Utilisateur:Michel Abada/Article en cours de modification/Thérapeutes

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Les Therapeutae (grec : Θεραπευταί Therapeutai ; féminin : Therapeutrides), ou Thérapeutes, sont les membres d’une secte juive hellénisée, décrite par le philosophe juif Philon d’Alexandrie dans son De Vita Contemplativa. Ce livre en demeure le seul témoignage, aucun écrit de ce courant, apparemment disparu avant le Ier siècle EC, n’ayant subsisté. Eusèbe de Césarée, apologète chrétien du IVe siècle, en fait des précurseurs du christianisme, voire des chrétiens.

Sources[modifier | modifier le code]

Il existe une seule source, qui semble un témoignage direct, l'ouvrage de Philon d'Alexandrie De vita contemplativa[1]. « Des livres propres à ce groupe auraient servi à l'initiation et à la méditation de ses membres : ils ont disparu[2]. »

Par la suite, les Pères de l'Église, Eusèbe de Césarée, Jérôme de Stridon (saint Jérôme), Épiphane de Salamine en parlent[2], alors qu'ils ont vraisemblablement disparu lors de la répression de la grande Révolte des exilés de 115-117[3].

Témoignage de Philon[modifier | modifier le code]

Selon ce qu'en dit le philosophe juif Philon d'Alexandrie (né vers 20 av. J.-C. mort en 50 ap. J.-C.), qui semble les avoir connus personnellement, ils s'agissait de « philosophes » qui vivaient sur une petite colline au bord du lac Maréotis, au sud d'Alexandrie[4]. Leurs conditions de vie s'apparentaient fort à celles du monachisme des futures laures[5], et ils étaient « les meilleurs » d'un genre d'hommes qui se vouaient à « la bonté parfaite » et qui « existe en de nombreux endroits dans le monde habité[6]. »
Philon fait dériver le nom Therapeutae/Therapeutides du grec θεραπεύω au sens de « culte » ou de « vénération » (cf. I.2), tandis que le Pseudo-Denys penche pour la signification de « serviteurs. »

Philon a décrit les Therapeutae au début du Ier siècle de notre ère, dans le De vita contemplative (La vie contemplative), écrit vers l'an 10 ap. J.-C. À cette époque, les origines des Thérapeutes avaient déjà disparu dans le passé, et Philon n'était même pas certain de l'étymologie de leur nom, qu'il expliquait soit au sens de médecins des âmes soit au sens de serviteurs de Dieu. Les phrases préliminaires de son essai établissent que ce dernier en suivait un autre (qui a été perdu) sur la vie active. Philon se servait d'une polarité familière dans la philosophie grecque entre la vie active et la vie contemplative, en donnant les Esséniens comme exemple de vie active, une autre secte à l'ascétisme sévère, et la vie contemplative que menaient les Thérapeutes dans le désert.

Origines[modifier | modifier le code]

« On ne sait pas à quelle époque les communautés de Thérapeutes ont commencer à se constituer[7]. » « Les origines des Thérapeutes demeures obscures[2]. » Reprenant tant les indications de Philon[8] que la description qu'il en fait[9], « pour certains critiques, les Thérapeutes seraient apparentés aux Esséniens[2]. »

Une partie significative de la critique y voit un « essénisme alexandrin »[2], mêmes si ces critiques « estiment que les deux mouvements ne sont pas identiques et que leur mise en parallèle ne va pas sans poser nombre de problème[10]. »

Description[modifier | modifier le code]

D'entrée de jeu, Philon compare les Thérapeutes aux Esséniens dont il dit avoir traité dans d'autres de ses livres[11]. Il note une différence entre-eux, les Esséniens « ont consacré à la vie active leur zèle et leurs efforts », alors que les Thérapeutes sont voués à la théôria ou vie contemplative[11].


Pour André Paul, dans la stratégie rhétorique de Philon d'Alexandrie et Flavius Josèphe, les Esséniens apparaissent dans leurs œuvres comme à l'ombre des Thérapeutes, constituant eux-mêmes l'archétype des gnostiques[12].

