Voir la source de Louis XIV

{{Titre noble}}
{{Semi-protection longue}}
{{En-tête label|BA|année=2019}}
{{Redirect5|Roi Soleil|la comédie musicale|Le Roi Soleil}}
{{Autre|les autres significations|Louis XIV (homonymie){{!}}{{Louis XIV}} (homonymie)|Louis le Grand}}
{{Infobox Personnalité politique
 | charte                  = Monarque
 | nom                     = {{Louis XIV}}
 | image                   = Louis XIV of France.jpg
 | légende                 = ''[[Portrait de Louis XIV en costume de sacre|Portrait de {{Louis XIV}} en costume de sacre]]''<br>([[Musée du Louvre]], [[huile sur toile]], [[Hyacinthe Rigaud]], [[1701 en France|1701]]).
 | fonction1               = [[Roi de France et de Navarre]]
 | à partir du fonction1   = {{Date|14 mai 1643}}
 | jusqu'au fonction1      = {{Date|1er septembre 1715}}<br><small>({{Durée|14|5|1643|1|9|1715}})</small>
 | couronnement 1          = {{Date|7 juin 1654}},<br> en la [[cathédrale Notre-Dame de Reims|cathédrale de Reims]]
 | régent 1                = [[Anne d'Autriche (1601-1666)|Anne d'Autriche]] <small>({{Date-|1643}}-{{Date-|1651}})</small>
 | premier ministre 1      = [[Jules Mazarin]]<br><small>([[Principal ministre d'État|principal ministre]], {{Date-|1643}}-{{Date-|1661}})</small><br>[[Jean-Baptiste Colbert]]<br><small>(principal ministre, {{Date-|1661}}-{{Date-|1683}})</small>
 | gouvernement 1          = [[Ministres de Louis XIV|Ministres de {{Louis XIV}}]]
 | prédécesseur 1          = {{souverain2|Louis XIII}}
 | successeur 1            = {{souverain2|Louis XV}}
 | fonction2               = [[Dauphin (titre)|Dauphin de France]]
 | à partir du fonction2   = {{Date|5|9|1638}}
 | jusqu'au fonction2      = {{Date|14|5|1643}}<br><small>({{durée|5|9|1638|14|5|1643}})</small>
 | prédécesseur 2          = [[Louis XIII]]
 | successeur 2            = [[Louis de France (1661-1711)|Louis de France]]
 | dynastie                = [[Maison capétienne de Bourbon|Maison de Bourbon]]
 | nom de naissance        = Louis de Bourbon<ref>{{lien web|url=http://www.frontenac-ameriques.org/louis-de-buade-comte-de-frontenac/article/la-chapelle-royale-saint-louis|titre=La chapelle royale Saint-Louis du château de Saint-Germain-en-Laye|site=frontenac-ameriques.org|consulté le=17 janvier 2016}}.</ref>
 | surnom                  = Louis Dieudonné<br />Louis le Grand<br />Le Roi-Soleil
 | date de naissance       = {{Date|5|9|1638}}
 | lieu de naissance       = [[Château Neuf de Saint-Germain-en-Laye]] <br>([[Royaume de France|France]])
 | date de décès           = {{Date de décès|1|9|1715|5|9|1638}}
 | lieu de décès           = [[Château de Versailles]] <br>([[Royaume de France|France]])
 | nature du décès         = [[Gangrène]]
 | sépulture               = [[Nécropole royale de la basilique de Saint-Denis]]
 | père                    = {{souverain2|Louis XIII}}
 | mère                    = [[Anne d'Autriche (1601-1666)|Anne d'Autriche]]
 | grand-père paternel     = [[Henri IV (roi de France)|Henri IV]]
 | grand-mère paternelle   = [[Marie de Médicis]]
 | grand-père maternel     = [[Philippe III (roi d'Espagne)|Philippe III]]
 | grand-mère maternelle   = [[Marguerite d'Autriche-Styrie]]
 | fratrie                 = [[Philippe d'Orléans (1640-1701)|Philippe d'Orléans]]
 | conjoints               = [[Marie-Thérèse d'Autriche (1638-1683)|Marie-Thérèse d'Autriche]]<br><small>({{Date-|1660}}-{{Date-|1683}})</small><br>[[Madame de Maintenon|Françoise d'Aubigné]]<br><small>({{Date-|1683}}-{{Date-|1715}})</small>
 | enfants                 = [[Louis de France (1661-1711)|Louis de France]]<br>[[Anne-Élisabeth de France]]<br>[[Marie-Anne de France]]<br>[[Marie-Thérèse de France (1667-1672)|Marie-Thérèse de France]]<br>[[Philippe Charles de France]]<br>[[Louis-François de France]]<br>
--------------------------------------------------------------- [[Marie-Anne de Bourbon (1666-1739)|Marie-Anne de Bourbon]]<br>[[Louis de Bourbon (1667-1683)|Louis de Bourbon]]<br>
---------------------------------------------------------------
[[Louis-Auguste de Bourbon (1670-1736)|Louis-Auguste de Bourbon]]<br>[[Louis-César de Bourbon]]<br> [[Louise-Françoise de Bourbon (1673-1743)|Louise-Françoise de Bourbon]] <br> [[Louise Marie Anne de Bourbon (1674-1681)|Louise Marie-Anne de Bourbon]]<br> [[Françoise-Marie de Bourbon]]<br> [[Louis-Alexandre de Bourbon]]
 | héritier                = [[Philippe d'Orléans (1640-1701)|Philippe de France]] <small>({{Date-|1643}}-{{Date-|1661}})</small><br>[[Louis de France (1661-1711)|Louis de France]] <small>({{Date-|1661}}-{{Date-|1711}})</small><br>[[Louis de France (1682-1712)|Louis de France]] <small>({{Date-|1711}}-{{Date-|1712}})</small><br>[[Louis de France (1707-1712)|Louis de France]] <small>({{Date-|1712}}-{{Date-|1712}})</small><br>[[Louis XV|Louis de France]] <small>({{Date-|1712}}-{{Date-|1715}})</small> [[Fichier:Red crown.png|15px]]
 | entourage               = 
 | religion                = [[Catholicisme]]
 | résidence               = [[Château de Fontainebleau]]<br>[[Palais du Louvre]]<br>[[Château de Saint-Germain-en-Laye]]<br> [[Château de Versailles]]<br> [[Grand Trianon]]<br>[[Château de Marly]]
 | signature               = Louis XIV Signature.svg
 | emblème                 = Coat of Arms of the Dauphin of France.svg
 | emblème2                = Grand Royal Coat of Arms of France & Navarre.svg
 | liste                   = [[Liste des monarques de France|Monarques de France]]
}}

'''{{Louis XIV}}''', dit « le Grand » ou « le Roi-Soleil », né le {{date de naissance|5 septembre 1638}} au [[château Neuf de Saint-Germain-en-Laye]] et mort le {{date de décès|1 septembre 1715}} au [[château de Versailles]], est un [[roi de France et de Navarre]]. Son [[Règne (politique)|règne]] s'étend du {{Date|14 mai 1643}} {{incise|sous la [[régence]] de sa mère [[Anne d'Autriche (1601-1666)|Anne d'Autriche]] jusqu'au {{Date|7 septembre 1651}}}} à sa mort en {{Date-|1715}}. Son règne d’une durée de {{nobr|72 ans}} est l'un des [[Liste des règnes européens les plus longs|plus longs de l'histoire d'Europe]] et le [[Liste des règnes français par durée|plus long de l'histoire de France]].

Né Louis, surnommé Dieudonné, il monte sur le [[Royaume de France|trône de France]] au décès de son père, {{souverain2|Louis XIII}}, quelques mois avant son cinquième anniversaire, ce qui fait de lui l'un des plus jeunes rois de France. Il devient ainsi le {{64e|[[roi de France]]}}, le {{44e|[[Liste des monarques de Navarre|roi de Navarre]]}} et le troisième roi de France issu de la [[dynastie]] des [[Maison capétienne de Bourbon|Bourbons]].

