Le Loup et le Renard (2)

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Le Loup et le Renard
Image illustrative de l’article Le Loup et le Renard (2)
Gravure réalisée par Per Gustaf Floding d'après un dessin de Jean-Baptiste Oudry

Auteur Jean de La Fontaine
Pays Drapeau de la France France
Genre Fable
Éditeur Claude Barbin
Lieu de parution Paris
Date de parution 1693
Chronologie

Le Loup et le Renard est la neuvième fable du livre XII de Jean de La Fontaine situé dans le troisième et dernier recueil des Fables de La Fontaine, édité pour la première fois en 1693 mais daté de 1694. Il existe une autre fable du même auteur, portant le même nom.

Texte de la fable[modifier | modifier le code]

Dessin de Benjamin Rabier
Dessin de Benjamin Rabier

D’où vient que personne en la vie
N’est satisfait de son état ?
Tel voudrait bien être soldat,
À qui le soldat porte envie[N 1].

Certain Renard voulut, dit on,
Se faire Loup. Hé qui peut dire
Que pour le métier de Mouton
Jamais aucun Loup ne soupire ?

Ce qui m’étonne est qu’à huit ans
Un Prince en fable ait mis la chose,
Pendant que sous mes cheveux blancs
Je fabrique à force de temps
Des vers moins sensés que sa prose.

Les traits dans sa fable semés,
Ne sont en l’ouvrage du poète
Ni tous, ni si bien exprimés.
Sa louange en est plus complète.

De la chanter sur la musette[N 2]
C’est mon talent ; mais je m’attends
Que mon Héros dans peu de tems
Me fera prendre la trompette[N 3].

Je ne suis pas un grand prophète,
Cependant je lis dans les cieux,
Que bientôt ses faits glorieux
Demanderont plusieurs Homères ;
Et ce tems-ci n’en produit guères.
Laissant à part tous ces mystères,
Essayons de conter la Fable avec succès.

Le Renard dit au Loup, Notre cher, pour tous mets
J’ai souvent un vieux Coq, ou de maigres Poulets ;
        C’est une viande qui me lasse.
Tu fais meilleure chère avec moins de hasard[N 4].
J’approche des maisons, tu te tiens à l’écart.
Apprends-moi ton métier, Camarade, de grâce :
        Rends-moi le premier de ma race
Qui fournisse son croc de quelque Mouton gras.
Tu ne me mettras point au nombre des ingrats.
Je le veux, dit le Loup : Il m’est mort un mien frère,
Allons prendre sa peau, tu t’en revêtiras.
Il vint, et le Loup dit : Voici comme il faut faire
Si tu veux écarter les Mâtins du Troupeau.
        Le Renard ayant mis la peau
Répétait les leçons que lui donnait son maître.
D’abord il s’y prit mal, puis un peu mieux, puis bien,
        Puis enfin il n’y manqua rien.
À peine il fut instruit autant qu’il pouvait l’être,
Qu’un Troupeau s’approcha. Le nouveau Loup y court,
Et répand la terreur dans les lieux d’alentour.
        Tel vêtu des armes d’Achille
Patrocle mit l’alarme au camp et dans la Ville.
Mères, brus et Vieillards au temple couraient tous.
L’ost au Peuple bêlant[N 5] crut voir cinquante Loups.
Chien, Berger et Troupeau, tout fuit vers le village,
Et laisse seulement une Brebis pour gage.
Le larron s’en saisit. À quelque pas de là
Il entendit chanter un Coq du voisinage.
Le Disciple aussitôt droit au Coq s’en alla,
        Jetant bas sa robe de classe[N 6],
Oubliant les Brebis, les leçons, le Régent[N 7],
        Et courant d’un pas diligent.
        Que sert-il qu’on se contrefasse ?
Prétendre ainsi changer, est une illusion :
        L’on reprend sa première trace
        À la première occasion.

    De votre esprit que nul autre n’égale,
Prince, ma Muse tient tout entier ce projet.
        Vous m’avez donné le sujet,
        Le dialogue et la morale.

— Jean de La Fontaine, Fables de La Fontaine, Le Loup et le Renard (2), texte établi par Jean-Pierre Collinet, Fables, contes et nouvelles, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade », 1991, p. 468

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Strophe imitée des Satires d'Horace satire 1
  2. Instrument de musique utilisé par les bergers.
  3. Pour saluer la victoire
  4. Avec moins de risques.
  5. L'armée dont le peuple est bêlant.
  6. La peau du Loup sous laquelle il avait pris la leçon du Loup.
  7. Le professeur

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