Eliduc

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Eliduc
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Date de création
XIIe siècleVoir et modifier les données sur Wikidata
Types
Enluminure représentant Marie de France, Paris, BnF, Bibliothèque de l'Arsenal, Ms. 3142, fo 256.

Eliduc est un lai breton écrit par Marie de France dans le cours du XIIe siècle. C'est le douzième et dernier du recueil des Lais de Marie de France. Composé de 1 184 octosyllabes, c'est le plus long du recueil. La poétesse donne, au vers 22, les noms Guildeluec et Guilladon comme titres alternatifs du lai, en référence aux deux personnages féminins.

Résumé[modifier | modifier le code]

Eliduc est un valeureux et brave chevalier breton, marié à une très belle jeune fille nommée Guildeluec. Il a pour seigneur le roi de Petite Bretagne. À cause de calomnies, le roi perd son affection pour Eliduc, qui décide de partir au royaume de Logres pour louer ses services, en laissant sa femme sur ses terres, après lui avoir donné des vœux de fidélité. Le chevalier se met au service d'un homme puissant près d'Exeter, et lui permet par sa bravoure de remporter la guerre contre son voisin. La fille du roi, Guilliadon, tombe amoureuse d'Eliduc, qui tombe amoureux en retour. Guilliadon envoie le lendemain à Eliduc un anneau et une ceinture, qu'il accepte de porter. Eliduc vit un dilemme moral entre son serment de fidélité à sa femme et son amour pour la jeune fille. Il s'engage tout de même avec la jeune fille. Pendant ce temps, le roi de Petite Bretagne cherche à le faire revenir, car il a subi de nombreux dommages depuis le départ de son fidèle serviteur. Eliduc décide donc de retourner aider son seigneur, en affirmant à l'homme d'Exeter qu'il reviendra l'aider par la suite. Guilliadon fixe un rendez-vous au terme duquel Eliduc doit revenir. Ce dernier conclut rapidement la paix avec les ennemis de son seigneur, et retourne près d'Exeter avant le terme promis, non sans que sa femme se soit interrogée sur son attitude. Ayant retraversé la mer, Eliduc enlève Guilliadon, et ils repartent secrètement pour la Petite Bretagne. Sur le bateau éclate une violente tempête. Un matelot accuse Eliduc d'avoir provoqué la colère de Dieu en ayant deux femmes ; c'est ainsi que Guilliadon apprend que son amant est déjà marié ; elle tombe évanouie et semble morte. Eliduc, affligé, décide de l'enterrer dans une chapelle où habite un ermite de sa connaissance. Arrivés à la chapelle, il s'avère que l'ermite est mort depuis huit jours. Il couche son amie devant l'autel. Revenu chez lui, il est las et tourmenté, ce qui afflige sa femme. Chaque jour, il retourne voir le corps de Guilliadon à la chapelle ; celui-ci reste inanimé, mais son teint demeure vermeil. Sa femme le fait épier et va à la chapelle. Elle comprend l'histoire et déplore la mort de la jeune fille. Alors passe une belette, que le valet tue d'un bâton. Aussitôt, une autre belette surgit, se désole de la mort de sa compagne et s'en va cueillir une fleur qui, placée dans la bouche de la morte, lui redonne vie. Guildeluec récupère cette fleur vermeille et la place dans la bouche de Guilliadon. La jeune fille se réveille. Les deux femmes se racontent leurs histoires et relations respectives avec Eliduc. Guideluec décide d'entrer en religion, pour laisser Eliduc et Guilliadon vivre leur amour ; elle fonde un monastère près de l'ermitage où était endormie Guilliadon.

Analyse[modifier | modifier le code]

Ce lai est le dernier et le plus long du recueil de lais de Marie de France.

Le lai a pour titre alternatif Guidelüec ha Guilliadon. La conjonction ha est bretonne et non française, ce qui montre que la poétesse a connu un texte qui portait ce titre et illustre, selon Brugger, « les relations étroites des lais bretons avec leurs sources bretonnes »[1],[2]. Le nom d'Eliduc provient également de la tradition bretonne, puisqu'il figure aussi dans le roman médiéval Ille et Galeron de Gautier d'Arras[3].

