Entreprenant (1751)

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Entreprenant
illustration de Entreprenant (1751)
Modèle de 74 canons du même type que l’Entreprenant présenté par Nicolas Ozanne.

Type Vaisseau de ligne
Histoire
A servi dans Pavillon de la marine royale française Marine royale française
Quille posée [1]
Lancement [2]
Statut Détruit en 1758
Équipage
Équipage 740 à 750 hommes[3]
Caractéristiques techniques
Longueur 53,59 m[2]
Maître-bau 13,99 m
Tirant d'eau 6,60 m
Déplacement 1 500 t
Propulsion Voile
Caractéristiques militaires
Armement 74 canons

L’Entreprenant était un vaisseau à deux ponts portant 74 canons, construit par Jacques-Luc Coulomb à Brest en 1749-50, et lancé en 1751. Il fut mis en chantier pendant la vague de construction qui sépare la fin de guerre de Succession d'Autriche (1748) du début de la guerre de Sept Ans (1755)[4]. Il participa aux premiers engagements de la guerre de Sept Ans et fut détruit en 1758 au siège de Louisbourg.

Caractéristiques générales[modifier | modifier le code]

L’Entreprenant était un vaisseau de force de 74 canons lancé selon les normes définies dans les années 1740 par les constructeurs français pour obtenir un bon rapport coût/manœuvrabilité/armement afin de pouvoir tenir tête à la marine anglaise qui disposait de beaucoup plus de vaisseaux depuis la fin des guerres de Louis XIV[5]. Sans être standardisé, l’Entreprenant, partageait les caractéristiques communes de tous les « 74 canons » construits à des dizaines d’exemplaires jusqu’au début du XIXe siècle et qui répondait à la volonté des responsables navals d’exploiter au mieux cette excellente catégorie de navire de guerre[6].

Comme pour tous les vaisseaux de guerre de l’époque, sa coque était en chêne. Son gréement, (mâts et vergues) en pin[7]. Il y avait aussi de l’orme, du tilleul, du peuplier et du noyer pour les affûts des canons, les sculptures des gaillards et les menuiseries intérieures[7]. Les cordages (80 tonnes) et les voiles (à peu près 2 500 m2) étaient en chanvre[7]. Un deuxième jeu de voiles de secours était stocké en soute. Prévu pour pouvoir opérer pendant des semaines très loin de ses bases européennes s’il le fallait, ses capacités de transport étaient considérables[6]. Il emportait pour trois mois de consommation d’eau, complétée par six mois de vin[8]. S’y ajoutait pour cinq à six mois de vivres, soit plusieurs dizaines de tonnes de biscuits, farine, légumes secs et frais, viande et poisson salé, fromage, huile, vinaigre, sel, sans compter du bétail sur pied qui était abattu au fur et à mesure de la campagne[9].

Il disposait sur son pont inférieur de 28 canons de 36 livres (les plus gros calibres en service dans la flotte à cette époque) et de 30 canons de 18 livres sur son pont supérieur. En outre, 16 canons de 8 livres étaient répartis sur les gaillards. Cette artillerie en fer pesait 215 tonnes[7]. Pour l’approvisionner au combat, le vaisseau embarquait près de 6 000 boulets pesants au total 67 tonnes[10]. S’y ajoutait des boulets ramés, chaînés et beaucoup de mitraille (8 tonnes)[7]. Il y avait pour finir 20 tonnes de poudre noire, stockée sous forme de gargousses ou en vrac dans les profondeurs du vaisseau[11]. En moyenne, chaque canon disposait de 50 à 60 boulets[12].

L'engagement et la perte du navire pendant la guerre de Sept Ans[modifier | modifier le code]

Le siège de Louisbourg en 1758, qui causa la perte de l’Entreprenant.

En 1755, l’Entreprenant était armé sous les ordres du chef d'escadre Dubois de La Motte[13]. Il servit de navire-amiral à une escadre de 18 voiles (3 vaisseaux de ligne, 11 flûtes, 4 frégates) chargée de convoyer d'importants renforts pour le Canada. Au retour, pour éviter les croisières anglaises qui avaient réussi à capturer deux bâtiments à l'aller, Dubois de la Motte fit passer audacieusement l’Entreprenant et toute l'escadre par le détroit de Belle-Isle, au nord de Terre-Neuve, route qu'aucun vaisseau n'avait emprunté avant lui[14].

