Madonna Oriente

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Madonna Oriente, aussi connue sous le nom de Signora Oriente (La Dame de l’Orient) ou La Signora del Gioco (La Dame du Jeu)[1], est une figure religieuse, décrite par deux Italiennes exécutées par l’Inquisition en 1390 pour sorcellerie.

Historique[modifier | modifier le code]

Selon deux femmes accusées de «pratique de magie diabolique» (et non de sorcellerie) à Milan[2], une femme nommée La Dame de l’Orient (Madonne Oriente) aurait pratiqué des actes de magie (notamment des ressuscitations d’animaux)[3] chez des personnes fortunées à Milan en Italie.

Les deux femmes, Sibilla Zanni, épouse de Lombardo de Fraguliati et Pierina de Bugatis, épouse de Pietro de Bripio[4],[5], ont été citées à comparaître devant l’inquisition en 1384 ; lors du procès, leur récit des faits aurait été considéré invraisemblable : par conséquent, elles n’ont été condamnées qu’à une légère pénitence. Elles avouèerent cependant avoir utilisé de la «magie blanche» pour guérir des blessures et soigner l'infertilité, ainsi que pour faire renaître des animaux[1].

Vers 1390 l'inquisiteur Fra Beltamino da Cernuscullo procède à nouveau à leur interrogatoire dans le cadre d'une enquête. Elle passent aux aveux et affirment faire partie d'un cortège nocturne de Diane et Hérodiade, au cours duquel est donné un banquet pendant lequel les convives mangent des bœufs puis dépsent les eaux sur les peaux. La Madonne d'Oriente les frapperaient alors d'un bâton pour les faire renaitre. Cette légende présente de forte ressemblance avec la mythologie de Thor[5],[6].

Les deux femmes furent cette fois-ci accusées de s'être livrée à des activités magiques «diaboliques » et de pacte avec le diable durant leurs équipées nocturnes et écopèrent alors de la peine capitale[2].

Bien que les preuves de l’existence de ce groupe fassent défaut, le témoignage des deux femmes ressemble de façon troublante à ceux décrivant d’autres groupes d’Italie et d’autres pays d’Europe[2], comme les disciples de Richella et de « Sibilia la Sage » dans le Nord de l’Italie du XVe siècle, les Benandati italiens des XVIe et XVIe siècles, les Armièrs des Pyrénées, les Călușari roumains, des Loups-garous de Livonie, les kresniks de Dalmatie, les táltos hongrois, ou encore les burkudzauta du Caucase. Ces thèmes récurrents et répandus ont été identifiés comme faisant partie d’une mythologie venue d’Eurasie. La mythologie dont s’inspirent ces groupes fait l’objet de discussions parmi les adeptes de la sorcellerie moderne et du Néo-paganisme[7]. Cette figure religieuse est nommée différemment selon les lieux et les époques : Perchtha, ou Holda du coté germanique, mais dans le discours érudit elle prend le nom de Diane ou Herodiate, voir Satia ou Abuntia pour les évocations de leurs pouvoirs allégués sur la fertilité[8].

Carlo Ginzburg argue que le nom Madonna Oriente provient de l'expression latine Domina Oriens, qui désigne la Lune en tant que déesse[9],[7].

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. a et b (en) Brenda Ralph Lewis, Dark History of the Popes, Amber Books Ltd, (ISBN 978-1-908696-32-8, lire en ligne).
  2. a b et c Antoine Follain, La sorcellerie et la ville, Presses universitaires de Strasbourg, (ISBN 979-10-344-0400-1, lire en ligne)
  3. (en) Brian P. Levack, Demonology, Religion, and Witchcraft: New Perspectives on Witchcraft, Magic, and Demonology, Routledge, (ISBN 978-1-136-53799-8, lire en ligne)
  4. (en) Brian P. Levack, The Oxford Handbook of Witchcraft in Early Modern Europe and Colonial America, OUP Oxford, , 646 p. (ISBN 978-0-19-164883-0, lire en ligne)
  5. a et b Claude Lecouteux, Fées, Sorcières et Loups-Garous au Moyen Âge, Editions Imago, (ISBN 978-2-84952-252-3, lire en ligne)
  6. (en) Frances Timbers, A History of Magic and Witchcraft: Sabbats, Satan & Superstitions in the West, Pen and Sword, (ISBN 978-1-5267-3182-1, lire en ligne)
  7. a et b (en) Raven Grimassi, Old World Witchcraft: Ancient Ways for Modern Days, Weiser Books, (ISBN 978-1-60925-613-5, lire en ligne)
  8. (en) Nancy Caciola, Discerning Spirits: Divine and Demonic Possession in the Middle Ages, Cornell University Press, (ISBN 978-0-8014-7334-0, lire en ligne)
  9. Ginzburg, Carlo., Ecstasies : deciphering the witches' Sabbath, University of Chicago Press, (ISBN 0-226-29693-8 et 9780226296937, OCLC 54487661, lire en ligne)

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Richard Kieckheffer, Forbidden Rites: A Necromancer's Manual of the Fifteenth Century (Magic in History), page 155. Pennsylvania State University Press, February 1, 1998. (ISBN 0-271-01751-1)
  • Carlo Ginzburg, Raymond Rosenthal (translator), Ecstasies : Deciphering the Witches' Sabbath. University Of Chicago Press, June 14, 2004. (ISBN 0-226-29693-8)
  • Jan Peter and Yury Winterberg, Hexen - Magie, Mythen und die Wahrheit (Witches - Magic, Myths and the Truth). A documentary movie. - in German, DVD was issued on 6 April 2004
  • Luisa Muraro, La signora del Gioco, Feltrinelli, Milano, 1976 - in Italian
  • Mario Graziano Parri, La signora del gioco, F. Cesati, 1984. (ISBN 88-7667-027-0), in Italian
  • Massimo Centini, Le schiave di Diana: Stregoneria e sciamanismo tra superstizione e demonizzazione (Nuova atlantide). ECIG, 1994. (ISBN 88-7545-588-0)