De nombreux récits médiévaux explorent le thème narratif du « mari aux deux femmes »[4]. L'épisode de l'orage en bateau, dans lequel un matelot fait part de la croyance qu'un péché entraîne la tempête, est un motif traditionnel dans les récits de mer, que ce soit dans l'histoire biblique de Jonas, chez les auteurs gréco-latins et dans la littérature celtique[5]. Le motif de la belette amenant la plante guérisseuse est également connu en Grèce ancienne et dans plusieurs textes du Moyen-âge[6].

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Éditions
  • Lais de Marie de France, transposés en français moderne par Paul Truffau, Paris, L'Edition de l'Art,
  • Lais de Marie de France, Paris, Honoré Champion, édition de Jean Rychner, .
  • Lais, Paris, Garnier Flammarion, édition de Laurence Harf-Lancner, .
  • Lais, Paris, édition de Philippe Walter, Gallimard, , p. 93-111. Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article.
  • Marie de France, Lais de Marie de France, Paris, édition de Françoise Morvan, Actes Sud, coll. Babel,
  • Lais, Paris, édition de Nathalie Koble et Mireille Séguy, Champion Classiques, , p. 241-265.
  • Philippe Walter (dir. et édition critique) (édition bilingue), Lais du Moyen Âge, Paris, Gallimard, coll. « Pléiade », , p. 242-299.
Ouvrages
  • Emil Schiött, L'Amour et les amoureux dans les lais de Marie de France, Lund, Thèse, .
  • Edgard Sienaard, Les lais de Marie de France : du conte merveilleux à la nouvelle psychologique, Genève, Champion, .
  • P. Menard, Les lais de Marie de France, contes d’amours et d’aventures du Moyen Âge, Paris, Littératures Modernes, .
  • Laurence Harf-Lancner, Les fées au Moyen Âge, Paris, Champion,
  • G. S. Burgess, The Lais of Marie de France. Text and context, Manchester,
  • Bernard Sergent, L'origine celtique des Lais de Marie de France, Genève, Droz, . Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article[7].
Articles
  • Joseph Bédier, « Les Lais de Marie de France », Revue des Deux Mondes, no 107,‎ .
  • Lucien Foulet, « Marie de France et les lais Bretons », ZRPh, no 29,‎ 1905. p. 19-56 et 293-322.
  • Ernest Hoepffner, « La tradition manuscrite des lais de Marie de France », Neophilologus, no 12,‎ .
  • Leo Spitzer, « Marie de France Dichterin von Problemmärchen », Zeitschrift für romanische Philologie, no 50,‎ .
  • Ernest Hoepffner, « La géographie et l'histoire dans les Lais de Marie de France », Romania, no 56,‎ , p. 1-32. Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article (Lien web).
  • Ernest Hoepffner, « Pour la chronologie des Lais de Marie de France », Romania, no 59,‎ , p. 351-370.
  • H. Ferguson, « Folklore in the Lais of Marie de France », Romanic Review, no 57,‎ .
  • R.N.Illingworth, « La chronologie des lais de Marie de France », Romania, no 87,‎ .
  • Jean Frappier, « Une Édition nouvelle des Lais de Marie de France », Romance Philology, no XXII,‎
  • J. Flori, « Seigneurie, noblesse et chevalerie dans les lais de Marie de France », Romania, no 108,‎ .
  • D. M. Faust, « Women Narrators in the Lais of Marie de France », Women in French Litterature, Saragora,‎ .

Références[modifier | modifier le code]

  1. Cité par Sergent 2014, p. 316
  2. Walter 1990, p. 478
  3. Sergent 2014, p. 316
  4. Thème nommé ainsi par Gaston Paris, « La légende du mari aux deux femmes », La Poésie au Moyen-âge, Paris, 1895, p.105-130
  5. Sergent 2014, p. 326
  6. Sergent 2014, p. 327
  7. White-Le Goff, Myriam, « Bernard Sergent, L’origine celtique des Lais de Marie de France », Cahiers de recherches médiévales et humanistes. Journal of medieval and humanistic studies,‎ (ISSN 2115-6360, lire en ligne, consulté le ).

Voir aussi[modifier | modifier le code]

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Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]