Nannette Lévesque

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Nannette Lévesque
Biographie
Naissance
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FraissesVoir et modifier les données sur Wikidata
Nationalité
Activités

Nannette Lévesque, née le à Sainte-Eulalie (Ardèche) et morte le à Fraisses (Loire), est une conteuse et chanteuse française.

Biographie[modifier | modifier le code]

Une vie difficile[modifier | modifier le code]

Nannette Lévesque naît en 1803 dans une famille de paysans extrêmement pauvre, qui vit au pied du mont Gerbier-de-Jonc, où la Loire prend sa source[1]. La petite Nannette n’est jamais scolarisée. À l’âge de 8 ans, au décès de sa mère, elle est louée par son père dans des fermes : tour à tour servante, bergère, fileuse, tout en s’occupant des quelques bêtes de la ferme, de ses frères et sœurs, ainsi que des enfants de sa belle-mère qui la persécute.

Après avoir donné naissance à deux fils en 1828 et 1834, elle part avec eux sur les chemins et en échange de ses contes et ses chansons, elle reçoit gite et couvert. Sur sa route, elle rencontre Jacques Lévesque, un marchand ambulant . Ils se marient et de leur union, elle donne naissance à un troisième fils. Mais la vie ne l'épargne pas. Jacques meurt à 46 ans la laissant veuve. Pour sa retraite, elle s'installe à Fraisses (Loire) chez un de ses fils. Elle meurt en 1880.

Une mémoire exceptionnelle[modifier | modifier le code]

Pour sa communion, sans savoir lire ni écrire, Nannette réussit à apprendre par cœur les 22 couplets en latin du Stabat Mater, sans en comprendre un seul mot. On dit d'elle que sa mémoire est exceptionnelle[2]. C'est de la bouche de bergères plus âgées ou lors des veillées contées et chantées qu'elle retient contes et chansons entendues. Elle les raconte à son tour et ainsi se forme son immense répertoire. Sa sensibilité et son imagination ne cessent de vivifier sa mémoire. Victor Smith [3] est admiratif : « Elle ne peut lire une seule lettre. La mémoire seule a agi chez elle. ».

De l'oralité à la transcription : une rencontre décisive[modifier | modifier le code]

Victor Smith, juge au tribunal de Saint-Étienne et collecteur[4], possède une maison secondaire à Fraisses. Il va à la rencontre de Nannette et découvre son savoir oral folklorique, tellement riche et précis, qu'il décide de le collecter et de le retranscrire par écrit dans son intégralité. De 1871 à 1876, Nannette Lévesque partage avec lui toute la littérature orale traditionnelle de son terroir. C'était la première fois qu'en France un collecteur se donnait pour tâche de recueillir tout le savoir narratif et chanté d'une femme du peuple. Mais Victor Smith meurt deux ans après Nannette et n'a pas le temps de publier cette collecte.

De la transcription à l'édition[modifier | modifier le code]

Victor Smith envoi sa collecte à Emmanuel Cosquin qui ne s'en occupe pas et laisse les archives de Victor Smith intactes parmi les siennes à l’Institut Catholique. « Elles ont dormi jusqu’à ce que Marie-Louise Tenèze n’aille réveiller cette Belle au bois dormant pour notre bonheur » dit Nicole Belmont [5] et Georges Delarue [6], ethnomusicologue, met en musique les chansons de Nannette. Grâce à eux deux, nous pouvons avoir accès au répertoire de Nannette essentiellement composés d’une cinquantaine de contes et de légendes et de soixante-douze chansons .Ces textes sont inspirés de la culture paysanne, de l’enseignement religieux et de sagesses collectives. Ils sont une précieuse source d’informations sur la représentation des familles au sein des familles pauvres du XIXe siècle, notamment concernant le rôle de la mère.

De l'édition à la transmission[modifier | modifier le code]

Séverine Sarrias, conteuse, fait découvrir le répertoire de Nannette, peu connu du public[7], depuis plusieurs années. En 2019, elle monte le spectacle Nannette ou l'arbre merveilleux dont le fil rouge est la vie de Nannette. Pour ce spectacle, Séverine Sarrias a choisi trois contes, imbibés de légendes chrétiennes et de croyances païennes, peuplés de belles-mères irascibles : Le granger et le bourgeois, conte facétieux dont on retrouve des traces dès le Xème  siècle ; L’arbre merveilleux , version primitive de Cendrillon ; et enfin La Mayrastre[8]. Elle chante aussi les chansons de Nannette en français et en occitan.

Voir aussi[modifier | modifier le code]

Articles connexes[modifier | modifier le code]

Liens externes[modifier | modifier le code]

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • [Bru 2001] Josiane Bru, « Nannette Lévesque conteuse et chanteuse du pays des sources de la Loire. Édition établie par Marie-Louise TENÈZE et Georges DELARUE. Paris, Gallimard, 2000. 734 p. », Clio. Femmes, Genre, Histoire, no 14,‎ , p. 247–250 (ISSN 1252-7017, DOI 10.4000/clio.122, lire en ligne, consulté le )
  • Marie-Louise Ténèze et Paul Delarue, Le Conte populaire français. Catalogue raisonné des versions de France et des pays de langue française d'outre-mer, Maisonneuve & Larose, (ISBN 2-7068-1277-X)
  • Marie-Louise Tenèze et Georges Delarue, Nannette Lévesque, conteuse et chanteuse du pays des sources de la Loire : la collecte de Victor Smith, 1871-1876 : le répertoire narratif , suivi du Répertoire chansonnier, Paris, Gallimard, coll. « Le Langage des contes », , 734 p. (ISBN 9782070758517, BNF 37211509)

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Marie-Louise Tenèze et Georges Delarue, Nanette Lévesque conteuse et chanteuse du pays des sources de la Loire, Paris, Gallimard, coll. « Le Langage des contes », (ISBN 207-0-75851-6)
  2. Claire Péricard, Mary Myriam et Françoise Barret, « Nannette Lévesque », La Grande Oreille, no 89,‎ , p. 40-45
  3. Marie-Louise Tenèze, « Nannette Lévesque, conteuse et chanteuse du pays des sources de la Loire », Les cahiers du Mezenc, no 13,‎
  4. Georges Delarue, « Victor Smith et Nannette Lévesque, son “informatrice privilégiée” », Les cahiers du Mezenc, no 13,‎
  5. Nicole Belmont, « L’univers merveilleux des contes. Hommage à Marie‑Louise Tenèze (1922‑2016) », Cahiers de Littérature Orale, no 82,‎
  6. Georges Delarue, « Pour chanter Nannette », Les cahiers du Mezenc, no 13,‎
  7. « Séverine Sarrias partage les mots de Nannette Lévesque », La Montagne,‎
  8. Chanteuges, « Les contes retrouvés de Nannette Lévesque », La Montagne,‎