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Ghiata

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Ghiata
غياثة
ⵖⵉⵢⴰⵟⵟⴰ
Village ghiata de la Tazekka.
Informations générales
Nom arabe
Ġiāṯa
Nom berbère
Ġiyaṭṭa
Échelon
Tribu
Géographie
Région principale
Province principale
Territoire
Chef-Lieu
Histoire et anthropologie
Période d'apparition
Mode de vie
Sédentaire
Fait partie du groupe tribal
Culture
Langue principale

Les Ghiata (variantes : Ghyata, Rhiata ou Rhyata ; en tamazight ⵖⵉⵢⴰⵟⵟⴰ, en arabe : غياثة) sont une tribu d'origine berbère zénète du nord-est du Maroc, occupant un territoire qui entoure la ville de Taza.

Origine de la tribu

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Lorsqu'il atteint le Maghreb al-Aqsa en l'an , Idris Ier est accueilli par les Awerba à Volubilis, qui le désignent Imam en 789[1]. Plusieurs autres tribus importantes leur emboîtent le pas comme les Ghomaras, les Tsoul, les Meknassas, qui règnent en maître dans la région de la trouée de Taza, les Zouagha et bien d'autres[2].

Le Kitāb al-Istibṣār d'époque almohade est le premier document à évoquer nommément la tribu des Ghiata, qui semblent s'être détachés du groupe des zénètes Matghara et peut-être Miknassa. Ibn Khaldoun indique que les Ghiata étaient de confession juive avant leur conversion à l’Islam[3], population juive que l'on retrouve bien représentée dans les statistiques d'époque coloniale[4]. Ibn Khaldoun rapporte : « Une partie des Berbères professait le judaïsme, Parmi les Berbères juifs, on distinguait les Djeraoua, tribu qui habitait l'Aures et à laquelle appartenait la Kahena, femme qui fut tuée par les Arabes à l'époque des premières invasions. Les autres tribus juives étaient les Nefouça, Berbères de l'Ifrikïa, les Fendelaoua, les Medîouna, les Behloula, les Ghiata et les Fazaz, Berbères du Maghreb-el-acsa [5] ».

Le sultan Hassan Ier, à l'occasion d'une expédition punitive dans la région d'Oujda, réclama des Ghiata qu'ils ravitaillent la suite du sultan. Refusant de s'aquitter des vivres réclamés, Hassan Ier décida de châtier les Ghiata. Le , il lance ses troupes contre la fraction Ghiata des Ahel Chekka mais subit un grave échec. Ses troupes furent embusquées dans un terrain difficile, le sultan a failli y perdre ses femmes, il y perdit par contre ses bagages et la plus grande partie de son équipement[6]. Cet événement est évoqué par l'explorateur français Charles de Foucauld, qui séjourne à Taza en 1883.

"Il y a environ sept ans, Moulei el Hassan voulut la soumettre; il marcha contre elle à la tête d'une armée: ses troupes furent mises en déroute; lui-même eut son cheval tué dans la mêlée; il s'enfuit à pied et non sans peine du champ de bataille."

Il raconte notamment l'occupation de la ville par les Ghiata qui font régner "la terreur" sur la population[7]. Il évoque leur indépendance farouche qui selon lui est devenue proverbiale "ils n'ont ni Dieu ni sultan; ils ne connaissent que la poudre". À la fin du XIXe siècle l'homme le plus influent de la tribu est Bel Khadîr, qui habite dans le village de Neguert selon Foucauld.

À la fin du XIXe siècle, les Ghiata étaient répartis en deux groupes, l’un gardait l’ancien nom de Matghara et comptait cinq fractions, le second, celui des Ahel Tahar ou Ghiata de l’est, était constitué de sept fractions. Les Ghiata avaient toujours considéré Taza comme leur appartenant ; les fractions de l’est avaient même pour habitude de réunir leur conseil en pleine ville[4].

En , les Ghiata apportèrent leur soutien à Jilali ben Driss Al Yousfi Az-Zerhouni, plus connu sous le nom de Rogui Bou Hamara ou Bouhmara (l'Homme à l'ânesse) proclamé sultan à Taza, l'amenant à une grande victoire sur l'expédition du sultan formée par 15 000 hommes le [8].

Le territoire des Ghiata fut peu à peu occupé par l'armée française. Dès , le col de Touaher est pris puis abandonné avant d'être occupé de nouveau en . Le colonel Aubert (devenu général par la suite) mène une compagne contre les Ghiata de septembre à qui se solde par la soumission de plusieurs fraction Ghiata et le contrôle du couloir de Taza par les français[9]. Les Ghiata furent entièrement soumis en dans le cadre d'une campagne visant à contrôle ce que l'armée coloniale appelait la "tâche de Taza"[10].

Le territoire des Ghiata s'étend au sud de la route N 6 reliant Fès et Oujda. Il a pour limite la commune de Bouhlou à l'ouest et celle de Msoun à l'est, en passant par Taza. Le pays ghiata contrôle ainsi la vallée de l'oued Inaouen, ou ce que les géographes nomment la trouée de Taza. Au nord, leur territoire ne s'éloigne guère au-delà de 2 à 10 km de l'oued Inaouen. Au sud de la vallée, les Ghiata occupent le massif de Tazekka. Leur territoire est cerné à l'ouest, au sud et à l'est par celui de leurs puissants voisins, les Aït Ouaraïn.

