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Utilisateur:INSA-4GP-gr4bis/Brouillon

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Une anisotropie magnétique est présente lorsque les propriétés magnétiques d'un système dépendent de la direction considérée. Par exemple, l’aimantation d’un matériau peut s’orienter selon une ou plusieurs directions privilégiées.

Un des aspects de l’anisotropie magnétique s’explique par la symétrie de l’environnement local des atomes magnétiques. Dans les liquides et les matériaux amorphes, la distribution statistique des environnements locaux conduit généralement à une anisotropie macroscopique magnétique nulle. En revanche, dans les matériaux magnétiques cristallisés, l'anisotropie provenant de l’environnement local joue un rôle prépondérant : c'est l’anisotropie magnéto-cristalline. Il existe aussi d’autres sources d’anisotropie telles que l’anisotropie de forme, de surface et d’échange qui seront décrites plus loin dans cette page.

Anisotropie magnéto-cristalline [modifier | modifier le code]

L’anisotropie magnéto-cristalline correspond à une variation de l’aimantation selon les directions cristallines à cause de l’interaction électrostatique entre le moment orbital et le champ cristallin combinée au couplage spin-orbite.

Explication du phénomène physique[modifier | modifier le code]

Les électrons à l’origine du magnétisme[modifier | modifier le code]

La physique quantique nous apprend que les couches complètes d’électrons ne contribuent pas au magnétisme dans les matériaux car le moment cinétique total dans ces couches est nul (le moment orbital total est nul tout comme le moment de spin total). Il faut donc s’intéresser aux couches électroniques incomplètes pour comprendre le magnétisme.

Les couches externes incomplètes sont remplies grâce à l’apport d’électrons des atomes voisins (liaisons covalentes ou ioniques dans un cristal). Ces couches deviennent donc complètes et ne participent pas non plus au magnétisme.

Il ne reste donc que les couches internes incomplètes qui sont les couches d pour les métaux de transition et les couches f pour les terres rares. Ces couches présentent un moment cinétique total J non nul et participent donc au magnétisme. Il est possible de retrouver de façon simple les valeurs des moments magnétiques d'éléments ou de matériaux grâce à l'étude du couplage spin-orbite et aux règles de Hund.

Champ cristallin[modifier | modifier le code]

Le champ cristallin est un champ électrostatique qui règne au sein d’un cristal contenant des ions. Il est la conséquence de la dispersion de charges au voisinage de chaque atome ou ion.

Ce champ, qui dépend de la structure cristalline, entre en interaction avec les moments orbitaux des éléments du cristal ce qui va aboutir à la création de nouveaux moments orbitaux plus favorables énergétiquement.

Couplage spin-structure cristalline[modifier | modifier le code]

L'anisotropie magnétocristalline provient de la superposition de deux interactions ou couplages au niveau microscopique.

Ces interactions sont celle entre le moment orbital et le champ cristallin, qui fait le lien entre la valeur du moment orbital et la direction cristalline considérée, et le couplage spin-orbite qui lui, fait le lien entre le moment orbital et le moment de spin. On remarque que la superposition de ces deux couplages permet de relier le moment de spin à la direction cristalline. Il existe donc une dépendance ou un couplage spin-structure cristalline ce qui revient à dire que la susceptibilité magnétique n'est pas isotrope: c'est l’anisotropie magnéto-cristalline. Les structures cristallines de métaux de transition ou de terres rares possèdent donc des axes d'aimantation facile ou difficile.

Il faut retenir que l'anisotropie magnéto-cristalline ne peut exister que si les deux interactions (orbitales / champ cristallin et orbitales / spin) existent. Nous verrons que, selon l’importance du couplage spin-orbite, l’anisotropie peut être faible ou forte.