Leur nom[modifier | modifier le code]

« « Thérapeutes » est le décalque du grec thérapeutae, pluriel de thérapeutês[12]. » Quoique le mot porte aussi le sens de « soigner » ou « guérir » (thérapeuein, θεραπεύω[13]), le mot désigne une fonction précise: « servir » un dieu ou lui rendre un culte[12]. Platon, un des grand inspirateurs de Philon en atteste en utilisant le mot dans l'une de ses œuvres appelée Gorgias, pour parler de « l'homme qui a pris soin du corps »[12]. Dans les Lois, écrit de vieillesse du même auteur, « le terme revêt une note de piété, le fils est présenté comme le « serviteur (therapeutês) de la famille et de la cité » ; ailleurs il est question de therapeutês ou ministre des « choses saintes ou des choses sacrées »[12]. » « Progressivement, un sens quasi liturgique investit donc le terme thérapeuein, qui signifia dès lors « honorer » ou « servir » la divinité[12]. » Selon Philon, c'est le nom que les Thérapeutes se donnaient eux-mêmes[14], en revanche on ne connaît pas le nom que leur donnaient leurs contemporains.

Précurseurs des premiers ordres monastiques chrétiens[modifier | modifier le code]

Selon Philon, les Thérapeutes étaient très répandus dans le monde antique, parmi les Grecs et au-delà, dans le monde non grec des « barbares », avec un de leurs principaux points de rassemblement à Alexandrie, dans la région du lac Mareotis:

« Maintenant on peut rencontrer cette catégorie de personnes dans bien des endroits, car il devrait être normal que la Grèce et le pays des barbares prennent part à tout ce qui est parfaitement bon, et c'est en Égypte que de tels hommes se rencontrent le plus, dans tous ses districts (qu'on appelle nomes), et surtout autour d'Alexandrie, et, à partir de tous les lieux ceux qui sont les meilleurs parmi ces Thérapeutes vont en pèlerinage à l'endroit qui leur convient le mieux, comme si c'était leur pays, qui est au-delà du Lac maéréotique. » Philon, Les ascètes III.

Ils vivaient chastement et dans la plus grande simplicité, ils « avaient en premier lieu prévu la tempérance comme une sorte de fondement sur laquelle l'âme s'appuierait pour construire sur cette base d'autres vertus » (Philon). Ils se consacraient à la vie contemplative, et leurs activités pendant six jours de la semaine étaient faites d'ascèse, de jeûne, de prière solitaire et de l'étude des Écritures dans leurs cellules isolées, dont chacune comportait un sanctuaire saint et séparé et une cour fermée:

« L'intervalle tout entier de l'aube au soir, est consacré aux exercices spirituels. Car ils lisent les Saintes Écritures et traduisent en pensée et en allégorie leur philosophie ancestrale, puisqu'ils regardent les significations littérales, comme symboles d'une nature intérieure et cachée qui se révèle en idées voilées. » Philon, paragraphe 28

Outre le Pentateuque, les Prophètes et les Psaumes, ils possèdent des écrits secrets (apocryphes) appartenant à leur tradition propre, et qui comprennent des formules pour des interprétations numérologiques et allégoriques.

Ils renonçaient à la propriété et suivaient une discipline sévère:

« Ces hommes abandonnent leurs biens sans subir l'influence de toute attraction prédominante, et ils fuient loin d'eux sans même retourner la tête. »

Ils « professaient un art de guérir qui l'emportait sur celui qu'on pratiquait dans les villes » note Philon, et il faut rappeler la réputation de guérisseur dont jouissait saint Antoine parmi ses contemporains du IVe siècle. Depuis Alexandrie on affluait pour pouvoir le trouver.

Le septième jour, les Therapeutae se réunissaient dans une maison pour y entendre des prédications, les hommes d'un côté et, par pudeur, les femmes de l'autre. Une fois toutes les sept semaines, ils se réunissent pour une longue veillée nocturne, après un banquet où ils se servent les uns les autres, parce qu'« ils ne disposent pas d'esclaves, ils jugent en effet que posséder des serviteurs quels qu'ils soient est contraire à la nature qui a engendré tous les hommes en leur donnant la même liberté » (Philo, para.70) et ils chantent des hymnes antiphonés jusqu'à l'aube.

