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Mouktse

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Mouktse
Image illustrative de l’article Mouktse
Suricate sur sable, tous deux mouktse, le premier en tant qu’animal, le second en tant qu’objet qui n’est propre à aucun usage.
Sources halakhiques
Textes dans la Loi juive relatifs à cet article
Mishna Shabbat chap. 17, 18 et 20:4-21
Beitsa (en) 1:1-5
Talmud de Babylone Shabbat 122b et seq.
Beitsa 2a et seq.
Talmud de Jérusalem Shabbat 17a
Mishné Torah Sefer Zmanim (he), Hilkhot Shabbat 25-26
Tour/Choulhan Aroukh Orah Hayyim 308-312

Le mouktse (hébreu : מוקצה, mʊktzə) est une mesure rabbinique qui limite l'emploi et le déplacement pendant le Chabbat et les jours saints du judaïsme, afin de préserver le repos et la solennité qui conviennent à ces jours. Contrairement à l'interdiction de transporter un objet d’un domaine à l’autre ou dans le domaine public (en), le mouktse limite même ce transport chez soi.

Cette règle s'applique à la quasi-totalité des choses du quotidien qui, ne servant pas pendant les temps fixés du judaïsme, tombent presque automatiquement sous le coup du mouktse : le réveil est mouktse parce qu'on ne peut pas l'éteindre ni le régler pendant le Chabbat, le linge qu'on a laissé sécher est mouktse parce qu'il était trop mouillé à l'orée du Chabbat pour s'en vêtir, les surgelés sont mouktse parce qu'on ne peut pas les cuire le Chabbat (mais on peut le faire les jours saints), le portable dernier cri est mouktse parce qu'on y tient trop pour le manipuler inutilement, le portefeuille est mouktse s'il contient de l'argent ou des cartes bancaires parce qu'on ne peut pas faire de transactions le Chabbat, les piles usées sont mouktse parce qu'elles ne servent à rien, et si l'on compte promener le chien, il faudra le tenir en laisse sans le porter car les animaux se reposent le Chabbat (he) et sont, eux aussi, mouktse.

Le mouktse est donc communément perçu comme l'une des lois fondamentales du Chabbat, et son observance influence le caractère de cette journée : lui accorder trop d'importance transformerait le Chabbat en un espace figé où l'on ne pourrait rien manipuler ni toucher, le limiter ou le contourner à l'excès affaiblirait la distinction entre jours profanes et jours saints.

Le mouktse dans les sources juives

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Prémisses dans la littérature tannaïtique

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Le terme mouktse, dérivé de la racine sémitique קצ"י (ḳ-ṣ-y) ou קצ"ה (ḳ-ṣ-h) qui signifie « trancher »[1], apparaît plus de cinquante fois dans les textes qui reflètent la loi en vigueur parmi les pharisiens aux IIe et Ier siècles av. J.-C. (c.-à-d. le Midrash halakha qui collectionne les lois orales par verset, la Mishna qui les arrange thématiquement, et la Tossefta IIIe siècle qui la « complémente »). Cependant, il désigne à cette époque une aire de séchage pour figues et raisins (mishna Beitsa (en) 4:7, tossefta Beitsa 4:1) ou un objet exclu du service divin à cause d'une consécration idolâtre (m. Temoura 6:1, t. Temoura 4:2-3)[2]. Ce n'est qu'à partir des Talmuds, au IVe siècle, que le terme prend son sens actuel : la mise à l'écart des objets non prévus pour une utilisation le Chabbat.

Les tannaïm (sages de la Mishna) définissent ce qu'il est permis ou interdit de manipuler le Chabbat, par la dyade min hamoukhan (« [fait partie] de ce qui est prêt ») – eino min hamoukhan (« n’est pas de ce qui est prêt »).
Moukhan, forme houph'al présent singulier de la racine sémitique כו"ן (ḵ-w-n), secondairement nominalisée en hamoukhan, tire son origine du verset biblique Exode 16,5, lequel dépeint le miracle de la double portion de manne (he) la veille de Chabbat (he) :

« Lorsqu’au sixième jour, ils prépareront ce qu’ils auront apporté (wǝheḵinû et ʾašer-yaḇiʾû), [les enfants d'Israël trouveront] le double de leur récolte de chaque jour. »

