Lactobacillus crispatus

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Lactobacillus crispatus est une bactérie lactique de la famille des Lactobacillaceae. C'est une espèce commune en forme de bâtonnet du genre Lactobacillus et un producteur de peroxyde d'hydrogène (H 2 O 2 )[1]. C'est une bactérie commensale présente aussi bien dans le microbiote vaginal que dans le tractus gastro-intestinal des vertébrés[2].

Histoire[modifier | modifier le code]

Le nom de l'espèce dérive du latin crispatus, signifiant « recourbé », en référence à la forme de la bactérie[3]. L. crispatus a été isolé pour la première fois en 1953 par Brygoo et Aladame, qui l'ont proposé comme nouvelle espèce du genre Eubacterium [4].Dans les années 1970, la souche type VPI 3199 (ATCC 33820) de L. crispatus (à l'époque encore désignée sous le nom de « Eubacterium crispatum ») a été déposée dans la collection du laboratoire anaérobie du Virginia Polytechnic Institute and State University (VPI), où elle a été identifié comme un Lactobacillus [5] et caractérisée [6] par Moore et Holdeman. Abordant le problème de l'hétérogénéité génétique parmi un grand nombre de souches identifiées comme L. acidophilus sur la base d'une similarité phénotypique, Johnson et al. ont réalisé des expériences d'homologie de l'ADN sur 89 souches de L. acidophilus proposées précédemment et délimité six groupes d'homologie distincts[7]. Seules les souches appartenant au groupe d'homologie d'ADN A1 furent encore désignées comme L. acidophilus . Les souches des groupes d'homologie A2, A3, A4, B1 et B2 ont été proposées comme étant des espèces distinctes[7] et reclassées plus tard respectivement comme L. crispatus, L. amylovorus, L. gallinarum, L. gasseri et L. johnsonii [8]. Dans le cas de L. crispatus, ce reclassement taxonomique a eu lieu en 1983, lorsque Cato et ses collègues ont recaractérisé la souche VPI 3199 et découvert une homologie d'ADN à 100 % avec VPI 7635 (ATCC 33197), la souche type du groupe A2 de « L. acidophilus »[9].

Taxonomie[modifier | modifier le code]

Le nom correct complet (avec auteur) de ce taxon est Lactobacillus crispatus (Brygoo & Aladame 1953) Moore & Holdeman 1970[10].

Lactobacillus crispatus a pour synonyme[10] :

Étymologie[modifier | modifier le code]

L'étymologie du nom spécifique de L. crispatus est la suivante : cris.pa.tus. L. masc. part. adj. crispatus, incurvé, crispé, fait référence à la morphologie observée initialement dans le milieu de culture liquide[10].

C'est une espèce du phylum Bacillota, de la classe Bacilli, de l'ordre des Lactobacillales, de la famille des Lactobacillaceae et du genre Lactobacillus[11]. C'est l'une des 49 espèces du genre Lactobacillus identifiées en 2024 et dont le nom a été publié de manière valide et est correct selon les règles de la nomenclature bactérienne[10],[12].

Génome[modifier | modifier le code]

Même au sein de L. crispatus, il existe une variation génétique substantielle : les souches de L. crispatus ont des tailles de génome allant de 1,83 à 2,7 Mb et codent pour 1 839 (EM-LC1) à 2 688 (FB077-07) protéines[13].

Le génome de la souche ST1 de Lactobacillus crispatus, qui colonise le poulet, se compose d'environ 2 043 161 nucléotides et code pour 2 024 protéines, 76 gènes d'ARN et a une forme chromosomique circulaire[11].

Écologie[modifier | modifier le code]

La souche de Lactobacillus crispastus, isolée à l'origine dans la poche de l'œsophage d'un poulet[11], est considérée comme l'un des lactobacilles producteurs de peroxyde d'hydrogène les plus puissants. Comme beaucoup d’autres espèces de Lactobacillus, il peut être gravement altéré par des modifications du système immunitaire, des niveaux d’hormones et par l’utilisation d’antimicrobiens. Lactobacillus crispatus est un habitant normal de l'appareil reproducteur inférieur chez les femmes en bonne santé[14].

Expérimentation en tant que probiotique[modifier | modifier le code]

Il est en cours d'évaluation pour la prévention et le traitement de la vaginose bactérienne[15] qui se caractérise par l'absence de flore Lactobacillus nécessaire pour protéger l'hôte de l'infection[16], sous forme d'ovules de gélatine comportant la souche CTV-05 (LACTIN-V) [15]. D'après plusieurs essais cliniques, il pourrait être efficace en complément d'antibiotiques si une infection est déclarée[17],[18].

