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Version du 4 juin 2022 à 22:25

L’exposition des mineurs à la pornographie est un phénomène de société qui se caractérise par le fait que des enfants et adolescents visionnent des contenus explicites en principe réservés aux adultes. Il prend de l’ampleur depuis la démocratisation d'Internet et des smartphone. Son influence sur la sexualité et la construction de la personnalité soulève des inquiétudes médicales et éthiques. Des dispositifs juridiques et techniques tentent d'enrayer ces pratiques.

État des lieux

Une série d'études transversales chez des 10-24 ans montre une forte corrélation entre le visionnage de contenus explicites sur les sites Internet ou par sexting et la pratique d'une activité sexuelle, y compris à risque (sans préservatif, avec ingestion de substances ou avec de multiples partenaires)[1].

Une méta-analyse d'études effectuées entre 1995 et 2015 montre une grande disparité dans la prévalence du phénomène. Elle indique que les jeunes consommateurs de pornographie sont en majorité des garçons à un stade avancée de la puberté, en recherche de nouvelles sensations fortes, dans un cadre familial distendu ou dysfonctionnel[2].

Une enquête européenne commanditée par le Conseil supérieur de l’audiovisuel en 2004 montre que 80 % des garçons de 14 à 18 ans et 45 % des filles du même âge ont vu au moins un film X dans l’année écoulée[3].

Perception et comportement sexuels

La consommation régulière de la pornographie semble associée chez les jeunes à des comportements sexuels plus permissifs et à un renforcement des stéréotypes en la matière, sans pour autant que cette relation soit très claire. La pornographie est parfois utilisée dans différentes formes de violence et de harcèlement sexuels[4]. Les consommateurs sont plus fréquemment des auteurs et/ou des victimes d'agression sexuelle que la moyenne[2]. Elle ne va pas dans le sens de l'éducation sexuelle en raison de la faible part laissée à l'imagination, la dissociation de l'émotion et de la sexualité ; ainsi que de l’absence d'un discours de sensibilisation aux risques liés à la sexualité (violence et hygiène)[5].

De manière générale, l'intégration des représentations de la pornographie en matière sexuelle chez les mineurs tend à la banaliser et à la normaliser, voire en faire un modèle. Elle augmente le risque de comportements déviants et augmente les stéréotypes de genre[6], autrement dit une vision sexiste. Plus la consommation d'images pornographiques est précoce, plus elle est une source d'influence, et ce d'autant plus lorsqu'elle est la principale source d'informations des jeunes en matière de sexualité[7]. L'hypersexualisation des petites filles est à mettre en relation avec cette omniprésence du corps érotisé dans l’espace médiatique[3].

Les caractéristiques personnelles ont cependant un rôle important dans l’influence de la pornographie dans les comportements sexuels : un homme aura d'autant plus tendance à reproduire des scènes violentes qu'il manifeste une hostilité envers les femmes par exemple. L'interaction réciproque de l'environnement extérieur et de la construction de la personnalité expliquent cette variabilité[8]

Risques psychologiques et psychopathologiques

La pornographie offre une première figuration de la sexualité aux jeunes ; cependant, en oblitérant la nature du fantasme et des aspects essentiels de la relation interpersonnelle, elle constitue un risque d'addiction pour les plus fragiles, en particulier en l’absence de discussions autour des sensations et des affects liés à ces images[9]

La pornographie véhicule une image de la sexualité et du corps valorisant la performance et un canon esthétique conventionnel. Elle tend à accroître les vulnérabilités des jeunes dans leur construction et leur estime personnelle, à favoriser un rapport obsessionnel à ses capacités et ses caractéristiques physiques et à renforcer une anxiété latente[10].

Lutte et prévention

Dispositifs juridiques et législatifs

Le cadre législatif de l’Union européenne ne dispose pas d'instruments juridiques contraignants en matière de contrôle de l'accès aux mineurs aux contenus qui leur sont préjudiciables, même s'il existe des recommandations et des programmes en ce sens. Les mesures diffèrent donc selon les États membres[11].