Comme il a le sens de « prêt, » « apprêté » ou « préparé », les courants juifs de la période du Second Temple y voient un ordre perpétuel de réaliser tout type de préparation avant le Chabbat : le Livre des Jubilés (II:29-30 & V:8-12) en tire une interdiction, sous peine de mort, de préparer quoi que ce soit pour se nourrir pendant le Chabbat ou d'apporter quoi que ce soit dans le même but. Le document de Damas (X:22-XI:2) impose, lui, d'obliger à préparer ce qui a été apporté en ville et de permettre de consommer ce qui a été trouvé impréparé dans les champs. Chez les rabbins de la Mishna, en revanche, moukhan a le sens de « prêt à l'usage, » et sert de critère d'inclusion pour son utilisation à Chabbat ou lors du jour saint, comme le montre t. Shabbat 14:8 : « Tout ce qui est de ce qui est prêt (min hamoukhan), on le déplace et tout ce qui n'est pas de ce qui est prêt (eino min hamoukhan), on ne le déplace pas » (t. Shabbat 14:8, cf. ibid 14:10).

Eino min hamoukhan apparaît donc, à première vue, comme le précurseur logique du mouktse talmudique puisque ce qui n'est pas prêt, n'est pas utilisable. Cependant, il ne désigne pas encore un objet volontairement mis à l'écart ou interdit en raison de sa nature mais seulement un objet qui n'a pas été préparé à l'avance. Par ailleurs, moukhan n'a pas toujours le sens de « préparé » : la cendre dans un four est moukhan si elle était présente avant le jour saint (m. Beitsa 1:2) mais pas si elle a été produite ce jour-là, bien qu'il soit permis de cuire et bouillir (he) (t. Beitsa 1:5 & Houllin 6:6) — cela suggère que moukhan signifie ici « disponible ». De même, les portes des meubles sont qualifiées de moukhan non parce qu'elles sont « préparées » mais parce qu'elles sont naturellement mobiles (m. Shabbat 17:1).
Cette dyade s'applique en outre à d'autres domaines que le Chabbat : dans la m. Kelim 28:2, moukhan est un critère de pureté rituelle : (« [un chiffon qui fait] moins de trois sur trois [doigts], qui a été confectionné pour sécher le bain, secouer la marmite et essuyer la meule, … Rabbi Akiva dit : s'il est moukhan, il [peut devenir] impur, s'il n'est pas moukhan, il [ne peut pas recevoir l'impureté] »). Réciproquement, les Talmuds ont décidé que l'interdiction de déplacer une bête morte pendant le jour saint (m. Beitsa 3:5) ou le tas de récolte à Chabbat (m. Shabbat 18:1 & v. t. Shabbat 14:4) relevait de l'eino min hamoukhan, mais d'autres raisons, aussi légitimes que convaincantes, ont été avancées par les autorités talmudiques comme par les commentateurs traditionnels.
Tout cela indique que le mouktse, tel qu'il se développera dans la littérature talmudique comme catégorie halakhique centrale, n’apparaît pas encore, dans la littérature tannaïtique, sous une forme unifiée : les articles de la Mishna comme de la Tossefta y sont au contraire traités de façon casuistique, sans qu’un principe normatif général ne s’en dégage. C'est donc dans un second temps, celui des amoraïm (docteurs des Talmuds), que ce principe prend forme, par reconceptualisation d'un eino min hamoukhan aux chaînes doctrinales encore trop nébuleuses et d'un mouktse trop restreint, pour les intégrer dans une approche unifiée[3].

Conclusions dans la littérature amoraïque

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Les Talmuds réinterprètent ces notions tannaïtiques en établissant un lien bidirectionnel entre les lois de manipulation d'objets et celles qui régissant la pureté rituelle (en), sur la base de termes communs (car polysémiques), comme moukhan (cf. supra) et keli qui peut désigner un « récipient, » un « vêtement, » un « outil » ou tout autre « objet. »
Tout comme les tannaïm qui distinguent l'état de pureté d'un objet de son utilisation ou son déplacement (m. Shabbat 17:4 et Shabbat 21:3), les amoraïm reconnaissent qu'un objet peut être « apte à l'usage » sans être « prêt à l'emploi » : le TB Shabbat 123a illustre cette nuance, en autorisant le transport d'une aiguille pour retirer une écharde, qu'elle soit ou non trouée pour y faire passer un fil.
Néanmoins, en employant ces termes de façon presque interchangeable, ils amènent à considérer manipulables des objets qui n'étaient pas destinés à un usage courant, tandis que des kelim ordinaires sont traités comme des instruments rituels, soumis aux lois de la pureté. Or une intention correcte est requise pour mener le culte à bien tandis qu'une pensée inadéquate l'invalide, ainsi que ses objets. L'application de ce principe aux lois de la manipulation introduit ainsi un critère mental dans la préparation, qui reposait jusque-là sur des considérations uniquement physiques (on trouve peut-être trace de ce processus dans la Tossefta car en t. Shabbat 14:11 et Beitsa 4:2, l'intention initiale détermine si la consommation d'origan ou de cornouiller est autorisée ; cette intentionnalité demeure toutefois limitée à ces cas précis et ne s'étend pas au-delà)[4].