Influence du champ cristallin : métaux de transition et terres rares[modifier | modifier le code]

Pour ce paragraphe nous ferons la comparaison entre les éléments ayant leur couche 3d incomplète et ceux ayant leur couche 4f incomplète pour expliquer la différence de comportement entre les métaux de transition et les terres rares concernant l'anisotropie magnéto-cristalline.

Une couche 3d et une couche 4f ne ressentent pas le champ cristallin avec la même intensité. En effet, la couche 4f (protégée par la 5s, 5p et 6s) est mieux écrantée que la couche 3d (seulement protégée par la 4s). Ainsi, le champ cristallin aura plus d’influence sur la couche 3d que sur la couche 4f.

L’interaction entre le champ cristallin et les orbitales favorise énergétiquement les orbitales avec un moment orbital L nul ce qui peut conduire à un moment orbital total proche de 0. On parle alors d’extinction du moment orbital. Ce phénomène est observé chez les métaux de transition dont la couche 3d est fortement exposée au champ cristallin.

Les éléments ne possédant pas à l’origine de moment orbital et les métaux de transition auront donc un moment orbital total Ltot nul ou très faible. Le couplage spin-orbite devient alors très petit. Cela a pour conséquence un affaiblissement du couplage spin-structure cristalline et donc de l'anisotropie résultante. C’est pourquoi on parle d’anisotropie faible pour ces matériaux.

À l'inverse, les terres rares, dont la couche 4f est bien écrantée, ont des moment orbitaux très différents de 0 et donc un couplage spin-orbite important ce qui engendre une forte anisotropie pour ces matériaux.

Énergie d’anisotropie[modifier | modifier le code]

Afin de trouver la direction de facile aimantation, on peut exprimer la densité volumique d’énergie d’anisotropie en fonction de la direction du moment magnétique. Celle-ci s'exprime sous forme de développement en série des puissances croissantes paires des cosinus directeurs du moment magnétique par rapport aux axes cristallographiques. Ce développement s’arrête généralement au deuxième terme car les coefficients associés aux termes suivants deviennent négligeables. L’expression de l'énergie d'anisotropie dépend également de la structure du réseau.

Structure cubique[modifier | modifier le code]

Vecteur d'aimantation (M) dans un repère cristallographique pour un réseau cubique

Pour la structure cubique, les axes cristallographiques de référence sont les arêtes du cube, l’expression de la densité volumique d’énergie s’effectue à une constante près :

Avec

Le premier terme est le plus important car le signe de , le coefficient du premier terme, permet de définir les directions privilégiées de l’aimantation.

  • Si > 0, les axes privilégiés sont [001], [010] et [100] car est à un minimum,
  • Si < 0, l’axe de facile aimantation est [111].

Structure hexagonale[modifier | modifier le code]

Dans une structure hexagonale, l’énergie d’anisotropie est exprimée en fonction de l’angle entre l’axe principal et la direction du vecteur d’aimantation.

Lorsque est négligeable, l’axe de facile aimantation est l’axe principal si > 0, on parle alors “d’anisotropie uni-axiale”. Si < 0, l’axe facile d’aimantation peut alors être dans le plan perpendiculaire à cet axe ou, si > 0 et suffisamment grand, on aura un cône d’aimantation facile centré sur l’axe principal. Voici quelques valeurs de pour certains matériaux, à température ambiante :

Matériaux
Fer (Fe) 4.8
Nickel (Ni) - 0.51
Cobalt (Co) 41-47
Ferrosilicium (FeSi) 3.5
Samarium - Cobalt 1:5 (SmCo5) 1000-1100

Anisotropie magnéto-élastique[modifier | modifier le code]

