Massacre d'Ochota

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Massacre d'Ochata
Date -
Lieu Varsovie, Pologne
Victimes Civils polonais
Morts ~ 10 000
Auteurs Drapeau de l'Allemagne nazie Reich allemand
Ordonné par Heinrich Himmler
Participants 29e division SS (russe no 1)
Guerre Seconde Guerre mondiale
Coordonnées 52° 12′ 36″ nord, 20° 58′ 16″ est
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Massacre d'Ochota
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Massacre d'Ochota

Le massacre d'Ochota (en polonais : Rzeź Ochoty ou "Abattage d'Ochota") est une vague de meurtres et de tuerie de masse, de pillages, d'incendies criminels, de torture et de viols orchestrée par les troupes allemandes qui a balayé le quartier d'OchotaVarsovie) du 4 au , pendant l'insurrection de Varsovie.

Les principaux auteurs de ces crimes de guerre étaient les collaborateurs nazi de la Brigade Kaminski (29e division SS), aussi appelée « Armée de libération nationale russe » (en russe : Русская Освободительная Народная Армия, POHA en caractères russes ; Russkaya Ovsoboditelnaya Narodnaya Armija, RONA en transcription latine), commandé par Bronislaw Kaminski.

Les pires atrocités ont été commises dans les hôpitaux locaux, à l'Institut Curie, dans la cité « Kolonia Staszica » et dans le camp de transition de Zieleniak. En tout, environ 10 000 habitants d'Ochota ont été tués et leurs biens volés, après quoi le quartier a été systématiquement incendié par les troupes de Kaminski, tout comme les corps de nombreuses victimes.

L'arrivée de la Brigade Kaminski dans le quartier Ochota de Varsovie[modifier | modifier le code]

Des officiers supérieurs de l'Armée de libération nationale russe tiennent un briefing pendant le soulèvement de Varsovie

Après le déclenchement du soulèvement de Varsovie, le , le Reichsführer Heinrich Himmler ordonne la destruction de la ville et l'extermination de sa population civile.[note 1] [note 2].

Le , vers 10 heures, des unités de la 29e division SS commandées par Bronislaw Kaminski entre dans le district d'Ochota à Varsovie. Le commandement de la Brigade Kaminski, ayant sous ses ordres 1 700 soldats, installe son quartier général dans un bâtiment de la Wolna Wszechnica Polska (Université libre de Pologne) au 2A rue Opaczewska (aujourd'hui 2 rue Banacha), tandis que les soldats prennent possession du bâtiment du XXI Liceum Ogólnokształcące im. Hugona Kołłątaja (21e école secondaire Hugo Kołłątaj) au 93 rue Grójecka[1].

Le début du massacre[modifier | modifier le code]

La priorité des troupes de la 29e Division SS est d'attaquer les positions de résistance à la « Reduta Kaliska » (Forteresse de Kalisz, sub-district i d'Ochota de l'Armia Krajowa) le long de la rue Grójecka, mais presque immédiatement, les troupes commencent le premier d'une longue série de meurtres, viols, vols visant initialement la population civile de la rue voisine (rue Opaczewska). Des groupes de soldats font irruption dans les maisons et expulsent les résidents, dont certains sont abattus – surtout s'ils sont réticents à quitter leurs propriétés[2]. La plupart des bâtiments de la rue Opaczewska sont incendiés ce jour-là après avoir été systématiquement pillés.

Les 4 et , des personnes sont également été assassinées dans des lotissements voisins, et les habitants du 104 rue Grójecka sont tués à la grenade alors qu'ils se cachent dans la cave[2].

Dans les premières heures du massacre, les troupes entrent également dans l'Institut du Radium où elles tuent certains des patients. De nombreuses victimes sont violées collectivement, avant d'être tuées – un schéma qui se répéte ailleurs[3].

Camp de transition de Zieleniak[modifier | modifier le code]

Le mémorial du camp de transition de Zieleniak où des centaines de prisonniers ont été fusillés en août et septembre 1944

Le , en raison du nombre toujours croissant de personnes expulsées de leurs foyers, les Allemands décident de créer un camp de transition à Ochota où les personnes pourraient être rassemblées avant d'être transportées vers le camp de transit de Pruszków, en dehors de Varsovie. Le camp de transition est situé dans la zone d'un ancien marché aux légumes appelé Zieleniak[1] (aujourd'hui la zone de Hale Banacha, la halle Banacha). Dans la soirée du , entre 10 000 et 20 000 habitants du district d'Ochota et de ses environs sont rassemblés[3].