S'il n'aime guère que son [[principal ministre d'État]], [[Jean-Baptiste Colbert|Colbert]], fasse référence à [[Armand Jean du Plessis de Richelieu|Richelieu]], ministre de {{Louis XIII}} et partisan intransigeant de l'autorité royale, il s'inscrit néanmoins dans son projet de construction séculaire d'un [[absolutisme]] de [[droit divin]]. Usuellement, son règne est divisé en trois parties : la période de sa minorité, troublée par la [[Fronde (histoire)|Fronde]], de {{Date-|1648}} à {{Date-|1653}}, durant laquelle sa mère et le [[Jules Mazarin|cardinal Mazarin]] gouvernent ; la période allant de la mort de Mazarin, en {{Date-|1661}}, au début des [[années 1680]], pendant laquelle le roi gouverne en arbitrant entre les grands ministres ; et enfin la période allant du début des années {{Date-|1680}} à sa mort, où le roi gouverne de plus en plus seul, notamment après la mort de [[Jean-Baptiste Colbert|Colbert]] (ministre clé de 1661 à {{Date-|1683}}), puis de [[François Michel Le Tellier de Louvois|Louvois]], en {{Date-|1691}}. Cette période est aussi marquée par un retour du roi à la religion, notamment sous l'influence de sa maitresse puis seconde épouse, [[Madame de Maintenon]]. Son règne voit la fin des grandes révoltes nobiliaires, parlementaires, protestantes et paysannes qui avaient marqué les décennies précédentes. Le [[monarque]] impose l'obéissance à tous les [[Société d'Ancien Régime#Les trois ordres de la société|ordres]] et il contrôle les courants d'opinion (y compris littéraires ou religieux, tels que [[Port-Royal des Champs|Port-Royal]] et les [[Jansénisme|Jansénistes]]) de façon plus prudente que Richelieu.

La France est, pendant son règne, le pays le plus peuplé d'[[Europe]] avec environ vingt millions d'habitants, ce qui lui confère une certaine puissance d'autant que, jusque dans les [[années 1670]], l'économie se porte bien grâce notamment au dynamisme économique du pays et à des finances publiques tenues en bon ordre par [[Colbertisme|Colbert]]. Du point de vue climatique, le règne coïncide avec le [[minimum de Maunder]] (1645-1715), une période extrêmement froide qui produit d'importantes disettes, plusieurs [[épidémie]]s et [[épizootie]]s ; en 1693-1694, le printemps très pluvieux suivi d'un échaudage l'été provoque une famine suivie d'une épidémie qui tuent {{formatnum:1300000}} personnes ; lors du « grand hiver » 1708-1709, le froid a tué directement environ deux cent mille personnes, et indirectement quatre cent mille par famine et épidémie.

Par la diplomatie et la guerre, {{Louis XIV}} affirme sa puissance en particulier contre la [[maison de Habsbourg]], dont les possessions encerclent la France. Sa politique du « [[pré carré]] » cherche à agrandir et rationaliser les [[Frontières de la France|frontières du pays]], protégées par la « [[ceinture de fer]] » de [[Sébastien Le Prestre de Vauban|Vauban]], qui fortifie les villes conquises. Cette action lui permet de donner à la France des frontières approchant celles de l'[[Époque contemporaine|ère contemporaine]], avec l'annexion du [[Roussillon (province)|Roussillon]], de la [[Franche-Comté]], de [[Lille]], de l'[[Alsace]] et de [[Strasbourg]]. Toutefois, les guerres pèsent sur les finances publiques et {{Louis XIV}} s'attire la méfiance des autres pays européens, qui s'allient souvent, à la fin de son règne, pour contrer sa puissance. C'est aussi le moment où, après la [[Glorieuse Révolution]], l'[[royaume d'Angleterre|Angleterre]] commence à affirmer sa puissance, notamment maritime et économique, grâce en partie aux [[Huguenot|Huguenots]] chassés de France, sous le règne d'un adversaire déterminé de {{Louis XIV}}, [[Guillaume III d'Orange-Nassau|Guillaume d'Orange]].

D'un point de vue religieux, le {{s-|XVII}} est complexe et ne se limite pas à l'opposition entre [[Église catholique en France|catholiques]] et [[protestantisme en France|protestants]]. Parmi les catholiques, la question de la [[Grâce (christianisme)|grâce]] suscite une forte opposition entre les [[Compagnie de Jésus|jésuites]] et les [[Jansénisme|jansénistes]]. {{Louis XIV}} doit trancher entre les divers courants de pensée religieuse, en tenant compte non seulement de ses propres convictions, mais aussi de considérations politiques. Ainsi, s'il fait condamner les jansénistes, c'est aussi parce qu'il se méfie de leur anti-absolutisme.

Concernant les protestants, la [[Révocation de l'édit de Nantes|révocation]] de l'[[édit de Nantes]] en {{Date-|1685}} a des conséquences économiques et [[Démographie|démographiques]] lourdes pour la France, et les réactions en Europe et à Rome sont défavorables. Les relations avec les papes sont en général mauvaises, particulièrement avec {{Souverain2|Innocent XI}}. En effet, le roi entend préserver son indépendance et celle de son clergé face à [[États pontificaux|Rome]], ce qui ne l'empêche pas de se méfier des [[Gallicanisme|gallicans]], souvent imprégnés par le jansénisme. À la fin du règne, la querelle du [[quiétisme]] entraîne également des tensions avec Rome.

À partir de {{Date-|1682}}, {{Louis XIV}} dirige son royaume depuis le vaste [[château de Versailles]], dont il a supervisé la construction, et dont le style architectural a inspiré d'autres châteaux européens. Sa [[Cour de France|cour]] soumet la [[Noblesse française|noblesse]], étroitement surveillée, à une [[Étiquette à la cour de France|étiquette]] très élaborée. Le prestige culturel s'y affirme grâce au [[mécénat]] royal en faveur d'artistes tels que [[Molière]], [[Jean Racine|Racine]], [[Nicolas Boileau|Boileau]], [[Jean-Baptiste Lully|Lully]], [[Charles Le Brun|Le Brun]] et [[André Le Nôtre|Le Nôtre]], ce qui favorise l'apogée du [[classicisme]] français, qualifié, dès son vivant, de « [[Grand Siècle (histoire de France)|Grand Siècle]] », voire de « siècle de {{Louis XIV}} ».

Sa fin de règne, très difficile, est marquée par l'exode de dizaines de milliers de [[dragonnades|protestants persécutés]], par des revers militaires, par les famines [[Grande famine de 1693-1694|de {{Date-|1693}}]] et [[Grande famine de 1709|de {{Date-|1709}}]], par la [[Guerre des Cévennes|révolte des]] [[Camisard]]s et par les nombreux décès de ses [[Liste des héritiers du trône de France|héritiers royaux]].

Tous ses enfants et petits-enfants dynastes sont morts avant lui, et son successeur, son arrière-petit-fils {{souverain2|Louis XV}}, n'a que {{Nobr|5 ans}} lorsqu'il meurt. Pourtant, même après la [[Régence (1715-1723)|régence]] assez libérale de [[Philippe d'Orléans (1674-1723)|Philippe d'Orléans]], l'absolutisme perdure, attestant ainsi de la solidité du régime construit.

Après la disparition de {{Louis XIV}}, [[Voltaire]] s'inspire en partie de lui pour élaborer le concept de [[despotisme éclairé]]. Au {{s-|XIX}}, [[Jules Michelet]] lui est hostile et insiste sur le côté sombre de son règne ([[dragonnades]], [[Galères (peine)|galères]], [[Famine|disettes]]{{etc.}}). [[Ernest Lavisse]] sera plus modéré, même si ses manuels scolaires insistent sur le [[despotisme]] du roi, et sur certaines décisions tyranniques.

Dans la seconde moitié du {{s-|XX}}, [[Marc Fumaroli]] considère {{Louis XIV}} comme le {{citation|saint patron}} de la politique culturelle de la [[Cinquième République (France)|Cinquième République]] en France. [[Michel de Grèce]] pointe ses insuffisances, tandis que [[François Bluche]] et [[Jean-Christian Petitfils]] le réhabilitent.

{{Sommaire|niveau=3}}

== Enfance, santé et éducation ==
=== Naissance de Louis-Dieudonné ===
[[Fichier:Louis XIV et Anne d'Autriche.jpg|vignette|gauche|upright|Anne d'Autriche et le futur roi {{Louis XIV}}, qui porte une plume au {{page h'|béguin}} assorti à sa robe et un tablier richement orné de [[broderie]]s et de dentelles.|alt=Une femme et son enfant.]]

Fils de {{souverain2|Louis XIII}} et d'[[Anne d'Autriche (1601-1666)|Anne d'Autriche]], Louis est le fruit de l'union des deux [[dynastie]]s les plus puissantes de ce temps : la [[maison capétienne de Bourbon]] et la [[maison de Habsbourg]]{{sfn|Bluche 1986|p=33}}.

