Alliance nationale pour l'accroissement de la population française

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Affiche de 1926 commandée par l'association, titrée : « Le plus grand des périls qui menacent la France est la diminution de sa natalité ».

L'Alliance nationale pour l'accroissement de la population française est une association nataliste française fondée en 1896 par plusieurs figures de la Troisième République, issus de différents bords politiques. Son objectif est de favoriser la natalité en France, notamment pour rivaliser avec l'Allemagne, qui connaît une forte natalité au début du XXe siècle.

Histoire et activité[modifier | modifier le code]

L'Alliance fut fondée en août 1896 par Jacques Bertillon, chef du bureau de statistiques de la ville de Paris, Émile Javal, ophtalmologiste, Charles Richet, physiologiste, André Honnorat, homme politique, ainsi qu'une centaine de sympathisants. Elle se donnait pour but de redresser la natalité française en alertant l'opinion et en faisant pression sur les acteurs politiques[1], dans un contexte où la dénatalité est considérée comme un "fléau social"[2]. Bien que d'autres associations similaires existaient, elle est considérée comme la plus influente[3],[4],[2], et sa fondation est considérée comme marquant le début du natalisme en France[5]. Contrairement aux autres associations pronatales, elle se concentre sur le plaidoyer, et apporte peu de soutien direct aux familles nombreuses[4]. Très active, elle fait rapidement des adeptes dans les milieux de la bourgeoisie cultivée (professions libérales, carrières juridiques, gens de lettres...) et infiltre ainsi les milieux parlementaires[6]. L'association publie une revue mensuelle, qui sera renommée Revue de l'Alliance Nationale contre la Dépopulation à partir de 1922, afin d'élargir son audience, et imprime également des affiches et des tracts[7].

En 1913, l'alliance est reconnue d'utilité publique par le président Poincaré[8], suite à quoi son nombre d'adhérents augmente fortement, regroupant plus de 25 000 membres en 1939[7].

En 1920, la loi du 31 juillet prohibant toute information relative à la contraception et renforçant les sanctions contre l’avortement[9] concrétise l'action de propagande nataliste de l’alliance[7].

Membres[modifier | modifier le code]

Elle compte parmi ses membres des personnalités de gauche telles qu'Émile Zola et Émile Cheysson, et de droite, comme les économistes Alfred de Foville et Paul Leroy-Beaulieu, et va progressivement se rapprocher des ligues de moralité telles que la Ligue française pour le relèvement de la moralité publique de Paul Bureau[5]. Cette diversité est aussi vue dans les instances directrices de l'association : Jacques Bertillon était laïque et dreyfusard tandis que Fernand Boverat, le secrétaire général de 1913 à 1937[10] et la personnalité la plus importante, est conservateur[5],[7]. Lorsqu'est créée la commission extra-parlementaire sur la dépopulation en 1902, un membre sur cinq fait partie de l'association[6].

Revendications et idéologie[modifier | modifier le code]

L'association appelle à renforcer la natalité pour lutter contre la dépopulation, qui est dépeinte comme un « péril pour la nation », parce que cause de faiblesse économique ainsi que militaire[6], en particulier face à la population allemande, qui connaît 2 millions de naissances annuelles dans la période 1900-1910 contre seulement 800 000 en France[6],[4]. La communication fait ainsi beaucoup appel à des notions de danger, mais souligne également les joies de la famille[7].

Références[modifier | modifier le code]

  1. Virginie De Luca, « Des liaisons avantageuses : l'Alliance nationale pour l'accroissement de la population française et les fonctionnaires (1890-1914) », Annales de démographie historique, vol. 116, no 2,‎ , p. 255 (ISSN 0066-2062 et 1776-2774, DOI 10.3917/adh.116.0255, lire en ligne, consulté le )
  2. a et b Françoise Thébaud, « Chapitre I. La maternité refusée », dans Quand nos grand-mères donnaient la vie : La maternité en France dans l’entre-deux-guerres, Presses universitaires de Lyon, coll. « Hors collection », (ISBN 978-2-7297-1004-0, lire en ligne), p. 11–26
  3. De Luca Barrusse, Virginie (dir.), Associations et familles dans la France des années 1880-1950, Paris, L’Harmattan, coll. « Logiques Sociales »,
  4. a b et c (en) Nikolas Dörr, « "As far as Numbers are concerned, we are beaten": Finis Galliae and the Nexus between Fears of Depopulation, Welfare Reform, and the Military in France during the Third Republic, 1870-1940 », Historical Social Research, vol. 45, no 2,‎ , p. 68–113 (ISSN 0172-6404, DOI 10.12759/hsr.45.2020.2.68-113, lire en ligne, consulté le )
  5. a b et c Hervé Le Bras, « Histoire du natalisme », Encyclopedia Universalis,‎ - (lire en ligne [archive] Accès payant)
  6. a b c et d Alain Becchia, « Les milieux parlementaires et la dépopulation de 1900 à 1914 », Communications, vol. 44, no 1,‎ , p. 201–246 (DOI 10.3406/comm.1986.1660, lire en ligne, consulté le )
  7. a b c d et e Françoise Thébaud, « Le mouvement nataliste dans la France de l'entre-deux-guerres : l'Alliance nationale pour l'accroissement de la population française », Revue d’Histoire Moderne & Contemporaine, vol. 32, no 2,‎ , p. 276–301 (DOI 10.3406/rhmc.1985.1318, lire en ligne, consulté le )
  8. Jean-Pierre Baux, « 1914 : une France démographiquement affaiblie », Population & Avenir, vol. 717, no 2,‎ , p. 14 (ISSN 0223-5706 et 1968-3952, DOI 10.3917/popav.717.0014, lire en ligne, consulté le )
  9. Isabelle Engeli, Les politiques de la reproduction : Les politiques d'avortement et de procréation médicalement assistée en France et en Suisse, Editions L'Harmattan, , p. 87
  10. Susan Gross Solomon, « “Dangerous Play”: Go-Betweens and Borders in Inter-War Public Health », Revue d’études comparatives Est-Ouest, vol. N° 1, no 1,‎ , p. 175–208 (ISSN 0338-0599, DOI 10.3917/receo1.491.0175, lire en ligne, consulté le )

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]