Les troupes de la 29e Division SS reprennent l'ancien bâtiment administratif du marché, et utilisent des loges de conciergerie comme postes de garde. La place de marché est entourée d'un mur de briques qui empêche les prisonniers de s'échapper. Les crimes contre la population locale se poursuivent lors des rafles menées par les troupes de Kaminski, qui souvent battent et tirent sur leurs prisonniers tout en les emmenant vers le camp de transition, extrayant les femmes hors de la foule pour les violer, les tuant fréquemment par la suite[3]. À l'entrée du camp de transition, les victimes sont fouillées pour trouver les objets de valeur, les bijoux et l'argent, puis forcées à entrer dans la zone pavée du marché. Une fois à l'intérieur du camp de transition, les prisonniers n'ont aucune installation sanitaire, aucun médicament ou aide médicale. Une petite quantité de pain moisi est parfois distribuée, mais il n'y a pas d'eau potable. De plus, les soldats tirent parfois sur les personnes emprisonnées pour s'amuser. Erich von dem Bach, commandant de toutes les forces armées allemandes à Varsovie pendant le soulèvement, inspecte le camp le jour de sa création et conclu « qu 'il n'y a rien de mal là-bas, tout est en ordre »[3].

Le , le camp de transition déborde de civils. Ceux qui ont été assassinés sont entassés le long du mur du camp ou enterrés de manière improvisée. Le même jour, plusieurs centaines de personnes d'origine non polonaise sont escortées vers un camp similaire à Okęcie (quartier du Włochy dans le district de Varsovie). Le , le premier groupe de prisonniers est évacué du camp de transition de Zieleniak et transporté vers le camp de transit de Pruszków[1].

Carte

Alors que les forces allemandes poussent progressivement les insurgés d'Ochota dans les jours suivants, le camp de transition est de nouveau rempli de personnes provenant d'autres parties du district, telles que le lotissement de Lubecki (Kolonia Lubeckiego) et des blocs de l'Office des assurances sociales de la Rue Filtrowa. La prise de positions de résistance le long de la rue Wawelska (la « Reduta Wawelska », Forteresse de Wawelska) le , est suivie par la vague suivante de personnes expulsées de leurs foyers. Comme le nombre de prisonniers assassinés et décédés augmente, leurs cadavres sont brûlés dans le gymnase de l'école secondaire voisine Hugo Kołłątaj[2]. Les corps sont transportés au gymnase par des civils conscrits de force qui reçoivent l'ordre de les empiler, après quoi les soldats les aspergent d'alcool et les incendient[2]. Le , un officier allemand tue trois scouts capturés du Bataillon Gustaw de l'Armée de l'Intérieur, leur tirant dans le dos alors qu'ils descendent des cadavres dans une fosse creusée. Le , l’évacuation définitive des civils vers le camp de transit de Pruszków commence. Entre-temps, des hommes sélectionnés sont enrôlés dans le Verbrennungskommando (NDT: librement traduit en kommando d'incinération) et continuent à brûler les corps des victimes du massacre[4].

Le camp de transition de Zieleniak fonctionne jusqu'au . Au cours de ses deux semaines d'existence, environ 1 000 prisonniers sont morts de faim, de soif et d'épuisement extrême, ou sont abattus par les soldats de la Brigade Kaminski[2].

Institut du Radium[modifier | modifier le code]

Une plaque commémorative de Tchorek commémorant le personnel et les patients assassinés à l'Institut du Radium en août 1944

Le , des unités de la Brigade Kaminski font irruption dans l'Institut du Radium (fondé par Marie Curie) au 15 rue Wawelska. Après avoir pillé l'hôpital et dévalisé le personnel et les patients, elles mettent le feu à la bibliothèque et détruisent le stock de nourriture, la pharmacie et une grande partie de l'équipement de l'hôpital. Après avoir initialement décidé d'exécuter les patients et le personnel à l'intérieur de l'Institut, les troupes changent d'avis et décident que les patients et huit membres du personnel resteront pendant que le reste de celui-ci est évacué vers le camp de transit de Zieleniak.

Le soir, les infirmières qui sont restées sur place sont victimes d'un viol collectif. Le lendemain, le bâtiment est incendié et certains des patients sont brûlés vifs[2]. Environ 60 personnes évitent la mort en cherchant un refuge dans la cave et les cheminées du bâtiment.