Au traditionnel [[Titre de noblesse|titre]] de [[Dauphin (titre)|Dauphin de Viennois]] est ajouté à sa naissance celui de ''[[Appellations des membres de la maison de France|Premier fils de France]]''. Intervenue après presque vingt-trois années de mariage stérile, ponctuées de plusieurs fausses couches, la naissance inattendue de l'[[Liste des héritiers du trône de France|héritier du trône]] est considérée comme un don du ciel, ce qui lui vaut d'être aussi prénommé Louis-''Dieudonné''<ref>Archives départementales des Yvelines - Saint-Germain-en-Laye (BMS 1637-1644 ; vues 277/339 et 278/339) - Mort du Roy ({{Louis XIII}}) le {{Date-|14|mai|1643}}… {{Citation|''après une longue et langoureuse maladie mourut dans le Chasteau neuf de St Germain en Laye tres puissant tres Victorieux et tres chrestien Prince Louis De Bourbon treiziesme du nom surnommé Le Juste… ; tres Illustre Prince Louis De Bourbon quatorziesme du nom surnommé Dieudonné son fils aisné Dauphin de France…''}}).</ref>{{,}}<ref group=n>{{Citation|Dieudonné}} signifiant {{Citation|Donné par Dieu}}.</ref> (et non pas ''-Désiré'').
[[Fichier:Portrait du Dauphin futur Louis XIV.1642.jpg|alt=Le futur roi Louis XIV en 1642.|gauche|vignette|Le futur roi {{Louis XIV}} en 1642, par [[Philippe de Champaigne]].]]
Si certains historiens ont avancé que le véritable père est [[Jules Mazarin|Mazarin]], cette hypothèse a été infirmée par un examen ADN<ref>{{Article |titre=La tête d'{{Henri IV}} a parlé : son ADN coïncide avec celui de {{Louis XVI}} |périodique=Le Parisien |date=31 décembre 2012 |lire en ligne=https://www.leparisien.fr/sciences/la-tete-d-henri-iv-a-parle-son-adn-coincide-avec-celui-de-louis-xvi-31-12-2012-2443745.php |consulté le=27 juillet 2020}}.</ref>{{,}}<ref>{{Ouvrage |auteur1=[[Claude Dulong]] |titre=Les signes cryptiques dans la correspondance d'[[Anne d'Autriche (1601-1666)|Anne d'Autriche]] avec Mazarin. Contribution à l'emblématique du {{s-|XVII}} |volume=CXL |tome=140-1 |éditeur=Bibliothèque de l'École des chartes |année=1982 |pages totales=198 |passage=61-83 |lire en ligne=https://www.persee.fr/doc/bec_0373-6237_1982_num_140_1_450256 |consulté le=27 juillet 2020}}.</ref>. Si l'historien [[Jean-Christian Petitfils]] propose la date {{nobr|du 23}} ou du {{Date-|30 novembre 1637-}}, semaine où le couple royal séjournait à Saint-Germain, comme date de la {{Citation|conception du dauphin}}{{sfn|Petitfils 2002|p=25}}, d'autres auteurs affirment que le dauphin a été conçu le {{Date-|5 décembre 1637}}, dans le [[palais du Louvre]]{{Note|groupe=n|Ayant quitté en ce jour son [[château de Versailles]], le roi, à la suite d'un gros orage, doit se replier au [[Palais du Louvre|Louvre]], où loge la reine [[Anne d'Autriche (1601-1666)|Anne d'Autriche]]. Ses appartements n'étant pas préparés, il doit partager le lit de la reine.}} (le {{Date-|5 décembre 1637-}} tombe d'ailleurs pile neuf mois avant sa naissance, le {{Date-|5 septembre 1638}})<ref name="chiron135">{{Ouvrage |auteur1=[[Yves Chiron]] |titre=Enquête sur les apparitions de la Vierge |éditeur=[[Éditions Perrin|Perrin]] |année=2007 |pages totales=427 |passage=135 |isbn=978-2-262-02832-9 |consulté le=20 juillet 2020}}.</ref>{{,}}<ref>{{Ouvrage |auteur1=Pierre Chevallier |titre={{Louis XIII}} |éditeur=[[Librairie Arthème Fayard|Fayard]] |année=1979 |pages totales=680 |passage=552 |isbn= |asin=B0161TUTS6 |consulté le=25 juillet 2020}}.</ref>.

Pour le roi {{Souverain2|Louis XIII}} comme pour la reine (et plus tard leur fils lui-même), cette naissance tant attendue est le fruit de l'intercession faite par le [[frère Fiacre]] auprès de [[Apparitions de Notre-Dame de Grâces|Notre-Dame de Grâces]], auprès de laquelle le religieux réalise trois neuvaines de prières afin d'obtenir {{Citation|un héritier pour la couronne de France}}. Les neuvaines sont dites, par le frère Fiacre du {{Date-|8 novembre 1637-}} au {{Date-|5 décembre 1637}}<ref name="ciel31">{{Ouvrage |auteur1=[[René Laurentin]] |auteur2=[[Patrick Sbalchiero]] |titre=Dictionnaire des "apparitions" de la Vierge Marie |éditeur=[[Librairie Arthème Fayard|Fayard]] |année=2007 |pages totales=1426 |passage=29-31 |isbn=978-2-213-67132-1 |consulté le=20 juillet 2020}}.</ref>{{,}}<ref group="n">Date du {{Date-|5 décembre 1637-}} justement retenue par certains historiens pour la conception du futur [[Dauphin (titre)|dauphin]].</ref>.

[[Fichier:Louis14-2.jpg|alt=|vignette|upright|{{Louis XIV}} dans son enfance.]]

En {{Date-|janvier 1638}}, la reine prend conscience qu'elle est à nouveau enceinte. Le {{Date-|7 février 1638}}, le roi et la reine reçoivent officiellement le [[frère Fiacre]] pour s'entretenir avec lui sur les visions qu'il dit avoir eues de la [[Vierge Marie]]<ref>{{Ouvrage |auteur1=O. Teissier |titre=Histoire de la commune de Cotignac |lieu=Marseille |éditeur= |année=1860 |réimpression=1979 |pages totales=346 |passage=40-42 |lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=HjtYAAAAcAAJ |consulté le=6 juillet 2020}}.</ref> et de la promesse mariale d'un héritier pour la couronne. À l'issue de l'entretien, le roi missionne officiellement le religieux pour aller à l'[[église Notre-Dame-de-Grâces de Cotignac]], en son nom, faire une neuvaine de messes pour la bonne naissance du [[Dauphin (titre)|dauphin]]<ref name=ciel31/>{{,}}{{Sfn|O. Teissier|1860|p=42-43}}{{,}}{{Sfn|Yves Chiron|2007|p=133-134}}{{,}}<ref group=n>D'autant que la reine avait déjà fait plusieurs [[fausses couches]].</ref>.

Le {{Date-|10 février 1638-}}, en remerciement à la Vierge pour cet enfant à naître, le roi signe le [[Vœu de Louis XIII]], consacrant le royaume de [[France]] à la Vierge Marie et faisant du {{date|15 août}} un jour férié dans tout le royaume{{Sfn|O. Teissier|1860|p=46}}. En 1644, la reine faisant venir auprès d'elle le frère Fiacre lui dira : {{Citation|Je n'ai pas perdu de vue la grâce signalée que vous m'avez obtenue de la Sainte Vierge, qui m'a obtenu un fils}}. Et à cette occasion, elle lui confie une mission personnelle : porter un présent (à la Vierge Marie) dans le [[église Notre-Dame-de-Grâces de Cotignac|sanctuaire de Cotignac]], en remerciement de la naissance de son fils{{Sfn|O. Teissier|1860|p=46}}{{,}}<ref name=ciel31/>. En 1660, {{Louis XIV}} et sa mère se rendront en personne à [[Cotignac]] pour y prier et remercier la Vierge{{Sfn|O. Teissier|1860|p=49-54}}, puis en 1661 et 1667, le roi fera porter des présents à l'[[Église Notre-Dame-de-Grâces de Cotignac|église de Cotignac]], par le [[frère Fiacre]], en son nom{{Sfn|O. Teissier|1860|p=55-56}}{{,}}<ref group=n>Dont une plaque de marbre gravé d'un texte d'[[action de grâce]], plaque toujours présente dans l'église. Voir {{ Base Palissy | PM83000206 }}.</ref>. À l'occasion de son passage en [[Provence]] (en 1660), le roi et sa mère se rendent en pèlerinage à la [[grotte de la Sainte-Baume]], sur les pas de sainte [[Marie de Magdala|Marie-Madeleine]]<ref name=grotte_histoire>{{Lien web|langue=fr |url=http://www.saintebaume.org/grotte/histoire/|titre=Histoire de la Grotte|année=2017|site=saintebaume.org|consulté le=3 novembre 2021}}.</ref>.

