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Utilisateur:ICANSTUDIES/Brouillon

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Historique

Si les premières traces d’écrits s’intéressant à l’étude du jeu peuvent être datées depuis la Grèce antique, notamment chez Aristote dans l'Éthique à Nicomaque, ce n’est qu'au xxe siècle que l’appellation « Sciences du jeu » (ou ludologie) est apparue. Jusque-là, l’étude du jeu était ancrée dans la sociologie et l’anthropologie, avec les travaux de Roger Caillois et Johan Huizinga, bien qu'il faille noter son intérêt et son usage dans l'étude des mathématiques ou encore de la philosophie.

En 1938, Johan Huizinga définit le jeu comme « une action ou une activité volontaire, accomplie dans certaines limites fixées de temps et de lieu, suivant une règle librement consentie mais complètement impérieuse, pourvue d’une fin en soi, accompagnée d’un sentiment de tension et de joie, et d’une conscience d’"être autrement” que dans la “vie courante” »[1]. On remarque que parmi les six points composant sa définition, trois d'entre eux concernent l'état du joueur (une activité volontaire, sentiment de tension et de joie, une conscience d’“être autrement” ). Vingt ans plus tard, Roger Caillois ajoutera à cette définition que jouer est une activité "improductive" et dont le résultat est "incertain"[2]. Il parlera également, toujours dans Les Jeux et les Hommes, d'un système de classification des jeux basé sur l'expérience du joueur lors dudit jeu.

Les recherches de Huizinga et de Caillois nourriront celles des chercheurs à venir, que ce soit avec le jeu dans son aspect global, dans des jeux spécifiques comme les échecs ou les jeux de rôle, jusqu'au jeu vidéo .[3]

Dans le game design moderne[modifier | modifier le code]

L'approche Player-Centric en game design[modifier | modifier le code]

L'approche play-centric (de l'anglais "play", jouer, et "centric", centré sur) est un courant théorique contemporain des sciences du jeu.

Il consiste à faire passer les intérêts du joueur en premier lors de la conception d'un jeu, en opposition avec l'approche game-centric qui pense d'abord les systèmes de jeu indépendamment de la perspective du joueur.

L'approche play-centric trouve en partie ses racines dans le travail de Jacques Henriot, bien avant l'apparition même du terme. Henriot décrit dans Le Jeu (1969) le jeu non pas comme objet technique, mais comme l'attitude du joueur lors du jeu. Ainsi, selon lui, le joueur est celui qui fait du jeu un jeu :

« Des enfants surgissent : "Attention, Monsieur, vous marchez dans notre jeu !"

Des cailloux alignés par terre, qu'est-ce-que c'est ? Le passant l'ignore. Le jeu n'est rien d'autre que ce que fait le joueur quand il joue. Une fois qu'il a cessé de jouer, que reste-t-il de son jeu ? Les joueurs envolés, les cailloux retournent à l'état de cailloux. »

— Jacques Henriot, Le Jeu, Paris, PUF, 1969, p 83-84


Un des procédés player-centric les plus populaires[4] explique que le designer, dans les premières étapes de la création, définit son audience et le rôle de celle ci lors du jeu. Il fait également appel à des joueurs test lors des phases finales de la conception, à l'aide de questionnaires et d'interviews.[5]

Ainsi, le studio de développement obtient les retours que les autres modèle de développement aurait obtenu seulement à la sortie du jeu. D'un point de vue game design, obtenir l'avis de joueur extérieur à toute la phase de développement apporte une dimension nouvelle et permet de mettre le doigt sur des problèmes que le studio n'aurait pas vu, afin de prendre du recul par rapport au développement. C'est donc une avance considérable en terme de temps et de moyens développés, et cela permet une meilleur fidélisation de la communauté qui verra ses retours impacter le développement du jeu.

L'approche Player-Centric comme modèle économique appliqué : l'accès anticipé[modifier | modifier le code]

De nos jours 15% des jeux sur Steam utiliseraient le modèle de l'accès anticipé[6]( ou early access en anglais). Ce mode de financement et de développement de jeux vidéo s'appuie sur l'étude du jeu par l'approche play-centric en recueillant régulièrement les avis d'une communauté active de joueurs.

Ce modèle est souvent utilisé par les développeurs et studios indépendants. Ils s'assurent une base de fans autour de leur jeu avant même la sortie de celui-ci tout en informant le public que le jeu est encore inachevé[7]. Au fil des années de nombreux jeux sont issus de ce processus de développement comme Minecraft ou Subnautica, légitimant au yeux de l'industrie le modèle de l'accès anticipé.

