Bibliologie

Un article de Wikipédia, l'encyclopédie libre.
Ceci est une version archivée de cette page, en date du 21 novembre 2021 à 21:54 et modifiée en dernier par Bobt9 (discuter | contributions). Elle peut contenir des erreurs, des inexactitudes ou des contenus vandalisés non présents dans la version actuelle.

Le terme de bibliologie est parfois utilisé pour désigner les études menées sur l'histoire du livre et ses procédés de fabrication, de diffusion et de conservation. L'étude du livre, dans sa partie extérieure, comporte de nombreux aspects économiques, sociologiques, politiques et idéologiques : le livre en tant qu'il est produit (technique, édition, possibilités ou non de diffusion, etc.), en tant qu'œuvre (esthétique de sa reliure par exemple), etc. En outre, la lecture étant la finalité habituelle du livre, il faut ajouter une sociologie et une histoire de la lecture (Bibliothèques publiques et privées, manière de lire, etc.).

Le terme est toutefois rarement utilisé (on préfère parler d'« histoire du livre ») et désigne souvent de manière plus précise l'appréhension du livre dans sa dimension matérielle, liée à la bibliographie matérielle.

Étymologie

Le mot «bibliologie » vient du mot grec biblion « livre » et le suffixe logia « science »[1]. Les recherches des années 1990 montrent que, « dès 1781, l'abbé Rive utilisait le terme de bibliologie et en donnait des explications. »[2] Plus spécifiquement, « [l]a lecture attentive du Dictionnaire raisonné de bibliologie [publié en 1802 par Gabriel Peignot] a permis [...] de remonter à l'abbé [Jean-Joseph] Rive qui apparaît, en France, [...], comme le fondateur du terme bibliologie. »[3]

Histoire

Le livre et l’écrit sont les objets d’études de la bibliologie[4]. L’histoire de la science est donc corollaire de l’écriture et du livre. La bibliologie apparaît tard dans l’histoire, bien après la naissance de l’écriture et même l’arrivée de l’imprimerie en Occident.

C’est au XIXe et au XXe siècle que la bibliologie prendra de l’importance, mais elle restera tout de même assez confidentielle, les scientifiques perdants et regagnant de l’intérêt pour celle-ci selon les périodes. Le Belge Paul Otlet, auteur du Traité de documentation, s’intéressera à la bibliologie dans son ensemble, en passant par son histoire. L’homme répertorie quatre périodes historiques qui mèneront à la création de la bibliologie (production de livres, création des bibliothèques, création de la bibliographie, naissance de la bibliologie). Robert Estival estime quant à lui que seulement trois sont nécessaires et que la création des bibliothèques n’est pas pertinente à l’histoire de la bibliologie[1].

Les XIXe et XXe siècles furent le théâtre de réflexion sur l’objet de la bibliologie, pour finalement voir les techniques bibliographiques et bibliothéconomiques se dissocier de la bibliologie. Les deux disciplines sont proches, et certains théoriciens comme Charles Nodier décrivent la bibliologie comme étant la théorie de la bibliographie[1]. Pour mieux spécifier cette science, Robert Estivals, explique que la bibliologie essaye de « comprendre et expliquer »[5] les documents, alors que la bibliographie aide à les « répertor[ier] et les classe[r] »[5]. La bibliologie sera aussi distinguée de la bibliothéconomie, cette fois par Léopold Auguste Constantin, toujours à la même période.

Au début du XXe siècle, sous l’influence de Otlet[6], mais aussi de plusieurs autres chercheurs, une école internationale de bibliologie se forme et des branches apparaissent, avec par exemple Javal et Binet qui étudient respectivement la physiologie et la psychologie de la lecture. Plusieurs sciences humaines et sociales, comme la linguistique, la psychologie ou la sociologie, se voient étudier sous l’angle bibliologique. Pendant la même période, Ernest Röthlisberger, « s’interroge sur les cycles nationaux et internationaux de la production internationale des livres » [7] et Nicolas Roubakine, « se servant de la psychologie, s’interroge sur les lois de la communication écrite. » [7] Selon Robert Estivals, Paul Otlet, Nicolas Roubakine et Ernest Röthlisberger sont considérés [les] « membres éminents de la première génération internationale de Bibliologie »[8] et les trois « précurseurs des Sciences de l’Information et de la Communication »[7].

La Seconde Guerre mondiale fera tomber dans l’oubli la bibliologie, qui entrera par la suite dans une autre phase de son histoire avec cette fois des comparaisons avec les autres médias. Par la suite, la recherche dans le secteur de l’information, et de la bibliologie, sera développée, ainsi que les formations dans ces mêmes domaines[1]. L’Association internationale de bibliologie (AIB) voit le jour, dans le but de développer la recherche internationale[9].

Les années 1980 seront le témoin d’un changement dans la définition de la bibliologie, qui devient l’étude de l’écriture par rapport aux autres systèmes de signes et les supports écrits. La recherche bibliologique s’internationalise à nouveau et ne s’ancre plus seulement en France. La recherche s’organise, plusieurs colloques sont donnés et partout dans le monde, la bibliologie redevient une science étudiée[1].

