ils sont faits de carbone, ou encore que les oxydes aient une perte rapide de leurs capacités de cycles de charge-décharge répétés. Comme les MBenes sont très stables, ce qui est important pour les matériaux des supercondensateurs, ils peuvent alors résister à de nombreux cycles de charge et de décharge sans perdre en performance, contrairement aux oxydes.

De plus, ils sont intéressants car les nanofeuillets à base de bore pourraient être plus performants que le graphène et ses dérivés, grâce à leur faible poids moléculaire et leur nature métallique[11].

Électro-catalyseurs[modifier | modifier le code]

Réaction de réduction de l’azote (NRR)[modifier | modifier le code]

La réduction de l’azote (N2) alimentée par de l’électricité renouvelable, est considérée comme une solution prometteuse pour le stockage et le transport d’énergie verte. Ce processus, connu sous le nom de cycle N2/NH3, pourrait révolutionner la manière dont nous produisons et utilisons l’énergie. Cependant, les catalyseurs couramment utilisés dans cette réaction, le fer et le ruthénium, sont limités par la réaction concurrente de production d’hydrogène (HER). Grâce à sa faible valence et à ses orbitales p, partiellement occupées, le bore offre une multitude de sites actifs pour la fixation et la réduction de N2.

Les MBenes, sont très stables en solution aqueuse en conditions normales et présentent une sélectivité notable pour la NRR par rapport à la réaction secondaire HER. Ces caractéristiques font de ces MBenes des candidats prometteurs comme nouveaux catalyseurs pour les applications énergétiques[12].

Réaction de production d’hydrogène (HER)[modifier | modifier le code]

L’activité des MBenes est liée à la teneur en bore, une diminution de cette dernière réduit l’activité HER. En effet, la concentration en bore dans les matériaux permet de contrôler leur réactivité face à deux réactions concurrentes. Certains MBenes, comme ZrBO, MoBO et Nb2BO2, ont une énergie libre de Gibbs d’adsorption proche de 0 eV, indiquant leur potentiel en tant que catalyseurs électrochimiques pour la réaction de HER.

Les MBenes, avec leurs structures similaires au graphène, leurs propriétés électroniques, leur grande surface spécifique et leurs propriétés mécaniques fiables, sont des catalyseurs prometteurs pour la production d’hydrogène[13].

Références[modifier | modifier le code]