L’énergie magnéto-élastique est en lien avec l’énergie magnéto-cristalline, à la différence que celle-ci est due aux contraintes induites par des déformations de la maille cristalline. C’est donc une correction faite à l’anisotropie magnéto-cristalline si on considère que la déformation est une perturbation au modèle magnéto-cristallin. Le moment magnétique dépend des orbitales atomiques et du champ cristallin. Or une déformation modifie ce champ cristallin auxquelles sont sensibles les orbitales. C’est pour cela qu’une déformation du réseau peut entraîner une modification de la direction de facile aimantation, comme par exemple pour les couches minces dont le paramètre de maille peut être différent de celui du substrat. Il existe également d'autres sources de contraintes dans une couche mince qui sont la dilatation thermique et la nature du processus de dépôt. Expérimentalement, dans les couches minces, il est difficile de séparer l’anisotropie magnéto-élastique de celle de surface car les deux contributions varient selon les mêmes paramètres. De plus, pour des épaisseurs faibles (30-50Å), l’énergie magnéto-élastique reste faible comparé aux autres contributions magnétiques.

Anisotropie de forme ou dipolaire[modifier | modifier le code]

L’anisotropie dipolaire, dite aussi "anisotropie de forme", est liée à l’énergie magnétostatique dans le matériau en fonction de sa forme géométrique (répartition spatiale de charges magnétiques fictives). Il s’agit d’une conséquence directe de l’interaction dipolaire entre les moments magnétiques du matériau.

Explication du phénomène physique[modifier | modifier le code]

Physiquement, l’anisotropie magnétique de forme résulte des interactions dipôle-dipôle (différent de l’anisotropie magnéto-cristalline qui vient des interactions spin/orbite locales). C’est une interaction à longue portée et qui dépend donc de la forme du matériau. Dans un grain à l'intérieur d’un matériau magnétique on peut observer que deux pôles magnétiques vont apparaître à sa surface (avec des charges magnétiques). Cette distribution de charges va elle même entraîner l’apparition d’un nouveau champ magnétique local qui avec tous les autres champs créés localement va entraîner l’apparition macroscopique du champ démagnétisant lors de l’alignement des moments magnétiques du matériau.

Dans les couches minces par exemple, la source d’anisotropie la plus importante est l’anisotropie d’interaction dipolaire de forme qui prend en compte les effets de bords (elle domine dans beaucoup de cas, mais pas tous, l’énergie d'anisotropie magnéto-cristalline et l’énergie d'anisotropie de surface). En effet, les lignes de champ magnétique créées par l’aimantation intrinsèque (notée ) d’un matériau sont orientées du pôle nord vers le pôle sud. Ceci va générer le champ démagnétisant qui s’oppose à l’aimantation de ce même matériau. Pour un objet de dimension réduite (paraboloïde, ellipsoïde), l’expression de ce champ s’écrit , où N est le coefficient (tenseur) dépendant de la forme de l’objet, entraînant l’anisotropie de forme. Pour les couches minces, tous les tenseurs () sont égaux à zéro sauf la composante hors du plan : . L’énergie du champ démagnétisant dans un ellipsoïde s’exprime par . L’expression de l’énergie de l’anisotropie de forme par unité de volume dans le repère cylindrique donne donc :.

Ici, l’angle désigne l’angle par rapport à la normale de l’échantillon et est l'aimantation à saturation lorsque tous les moments magnétiques sont alignés. Cette expression montre que la direction favorisée est la direction parallèle au plan de l’échantillon, car l’énergie est minimale lorsque ce qui correspond à l’alignement des moments magnétiques du champ démagnétisant dans la direction préférentielle (selon la plus grande dimension de l’échantillon, dans l’exemple des couches minces : lorsque tous les moments sont alignés dans le plan). L’épaisseur ne rentre pas en compte dans cette source d’anisotropie car elle dépend de l’angle .

Dans le cas où l'ellipsoïde possède un axe de révolution autour de l'axe z, on et on obtient une énergie de la forme , où est l'angle entre l'aimantation et l'axe de révolution. On peut remarquer que cette expression est de la même forme que celle de l'anisotropie magnéto-cristalline.

Calcul pour différentes géométries[modifier | modifier le code]

Comme vu précédemment, la formule générale pour une ellipsoïde peut s’écrire de la façon suivante  avec et . On a donc .