Théorie de la bibliologie

Pendant la deuxième moitié du XXe siècle les chercheurs de plusieurs pays essayent de définir cette science afin de l'accepter en tant que discipline scientifique.[1] « Elle a redéfini son objet, grâce à une méthode de délimitation. Elle a été conduite à cerner son domaine par rapport aux techniques et aux arts de l’écrit, notamment par rapport à la bibliographie et à la bibliothéconomie. Elle a élaboré un schéma de recherche qui peut servir comme schéma de classification. Elle a renouvelé sa méthodologie en passant de la méthode de la chaîne à celle de la systémique. Vers les mêmes années, la conception de la bibliométrie a été redéfinie et ses axes d’application réorientés. Elle a enfin dégagé son système d’interprétation générale. »[1]

Les disciplines de la bibliologie

Dès la deuxième moitié du XXe siècle, les spécialistes du domaine ont pu identifier plusieurs disciplines de cette science de la bibliologie : « [a]rchivistique, bibliographie matérielle, bibliothéconomie, biomécanique de l’écriture, cryptographie, diplomatique, documentologie, éditologie, emblématique, épigraphie, génétique de l’écrit, grammatologie, lecturologie, manuscriptologie, papyrologie, psychologie bibliologique, psychologie de la lecture, psychologie de la littérature, psycho-physiologie de la lecture, psycho-sociologie de la lecture, sociologie de la bibliographie, sociologie de la lecture, sociologie de la littérature, sociologie du livre et textologie. » [1] En 2015, Bob Bobutaka Bateko explique dans son livre, Archivistique, bibliothéconomie, documentation et légistique, que la légistique est aussi une discipline de la bibliologie[10].

D'autres sciences s'intéressent aussi au livre

Grands noms de la bibliologie

Robert Estivals (1927-2016)

Auteur, professeur-chercheur, cofondateur de l’AIB, il est un acteur important de la bibliologie actuelle[11]

Paul Otlet (1868-1944)

Auteur du Traité de Documentation est un bibliographe qui s’intéressera aussi à la bibliologie[12].

Gabriel Peignot (1767-1849)

Gabriel Peignot est l’auteur du Dictionnaire raisonné de bibliologie.

Jean-Joseph Rive (1730-1791)

L’abbé Rive est l’un des premiers à définir la bibliologie, avec Gabriel Peignot. Il est aussi appelé l’homme-bibliothèque[13].

Nicolas Roubakine (1862-1946)

Nicolas Roubakine, publiant le livre Introduction à la psychologie bibliologique : la psychologie de la création des livres, de leur distribution et circulation, de leur utilisation par les lecteurs, les écoles, les bibliothèques, les librairies, etc. : théorie et pratique en 1922, « ouvrait la voie de la communicologie, l’une des deux principales sciences, avec l’informatologie, des SIC. »[7] Elena Savova le décrit aussi comme « fondateur de la psychologie bibliologique »[8] .

Ernest Röthlisberger (1858-1926)

Ernest Röthlisberger est connu pour son Rapport sur la statistique internationale des œuvres littéraires, publié en 1892[14]. C'est lui qui « avait ouvert la voie de la bibliométrie »[7]. Ernest Röthlisberger a été, également, le premier rédacteur en chef de la Revue internationale du droit d'auteur (RIDA)[15].

Écrits

Notes et références

  1. a b c d e f g et h Les sciences de l'écrit / sous la dir. de Robert Estivals ; avec la collab. de Jean Meyriat et François Richaudeau..., , 576 p. (ISBN 9782725614281, lire en ligne)
  2. Robert Estivals, « Peignot (Etienne Gabriel, 1767-1849) », Revue de bibliologie: schéma et schématisation,‎ no. 39, 1993, p. 31
  3. Hanane El Yousfi, « Rive (abbé Jean-Joseph, 1730-1790) », Revue de bibliologie: schéma et schématisation,‎ no. 39, 1993, p. 26
  4. Olivier Le Deuff et Franck Cormerais, Fondements épistémologiques et théoriques de la science de l’information-documentation. Actes du Colloque ISKO France 2017 (ISBN 9781784054878), « Robert Estivals, entre bibliométrie et bibliologie, quel apport pour les SIC dans la recomposition des savoirs. », p. 311-321
  5. a et b Robert Estivals, La Bibliologie, PUF, , p.10 (ISBN 213-040-1910)
  6. Robert Estivals, Paul Otlet et la Bibliologie, (présentation en ligne, lire en ligne [PDF])
  7. a b c d et e Robert Estivals et Association Internationale de Bibliologie (AIB), « Paul Otlet : dans l’histoire de la bibliologie », Cahiers de la documentation – Bladen voor documentatie,‎ , p. 69-70 (lire en ligne [PDF])
  8. a et b Robert Estivals et Elena Savova, « Nicolas ROUBAKINE: Introduction a la psychologie biblioloque », Writing Yesterday and Tomorrow,‎ volume 1, number 4 (1998) (lire en ligne)
  9. « AIB : Association Internationale de Bibliologie », sur www.aib.ulb.be (consulté le )
  10. Bob Bobutaka Bateko, Archivistique, bibliothéconomie, documentation et légistique : des disciplines de la bibliologie, 309 p. (ISBN 9782343057392)
  11. « Savoirs CDI: Robert Estivals, chercheur avant-gardiste en SIC », sur www.reseau-canope.fr (consulté le )
  12. « Savoirs CDI: Paul Otlet », sur www.reseau-canope.fr (consulté le )
  13. François Moureau, « L'abbé Rive ou l'homme-bibliothèque : une « physiologie » provençale », Babel. Littératures plurielles, no 6,‎ , p. 105–125 (ISSN 1277-7897, DOI 10.4000/babel.1959, lire en ligne, consulté le )
  14. (en) « Ernst Röthlisberger (1858-1926) », sur data.bnf.fr (consulté le )
  15. (en) Arpad Bogsch and World Intellectual Property Organization, The Berne Convention for the Protection of Literary and Artistic Works, from 1886 to 1986, Geneva, International Bureau of Intellectual Property, , 248 p. (ISBN 9789280501612, lire en ligne [PDF]), p. 56