Charles Guillet

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Charles Guillet
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Charles [Karel, Carolus] Guillet, né à Bruges (Flandres) dans le dernier quart du XVIe siècle, inhumé le 1er mai 1654 à Bruges, est un théoricien de la musique et compositeur belge.

Biographie[modifier | modifier le code]

C'est un notable de la ville de Bruges où il occupa diverses fonctions publiques[1] : il est conseiller municipal durant l’exercice 1616-1617, chef de quartier dans celui de 1618-1619, échevin dans les exercices 1620-1621 et 1621-1622.

Il est élu en 1615 membre de la Confrérie du Saint-Sang de Bruges[2]. À une époque non précisée, il est marguillier de l’église collégiale et paroissiale Notre-Dame de Bruges[3].

Il est inhumé à Bruges le , dans la chapelle de la Sainte-Trinité, d’après les registres de l’église Saint-Donat (État civil de Bruges). Ses héritiers ont refusé de se charger de ses obsèques.

Œuvres[modifier | modifier le code]

Controverse[modifier | modifier le code]

  • Verschilling des Geloofs. Ouvrage oublié par Guillet en 1650, apparemment perdu, cité par Piscaër 1938 d’après Ledoulx.

Théorie musicale[modifier | modifier le code]

  • Institution harmonique divisée en trois livres. Le premier contient la théorie musicale ; le second contient la pratique d'icelle ; et le troisième, les controverses qui se trouvent en la musique, par le sieur Guillet, ancien eschevin de la ville de Bruges. Manuscrit in-folio, [20]-474-[4] p., terminé en 1647. Wien ÖNB : Mus.Hs.2376 Mus. On ignore comment ce manuscrit s’est retrouvé dans les collections des Jésuites de Neustadt en Autriche dès 1668, quatorze ans seulement après la mort de l’auteur.
Une description est donnée dans Schmid 1845, qui contient la liste des 131 propositions du 1er livre. Ce traité, dont seul le premier livre est connu, est dédié en 1647 à l’archiduc Léopold-Guillaume de Habsbourg, gouverneur des Pays-Bas. Guillet y regrette que la musique soit mal enseignée et justifie ainsi d’avoir alourdi son traité avec de nombreuses traductions et la citation de nombreuses sources. L’ouvrage porte l’ambition d’exhaustivité typique de cette époque, qui se voit aussi dans l’Harmonie universelle de Marin Mersenne, la Musique universelle d'Antoine de Cousu ou la Musique rétablie de René Ouvrard... Les théoriciens Gioseffo Zarlino et Francisco de Salinas y sont souvent cités.
Une étude moderne de ce manuscrit fait l’objet de Grimaldi 2013.

Musique[modifier | modifier le code]

Titre des Fantaisies de Charles Guillet, 1610.
  • Vingt-quatre fantaisies à quatre parties, disposées selon l'ordre des douze modes. Paris : Pierre I Ballard, 1610. 4 parties séparées in-4°. Guillo 2003 n° 1610-D, RISM G 5099.
Dédicace à Mre Charles de Fonsecque, Chevalier de l'Ordre du Roi, Conseiller en ses conseils d'État et Privé, Capitaine de cinquante hommes d'armes des ordonnances de sa Majesté, Seigneur & Baron de Surgères, &c.[4].
Édition moderne par Jean Bonfils, Schola Cantorum, 1961-62 (coll. L’Organiste liturgique, n° 33, 37, 49-50) ; réédité chez Kalmus.
Édition moderne : 24 Fantaisies, éditions Chanvrelin, 2005, 58 p.
Édition moderne en ligne chez Vista Mare Musica.
Édition moderne par Maurizio M. Gavioli sur IMSLP.
Ces fantaisies sont composées de vingt-quatre ricercars à quatre parties et monothématiques. Elles sont fortement structurées par l'utilisation systématique de cadences sur les cordes principales de chaque mode : finale, médiante et dominante. L'auteur précise lui-même le rôle didactique de ces œuvres : pour ... apprendre à jouer de l'orgue ... exercer les doigts sur le clavier ... cognoissance des modes... Ce sont probablement son habileté dans les modes et le contrepoint qui valurent à Guillet d’être cité par Eustache Du Caurroy dans la préface de ses Meslanges en 1610.
  • Les Meslanges des œuvres harmoniques à 2, 3, 4 & 8 parties de M. C. Guillet. 4°.
Cette édition perdue est citée dans le catalogue de la bibliothèque de musique de Jean IV du Portugal, 1649 (n° 623 et 624)[5] ; elle est également citée dans le catalogue du libraire Balthasar Bellère à Douai, fascicule de 1620-1621[6]. Il s’agit très probablement d’une édition d’Anvers ou de Douai.