Les 9 et , quelques survivants sont découverts et les soldats de Kaminski incendient à nouveau le bâtiment. Le , les soldats extraient tous les survivants encore présents dans le bâtiment et tuent les 50 patients gravement malades sur place. Les autres sont envoyés au camp de transition de Zieleniak, où ils sont également exécutés (selon les témoignages oculaires, d'une balle dans la nuque[réf. souhaitée]), puis brûlés sur un bûcher dans le gymnase[2]. Au total, environ 170 personnes (patients et personnels) sont assassinées[5].

Autres atrocités[modifier | modifier le code]

Des viols, des vols, des incendies criminels, des exécutions par peloton d'exécution et de meurtres de civils, cachés dans des caves (généralement en y jetant des grenades à main) sont commis par les diverses unités de la 29e Division SS à travers le quartier d'Ochota. Elles tuent également les blessés dans l'hôpital de campagne de la résistance, au 11/13 rue Langiewicza, avec des grenades. La plupart des atrocités commises à Ochota prennent fin avec la chute du dernier bastion de la résistance dans le bâtiment de l'Institut Géographique Militaire (Instytut Geograficzny) le . Cependant, le , les patients et le personnel de la Szpital Dzieciątka Jésus (Hôpital de l'Enfant-Jésus) au 4 rue Lindleya sont battus et assassinés.

Victimes[modifier | modifier le code]

Une plaque commémorative sur le mur du 104, rue Grójecka, où des dizaines de personnes ont été tuées à la grenade dans le sous-sol et vingt personnes ont été abattues dans l'arrière-cour le 4 août 1944

Environ 10 000 personnes sont tuées dans le massacre d'Ochota[6],[2] dont 1 000 dans le camp de transition de Zieleniak. De nombreux sites différents sont utilisés pour les exécutions de masse, dont certains sont maintenant marqués de plaques commémoratives en souvenir des victimes. Parmi les personnes tuées figurent le peintre Wiktor Mazurowski, 82 ans, et sa femme, assassinés au 83 rue Filtrowa, l'acteur dramatique Mariusz Maszyński et sa famille, ainsi que l'architecte Stefan Tomorowicz et sa femme, qui sont tués au Pôle Mokotowskie.

Pillage et destruction systématiques du district d'Ochota[modifier | modifier le code]

Les unités de la 29e Division SS se retirent d'Ochota entre le 22 et le , mais le pillage des propriétés dans le district se poursuit jusqu'au début d'octobre. L'administration du travail allemande organise une campagne systématique de pillage; le butin est chargé dans des trains de marchandises à la gare de Warszawa Zachodnia et envoyé en Allemagne. De plus, des convois de camions chargés de biens volés sont envoyés à Piotrków Trybunalski. Finalement, les unités du Vernichtungskommando (NDT: librement traduit par commando d'annihilation) incendie systématiquement rue après rue le quartier, provoquant ainsi sa destruction définitive.

Voir également[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

Citations[modifier | modifier le code]

  1. "[...] The Führer is not interested in the further existence of Warsaw [...] the whole population shall be executed and all buildings blown up. Madajczyk 1972, p. 390.
  2. According to the testimony of SS-Obergruppenführer Erich von dem Bach submitted at the Nürnberg trial, Himmler's order (issued on the strength of an order from Adolf Hitler), read as follows: 1. Captured insurrectionists shall be killed whether or not they fight in accordance with the Hague Convention. 2. The non-fighting part of the population, women, children, shall also be killed. 3. The whole city shall be razed to the ground, i.e. its buildings, streets, facilities, and everything within its borders Wroniszewski 1970, p. 128–129.

Références[modifier | modifier le code]

  1. a b et c Alexandre Wolowski, La vie quotidienne à Varsovie sous l'occupation nazie, 1939-1945, Hachette,
  2. a b c d e f g et h (pl) Lidia Ujazdowska, Zagłada Ochoty, Fronda PL. sp. z o.o, , 140 p. (ISBN 8392234413), p111-113
  3. a b c et d (pl) J. Kazimierkski, R.Kolodziejczyk, A. Rostkowska, Dziesje Ochoty, Warszsawa, A. Rostkowska (eds), , p325
  4. « Le massacre de Wola », sur Milguerres (consulté le )
  5. Józef Kazimierz Wroniszewski, Ochota Okęcie. Przewodnik historyczny po miejscach walk i pamięci z lat 1939–1944, Warszawa, Fundacja "Wystawa Warszawa Walczy 1939–1945"; Wydawnictwo "Askon", (ISBN 83-87545-27-9), p. 113
  6. (en) Alexander Mikaberidze, Atrocities, Massacres, and War Crimes: An Encyclopedia [2 volumes] (English Edition), Alexander Mikaberizde, , p504