Échantillon sphérique[modifier | modifier le code]

Pour un échantillon sphérique, on a . Donc .

On remarque donc ici que l'énergie de dépend pas de l'orientation du moment magnétique : il n'y a pas d'anisotropie de forme.

Échantillon cylindrique infiniment long[modifier | modifier le code]

Pour un échantillon cylindrique infiniment long (un fil), nous avons avec et les angles polaire et azimut. On considère également d'où On obtient donc .

C'est une anisotropie uniaxiale caractéristique des particules allongées.

Échantillon cylindrique infiniment plat[modifier | modifier le code]

Dans le cas d'un tel échantillon, nous avons Ce qui donne . Dans l’hypothèse où l’anisotropie magnétocristalline est absente, l’orientation dans le plan du moment magnétique d’un cylindre infiniment plat est favorisée.

Anisotropie de surface[modifier | modifier le code]

L’anisotropie de surface est un phénomène complexe fondé sur l’absence de symétrie cristalline et de liaisons atomiques à la surface d’échantillons magnétiques. Le modèle de Néel (Néel surface anisotropy (NSA) model) permet de d’expliquer l’origine phénoménologique de l’anisotropie de surface, et plus particulièrement l’apparition d’un terme d’énergie d’anisotropie supplémentaire lié à la surface et qui favorise l’orientation de l’aimantation perpendiculairement à cette dernière.

Modèle de Néel (NSA), origine et explication[modifier | modifier le code]

En 1954 Louis Néel publia dans le Journal de Physique et le Radium : « Il doit exister dans les corps ferromagnétiques, une énergie d’anisotropie superficielle, dépendant de l’orientation de l’aimantation spontanée par rapport à la surface et ne présentant d’ailleurs aucun rapport avec le phénomène classique de champ démagnétisant de forme. Cette énergie de surface, de l’ordre de 0,I à I erg/cm2, est susceptible de jouer un rôle important dans les propriétés des substances ferromagnétiques dispersées en éléments de dimensions inférieures à I00 Å. ». Dès lors, on se rend compte que l’anisotropie de surface, qui a alors été découverte comme une nouvelle manifestation de forces magnéto-cristallines, engendre un terme correctif sur l’énergie d’anisotropie. Elle va jouer un rôle d’autant plus important dans le cas des couches minces magnétiques.

Le modèle que Néel part du principe que la contribution à l’anisotropie de surface est décrite par les paires d’interaction spin-spin en surface. Pour décrire ce phénomène, nous considérons deux atomes i et j distants de et de spins respectifs Si et Sj.
L’Hamiltonien décrivant cette interaction spin-spin en surface est le suivant :



est le nombre de premiers voisins de spin de surface i (i est la numéro de coordination), est un vecteur unitaire pointant le long de la direction de l’aimantation, est la distance entre les spins des atomes i et j, est le vecteur unitaire connectant le spin de l’atome i à celui de son plus proche voisin j, le facteur est ajouté pour ne pas compter deux fois la paire d’interaction et est la constante de couplage paire-anisotropie, ou constante d’anisotropie de surface de Néel, qui dépend de la distance entre les deux spins des atomes correspondants. Dans la suite nous écrirons simplement cette constante sous la forme en omettant les indices i et j.

Si L(r) < 0, l’anisotropie de surface est localement dans le plan
Si L(r) > 0, l’anisotropie de surface est hors du plan

L’expression de la constante d’anisotropie de surface de Néel est la suivante :

et dépendent de la magnétostriction et de constantes élastiques.

Toutes ces relations rendent évident que la NSA dépend de l'orientation de l’aimantation locale par rapport à la surface, l'orientation de la surface par rapport aux axes cristallins et la perte de voisins. De cette façon, les atomes situés à différentes positions de la surface peuvent posséder une valeur d'anisotropie de surface différente. On constate que le voisinage des atomes situés à différentes positions dans une nanoparticule octaédrique tronquée, qui ont des des axes d’aimantation facile de directions différentes.