C'est ainsi qu'apparaît l'aliment comestible mais repoussé parce qu'on n'a pas l'intention de le consommer, et le cas d'école donné dans le Talmud de Jérusalem, est le mouktse, c.-à-d. l'aire où l'on a laissé des figues à sécher[5] : « Ribbi Yaakov bar Aḥa au nom de Ribbi Yassa : le mouktse qui a séché (mouktse sheyavash), il est interdit d'y toucher — Ribbi dit à son fils Ribbi Shimon (en) : “Monte et rapporte-nous des figues sèches du grenier.” Il lui dit : “N’est-ce pas interdit à cause du mouktse ?” Il répondit : “Tu maintiens toujours cette opinion ? Seuls les figues et les raisins peuvent être interdits à cause du mouktse !” Ribbi Shmouel bar Sosartai a dit : “Parce qu’ils puent entre les deux [le dépôt et la fin du séchage]” » (TJ Beitsa 4:1 [62b])[6].
Le mouktse sheyavash devient alors, dans le Talmud de Jérusalem, l'épitome de l'aliment « mis à l'écart » puisque l'œuf pondu un jour saint, qui relève de la rubrique eino min moukhan — et la controverse entre les écoles de Shammaï et de Hillel porte sur la définition de l'œuf pondu comme préparé par sa mère, à l'instar ou à la différence d'un veau —, est considéré par l'école de Hillel comme un mouktse sheyavash dont l'on ignorait l'existence avant l'orée du jour saint (TJ Beitsa 1:1).

Dans la version de l'échange entre Rabbi Shimon Berabbi (en) et son père que rapporte la guemara babylonienne sur la mishna Shabbat 3:6, c'est le premier qui, s'enquérant auprès du second du statut des dattes fendues selon Rabbi Shimon, reçoit la réponse que Rav Yehouda reprend au nom de Shmouel : « il n'y a de mouktse pour Rabbi Shimon que les figues et raisins secs » (Talmud de Babylone Shabbat 45b)[7] .

Cette affirmation s'inscrit dans la formulation progressive de la controverse entre Rabbi Shimon et Rabbi Yehouda (hébreu : מחלוקת רבי שמעון ורבי יהודה maḥloḳet Rabbi Šimon veRabbi Yehûdâ), que le Talmud de Babylone établit entre Shabbat 44a et 47b. Cette dispute, qui n'a pas de fondement explicite dans la Mishna, repose sur la relecture judéo-babylonienne de plusieurs passages de la Tossefta, en particulier t. Shabbat 3:13« On déplace un nouveau luminaire mais non un vieux, paroles de Rabbi Yehouda. Rabbi Meïr dit : On déplace tous les luminaires, à l'exception de celui qui a été allumé ce Chabbat. Rabbi Shimon dit : On déplace tous les luminaires, à l'exception du luminaire allumé à Chabbat ».
Alors que le Talmud de Jérusalem examine ces trois opinions (Shabbat 3:3 [6b-c]), le Talmud de Babylone omet de citer Rabbi Meïr, et se fonde sur d'autres disputes tannaïtiques où Rabbi Yehouda adopte une approche plus restrictive que ses collègues, tandis que Rabbi Shimon se montre plus permissif. Il construit de la sorte une dichotomie entre les deux sages, où Rabbi Yehouda interdirait tout ce qui a trait au mouktse tandis que Rabbi Shimon l'autoriserait, à de rares exceptions près[8].

Ceci établi, les auteurs anonymes du Talmud (he) font dire à Rav Nahman (en) que la controverse entre les écoles de Shammaï et de Hillel sur l'œuf pondu un jour saint, démontre que la dernière suit Rabbi Shimon pour le Chabbat mais Rabbi Yehouda pour les jours saints. Il est, en effet, permis de « découper […] la charogne devant les chiens » à Chabbat (m. Shabbat 24:4) mais interdit de couper du bois pendant le jour saint, « à partir d'une poutre comme à partir d'une poutre qui s'est brisée » le jour même (m. Beitsa 4:3). Cette conclusion — qui n'est pas appuyée par la comparaison entre les corpus des lois de Chabbat et des jours saints dans la littérature tannaïtique, y compris sur les lois qui seront rattachées au mouktse[9] —, implique d'attribuer au seul mouktse toutes sortes d'interdits pour lesquels eino min hamoukhan n'était qu'une possibilité parmi d'autres dans la littérature tannaïtique[10].