En 1757, l’Entreprenant fut commandé par Froger de l'Éguille. En 1758, le bâtiment passa sous les ordres de Beaussier de l'Isle. Il servit de navire amiral à une division de cinq navires (quatre vaisseaux, une frégate), chargée d’aller défendre Louisbourg[15]. Sur place, il y retrouva le Prudent, vaisseau du marquis Des Gouttes. Cette petite force de cinq vaisseaux (deux de 74 canons et trois de 64 canons) ne put rien tenter lorsqu’arriva le l’escadre de Boscawen formée de vingt vaisseaux, dix-huit frégates et cent navires de transport avec 12 000 hommes de troupes[15]. Lorsque les Anglais débarquèrent et mirent le siège devant la place, les navires, qui n'avaient pas reçu l'autorisation de quitter les lieux quand c'était encore possible, se retrouvèrent pris au piège. Le siège se resserrant de plus en plus, les vaisseaux français finirent pas se retrouver à portée de tir des canons adverses.

Le , sur la fin de la journée, une bombe tomba sur le Célèbre et perça la soute aux poudres[16]. L’explosion qui s'ensuivit fit voler en éclats ses œuvres mortes et jeta une grande quantité de débris enflammés sur l’Entreprenant et le Capricieux mouillés tout près[16]. En un instant, les cordages et les voiles de ces navires s’embrasèrent. La plus grande partie des équipages ayant été mis à terre pour participer à la défense de la place, il fut impossible de maîtriser l’incendie, d’autant que les Anglais, voyant la scène, se mirent à tirer à boulets rouges sur les trois bâtiments pour précipiter leur perte[16].

C’est à grand peine que les marins purent sauver les deux vaisseaux encore intacts, le Prudent et le Bienfaisant car les canons chargés des navires en feu tiraient en tous sens au fur et à mesure que le feu les atteignait[16]. Le vent d’est fit dériver les carcasses jusqu’au barachois (lagune), où elles brulaient encore au lever du soleil sous le regard des habitants et des défenseurs qui avaient suivi le drame depuis les remparts[16].

L'Entreprenant est l'un des trente-sept vaisseaux de ligne perdus par la France pendant la guerre de Sept Ans[17].

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Dans Vaisseaux de ligne français de 1682 à 1780, « 2. du deuxième rang », Ronald Deschênes donne 1749-50 comme année de construction.
  2. a et b Article French Third Rate ship of the line L'Entreprenant (1751) sur le site anglophone Three Decks - Warships in the Age of Sail
  3. Le ratio habituel, sur tous les types de vaisseau de guerre au XVIIIe siècle est d'en moyenne 10 hommes par canon, quelle que soit la fonction de chacun à bord. C'est ainsi qu'un 100 canons emporte 1 000 hommes d'équipage, un 80 canons 800 hommes, un 74 canons 740, un 64 canons 640, etc. L'état-major est en sus. Cet effectif réglementaire peut cependant varier considérablement en cas d'épidémie, de perte au combat ou de manque de matelots à l'embarquement. Acerra et Zysberg 1997, p. 220.
  4. Villiers 2015, p. 126.
  5. Meyer et Acerra 1994, p. 90-91.
  6. a et b Jacques Gay dans Vergé-Franceschi 2002, p. 1486-1487 et Jean Meyer dans Vergé-Franceschi 2002, p. 1031-1034.
  7. a b c d et e Acerra et Zysberg 1997, p. 107 à 119.
  8. 210 000 litres d’eau douce. 101 000 litres de vin rouge, à raison d’un litre par jour et par homme. Le vin complète largement l’eau qui est croupie dans les barriques au bout de quelques semaines. Jacques Gay dans Vergé-Franceschi 2002, p. 1486-1487
  9. Des moutons (six par mois pour 100 hommes), volailles (une poule par mois pour sept hommes, avec aussi des dindes, des pigeons, des canards), Jacques Gay dans Vergé-Franceschi 2002, p. 1486-1487.
  10. Dans le détail : 2 240 projectiles de 36 livres-poids, 2 400 de 18 livres et 1 280 de 8 livres. Acerra et Zysberg 1997, p. 216.
  11. En moyenne : un quart de la poudre est mise en gargousse à l’avance pour les besoins de la batterie basse, celle des plus gros canons au calibre de 36 livres, et un tiers pour les pièces du second pont et des gaillards. Acerra et Zysberg 1997, p. 216
  12. Acerra et Zysberg 1997, p. 48
  13. Troude 1867-1868, p. 326.
  14. Taillemite 2002, p. 152.
  15. a et b Lacour-Gayet 1910, p. 386-385 et 532.
  16. a b c d et e Casgrain 1891, p. 490-500.
  17. Dans le détail : 18 vaisseaux pris par l'ennemi ; 19 vaisseaux brûlés ou perdus par naufrage. Vergé-Franceschi 2002, p. 1327.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Sources et bibliographie[modifier | modifier le code]

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Liens internes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]