La naissance de Louis{{Note|groupe=n|Archives départementales des Yvelines - Saint-Germain-en-Laye (B 1640-1656 ; vue 47/187 et 48/187) - Acte de baptême de {{Louis XIV}} Roy de France : {{Citation|Le vingt et un ({{Date-|avril 1643}}) mardy à cinq heures après midy furent supplées les ceremonies du sacrement de baptesme dans la chapelle du chasteau viel de St Germain en Laye par messire Dominique Seguier evesque de Meaux… à tres hault et tres puissant prince Monseigneur le Dauphin né du cinquième du mois de septembre mil six cent trente huit.... la marraine Madame Charlotte Marguerite de Montmorency, épouse de tres hault prince Henry de Bourbon prince du sang laquelle a donné le nom de Louys à monseigneur le Dauphin}}.}}, le {{Date-|5|septembre|1638}}<ref>Archives départementales des Yvelines - Saint-Germain-en-Laye ({{Nobr|B 1629-1640}} ; {{Nobr|vue 110/140}} ; {{p.|103}} du registre) - Acte d'ondoiement du {{Date-|5|septembre|1638}}, de Monseigneur le Dauphin (pas de prénom donné ; noté en marge de l'acte : {{citation|ondoyment de Louis quatorze Roy de France}}).</ref>, est suivie deux ans plus tard par celle de [[Philippe d'Orléans (1640-1701)|Philippe]]. La naissance tant espérée d'un dauphin écarte du trône le comploteur impénitent qu'était [[Gaston de France|Gaston d'Orléans]], le frère du roi.

=== Éducation ===
[[Fichier:A young King Louis XIV with his brother the Duke of Orléans attributed to the Beaubrun brothers.jpg|vignette|upright|{{Louis XIV}} et son frère cadet [[Philippe d'Orléans (1640-1701)|Philippe]], dit « le Petit Monsieur », en 1645. Tableau attribué à [[Henri et Charles Beaubrun]].|alt=Deux enfants en costume.]]
[[Fichier:Louis XIV 1648 Henri Testelin.jpg|vignette|upright|{{Louis XIV}} en costume de sacre, en 1648.|alt=tableau représentant un homme]]

En plus de ses fonctions ministérielles, [[Jules Mazarin|Mazarin]], parrain de {{Louis XIV}} (choisi comme tel par {{Louis XIII}} à la mort de Richelieu, le {{Date|4 décembre 1642}}<ref>{{Ouvrage |langue=fr |auteur1=[[Max Gallo]] |titre=Richelieu, la foi dans la France |lieu=Villeneuve d'Ascq & Mayenne |éditeur=[[XO éditions]] |date=août 2015 |pages totales=370 |isbn=978-2-84563-381-0 |consulté le=25 juillet 2020 |partie=entre {{p.|192 & 193}} |titre chapitre=Encart d'illustrations (page 16)}}.</ref>), se voit attribuer par la reine, en {{Date-|mars 1646}}, la responsabilité de l'éducation du jeune [[monarque]] et celle de son frère le duc Philippe d'Orléans (dit « [[Monsieur (Ancien Régime)|le Petit Monsieur]] »). L'usage est que les princes élevés par des gouvernantes « passent aux hommes » à l'âge de {{Nobr|7 ans}} (l'[[Paliers d'acquisition#Stade opératoire concret|âge de raison]] à l'époque), pour être confiés aux soins d'un gouverneur assisté d'un sous-gouverneur{{sfn|Bluche 1986|p=43}}. Mazarin devient donc « {{Page h'|surintendant}} au gouvernement et à la conduite de la personne du roi ainsi que de celle de {{M.|le duc d'Anjou}} », et confie la tâche de gouverneur au [[Nicolas de Neufville de Villeroy|maréchal de Villeroy]]. Le roi et son frère vont souvent à l'[[Hôtel de Villeroy (Paris, 1er arrondissement)|hôtel de Villeroy]], non loin du Palais-Royal. C'est alors que {{Louis XIV}} se lie d'une amitié à vie avec le fils du maréchal, [[François de Neufville de Villeroy|François de Villeroy]]. Le roi a eu différents précepteurs, notamment l'[[Hardouin de Péréfixe de Beaumont|abbé Péréfixe de Beaumont]] en {{Date-|1644}} et [[François de La Mothe Le Vayer (1588-1672)|François de La Mothe Le Vayer]].

À partir de {{Date-|1652}}, son meilleur éducateur est sans doute [[Pierre de La Porte]], son [[Liste de valets royaux et impériaux|premier valet de chambre]] et celui qui lui fait lecture de récits historiques<ref>{{Ouvrage |auteur1=Pierre de La Porte |titre=Mémoires de {{M.|de La Porte}}, premier valet de chambre de {{Louis XIV}}, contenant plusieurs particularités des règnes de {{Louis XIII}} et de {{Louis XIV}} |éditeur= |année=1756 |pages totales=325 |lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=J7IUAAAAQAAJ}}.</ref>. Malgré leurs efforts pour lui prodiguer des cours de [[latin]], d'[[histoire]], de [[mathématiques]], d'[[italien]] et de [[dessin]], Louis n'est pas un élève très travailleur. Par contre, suivant l'exemple du grand [[Collectionneur d'œuvres d'art|collectionneur d'art]] qu'est Mazarin, il se montre très sensible à la [[Peinture (art)|peinture]], à l'[[architecture]], à la [[musique]] et surtout à la [[danse]] qui est, à l'époque, une composante essentielle de l'éducation d'un [[gentilhomme]]{{sfn|Cornette 1997|p=140}}. Le jeune roi apprend aussi à jouer de la [[Guitare baroque|guitare]] auprès de [[Francesco Corbetta]]<ref>{{Lien web |titre=Le Babillard {{!}} Le roi de la guitare |url=http://www.le-babillard.fr/page.php?p=article&evn=4 |site=le-babillard.fr |consulté le=2021-03-20}}.</ref>.

Louis aurait bénéficié également d'une éducation sexuelle particulière, sa mère ayant demandé à la [[Catherine Bellier|baronne de Beauvais]], surnommée « Cateau la Borgnesse », de le « déniaiser » à sa majorité sexuelle{{Note|groupe=n|[[Primi Visconti]] rapporte que c'est elle qui avait déniaisé le jeune roi {{Louis XIV}}, qui avait alors {{nobr|16 ans}} <!--ailleurs dans l'article on disait {{nombre|14|ans}}-->: {{Citation|Tout affreuse qu'elle était, le prince étant fort jeune, l'ayant trouvé seul à l'écart dans le Louvre, elle le viola, ou du moins le surprit, de sorte qu'elle obtint ce qu'elle désirait}}. On prétend même que, nullement gêné, le jeune roi serait retourné plusieurs fois dans son lit. Anne d'Autriche aurait inventé ce stratagème afin de s'assurer que son fils était {{Citation|propre au mariage}}. Cette hypothèse est appuyée sur le fait que cette femme « issue de peu » eut l'extrême honneur de recevoir un cadeau étonnant de la reine mère qui l'aurait payée en pierres précieuses, prévues initialement pour les travaux du Louvre, avec lesquelles la Borgnesse s'est construit un hôtel particulier à Paris, aujourd'hui situé au 68, rue François-Miron, l'[[hôtel de Beauvais]].}}.

=== « Miraculé » ===
Dans son enfance, {{Louis XIV}} échappe à plusieurs reprises à la [[mort]]. À {{nobr|5 ans}}, il manque de se noyer dans un des bassins du [[jardin du Palais-Royal]]. Il est sauvé ''in extremis''. À {{nobr|9 ans}}, le {{Date-|10|novembre|1647}}, il est atteint de la [[variole]]<ref name="Stanis Perez">{{Article |auteur=Thomas Wieder |titre=Stanis Perez : {{Louis XIV}}, grand corps malade |périodique=[[Le Monde]] des livres |date=22 novembre 2007 |lire en ligne=http://abonnes.lemonde.fr/livres/article/2007/11/22/stanis-perez-louis-xiv-grand-corps-malade_981160_3260.html?xtmc=louis_xiv_fistule_anale&xtcr=3}}.</ref>. Dix jours plus tard, les médecins n'ont plus aucun espoir, mais le jeune Louis se remet « miraculeusement ». À {{nobr|15 ans}}, il a une tumeur au sein<ref name="Stanis Perez"/>. À {{nobr|17 ans}}, il souffre de [[Gonorrhée|blennoragie]]<ref name="Stanis Perez"/>.

