Testo Junkie : sexe, drogue et biopolitique

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Testo Junkie : sexe, drogue et biopolitique
Auteur Paul B. Preciado
Pays Drapeau de la France France
Genre Essai
Éditeur Grasset & Fasquelle
Date de parution 2008
Type de média livre de poche
Nombre de pages 409
ISBN 978-2-290-03602-0
Chronologie

Testo Junkie : sexe, drogue et biopolitique[1] est un essai publié par Paul B. Preciado.

Diffusion[modifier | modifier le code]

La version originale, en espagnol, est parue aux éditions Espasa Calpe à Madrid sous le titre Testo Yonqui. La traduction est parue en France en 2008 aux Éditions Grasset & Fasquelle.

Le genre du livre se situe entre un récit autopornographique et un essai philosophique analysant la production subjective d'un corps genré[2].

L'auteur qualifie son œuvre de « fiction autopolitique »[3].

Ce livre est, depuis sa publication, devenu un classique de la théorie queer[4].

Thèmes[modifier | modifier le code]

Intimité de la transition[modifier | modifier le code]

Le livre aborde une dimension intime par l'examen attentif d'un protocole volontaire d'ingestion de testostérone[5] sur le corps de Preciado, et en examine les effets induits sur sa sexualité dans une tentative de critique performative de la construction normative du genre[6].

Dans sa structure, le livre alterne des développements philosophiques et la retranscription d'éléments autobiographiques intimes[7].

Deuil[modifier | modifier le code]

Écrit après la mort de Guillaume Dustan, ami proche de l'auteur, et au moment de sa rencontre amoureuse avec Virginie Despentes (au moment où celle-ci rédige son livre King Kong Théorie), le livre explore également ces deux chocs que sont la disparition d'un être cher et les perspectives ouvertes par une nouvelle rencontre amoureuse.

Il s'agit en ce sens d'un hommage posthume à Guillaume Dustan (GD dans le livre) dont une citation de Dans ma chambre en ouvre la lecture à la première page : « Je vis dans un monde où plein de choses que je pensais impossibles sont possibles »[8].

Analyse[modifier | modifier le code]

Ère du capitalisme pharmacopornographique[modifier | modifier le code]

En référence aux thèses de la biopolitique de Michel Foucault et de la construction performative du genre de Judith Butler, Paul Preciado développe l'idée selon laquelle le capitalisme serait entré dans une phase de contrôle subjective des corps par la "phamacopornographie"[9].

Paul Preciado s'appuie sur la description de l'histoire de différentes types d'hormones, contraceptives ou de performance comme la progestérone, de la testosterone et du viagra pour appuyer son concept d'imbrication étroite de la production industrielle pharmaceutique et du contrôle induit par le sujet même dans la construction de l'identité sexuelle des substances produites par l'industrie pharmacopornographique.

Le pouvoir ne serait plus une question de contrôle externe des corps ou de leur redressement tel que Michel Foucault avait pu le mettre en évidence dans Surveiller et punir et Histoire de la sexualité mais un concept internalisé par des sujets consentants qui ingèrent des hormones contrôlant les processus biologiques de leurs corps pour les conformer à leur identité assignée de genre.

Gender hacking ou piratage du genre[modifier | modifier le code]

Dans ce contexte, l'entreprise décrite plus haut d'ingestion volontaires de substances hormonales modifiant à la fois la performativité et la biologie des genres assignés est vue comme une contestation politique de ce pouvoir pharmacopornographique dans une tentative de déconstruction subjective du genre[10], un piratage et une forme de résistance subjective aux normes binaires[11].

Cette démarche d'ingestion contestataire s'accompagne aussi de pratiques issues du transféminisme[12] de gender hacking[13] (comprendre piratage du genre) performatives, comme l'organisation d'ateliers de dragking où les personnes se considérant comme femmes cisgenres apprennent à se comporter comme des personnes qui ont été identifiées comme des hommes cisgenres, en adoptant leur normes de comportement sociétales[14].

Influence de Guillaume Dustan[modifier | modifier le code]

Paul Preciado souligne à quel point, et c'est ici que sa démarche rejoint celle de Guillaume Dustan qui décrit dans ses romans autobiographiques très précisément l'ingestion de différentes drogues (poppers, cocaïne, héroïne, alcool), un grand nombre de pratiques contestataires s'opèrent par le biais d'une reconstruction des affects subjectifs par l'ingestion de substances modifiant les perceptions. Il va toutefois beaucoup plus loin que Dustan en soulignant finalement la construction hormonale auto induite du genre.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

Références[modifier | modifier le code]

  1. « Salut les terriens », sur youtube.com, (consulté le )
  2. « Testo Junkie », sur franceculture.fr (consulté le )
  3. Paul B. Preciado (trad. de l'espagnol), Testo Junkie : sexe, drogue et biopolitique, Paris, grasset & Fasquelle, , 409 p. (ISBN 978-2-290-03602-0), p 11
  4. « B. Preciado, Testo Junkie: Sexe, drogue et biopolitique », sur fabula.org (consulté le )
  5. « Hormones, discrètes alliées », sur Site de l'emiliE (consulté le )
  6. Cécile Daumas, « Tête à Queue », Libération,‎ (lire en ligne)
  7. « Lecture de Testo Junkie », (consulté le )
  8. Guillaume Dustan, Dans ma chambre : roman, Paris, P.O.L, , 157 p. (ISBN 2-86744-525-6)
  9. Ricky Tucker, « Pharmacopornography: An Interview with Beatriz Preciado », (consulté le )
  10. « Lecture de Testo Junkie de Beatriz Preciado | GenERe », sur genere.hypotheses.org (consulté le )
  11. « Questions féministes ou pas », sur Site de l'emiliE (consulté le )
  12. « CfP: Transfeminism (Publication: …ment journal); DL: 10.09.2014 « Salon 21 », sur www.univie.ac.at (consulté le )
  13. « The artists subverting the gender binary », sur Dazed (consulté le )
  14. « Du genre binaire aux genres pluriels : Les Drag Kings de Bruxelles », sur Formation continue Université catholique de Louvain