Avec ce modèle, l’anisotropie de surface d’un atome peut être calculée en sommant les paires d’interaction de spin avec ses voisins les plus proches. Toutefois cette description garde un caractère phénoménologique et ne fournit donc pas une compréhension physique de son origine. Il faudrait alors tenir compte des effets du couplage spin-orbite et de la théorie des champs de ligand, c’est à dire l'arrangement orbital des liaisons atomiques, ce qui n’est pour l’instant pas traité ici.

Energie d’anisotropie de surface[modifier | modifier le code]

Au niveau expérimental, il est difficile de distinguer la contribution de chaque type d’anisotropie. On utilise alors le concept d’anisotropie effective. Il a été proposé de séparer phénoménologiquement cette anisotropie effective Keff en deux contributions : de volume et de surface.

est la constante associée à l’énergie due à l’anisotropie du volume (magnétocristalline, de forme), est la constante associée à l’énergie due à l’anisotropie de surface, S est la surface et V le volume du système.

Dans le cas d’une couche ultra-mince (film), l’anisotropie de surface peut être déterminée en mesurant Keff en fonction de l’épaisseur du film t, et on obtient une dépendance en  :

Le facteur 2 est dû à l’existence de deux surface (dessus et sous le film).

Dans le cas d’une nanoparticule sphérique de diamètre D, on arrive à la formule :

Compétition entre les différent types d'anisotropie : exemple d'une couche mince de Cobalt[modifier | modifier le code]

Nous prenons l’exemple d’une couche mince de cobalt dont l’axe d’anisotropie c est perpendiculaire au plan de la couche. Nous allons voir comment l’axe de préférence d’aimantation M évolue en fonction de l’épaisseur de la couche.

  • Si l’épaisseur de la couche est très fine (<20 Å, on parle alors de couche ultra mince) :

Les effets d’anisotropie de surface sont plus importants que ceux d’anisotropie de forme (qui tendent à aligner les spins dans le plan de la couche) et d’anisotropie magnéto-cristalline. L’énergie de surface domine et l’axe de facile aimantation est selon c.

  • Si l’épaisseur de la couche est mince (> 20Å, couche mince) :

Bien que l’axe cristallographique de facile aimantation du cobalt soit perpendiculaire à la surface du substrat... il existe cependant une forte anisotropie de forme (lié au caractère "mince" de la couche de cobalt) qui a tendance à aligner les spins dans le plan du film. L’énergie de forme domine et l’axe de facile aimantation est perpendiculaire à c.

  • Si l’épaisseur de la couche est grande (c’est à dire un échantillon massif) :

L’effet d’anisotropie de surface est négligeable. Les effets d’anisotropie magnétocristalline dominent ceux d’anisotropie de forme et l’axe de facile aimantation est alors selon c.

Ainsi l'axe de facile aimantation dans une couche mince est déterminé par la compétition entre les différents types d’anisotropie.

Quelques valeurs expérimentales de [modifier | modifier le code]

Voici quelques valeurs expérimentales de la constante d’anisotropie de surface à température donnée pour différents métaux de transition ferromagnétiques :

Données expérimentales pour de la constante d'anisotropie de surface magnétiques de matériaux de transition ferromagnétiques [1]
Système Température (K) Ks (erg/cm²)
UHV/Ni(111) 300 -0.58
Cu, Pd/Ni(111) 300 -0.22
Re/Ni(111) 300 -0.19
O2/Ni(111) 300 ~0
UHV/Fe(100) 293 +1
Ag/Fe(100) 293 +0.6
UHV/Fe(100)/Ag(100) 293 ~0
UHV/Fe(100)/W(110) 293 -0.5
Ag/Fe(100)/Ag(111) 77- 293 ~0
Au/Fe(100)/Au(111) >0
UHV/Fe/Cu(100) 100 +1
Cu/Fe(100)/Cu(100) +0.5
Au/Co/Au(111) 293 +0.5
Pd/Co/Pd(111) 293 +0.26
UHV/Co/Cu(100) 293 >0