Des lois sont ainsi regroupées, et leur ordre est modifié au besoin — ainsi qu'il ressort de la comparaison entre les manuscrits de la Mishna issus des académies talmudiques en Babylonie et celles où s'est élaboré le Talmud de Jérusalem —, pour constituer des ensembles comme les chapitres 17-18 et 20:4-21 de la Mishna Shabbat, et les articles 1:1-5 de la Mishna Beitsa. Ils pourraient en effet s'expliquer autrement, et dans le cas du premier chapitre de ce dernier traité, consacré aux lois de Yom tov, le cas de l'œuf pondu un jour saint dont les amoraïm font unanimement une exemplification de l'eino min hamoukhan, pourrait n'être qu'un aparté rapportant l'étonnante sévérité de l'école de Hillel par rapport à l'école de Shammaï sur trois points relatifs aux jours saints, et les articles suivants poursuivraient les controverses entre les écoles selon l'ordre chronologique des actions au cours de la journée et les modifications qu'il convient de leur apporter quand cette journée est sainte — apport d'une échelle au poulailler, sélection de la volaille ou la bête destinée à l'abattage, ouverture de la boutique, abattage de l'animal, récupération de sa peau (he) après dépouillement (he), prélèvement des portions de la viande réservées aux prêtres (en), préparation des condiments, tri des grains (he) et envoi d'aliments pour réjouir les amis. De plus, cette redéfinition s'est faite au prix d'une inconsistance textuelle car la mishna 1:3 (« L’école de Shammaï dit: il n’est pas permis de transporter une échelle d’un pigeonnier à l’autre, mais seulement de la pencher d’une cloison à l’autre; l’école de Hillel le permet ») ne peut être liée à la préparation ou l'impréparation, et elle est expliquée dans les deux Talmuds par contraste avec une échelle plus solide, le Talmud de Babylone y voyant un souci de préserver les apparences (en) (l'apport de l'escabeau du poulailler est permis mais non celui d’une échelle car l'on pourrait penser que la personne compte plâtrer son toit)[11].
Les amoraïm généralisent au mouktse des questions et conceptions en provenance d'autres domaines de loi, en particulier celui de la pureté et de l'impureté rituelle.
Les amoraïm étendent par ailleurs le caractère répugnant du mouktse sheyavash à d'autres cas, expliquant la distinction entre les lumières qui ont déjà servi et celles qui demeurent inutilisées, par le dégoût que suscitent les premières[12], de sorte que mouktse devient une interjection équivalent au « pas touche ! ».

Le mouktse dans la littérature amoraïque

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Les sages permettent de même d'utiliser et déplacer divers matériaux destinés à un emploi permissible (m. Shabbat 4:1-2). Le degré de préparation requis varie cependant en fonction de l'usage escompté : la paille est déplacée sans restriction lorsqu'elle sert à enfouir les plats afin d'en conserver la chaleur (he) mais celle qui remplit la couche du lit, doit avoir été recouverte d'un drap ou d'un coussin pour être manœuvrée — m. Shabbat 4:1-2 et m. Shabbat 20:5). Quant aux matériaux pour lesquels il n'existe aucun usage permissible comme les pierres, les sages se montrent sévères, et interdisent même de remplir une courge creuse alourdie par une pierre si celle-ci est déplacée par l'eau qu'on y verse (m. Shabbat 17:6). On peut cependant incliner la jarre ou un coussin dont on a besoin pour en faire tomber la pierre ou les pièces de monnaie qui y sont déposées (m. Shabbat 21:2), et les sages n'interdisent pas de prendre un enfant qui porte une pierre ni de la transporter dans une corbeille pleine de fruits (m. Shabbat 21:1, cf. t. Shabbat 14:5 et 16:6). La poussière qu'on a destinée avant le jour saint à couvrir le sang d'une bête abattue, peut être utilisée et déplacée au cours de celui-ci (m. Beitsa 1:2, t. Shabbat 3:13). Rabbi Eliezer permet aussi de ramasser un bout de bois en tout lieu et à tout moment pour se curer les dents (m. Beitsa 4:6 et t. Beitsa 3:18) alors que les rabbins n'autorisent de prendre le bois d'une soukka (cabane que les juifs ont pour devoir de construire afin d'y habiter lors de la fête des Tabernacles) qu'à celui qui a déclaré vouloir en faire usage avant que la fête ne commence ; vraisemblablement informés par l'épisode biblique du rassembleur de bois (en) (Nombres 15,32-36)[13], ils font de plus la part entre bois dispersé et rassemblé, grange et champ, Chabbat et jour férié (m. Beitsa 4:2 et t. Beitsa 3:10). Les écoles de Shammaï et Hillel se disputent aussi sur le traitement des déchets de table, l'une permettant de les débarrasser directement à la main, l'autre n'autorisant qu'un déplacement indirect, en soulevant la planche de la table pour la secouer (m. Shabbat 21:3 et t. Shabbat 16:7), ainsi que le prescrit la mishna précédente.