Du point de vue géographique, le pays ghiata est très diversifié. On y trouve les vallées verdoyantes de l'oued Inaouen, l'oued Dfali, l'oued El haddar. Dans le même temps, on y rencontre des paysages dénudés au niveau de la plaine de Fahama (à l'est de la ville de Taza). Il étend ses ramifications dans le pays prérifain et occupe l'essentiel du massif de la Tazekka.

Actuellement, la tribu est composée des fractions suivantes :

Groupe des Matghara (5 fractions) :

  • Les Ahl Boudriss[11].
  • Les Beni Bouyahmed[11].
  • Les Beni Msir, ou Beni Mtir[11], autour de la commune du même nom.
  • Les Oulad Hajjaj[11].
  • Les Oulad Ayach[11].

Groupe des Ahel Tahar (7 fractions) :

  • Les Ahel Doula[11], occupant les montagnes de Tazekka autour des villages de Bab Boudir et Ras el Ma, au sud de la ville de Taza.
  • Les Ahel Oued[11], occupant la vallée de l'oued Inaouen sur une quinzaine de kilomètres de la sortie ouest de Taza jusque au-delà du col de Touaher.
  • Les Ahel Tahar[11], concentrés autour de la ville de Oued Amlil.
  • Bechchiyyin, au sud-est de Taza, autrefois appelés Gueldamane[11].
  • Beni Bouquitoun[11], occupant le territoire autour de la ville de Taza, dans les environs des villages de Sidi Hamou Mftah, Choqqa, Jaâouna, Kardoussa et Asdor.
  • Les Beni Oujjan[11], occupant l'arrière pays sud de Bab Marzouka, formant un groupe distinct, important numériquement.
  • Les Mterkat[11], occupant l'est de la ville de Taza, parfois rattachés aux Beni Oujjan.

Selon la description de l'explorateur Charles de Foucauld en 1883, les Ghiata ont pour usage de fumer le kif, c'est-à-dire le hachich, mais surtout de priser le tabac, ce qui est très rare au Maroc selon lui: "je ne l'ai vu aux gens de la campagne que chez les Ghiata, chez les Oulad el Hadj et à Missour."

Il décrit également leur façon de se vêtir et de se coiffer: "tous ont la tête nue, avec un mince cordon de poil de chameau ou de coton blanc lié autour. Ils ne marchent jamais qu'armés, et ont un sabre et un fusil.[...] Les femmes ne se voilent point.[...] de taille élevée, portant leur jupe retroussée au-dessus du genou."[12]

À partir du récit de Foucauld dans Reconnaissance au Maroc, il semble les Ghiata aient une pratique religieuse très légère à la fin du XIXe siècle: "Les Ghiata sont fort peu dévots: "ils n'ont ni Dieu ni sultan [...]"

Occupant un territoire dominant la trouée de Taza, voie de communication de tout temps essentielle entre le Maghreb al-Aqsa, c'est-à-dire le Maroc, et le Maghreb al-Awsat, l'Algérie, les Ghiata ont depuis longtemps adopté l'usage de la langue arabe. Seule la fraction des Bechchiyyin, aussi appelé Bichiouine, isolée dans le Moyen Atlas oriental, est encore berbérophone[4].

Notes et références

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  1. ʻAbd al-Laṭīf Aknūsh et Abdelatif Agnouche, Histoire politique du Maroc : pouvoir, légitimités, et institutions, , 367 p. (lire en ligne).
  2. International Union of Prehistoric and Protohistoric Sciences, International Union of Anthropological and Ethnological Sciences et Laboratoire d'anthropologie et de préhistoire des pays de la Méditerranée occidentale (France), Encyclopédie berbère, , 151 p. (ISBN 978-2-85744-201-1, lire en ligne).
  3. Ibn Khaldoun, Histoire des Berbères et des dynasties musulmanes de l'Afrique septentrionale, traduction de William McGuckin de Slane, éd. Paul Geuthner, Paris, 1978, tome 1, p. 208-209
  4. a b et c Agabi, C., « Ghiata », Encyclopédie berbère, no 20,‎ (ISSN 1015-7344, lire en ligne, consulté le )
  5. Ibn Khaldoun, Histoire des Berbères et des dynasties musulmanes de l'Afrique septentrionale, traduction de William McGuckin de Slane, éd. Paul Geuthner, Paris, 1978, tome 1, p. 208-209
  6. Le Maroc moderne (p. 197-198-199)/ par Jules Erckmann, | Éditeur : Challamel aîné (Paris) Date d'édition : 1885
  7. Charles de Foucauld, Reconnaissance au Maroc, , 495 p., p. 32
  8. Mohamed El Moubaraki, Marocains du Nord : entre la mémoire et le projet, , 253 p. (ISBN 978-2-7384-0050-5, lire en ligne), p. 68.
  9. La cluse de l'Innaouen, d'après le commandant H. Poirmeur
  10. La Guerre du Riff (p. 16-17-18)/ Victor Barrucand (1864-1934) | Laroche et Dawant (Paris) Date d'édition : 1927
  11. a b c d e f g h i j k et l Maroc. Secrétariat Général (Service de l'administration générale, du travail et des questions sociales), Répertoire alphabétique des confédérations de tribus, des fractions de tribus et des agglomérations de la zone française de l'Empire chérifien au 1er novembre 1939, Casablanca, Imprimeries réunies de la Vigie marocaine et du Petit marocain, , 1017 p. (lire en ligne), p. 15
  12. Charles de Foucauld, Reconnaissance au Maroc, , 494 p., p. 34

Bibliographie

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  • C. Agabi, « Ghiata », dans Encyclopédie berbère, vol. 20, Edisud, (lire en ligne), p. 3107-3109

Articles connexes

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