Anisotropie d’échange[modifier | modifier le code]

Figure 4.1: Illustration de l'effet du couplage d'échange sur le cycle d'aimantation d'une bi-couche ferro/antiferromagnétique

Le phénomène d’anisotropie d’échange (ou "exchange bias") a été découvert par Meiklejohn et Bean en 1956 en étudiant des particules ferromagnétiques de Co recouvertes par leur oxyde antiferromagnétique CoO. Il apparaît lors de l’association d’un matériau ferromagnétique (FM) et d’un matériau antiferromagnétique (AFM). Ce phénomène est caractérisé par un décalage du cycle d’hystérésis le long de l’axe du champ magnétique dû une interaction d’échange entre le F et l’AF.


Sur la figure 4.1, le cycle d'hystérésis de la bi-couche (constitué d'une couche de FM et d'une couche de AF) avant le refroidissement sous champ magnétique est représenté par la courbe rouge. Il est symétrique par rapport à l’axe des ordonnées et le champ coercitif de la bi-couche vaut HC1. Le cycle d'hystérésis de la bi-couche après le refroidissement sous champ magnétique est représenté par la courbe bleue en pointillé. On remarque que le cycle est décalé de HEC dans le sens opposé à celui du champ de refroidissement et le coercitif de la couche HC2 est modifié. Ce décalage du cycle est quantifié par champ d'échange HEC pouvant être définie approximativement comme :

où HC1 et HC2 représentent les valeurs des champ coercitif avant et après le champ de refroidissement.


Explication du phénomène physique[modifier | modifier le code]

Figure 4.2 : Configuration des spins dans un système F/AF dans le cas de l’anisotropie d’échange

Le schéma ci-contre décrit les mécanismes de l’anisotropie d’échange. On se place dans le cas où la température de Curie TC du matériau F est plus élevée que la température de Néel TN du matériau AF.

1. Le système F/AF est porté à une température T comprise entre la température de Néel TN et la température de Curie TC. On applique un champ magnétique externe H sur le système. Ce système étant à une température inférieure à TC, les spins du F s’alignent dans la direction du champ magnétique appliqué. En revanche, la température est supérieure TN, la couche AF est donc dans sa phase paramagnétique. Ainsi les spins de AF sont désordonnés. Le cycle d’hystérésis de la couche F est centré en zéro et n’est pas affectée par le dépôt AF.

2. Si on applique un champ H suffisamment fort pour saturer la couche F, sans changer son intensité ni sa direction, un processus de refroidissement du système s’effectue. Le champ magnétique externe est alors appelé champ de refroidissement HFC. Avec HFC maintenu sur le système durant un certain temps, la bicouche F/AF atteint une température inférieure à la température de Néel TN. Au cours de cette étape de refroidissement, les moments magnétiques de l’AF, situés à l’interface s’alignent parallèlement à ceux du F par interaction d’échange puis s’ordonnent alternativement parallèlement et anti-parallèlement pour respecter le moment magnétique net nul de l’AF.

3. Lorsque ce champ diminue et devient négatif, les spins du F commencent à s’orienter dans le sens opposé, en revanche, les spins de l’AF restent immobiles. À cause du couplage F/AF à l’interface, les spins de l’AF exercent un couple qui s’oppose à la rotation des spins du F. On parle alors de champ coercitif qui, dans un premier temps, est supérieur au champ externe. Puis l’intensité du champ externe est augmenté jusqu’à obtenir le champ nécessaire pour retourner l’aimantation de la couche F. Ceci explique le décalage du cycle d’hystérésis.