L'alerte la plus sérieuse pour le Royaume a lieu le {{Date-|30 juin 1658}} : le roi, à {{nobr|19 ans}}, est victime d'une grave [[intoxication alimentaire]] (à cause de l'infection des eaux) et de [[fièvre typhoïde]]<ref name="Stanis Perez"/>, diagnostiquée comme un [[typhus exanthématique]], lors de la prise de [[Bergues]] dans le [[Flandre française|Nord]]. Le {{Date-|8 juillet 1658-}}, il reçoit les [[Onction des malades|derniers sacrements]] et la cour commence à préparer la succession.

Mais François Guénaut, le médecin d'Anne d'Autriche, lui donne un [[émétique]] à base d'[[antimoine]] et de [[vin]], qui guérit encore une fois « miraculeusement » le roi. Selon son secrétaire [[Toussaint Rose]], c'est à cette occasion qu'il perd une bonne partie de ses [[Cheveu|cheveux]] et se met à porter temporairement{{Note|groupe=n|Puis continûment, à partir de {{Date-|1673}}. Lorsque la calvitie devient importante, il adopte une perruque complète avec différentes longueurs et bouclages selon les circonstances (chasse, messe, souper, cérémonie officielle avec notamment la « perruque in-folio » ou « à la Royale », volumineuse perruque d'apparat au gros bouclage en étage) réalisées par Jean Quentin, premier barbier du roi ou [[Benoît Binet]], perruquier du roi<ref>{{Ouvrage |auteur1=Hélène Delalex |titre={{Louis XIV}} pour les Nuls |éditeur=First |année=2011 |passage=84 |isbn=}}.</ref>.}} la « [[perruque|perruque à fenêtre]] », dont les ouvertures laissent passer les quelques mèches qui lui restent<ref>{{Ouvrage |auteur1=Toussaint Rose |titre=Lettre à Mazarin du 4 août |lieu=Archives des Affaires étrangères |éditeur= |collection=Mémoires et documents |numéro dans collection=905 |année= |passage=fol 338 |isbn=}}.</ref>.

== Roi de France et de Navarre ==
=== Régence d'Anne d'Autriche (1643-1651) ===
{{article connexe|Anne d'Autriche (1601-1666){{!}}Anne d'Autriche|Mazarin}}

==== Cassation du testament de {{souverain-|Louis XIII}} ====
[[Fichier:Bb85790a33.jpg|alt=|vignette|{{Louis XIV}} en 1643, par [[Claude Déruet]].]]
À la mort de son père, Louis-Dieudonné, qui a {{Nobr|4 ans}} et demi, devient roi sous le nom de {{Louis XIV}}<ref group="n">On dit jusqu'au {{s-|XVII}} inclus, Louis [le] Quatorzième.</ref>. Son père {{Souverain2|Louis XIII}}, qui se méfie d'[[Anne d'Autriche (1601-1666)|Anne d'Autriche]] et de son frère le [[duc d'Orléans]] {{incise|notamment pour avoir participé à des complots contre [[Armand Jean du Plessis de Richelieu|Richelieu]]}} établit un [[Régent de France|conseil de régence]] comprenant, en sus des deux personnes citées, des fidèles de Richelieu, dont [[Jules Mazarin|Mazarin]]. Le texte y afférent est enregistré le {{Date-|21 avril 1643}} par le [[Parlement (royaume de France)|Parlement]] mais, dès le {{Date-|18 mai 1643}}, Anne d'Autriche se rend avec son fils au Parlement, pour faire casser cette disposition et se faire confier {{citation|l'administration, libre, absolue et entière du royaume pendant sa minorité}}{{sfn|Pernot 2012|p=14}}, en bref la régence pleine et entière. Elle maintient contre toute attente le [[Jules Mazarin|cardinal Mazarin]] en qualité de [[Principal ministre d'État|Premier ministre]], en dépit de la désapprobation des cercles politiques français de l'époque, dont beaucoup n'apprécient pas qu'un [[Italiens|Italien]], fidèle de Richelieu, dirige la France{{sfn|Pernot 2012|p=23}}.

La Régente quitte alors les appartements incommodes du [[Palais du Louvre|Louvre]] et s'installe au [[Palais-Royal|Palais-Cardinal]], légué par Richelieu à {{Louis XIII}}, pour profiter du [[Jardin du Palais-Royal|jardin]] où peuvent jouer le jeune {{Louis XIV}} et son frère. Le Palais-Cardinal devient alors le [[Palais-Royal]], où des [[Gouvernante des enfants royaux|gouvernantes]] abandonnent le jeune Louis à leurs [[Femme de chambre|femmes de chambre]] qui cèdent à tous ses caprices, ce qui fera naître la légende, colportée par les ''[[Mémoires de Saint-Simon|Mémoires]]'' de [[Louis de Rouvroy de Saint-Simon|Saint-Simon]], d'une éducation négligée<ref name="Bouyer">{{Ouvrage |langue=fr |auteur1=[[Christian Bouyer]] |titre=Les Enfants-Rois |lieu=Paris |éditeur=[[Pygmalion (maison d'édition)|Pygmalion]] |année=2012 |pages totales=288 |isbn=978-2-7564-0511-7}}.</ref>.

==== Épreuve de la Fronde ====
{{Article détaillé|Fronde (histoire)}}
[[Fichier:Grand-conde.jpg|vignette|gauche|upright|alt=Tableau représentant le portrait d'un homme.|[[Louis II de Bourbon-Condé|Le Grand Condé]], d'abord ferme soutien du pouvoir royal, puis opposant, avant de revenir en grâce après le [[traité des Pyrénées]].]]
[[Fichier:Louis XIV by Juste d'Egmont.jpg|vignette|upright|{{Louis XIV}} par [[Juste d'Egmont]], en 1654.|alt=Buste d'un homme.]]

En 1648, commence une période de forte contestation de l'autorité royale par les [[Parlement (royaume de France)|parlements]] et la noblesse, qu'on appelle la [[Fronde (histoire)|Fronde]]. Un épisode qui marque durablement le monarque. En réaction à ces événements, il s'applique à continuer le travail commencé par Richelieu, qui consiste à affaiblir les membres de la [[noblesse]] d'épée, en les obligeant à servir comme membres de sa [[Cour de France|cour]] et en transférant la réalité du pouvoir à une administration très centralisée, dirigée par la [[noblesse de robe]]<ref name="Bouyer"/>. Tout commence quand, en {{Date-|1648}}, le [[Parlement de Paris]] s'oppose aux impôts que veut lever Mazarin{{sfn|Pernot 2012|p=78}}. La [[Journée des barricades (1648)|Journée des barricades]] contraint la régente et le roi à s'installer à [[Rueil-Malmaison]]{{sfn|Pernot 2012|p=90}}. Si la cour revient assez vite dans la capitale, les exigences des parlementaires, appuyés par le très populaire [[coadjuteur]] de Paris, [[Jean-François Paul de Gondi]], obligent Mazarin à envisager un coup de force. En pleine nuit, au début de l'année {{Date-|1649}}, la régente et la cour quittent la capitale dans le but de revenir l'assiéger et la remettre à obéissance. L'affaire se complique quand des personnalités de la haute noblesse apportent leur soutien à la Fronde : le [[Armand de Bourbon-Conti|prince de Conti]], frère du [[Louis II de Bourbon-Condé|prince de Condé]]{{Note|groupe=n|Tous deux cousins directs du roi ; Condé est le premier prince du sang, et également un général talentueux.}}, [[François de Vendôme|Beaufort]], petit-fils d'{{souverain2|Henri IV (roi de France)}} et quelques autres veulent renverser Mazarin. Après quelques mois de siège conduit par Condé, un accord de paix ([[paix de Rueil]]) est trouvé, qui voit le triomphe du Parlement de Paris et la défaite de la cour. Toutefois, il s'agit d'une trêve plutôt que d'une paix{{sfn|Pernot 2012|p=140}}.