Références[modifier | modifier le code]

  1. « DNA fingerprinting of Lactobacillus crispatus strain CTV-05 by repetitive element sequence-based PCR analysis in a pilot study of vaginal colonization », Journal of Clinical Microbiology, vol. 41, no 5,‎ , p. 1881–7 (PMID 12734221, PMCID 154705, DOI 10.1128/jcm.41.5.1881-1887.2003)
  2. « Genome sequence of Lactobacillus crispatus ST1 », Journal of Bacteriology, vol. 192, no 13,‎ , p. 3547–8 (PMID 20435723, PMCID 2897677, DOI 10.1128/JB.00399-10)
  3. Zheng, Wittouck, Salvetti et Franz, « A taxonomic note on the genus Lactobacillus: Description of 23 novel genera, emended description of the genus Lactobacillus Beijerinck 1901, and union of Lactobacillaceae and Leuconostocaceae », International Journal of Systematic and Evolutionary Microbiology, vol. 70, no 4,‎ , p. 2782–2858 (DOI 10.1099/ijsem.0.004107, hdl 10067/1738330151162165141)
  4. Brygoo et Aladame, « Étude d'une espèce nouvelle anaérobie stricte du genre Eubacterium: E. crispatum n. sp. », Annales de l'Institut Pasteur, vol. 84, no 3,‎ , p. 640–641 (PMID 13124957)
  5. W. E. C. Moore et L. V. Holdeman, Outline of Clinical Methods in Anaerobic Bacteriology, Blacksburg, Moore, , 15–21 p., « Propionibacterium, Arachnia, Actinomyces, Lactobacillus and Bifidobacterium »
  6. L. V. Holdeman, E. P. Cato et W. E. C. Moore, Anaerobe Laboratory Manual, Blacksburg, 4th, , 1–156 p.
  7. a et b Johnson, Phelps, Cummins et London, « Taxonomy of the Lactobacillus acidophilus group », International Journal of Systematic and Evolutionary Microbiology, vol. 30, no 1,‎ , p. 53–68 (DOI 10.1099/00207713-30-1-53)
  8. Du Plessis et Dicks, « Evaluation of random amplified polymorphic DNA (RAPD)-PCR as a method to differentiate Lactobacillus acidophilus, Lactobacillus crispatus, Lactobacillus amylovorus, Lactobacillus gallinarum, Lactobacillus gasseri, and Lactobacillus johnsonii », Current Microbiology, vol. 31, no 2,‎ , p. 114–118 (PMID 7606186, DOI 10.1007/BF00294286, S2CID 25714596)
  9. Cato et Moore, « Synonymy of strains of "Lactobacillus acidophilus" group A2 (Johnson et al. 1980) with the type strain of Lactobacillus crispatus (Brygoo and Aladame 1953) Moore and Holdeman 1970 », International Journal of Systematic Bacteriology, vol. 33, no 2,‎ , p. 426–428 (DOI 10.1099/00207713-33-2-426)
  10. a b c et d List of Prokaryotic names with Standing in Nomenclature (LPSN), consulté le 1 avril 2024
  11. a b et c « KEGG GENOME: Lactobacillus crispatus »
  12. « Genus Lactobacillus », sur LPSN - List of Prokaryotic names with Standing in Nomenclature (consulté le )
  13. « Genomic Comparisons of Lactobacillus crispatus and Lactobacillus iners Reveal Potential Ecological Drivers of Community Composition in the Vagina », Applied and Environmental Microbiology, vol. 82, no 24,‎ , p. 7063–7073 (PMID 27694231, PMCID 5118917, DOI 10.1128/AEM.02385-16)
  14. « Vaginal microbiota and viral sexually transmitted diseases », Annali di Igiene, vol. 25, no 5,‎ , p. 443–56 (PMID 24048183, DOI 10.7416/ai.2013.1946)
  15. a et b « Vaginal colonization by probiotic Lactobacillus crispatus CTV-05 is decreased by sexual activity and endogenous Lactobacilli », The Journal of Infectious Diseases, vol. 199, no 10,‎ , p. 1506–13 (PMID 19331578, DOI 10.1086/598686)
  16. « Vaginal lactobacillus flora of healthy Swedish women », Journal of Clinical Microbiology, vol. 40, no 8,‎ , p. 2746–9 (PMID 12149323, PMCID 120688, DOI 10.1128/JCM.40.8.2746-2749.2002)
  17. Dwyer et Dwyer, « Lactobacillus probiotics may prevent recurrent UTIs in postmenopausal women », Evidence Based Medicine, vol. 18, no 4,‎ , p. 141–142 (PMID 23125237, DOI 10.1136/eb-2012-100961, S2CID 41235446)
  18. Craig R. Cohen, Michael R. Wierzbicki, Audrey L. French et Sheldon Morris, « Randomized Trial of Lactin-V to Prevent Recurrence of Bacterial Vaginosis », The New England Journal of Medicine, vol. 382, no 20,‎ , p. 1906–1915 (ISSN 1533-4406, PMID 32402161, PMCID 7362958, DOI 10.1056/NEJMoa1915254, lire en ligne, consulté le )

Liens externes[modifier | modifier le code]