Guillet et les modes[modifier | modifier le code]

Dans ses fantaisies, Guillet suit l'ordonnance des modes courant en France au début du XVIIe siècle : deux séries de douze fantaisies selon les douze modes (six authentes et six plagaux), la première par nature (d'ut à la) et la seconde transposée par bémol (de fa à ré). En revanche la dénomination des modes est chez lui beaucoup plus curieuse : si les fantaisies suivent la théorie de Zarlino (d'ut à la), leur classification est celle de Glaréan, entraînant une conjonction inédite que Guillet est le seul à utiliser :

  • finale sur ut : Dorien
  • finale sur ré : Phrygien
  • finale sur mi : Lydien
  • finale sur fa : Mixolydien
  • finale sur sol : Ionien
  • finale sur la : Eolien.

Pour chaque fantaisie, l'auteur précise l'espèce de son diapason (voir Salomon de Caus ou Antoine de Cousu) et la place de son mode dans la classification. Exemples :

  • Premiere Fantasie / Mode dorien, authentique / contenu dans la première espèce de Diapason divisé Harmoniquement : Premier des modernes, Unziesme des anciens
  • Seconde Fantasie / Mode sous-dorien, plagal / contenu dans la cinquiesme espèce de Diapason divisé Arithmetiquement : Second des modernes, Douziesme des anciens.

Il est difficile de déterminer l'origine de ce système, car il semble que Guillet se base directement sur les écrits de Zarlino, Glarean et Salinas. De nombreux compositeurs abandonnent à cette époque les noms grecs des modes, se limitant à la place des finales dans la numérotation de Zarlino (Dodécacorde de Claude Le Jeune, Institutions Harmoniques de Salomon de Caus, Exemples des douze modes de Charles Racquet, etc.).

Dans son Institution harmonique de 1647, Guillet rejette aussi la dénomination classique des 12 modes et lui préfère les six modes naturels. En cela, il suit le mouvement observé au début du XVIIe siècle, où cette préoccupation théorique est de plus en plus caduque face à l'abandon progressif de la différenciation authente/plagal et l'émergence de deux pôles principaux : le majeur et le mineur.

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Sauf mention contraire, les renseignements sur sa vie à Bruges sont repris de Piscaër 1938. Piscaër cite dans sa préface d’autres Brugeois nommés Guillet ou Gillet dans les années 1606-1613.
  2. Gailliard 1846 p. 280.
  3. Beaucourt 1773 p. 163.
  4. Cette dédicace de même que l’origine parisienne de l’édition des fantaisies (alors qu’il aurait suffi de s’adresser à un éditeur anversois) pose évidemment la question des liens de Guillet avec la France, qui ne sont pas éclaircis.
  5. Primeira parte 1649, n° 623.
  6. Vanhulst 1999 n° 273 et 355.

Références[modifier | modifier le code]

  • Robert de Beaucourt de Noortvelde, Description historique de l’église collégiale et paroissiale de Notre Dame à Bruges... - Bruges : J. de Busscher, 1773, sur Google Books.
  • J. Gailliard, Recherches historiques sur la chapelle du Saint-Sang à Bruges... Bruges : J. Gailliard, 1846, sur Google Livres.
  • Amarine Grimaldi, L’Institution harmonique (c. 1640-1647) de Charles Guillet. Thèse de musicologie, université François-Rabelais de Tours, 2013.
  • Laurent Guillo. Pierre I Ballard et Robert III Ballard, imprimeurs du roy pour la musique (1599-1673). Sprimont et Versailles : 2003. 2 vol.
  • Primeira parte do index da livraria de musica do muyto alto, e podereso Rey Dom Joào o IV... - Lisbonne, Paulo Crasbeeck, 1649 .
  • Pieter Ledoulx (nl), Levens der geleerde en vermaerde mannen der stad van Brugge. Manuscrit conservé à Bruges, archives municipales, cité dans Piscaër 1938 p. XXIV.
  • Anny Piscaër, Introduction à Charles Guillet, Giovanni (de) Macque, Carolus Luython : werken voor orgel of voor vier speeltuigen, éd. J. Watelet (Anvers : De Ring, 1938). Cette édition contient aussi les fantaisies 1 à 12, éd. J. Watelet.
  • Anton Schmid, « Beiträge zur Literatur und Geschichte der Tonkunst », Cäcilia, ein Zeitschrift für die musikalische Welt 24 (1845), p. 252-256.
  • Herbert Schneider, Die französische Kompositionslehre in der ersten Hälfte des 17. Jahrhunderts. Tutzing, 1972.
  • Henri Vanhulst, « Balthasar Bellère, marchand de musique à Douai (1603-1636) », Revue de musicologie 85/2 (1999), p. 227-263.

Liens internes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]