En {{Date-|1649}}-{{Date-|1650}}, un renversement d'alliance intervient, [[Jules Mazarin|Mazarin]] et la régente se rapprochent du Parlement et des chefs des Grands de la première Fronde et font enfermer Condé, leur ancien allié, et le [[Armand de Bourbon-Conti|prince de Conti]]{{sfn|Pernot 2012|p=162}}. Le {{Date-|25 décembre 1649}}, le roi fait sa première [[communion]] en l'[[église Saint-Eustache de Paris|église Saint-Eustache]] et entre, alors qu'il n'a que douze ans, au conseil, en 1650. À partir de {{Date-|février 1650}}, se développe la révolte princière, qui oblige Mazarin et la cour à se déplacer en province, pour mener des expéditions militaires{{sfn|Pernot 2012|p=167}}. En {{Date-|1651}}, Gondi et Beaufort, chefs des Grands de la première Fronde, s'allient au Parlement pour renverser Mazarin, qu'une émeute oblige à s'exiler le {{Date-|8 février 1651}}. La reine et le jeune Louis essaient de s'enfuir de la capitale mais, alarmés, les Parisiens envahissent le [[Palais-Royal]], où loge le roi, désormais prisonnier de la Fronde.

Le coadjuteur et le [[Gaston de France|duc d'Orléans]] vont alors faire subir au roi une humiliation qu'il n'oubliera jamais : en pleine nuit, ils confient au capitaine des [[Gardes suisses (France)|Gardes suisses]] du duc de vérifier ''{{langue|la|de visu}}'' qu'il est bien là{{sfn|Pernot 2012|p=200}}.

Le {{Date-|7 septembre 1651}}, un [[lit de justice]] déclare la majorité du roi (la majorité royale est à treize ans). Tous les Grands du royaume viennent lui rendre hommage, sauf Condé qui, de [[Guyenne]], lève une armée pour marcher sur Paris{{sfn|Pernot 2012|p=271}}. Le {{Date-|27 septembre 1651-}}, pour éviter d'être à nouveau prisonnière dans Paris, la cour quitte la capitale pour [[Fontainebleau]], puis [[Bourges]], où sont stationnés les quatre mille hommes du [[François-Annibal d'Estrées|maréchal d'Estrée]]{{sfn|Pernot 2012|p=271}}. Commence alors une guerre civile qui {{citation|va contribuer à clarifier les choses}}{{sfn|Pernot 2012|p=271}}. Le {{Date-|12 décembre 1651-}}, {{Louis XIV}} autorise Mazarin à revenir en France ; en réaction, le Parlement de Paris, qui a banni le cardinal, met sa tête à prix pour {{unité|150000|[[Livre française|livres]]}}{{sfn|Pernot 2012|p=279-280}}.

Début {{Date-|1652}}, trois camps se font face : la cour, libérée de la tutelle instaurée par le Parlement en {{Date-|1648}}, le Parlement et enfin Condé et les Grands{{sfn|Pernot 2012|p=282}}. Condé va dominer Paris durant la première partie de l'année {{Date-|1652}}, en s'appuyant notamment sur le peuple, qu'il manipule en partie. Mais il perd des positions en province, tandis que Paris, qui supporte de moins en moins sa tyrannie, le contraint à quitter la ville le {{Date-|13 octobre 1652-}} avec ses troupes{{sfn|Pernot 2012|p=321}}. Le {{Date-|21 octobre 1652-}}, [[Anne d'Autriche (1601-1666)|Anne d'Autriche]] et son fils {{Louis XIV}}, accompagnés du roi déchu {{Souverain2|Charles II (roi d'Angleterre)|d'Angleterre}}, rentrent dans la capitale, entourés des princes resté fidèles, au premier rang desquels se tenait [[César de Vendôme]], oncle du roi<ref name="Renault1">{{Ouvrage |langue=fr |prénom1=Jean-Jacques |nom1=Renault |titre=César de Vendôme |sous-titre=|lieu= |Éditions du Cherche-Lune|numéro dans collection= |année=2015 |pages totales=508 |passage= page 327 |isbn=978-2-904736-73-5|lire en ligne=}}.</ref>. L'[[absolutisme]] de [[droit divin]] commence à se mettre en place. Une lettre que le roi adresse au Parlement permet d'en percevoir la substance :

{{citation bloc|Toute autorité Nous appartient. Nous la tenons de Dieu seul sans qu'aucune personne, de quelque condition qu'elle soit, puisse y prétendre […] Les fonctions de justice, des armes, des finances doivent toujours être séparées ; les officiers du Parlement n'ont d'autre pouvoir que celui que Nous avons daigné leur confier pour rendre la justice […] La postérité pourra-t-elle croire que ces officiers ont prétendu présider au gouvernement du royaume, former des conseils et percevoir des impôts, s'arroger enfin la plénitude d'un pouvoir qui n'est due qu'à Nous{{sfn|Pernot 2012|p=321-322}}}}

Le {{Date-|22 octobre 1653}}, {{Louis XIV}}, alors âgé de quinze ans, convoque un [[lit de justice]] où, rompant avec la tradition, il apparaît en chef militaire avec gardes et tambours. À cette occasion, il proclame une amnistie générale, tout en bannissant de Paris des Grands, des parlementaires, ainsi que des serviteurs de la [[maison de Condé]]. Quant au Parlement, il lui interdit {{citation|de prendre à l'avenir aucune connaissance des affaires de l'État et des finances}}{{sfn|Pernot 2012|p=323}}.

==== Sacre du roi à Reims ====
{{Louis XIV}} est [[Sacre des rois de France|sacré]] le {{Date-|7 juin 1654}} en la [[Cathédrale Notre-Dame de Reims|cathédrale de Reims]] par [[Simon Legras]], [[Liste des évêques de Soissons|évêque]] de [[Soissons]]. Il laisse les affaires politiques à Mazarin, tandis qu'il continue sa formation militaire auprès de [[Henri de La Tour d'Auvergne (vicomte de Turenne)|Turenne]]{{sfn|Pernot 2012|p=118-121}}.

==== Mariage avec Marie-Thérèse d'Autriche ====
[[Fichier:Traite-Pyrenees.jpg|vignette|Entrevue de {{Louis XIV}} et de {{souverain2|Philippe IV (roi d'Espagne)}} dans l'[[île des Faisans]] en {{Date-|1659}}. On distingue la fille de {{souverain-|Philippe IV}}, future reine de France, derrière lui.]]

Le {{Date-|7 novembre 1659}}, les Espagnols acceptent de signer le [[traité des Pyrénées]], qui fixe les [[Frontière entre l'Espagne et la France|frontières entre la France et l'Espagne]]. De son côté, {{Louis XIV}} consent, bon gré mal gré, à respecter une des clauses du traité : épouser l'[[infant]]e [[Marie-Thérèse d'Autriche (1638-1683)|Marie-Thérèse d'Autriche]], fille de {{souverain2|Philippe IV (roi d'Espagne)}}, [[Liste des rois et reines d'Espagne|roi d'Espagne]], et d'[[Élisabeth de France (1602-1644)|Élisabeth de France]]{{sfn|Bluche 1986|p=130}}. Les époux sont [[double cousin|doublement cousins germains]] : la reine mère [[Anne d'Autriche (1601-1666)|Anne d'Autriche]] étant la sœur de {{souverain-|Philippe IV}} et Élisabeth de France la sœur de {{souverain2|Louis XIII}}. Ce mariage a cependant pour but de rapprocher la France de l'Espagne. Il a lieu le {{Date-|9 juin 1660}} en l'[[église Saint-Jean-Baptiste de Saint-Jean-de-Luz]]{{sfn|Deschodt 2008|p=59}}.

Louis ne connaît sa femme que depuis trois jours, celle-ci ne parle pas un mot de français, mais le roi « l'honore » fougueusement devant témoins dès la [[nuit de noces]]{{Sfn|Petitfils 2002}}. Selon d'autres sources, cette nuit de noces, contrairement à l'usage, n'aurait pas eu de témoin<ref>[[Georges Bordonove]], ''Les Rois qui ont fait la France, {{Louis XIV}}, Roi Soleil'', Pygmalion, 1983.</ref>.

Notons qu'à l'occasion de ce mariage, Marie-Thérèse doit renoncer à ses droits sur le [[Monarchie catholique espagnole|trône d'Espagne]] et que {{souverain2|Philippe IV (roi d'Espagne)|d'Espagne}}, en contrepartie, s'engage à verser {{citation|{{unité|500000|[[Écu (monnaie)|écus]]}} d'or payables en trois versements}}. Il est convenu que si ce paiement n'est pas effectué, la renonciation devient caduque{{sfn|Bluche 1986|p=134}}.