« L'accès anticipé est un outil qui vous permet de développer votre jeu avec l'aide de la communauté en lui donnant accès à votre titre avant sa sortie officielle. »

— Accès anticipé - Documentation Steamworks

Ainsi ce modèle permet non seulement des mises à jours plus nombreuses[8] mais aussi plus proche des attentes des joueurs.

« developers update their games more frequently in the early access stage. »

— Dayi Lin, Cor-Paul Bezemer & Ahmed E. Hassan, An empirical study of early access games on the Steam platform

Grâce à cela les joueurs se sentent, à raison, investies dans le développement du jeu qu'ils suivent. Les jeux en accès anticipé recueillent en général des critiques plus positives dans leur phase de pré-lancement.[9]

« From the perspective of player-centric approach, the best practice is to involves players in the early stage of game design explicitly in pre-production stage »

— A. Kerr, "Representing users in the design of digital games", in Proceedings of Computer Games and Digital Cultures Conference, (2002), pp. 277–295.

Sur Steam, de nombreuses règles encadrent les jeux en accès anticipé. Évitant ainsi que les développeurs ne promettent des ajouts irréalistes ou des projets frauduleux.[10]

Limites[modifier | modifier le code]

Malgré la mise en place de méthode d'analyse permettant de référencer les jeux et de les décortiquer, il est néanmoins très compliqué de ne pas faire intervenir une note de subjectivité, car malgré le côté académique de ces référencements, le joueur ne peut réellement se baser que sur son ressenti. De plus, les expériences personnelles de chacun influencent grandement les analyses et les jugements, ce qui permet l'émergence d'une pluralité des analyses. Là où l'approche du game est par définition objective, car elle analyse l'objet en tant que tel et ses règles de jeu, l'approche play entre en conflit en se basant sur l'expérience de jeu, qui est donc propre à chaque joueur et par conséquent subjective. L'analyse n'est donc pas entièrement objective et ne peut s'imposer comme une vérité acquise, sachant qu'elle ne se base pas sur des éléments objectifs dénués de parti pris.

« [...] le play qui se donne comme un acte de la subjectivité, comme un processus de subjectivation, résiste à l'objectivation et pose problème. »

— Mathieu Triclot, Game studies ou études du play ? Une lecture croisée de Jacques Henriot et de Jesper Juul

« Le risque ici est de se retrouver cantonné à une forme de subjectivisme ou à l'introspection comme seule méthode. »

— Mathieu Triclot, Game studies ou études du play ? Une lecture croisée de Jacques Henriot et de Jesper Juul

« Autant il est facile de décrire des propriétés du médium, qu’il s’agisse des spécifications du matériel, des formes graphiques qui s’affichent à l’écran ou des systèmes de règles, autant il est difficile de produire une description objective de "ce que cela fait que de jouer", d’une "forme d’expérience". »

— Matthieu Triclot

Revues scientifiques[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. (nl) Johan Huizinga, Homo Ludens, Paris, Gallimard,
  2. Roger Caillois, Les Jeux et les Hommes, Paris, Gallimard,
  3. Laurent Di Filippo, « Contextualiser les théories du jeu de Johan Huizinga et Roger Caillois », Questions de communication, no 25,‎ , p. 281–308 (ISSN 1633-5961, DOI 10.4000/questionsdecommunication.9044, lire en ligne, consulté le )
  4. « Users as Co-creators: Player-centric Game Design User Experience Magazine », sur uxpamagazine.org (consulté le )
  5. (en) Ernest Adams, Fundamentals of Game Design, Pearson College Div, , 669 p.
  6. (en) Dayi Lin, Cor-Paul Bezemer et Ahmed E. Hassan, « An empirical study of early access games on the Steam platform », Empirical Software Engineering, vol. 23, no 2,‎ , p. 771–799 (ISSN 1573-7616, DOI 10.1007/s10664-017-9531-3, lire en ligne, consulté le )
  7. « Accès anticipé  (Documentation Steamworks) », sur partner.steamgames.com (consulté le )
  8. (en) Dayi Lin, Cor-Paul Bezemer et Ahmed E. Hassan, « An empirical study of early access games on the Steam platform », Empirical Software Engineering, vol. 23, no 2,‎ , p. 771–799 (ISSN 1573-7616, DOI 10.1007/s10664-017-9531-3, lire en ligne, consulté le )
  9. (en) Dayi Lin, Cor-Paul Bezemer et Ahmed E. Hassan, « An empirical study of early access games on the Steam platform », Empirical Software Engineering, vol. 23, no 2,‎ , p. 771–799 (ISSN 1573-7616, DOI 10.1007/s10664-017-9531-3, lire en ligne, consulté le )
  10. « Accès anticipé  (Documentation Steamworks) », sur partner.steamgames.com (consulté le )