Eusèbe de Césarée[modifier | modifier le code]

Dans son Histoire ecclésiastique, Eusèbe de Césarée, auteur chrétien du IVe siècle, décrit les Thérapeutes de Philon comme les premiers moines chrétiens, identifiant leur renonciation à la propriété, leur chasteté, leurs jeûnes et leurs vies solitaires à l'idéal cénobitique des moines. Pour Eusèbe, les Thérapeutes auraient été parmi les premiers chrétiens convertis par Marc, envoyé de Jérusalem pour répandre le message chrétien. Pour Simon Claude Mimouni, si les autres Pères de l'Église, comme Épiphane, ou saint Jérôme disent la même chose, c'est parce qu'ils reprennent les informations d'Eusèbe, sans aucune critique[2]. Pour Mimouni, « ces informations sont considérées maintenant comme erronés, mais elles ont été à la source de confusions qui ont duré près d'un millier d'années[2]. »

Comme les premiers ermites chrétiens du désert égyptien (la Thébaïde), ils vivaient en ermites ou anachorètes, plutôt qu'en communauté, comme plus tard devaient le faire les communautés cénobitiques[15].

« Le caractère semi-anachorétique de la communauté des Thérapeutes, la renonciation à la propriété, la solitude pendant les six jours de la semaine et le rassemblement du samedi pour la prière commune et le repas en commun, la sévérité du jeûne, la sauvegarde vivante de la mémoire de Dieu, la prière continue, la méditation et l'étude de l'Écriture Sainte sont également des pratiques des anachorètes chrétiens du désert d'Alexandrie ». Scouteris, Les Therapeutae de Philon et les moines comme Therapeutae selon le Pseudo-Denys.

Épiphane « rapproche la communauté des Thérapeutes des communautés chrétiennes (Panarion, XXIX, 5, 1-3). Saint Jérôme la compare aux premiers monastères et souligne que leur mise en commun des biens rappelle la pratique de la première communauté de Jérusalem (De viris illustribus, 11)[2]. »

Pseudo-Denys[modifier | modifier le code]

On connaît une référence secondaire aux Therapeutae grâce au Pseudo-Denys l'Aréopagite (Ve siècle), qui signale que « Certaines personnes ont donné aux ascètes le nom de « Therapeutae » ou de serviteurs, alors que d'autres leur ont donné celui de moines ». Le Pseudo-Denys cependant décrit déjà un ordre chrétien ascétique extrêmement organisé.

Influences dans la formation[modifier | modifier le code]

tradition hébraïque[modifier | modifier le code]

On a émis des hypothèses sur diverses influences qui peuvent être à l'origine des Thérapeutes. Le Livre d'Hénoch et les Jubilés sont des exemples de la tradition hébraïque sur les valeurs mystiques des nombres et les interprétations allégoriques, sans qu'il faille remonter à Zoroastre ou aux Pythagoriciens.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : aucun texte n’a été fourni pour les références nommées Mimouni2012_p839
  2. a b c d e f g et h Mimouni 2012, p. 840. Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : le nom « Mimouni2012_p840 » est défini plusieurs fois avec des contenus différents.
  3. Mimouni 2012, p. 844.
  4. De vita contemplativa I.2
  5. Ibid. III.22
  6. Ibid. III. 21
  7. Mimouni 2012, p. 843.
  8. Paul 2008, p. 152.
  9. Paul 2008, p. 151-154.
  10. Mimouni 2012, p. 841.
  11. a et b Paul 2008, p. 151.
  12. a b c d e et f Paul 2008, p. 150.
  13. Erreur de référence : Balise <ref> incorrecte : aucun texte n’a été fourni pour les références nommées vita contemplativa I, 2
  14. Paul 2008, p. 150-151.
  15. Constantine Scouteris, University of Athens THE THERAPEUTAE OF PHILO AND THE MONKS « The semianchoritic character of the Therapeutae community, the renunciation of property, the solitude during the six days of the week and the gathering together on Saturday for the common prayer and the common meal, the severe fasting, the keeping alive of the memory of God, the continuous prayer, the meditation and study of Holy Scripture were also practices of the Christian anchorites of the Alexandrian desert ». Constantine Scouteris, The Therapeutae of Philo and the Monks as Therapeutae according to Pseudo-Dionysius Scouteris

Sources[modifier | modifier le code]

Annexes[modifier | modifier le code]

Lien externe[modifier | modifier le code]