=== Début de la direction du gouvernement (1661-1680) ===
==== Prise de pouvoir à la mort de Mazarin ====
[[Fichier:Portrait Nicolas Fouquet par Charles Le Brun.jpg|vignette|upright|[[Nicolas Fouquet]], surintendant des finances.|alt=Tableau représentant un homme.]]
[[Image:Louise de la Vallière.jpg|thumb|upright|[[Louise de La Vallière|Madame de la Vallière]] (portrait par [[Jean Nocret]], 1667).]]
À la mort de [[Jules Mazarin|Mazarin]], le {{Date+|9 mars 1661}}, la première décision de {{Louis XIV}} est de supprimer la fonction de [[Principal ministre d'État|ministre principal]] et de prendre personnellement le contrôle du gouvernement, dès le {{Date-|10 mars 1661}}{{sfn|Bluche 1986|p=144}}, par un « [[coup de majesté]] ».

La situation financière dégradée<ref group=n>Y.M. Bercé (v. bibliographie) parle même d'{{Citation|impuissance fiscale}} à son arrivée au pouvoir et de {{Citation|terrorisme fiscal}} infligé par le surintendant.</ref>, dont l'informe [[Jean-Baptiste Colbert]], et le fort mécontentement des [[Territoires du royaume de France|provinces]] contre la pression fiscale sont préoccupants. Les causes en sont la guerre ruineuse contre la [[Maison de Habsbourg en Espagne|maison d'Espagne]] et les cinq années de la [[Fronde (histoire)|Fronde]], mais aussi l'enrichissement personnel effréné de Mazarin, dont Colbert lui-même a profité, et celui du {{Page h'|surintendant}} [[Nicolas Fouquet|Fouquet]].

Le {{Date-|5 septembre 1661}}, jour de ses {{nobr|23 ans}}, le roi fait arrêter Fouquet au grand jour, par [[d'Artagnan]]. Il supprime, par la même occasion, le poste de [[surintendant des finances]]{{sfn|Bluche 1986|p=156}}.

Les raisons de l'incarcération de Nicolas Fouquet sont nombreuses et vont au-delà d'un problème d'enrichissement. Pour comprendre le problème, il convient de noter que {{Louis XIV}}, après la mort de Mazarin, n'est pas pris au sérieux et a besoin de s'affirmer{{sfn|Petitfils 2002|p=215}}. Or, précisément, Nicolas Fouquet peut être perçu comme une menace politique : il fait [[Fortification|fortifier]] sa possession de [[Belle-Île-en-Mer]], il cherche à se constituer un réseau de fidèles et il n'hésite pas à faire pression sur la mère du roi en soudoyant son confesseur{{sfn|Petitfils 2002|p=215}}. Il tente même de corrompre l'amie de {{Louis XIV}}, [[Louise de La Vallière|Mademoiselle de La Vallière]], pour qu'elle le soutienne, ce qui la choque profondément. Par ailleurs, il est proche des [[Compagnie du Saint-Sacrement|dévots]], à un moment où le roi n'adhère pas à cette doctrine. Enfin, pour [[Jean-Christian Petitfils]], il convient de prendre en compte la jalousie de Colbert vis-à-vis de Fouquet. Le premier nommé, s'il est un ministre de qualité que les historiens [[Radicalisme|radicaux]] de la [[Troisième République (France)|Troisième République]] ont honoré{{sfn|Petitfils 2002|p=202}}, est aussi {{citation|un homme brutal... d'une froideur glaciale}}, à qui [[Madame de Sévigné]] a donné le sobriquet {{citation|Le Nord}}{{sfn|Petitfils 2002|p=215}} et, partant, un adversaire redoutable.

{{Louis XIV}} crée une [[chambre de justice]] pour examiner les comptes des financiers, dont ceux de Fouquet. En {{Date-|1665}}, les juges condamnent Fouquet au bannissement, sentence que le roi commue en emprisonnement à vie à [[Pignerol]]{{sfn|Petitfils 2002|p=215}}. En juillet {{Date-|1665}}, les juges renoncent à poursuivre les fermiers et les traitants (financiers participants à la collecte des impôts), amis de Fouquet, moyennant le versement d'une taxe forfaitaire{{sfn|Petitfils 2002|p=215-216}}. Tout cela permet à l'État de récupérer une centaine de millions de livres{{sfn |Petitfils 2002|p=216}}.

==== Méthode de gouvernement ====
Le roi gouverne avec divers ministres de confiance : la [[Chancelier de France|chancellerie]] est occupée par [[Pierre Séguier]], puis par [[Michel Le Tellier (homme d'État)|Michel Le Tellier]], la [[Surintendant des finances|surintendance des finances]] est entre les mains de [[Jean-Baptiste Colbert|Colbert]], le [[Secrétaire d'État de la Guerre#France|secrétariat d'État à la guerre]] est confié à Michel Le Tellier, puis à son fils le [[François Michel Le Tellier de Louvois|marquis de Louvois]], le [[Liste des ministres français de la Maison du Roi|secrétariat d'État à la maison royale]] et au clergé passe aux mains de [[Henri du Plessis-Guénégaud]], jusqu'à la destitution de ce dernier.

Le roi a plusieurs [[Maîtresse royale|maîtresses]], dont les plus notables sont [[Louise de La Vallière]] et [[Madame de Montespan]]. Cette dernière, qui a en commun avec le roi {{citation|le goût du faste et de la grandeur}}{{sfn|Petitfils 2002|p=314}}, le conseille dans le domaine artistique. Elle soutient [[Jean-Baptiste Lully]], [[Jean Racine|Racine]] et [[Nicolas Boileau|Boileau]]. {{Louis XIV}}, alors dans la quarantaine, semble pris d'une frénésie sensuelle intense et mène une vie sentimentale agitée{{sfn|Petitfils 2002|p=304}}. Les choses changent au début des années {{Date-|1680}}, quand, après la mort de [[Angélique de Fontanges|Mademoiselle de Fontanges]], sous l'influence de Madame de Maintenon, le roi se rapproche de la reine puis, après la mort de sa femme, épouse secrètement [[Madame de Maintenon]]. L'[[affaire des poisons]] contribue également à cette conversion{{sfn|Bluche 1986|p=564}}.

Des [[Compagnie de Jésus|jésuites]] se succèdent au poste de confesseur royal. Il est d'abord occupé de {{Date-|1654}} à {{Date-|1670}} par le [[François Annat|père Annat]], un anti-janséniste farouche, attaqué par [[Blaise Pascal|Pascal]] dans ''[[Les Provinciales]]'', puis par le {{Abréviation discrète|père Ferrier|Jean Ferrier}} de {{Date-|1670}} à {{Date-|1674}}<ref>Jean Racine [https://books.google.ca/books?id=ThhbAAAAQAAJ&lpg=PA399&dq=P%C3%A8re%20Ferrier%20j%C3%A9suite&hl=fr&pg=PA399#v=onepage&q=P%C3%A8re%20Ferrier%20j%C3%A9suite&f=false ''Abrégé de l'histoire de Port-Royal''].</ref>, auquel succède le [[François d'Aix de La Chaise|père de la Chaize]] (qui donnera son nom au [[Cimetière du Père-Lachaise|cimetière du 'Père-Lachaise]]') de {{Date-|1675}} à {{Date-|1709}}{{sfn|Bluche 1986|p=578}}{{,}}<ref>[https://books.google.ca/books?id=ER2AxQEACAAJ&dq ''Journal du père de La Chaize, confesseur de {{Louis XIV}}''].</ref> et enfin par le [[Michel Le Tellier (jésuite)|père Le Tellier]]{{Note|groupe=n|Michel Le Tellier n'est pas parent avec le ministre homonyme.}}.

==== Guerres pendant le règne ====
[[Fichier:Charles_Le_Brun_-_Louis_XIV_-_WGA12539.jpg|alt=Portrait de Louis XIV|vignette|''Portrait de {{Louis XIV}}'', pastel gris sur papier par [[Charles Le Brun]], 1667.]]
Durant cette période, {{Louis XIV}} mène deux guerres. D'abord la [[guerre de Dévolution]] ({{Date-|1667}}-{{Date-|1668}}), provoquée par le non-paiement des sommes dues pour le renoncement de la reine au trône d'Espagne, puis la [[guerre de Hollande]] ({{Date-|1672}}-{{Date-|1678}}). La première se conclut par le [[traité d'Aix-la-Chapelle (1668)]], par lequel le royaume de France conserve les places fortes occupées ou fortifiées par les armées françaises pendant la [[Guerre de Dévolution#La campagne de Flandre|campagne de Flandre]], ainsi que leurs dépendances : des villes du [[comté de Hainaut]] et la [[forteresse de Charleroi]] dans le [[comté de Namur]]<ref>{{Lien web |langue=en |url=http://www.fortified-places.com/charleroi/default.htm |titre=Forteresse de Charleroi |consulté le=11 novembre 2019}}.</ref>. En contrepartie, la France rend à l'Espagne la [[Franche-Comté]], territoire qui lui reviendra dix ans plus tard par le [[Traités de Nimègue|traité de Nimègue]] ({{Date-|10 août 1678}}), qui conclut la [[guerre de Hollande]]<ref>{{Ouvrage |auteur1=[[Alistair Horne]] |titre=La Belle France |sous-titre=A Short History |éditeur=Vintage |année=2004 |pages totales=485 |passage=164 |isbn=978-1-4000-3487-1 |lire en ligne=https://books.google.com/books?id=SZ7tAAAAMAAJ |consulté le=7 décembre 2010}}.</ref>.