4. Une fois la couche F retournée et saturée en champ négatif, la configuration magnétique du système est telle que l’aimantation du F se trouve antiparallèle aux spins interfaciaux de l’AF.

5. Lorsque le champ magnétique est ramené à sa valeur initiale positive, les spins du F commencent à s’orienter dans le sens opposé afin de revenir à leur position initial. Comme précédemment, le couple est exercé par l’AF sur la couche de F. Cependant cette fois la rotation des spins du F est favorisée par cette force. Ainsi le champ coercitif, nécessaire à leur retournement, est donc plus faible que celui attendu dans l’étape 1. Ceci explique, une fois de plus, le décalage du cycle d’hystérésis.


Le sens du décalage du cycle d’hystérésis dépend de l’orientation privilégié des spins de la couche F fixée par le champ de refroidissement HFC. En général, le décalage est dans le sens opposé au champ de refroidissement. Le cycle d’hystérésis, présenté plus haut, est décalé sur la gauche (valeur négative de H) par rapport au centre. On parle d’anisotropie d’échange négative (negative exchange bias).


Modèle de Meiklejohn et Bean[modifier | modifier le code]

Meiklejohn et Bean ont proposé en 1956 le modèle original le plus simple décrivant l’effet de l’anisotropie d’échange.

Figure 4.3 : Schéma de deux bicouches FM/AFM présentant une interface idéale et une surface AFM non compensée et compensée

Ce modèle est basé sur les hypothèses suivantes :

  • l’interface FM/AFM est parfaitement plane et sans rugosité,
  • l’anisotropie de la couche AFM au dessous de TN est supérieure à l’anisotropie de la couche FM et les moments de la couche AFM sont fixes,
  • les matériaux FM et AFM sont monodomaines,
  • la surface AFM est parfaitement non compensée,
  • l’anisotropie est planaire et les axes d’anisotropies FM et AFM sont colinéaires.
Figure 4.4 : Schéma représentant les paramètres utilisés dans le modèle de Meiklejohn et Bean.

Dans ces conditions, l’énergie par unité de surface s’écrit dans le système F/AF s’exprime de la façon suivante:

où H est le champ magnétique appliqué, MF l’aimantation à saturation de la couche F, tF et tAF les épaisseurs respectives des couches F et AF, KF et KAF les constantes d’anisotropie respectives des couches F et AF, α , β et θ, les angles définis à la figure 4.4 et JINT la constante de couplage interfaciale.


Le premier terme de l’équation est le terme d’énergie Zeeman provenant de l’interaction entre le champ appliqué et l’aimantation de la couche F. Le deuxième et troisième termes représentent l’énergie d’anisotropie des couches F et AF, respectivement. Le dernier terme correspond à l’énergie d’interaction entre les deux couches.

Dans ce modèle, on suppose que l’anisotropie de la couche F est négligeable devant celle de l’AF ( KF tF << KAF tAF ), ce qui implique que les moments de l’AF ne tournent pas sous l’effet d’un champ magnétique extérieur. Par conséquent, on ne tiendra pas compte de l’énergie Zeeman de l’AF. Aussi, on considère que le champ extérieur est appliqué dans le plan de la bi-couche, ainsi θ = 0, et les axes d’anisotropies F et AF sont colinéaires, donc α et β égaux.

Ceci permet de déduire l’expression du champ de décalage du Modèle de Meiklejohn et Bean :

où MF est l’aimantation du matériau F, tF est l’épaisseur de la couche F, et σ représente la densité d’énergie de couplage interfacial.


Applications[modifier | modifier le code]

L’anisotropie d’échange connaît depuis une vingtaine d’années un très grand intérêt dans le domaine de la recherche, en raison de ses applications dans les dispositifs de l’électronique de spin, tel que :

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  1. P. Bruno and J. P. Renard. Magnetic surface anistropy of transition metal ultrathin films. Appl. Phys. A 49, 499 (1989).