  1. (en) Zhonglu Guo, Jian Zhou et Zhimei Sun, « New two-dimensional transition metal borides for Li ion batteries and electrocatalysis », Journal of Materials Chemistry A, vol. 5, no 45,‎ , p. 23530–23535 (ISSN 2050-7488 et 2050-7496, DOI 10.1039/C7TA08665B, lire en ligne, consulté le )
  2. a et b (en) Bikun Zhang, Jian Zhou et Zhimei Sun, « MBenes: progress, challenges and future », Journal of Materials Chemistry A, vol. 10, no 30,‎ , p. 15865–15880 (ISSN 2050-7488 et 2050-7496, DOI 10.1039/D2TA03482D, lire en ligne, consulté le )
  3. (en) Martin Ade et Harald Hillebrecht, « Ternary Borides Cr 2 AlB 2 , Cr 3 AlB 4 , and Cr 4 AlB 6 : The First Members of the Series (CrB 2 ) n CrAl with n = 1, 2, 3 and a Unifying Concept for Ternary Borides as MAB-Phases », Inorganic Chemistry, vol. 54, no 13,‎ , p. 6122–6135 (ISSN 0020-1669 et 1520-510X, DOI 10.1021/acs.inorgchem.5b00049, lire en ligne, consulté le )
  4. (en) Sankalp Kota, Maxim Sokol et Michel W. Barsoum, « A progress report on the MAB phases: atomically laminated, ternary transition metal borides », International Materials Reviews, vol. 65, no 4,‎ , p. 226–255 (ISSN 0950-6608 et 1743-2804, DOI 10.1080/09506608.2019.1637090, lire en ligne, consulté le )
  5. a b c d et e (en) Michał Jakubczak, Aleksandra Szuplewska, Anita Rozmysłowska‐Wojciechowska et Andreas Rosenkranz, « Novel 2D MBenes—Synthesis, Structure, and Biotechnological Potential », Advanced Functional Materials, vol. 31, no 38,‎ (ISSN 1616-301X et 1616-3028, DOI 10.1002/adfm.202103048, lire en ligne, consulté le )
  6. a et b (en) Varun G. Nair, Magdalena Birowska, Dominika Bury et Michał Jakubczak, « 2D MBenes: A Novel Member in the Flatland », Advanced Materials, vol. 34, no 23,‎ (ISSN 0935-9648 et 1521-4095, DOI 10.1002/adma.202108840, lire en ligne, consulté le )
  7. a b et c (en) Nanxi Miao, Zhiyao Duan, Shiyao Wang et Yanjie Cui, « h -MBenes: Promising Two-Dimensional Material Family for Room-Temperature Antiferromagnetic and Hydrogen Evolution Reaction Applications », ACS Applied Materials & Interfaces, vol. 16, no 5,‎ , p. 5792–5802 (ISSN 1944-8244 et 1944-8252, DOI 10.1021/acsami.3c15360, lire en ligne, consulté le )
  8. a et b Rasoul Khaledialidusti, Mohammad Khazaei, Vei Wang et Nanxi Miao, « Exploring structural, electronic, and mechanical properties of 2D hexagonal MBenes », Journal of Physics: Condensed Matter, vol. 33, no 15,‎ , p. 155503 (ISSN 0953-8984 et 1361-648X, DOI 10.1088/1361-648X/abbb0e, lire en ligne, consulté le )
  9. (en) Xunlin Liu, Zhixiao Liu et Huiqiu Deng, « Theoretical Evaluation of MBenes as Catalysts for the CO 2 Reduction Reaction », The Journal of Physical Chemistry C, vol. 125, no 35,‎ , p. 19183–19189 (ISSN 1932-7447 et 1932-7455, DOI 10.1021/acs.jpcc.1c02749, lire en ligne, consulté le )
  10. (en) Zhou Jiang, Peng Wang, Xue Jiang et Jijun Zhao, « MBene (MnB): a new type of 2D metallic ferromagnet with high Curie temperature », Nanoscale Horizons, vol. 3, no 3,‎ , p. 335–341 (ISSN 2055-6756 et 2055-6764, DOI 10.1039/C7NH00197E, lire en ligne, consulté le )
  11. (en) Shudan Wei, Xiaojun Lai et Girish M. Kale, « Exploring the Potential of MBenes Supercapacitors: Fluorine-Free Synthesized MoAl 1– x B with Ultrahigh Conductivity and Open Space », ACS Applied Materials & Interfaces, vol. 15, no 28,‎ , p. 33560–33570 (ISSN 1944-8244 et 1944-8252, DOI 10.1021/acsami.3c04301, lire en ligne, consulté le )
  12. (en) Yuwen Cheng, Jisheng Mo, Yongtao Li et Yumin Zhang, « A systematic computational investigation of the water splitting and N 2 reduction reaction performances of monolayer MBenes », Physical Chemistry Chemical Physics, vol. 23, no 11,‎ , p. 6613–6622 (ISSN 1463-9076 et 1463-9084, DOI 10.1039/D0CP06405J, lire en ligne, consulté le )
  13. (en) Shuang Feng, Nanxi Miao et Junjie Wang, « Hexagonal MBene (Hf 2 BO 2 ): A Promising Platform for the Electrocatalysis of Hydrogen Evolution Reaction », ACS Applied Materials & Interfaces, vol. 13, no 47,‎ , p. 56131–56139 (ISSN 1944-8244 et 1944-8252, DOI 10.1021/acsami.1c16449, lire en ligne, consulté le )