Mesures techniques

Le système de vérification de l’âge des visiteurs d'un site web, lorsqu'il repose sur une déclaration sur l'honneur, s'avère inefficace en cas de démarche volontaire de l'internaute. Un contrôle de l’identité se heurte à l’enjeu de la protection des données personnelles, sensibles dans le domaine de la pornographie[12]

Références

  1. (en) Lucy Watchirs Smith, Bette Liu, Louisa Degenhardt, Juliet Richters, George Patton, Handan Wand, Donna Cross, Jane S. Hocking, Rachel Skinner, Spring Cooper, Catharine Lumby, John M. Kaldor et Rebecca Guy, « Is sexual content in new media linked to sexual risk behaviour in young people? A systematic review and meta-analysis », Sexual Health, vol. 13, no 6,‎ , p. 501-515 (DOI 10.1071/SH16037, présentation en ligne).
  2. a et b (en) Peter Jochen et Patti M. Valkenburg, « Adolescents and Pornography: A Review of 20 Years of Research », The Journal of Sex Research, vol. 53, nos 4-5,‎ , p. 509-531 (PMID 27105446, DOI 10.1080/00224499.2016.1143441, lire en ligne, consulté le ).
  3. a et b Israël Nisand, « C’est la pornographie qui éduque nos enfants ? », dans René Frydman & Muriel Flis-Trèves.(éd.), Ruptures, Presses Universitaires de France, (ISBN 978-2-13-060868-4, lire en ligne), p. 61-74.
  4. (en) Gary Raine, Claire Khouja, Rachel Scott, Kath Wright et Amanda J. Sowden, « Pornography use and sexting amongst children and young people: a systematic overview of reviews », Systematic Reviews, vol. 9, no 283,‎ (PMID 33280603, DOI 10.1186/s13643-020-01541-0, lire en ligne, consulté le ).
  5. Divina Frau-Meigs, « Pornographie et désarroi des corps et des sentiments », dans Socialisation des jeunes et éducation aux médias : du bon usage des contenus et comportements à risque, Toulouse, Paris, Erès, Céméa, (ISBN 978-2-7492-1482-5, DOI 10.3917/eres.fraum.2011.01.0095, lire en ligne), p. 95-126.
  6. Geneviève Gagnon, « La pornographie sur Internet et ses conséquences pour les jeunes : comment intervenir ? », Ça s'exprime, no 9,‎ , p. 1-12 (lire en ligne, consulté le ).
  7. Richard Poulin, « La pornographie, les jeunes, l'adocentrisme », Les Cahiers Dynamiques, vol. 1, no 50,‎ , p. 31-39 (DOI 10.3917/lcd.050.0031, lire en ligne, consulté le ).
  8. (en) Neil Malamuth et Mark Huppin, « Pornography and teenagers: the importance of individual differences », Adolescent Medicine Clinics, vol. 16, no 2,‎ , p. 315-326 (PMID 16111620, DOI 10.1016/j.admecli.2005.02.004)
  9. Barbara Smaniotto et Maud Melchiorre, « Quand la construction de la sexualité adolescente se confronte à la violence du voir pornographique », Sexologies, vol. 27, no 4,‎ , p. 177-183 (DOI 10.1016/j.sexol.2017.09.003, lire en ligne, consulté le ).
  10. Tebaldo Vinciguerra, « Pornographie, vulnérabilités et abus sexuels : défis et possibles solutions », Topique, vol. 2, no 152,‎ , p. 39-55 (DOI 0.3917/top.152.0041, lire en ligne, consulté le ).
  11. Valérie Kaiser, « La protection des mineurs sur Internet : la problématique de la pédopornographie et des contenus jugés préjudiciables », (consulté le ).
  12. Florian Reynaud et Damien Leloup, « Pornographie en ligne : pourquoi la vérification de l’âge des internautes est si difficile », Le Monde,‎ (lire en ligne, consulté le ).