Pour ce qui est des objets, récipients comme outils, les sources tannaïtiques décrivent un processus d'allègement progressif : « au début », seuls trois outils requis pour la table peuvent être pris car les réprimandes d'Isaïe 58,13, Jérémie 17,21-22 et Néhémie 10,32 & 13,15-19 résonnent encore contre le transport de charges le Chabbat[13] mais les rabbins adoptent progressivement une définition relativement large de ce qui constitue un usage permissible, et autorisent de déplacer tout objet s'il peut servir à un usage permissible, quand bien même ce ne serait pas sa fonction originale. Ils autorisent donc un maillet pour casser des noix, une hache pour couper un gâteau de figues, une scie pour découper du fromage , une bêche pour ramasser des figues sèches, un roseau ou la navette d’un fuseau pour saisir les aliments, etc. Seuls certains outils très spécifiques comme une grande scie ou un soc de charrue demeurent interdits. L'école de Hillel permet en outre le transport dans le domaine public (en) d'un pilon ou d'une peau de bête lors des jours saints, même sans en faire usage, et le déplacement d'objets dans l'espace domestique durant le chabbat, même sans usage spécifique — m. Shabbat 17:2-3 et m. Beitsa 1:5, t. Shabbat 14:1). Si les ustensiles peuvent être déplacés, leurs débris peuvent l'être également tant qu'ils n'ont pas été jetés aux ordures, pour peu qu'ils puissent remplir une fonction ou, selon Rabbi Yehouda, leur fonction originelle (m. Shabbat 17:5, t. Shabbat 14:2 et 6)[14].

Notes et références

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  1. Kretzmer-Raziel 2015, p. 211.
  2. Shimshoni 2022, p. 17-18.
  3. Kretzmer-Raziel 2015, p. 71-73, 78-79, 105-107.
  4. Kretzmer-Raziel 2015, p. 85-89 & 99.
  5. Kretzmer-Raziel 2015, p. 212-13 fait remarquer le jeu de mot entre l'aire, mouktse, et la figue, kayits (hébreu : קיץayṣ).
  6. Kretzmer-Raziel 2015, p. 8.
  7. Kretzmer-Raziel 2015, p. 120.
  8. Kretzmer-Raziel 2015, p. 100-101
  9. Kretzmer-Raziel 2015, p. 103.
  10. Kretzmer-Raziel 2015, p. 59-65, 81-82, 102.
  11. Kretzmer-Raziel 2015, p. 43-55 et 85-91.
  12. Kretzmer-Raziel 2015, p. 80
  13. a et b Kretzmer-Raziel 2015, p. 21-22.
  14. Kretzmer-Raziel 2015, p. 25-42.

Liens externes

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Bibliographie

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Sources primaires

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Sources secondaires

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  • (he) Zvi Shimshoni, « Mavo leʾissour mouktse » [« Introduction à l’interdit de Mouktse »], Midbara, vol. 7,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  • (he) Yoel Kretzmer-Raziel, Hakategoria 'mouktse' vehitgabshouta basafrout haamorait [« La catégorie 'mouktse' et son développement dans la littérature amoraïque »], (lire en ligne).
  • (en) Yoel Kretzmer-Raziel, « Mukhan: The Rise and Fall of a Halakhic Term », Hebrew Studies, vol. 61,‎ , p. 259-276 (lire en ligne, consulté le ).
  • (en) Yoel Kretzmer-Raziel, « The Impact of Purity Laws on Amoraic Laws Concerning Handling on the Sabbath », Hebrew Union College Annual, vol. 87,‎ , p. 179-202 (JSTOR 10.15650).