{{Louis XIV}} pratique une politique répressive forte envers les [[Roms|Bohémiens]]. Dans la droite ligne du décret du roi de {{Date-|1666}}, l'ordonnance du {{Date-|11 juillet 1682}} confirme et ordonne que tous les Bohémiens mâles, dans toutes les provinces du royaume où ils vivent, soient condamnés aux [[Galères (peine)|galères]] à perpétuité, leurs femmes rasées et leurs enfants enfermés dans des [[hospice]]s<ref>[https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8607058x '' Déclaration... contre les vagabons et gens appelez bohëmes et bohëmiennes et ceux qui leur donnent retraite. Registré en Parlement le 4 aoust 1682'']</ref>. Les nobles qui leur donnaient asile dans leurs châteaux voient leurs [[fief]]s frappés de [[Commise|confiscation]]<ref>[[Max Gallo]], ''Le Sens des choses'', sous la direction de [[Jacques Attali]], Robert Laffont, 2009, {{p.|246}}.</ref>{{,}}<ref>[[Jean-Pierre Liégeois]], ''Roms en Europe'', Council of Europe, 2007, [https://books.google.fr/books?id=J96ttbXc0REC&pg=PA109 {{p.|109-110}}].</ref>. Ces mesures visent aussi à lutter contre le [[vagabondage]] transfrontalier, et l'utilisation de [[mercenaire]]s par certains nobles.

=== Maturité et période de gloire (1680-1710) ===
==== Mutations des années {{Date-|1680}} ====
[[Fichier:Follower Pierre Mignard - Portrait of a Lady, said to be Madame de Montespan.jpg|vignette|De [[Madame de Montespan]] (portrait de [[Pierre Mignard]])...|alt=Tableau représentant le portrait d'une femme.]]
[[Fichier:Madame de Maintenon.jpg|vignette|upright|droite|...à [[Madame de Maintenon]] (portrait de {{souverain3|Nicolas II de Larmessin}}).|alt=Tableau représentant le portrait d'une femme.]]
Vers {{Date-|1681}}, le roi revient à une vie privée conforme aux normes sociales, sous l'influence conjuguée de ses confesseurs, de l'[[affaire des poisons]] et de [[Madame de Maintenon]]{{sfn|Bluche 1986|p=564}}. L'année {{Date-|1683}} est marquée par la mort de [[Jean-Baptiste Colbert|Colbert]], un de ses principaux ministres et l'{{citation|agent de cet [[absolutisme]] rationnel qui se développe alors, fruit de la révolution intellectuelle de la première moitié du siècle}}.

La reine [[Marie-Thérèse d'Autriche (1638-1683)|Marie-Thérèse]] meurt la même année, ce qui permet au roi d'épouser secrètement [[Madame de Maintenon]], lors d'une cérémonie intime, qui eut lieu vraisemblablement en {{Date-|1683}} (les dates de {{Date-|janvier 1684}} ou {{Date-|janvier 1686}} ont aussi été avancées){{sfn|Petitfils 2002|p=311}}. En {{Date-|1684}}, la dévotion s'installe en force à la cour{{sfn|Petitfils 2002|p=311}}, qui a emménagé à [[Château de Versailles|Versailles]] depuis {{Date-|1682}}. En {{Date-|1685}}, la [[Édit de Fontainebleau (1685)|révocation]] de l'[[édit de Nantes]], qui octroyait la [[Liberté de religion|liberté religieuse]] aux [[Huguenot|protestants français]], est une catastrophe économique, avec la fuite massive des industries et capitaux des [[Huguenot|Huguenots]]. Mais elle redore le prestige de {{Louis XIV}} vis-à-vis des princes catholiques (oisifs et non investisseurs) et lui restitue {{citation|sa place parmi les grands chefs de la chrétienté}}{{sfn|Petitfils 2002|p=482}}{{,}}{{Note|groupe=n|Voir la section [[#Le roi et la religion|Le roi et la religion]].}}.

==== Montée de l'absolutisme ====
[[Fichier:Nocret, attributed to - Louis XIV of France - Versailles, MV2066.jpg|alt=|vignette|{{Louis XIV}} vers 1685, par [[Jean Nocret]].]]
Pendant trente ans, de 1661 jusque vers {{Date-|1691}}, le roi gouverne en arbitrant entre ses principaux ministres : [[Jean-Baptiste Colbert|Colbert]], [[Michel Le Tellier (homme d'État)|Le Tellier]] et [[François Michel Le Tellier de Louvois|Louvois]]. Leur mort (le dernier, Louvois, décède en {{Date-|1691}}) change la donne. Et elle dégrade fortement les comptes publics, surveillés par [[Colbertisme|Colbert]]. La mort du ministre des Armées ([[François Michel Le Tellier de Louvois|Louvois]]) permet au roi de répartir le [[Secrétaire d'État de la Guerre#France|secrétariat d'État à la guerre]] entre plusieurs mains, ce qui lui permet de s'impliquer davantage dans le gouvernement quotidien. [[Louis de Rouvroy de Saint-Simon|Saint-Simon]] note que le roi prend alors plaisir {{citation|à s'entourer de « fort jeunes gens » ou d'obscurs [[commis]] peu expérimentés, afin de mettre en relief ses capacités personnelles}}{{sfn|Petitfils 2002|p=517-516}}. À partir de cette date, il devient à la fois chef d'État et de gouvernement{{sfn|Petitfils 2002|p=517-516}}.

==== Affaires étrangères ====
La [[guerre des Réunions]] qui, entre {{Date-|1683}} et {{Date-|1684}}, oppose la France et l'Espagne, se termine par la [[trêve de Ratisbonne]], signée pour permettre à l'[[Liste des souverains du Saint-Empire|empereur]] {{Souverain2|Léopold Ier (empereur du Saint-Empire)}} de combattre les [[Dynastie ottomane|Ottomans]]. De {{Date-|1688}} à {{Date-|1697}}, la [[guerre de la Ligue d'Augsbourg]] oppose {{Louis XIV}}, alors allié à l'[[Empire ottoman]] et aux [[Jacobitisme|jacobites]] [[Royaume d'Irlande|irlandais]] et [[Royaume d'Écosse|écossais]], à une large coalition européenne, la [[ligue d'Augsbourg]] menée par l'Anglo-[[Provinces-Unies|Néerlandais]] {{souverain2|Guillaume III d'Orange-Nassau}}, l'empereur du [[Saint-Empire romain germanique]] {{Souverain2|Léopold Ier (empereur du Saint-Empire)}}, le [[roi d'Espagne]] {{souverain2|Charles II (roi d'Espagne)}}, {{souverain2|Victor-Amédée II|de Savoie}} et de nombreux princes du Saint-Empire romain germanique. Ce conflit se déroule principalement en Europe continentale et dans les mers voisines. En {{Date-|août 1695}}, l'armée française, menée par [[François de Neufville de Villeroy|Villeroy]], procède au [[bombardement de Bruxelles de 1695|bombardement de Bruxelles]], opération qui suscite l'indignation des capitales européennes<ref>[https://www.lesoir.be/art/un-livre-sur-le-bombardement-de-bruxelles-par-louis-xiv_t-19921006-Z05WRJ.html Un livre sur le bombardement de Bruxelles], ''Le Soir'', 6-10-1992.</ref>.

Le conflit n'épargne pas le [[Rébellions jacobites|territoire irlandais]], où {{Guillaume III}} et {{souverain2|Jacques II (roi d'Angleterre)}} se disputent le contrôle des [[îles Britanniques]]. Enfin, ce conflit donne lieu à la [[première guerre intercoloniale]], opposant les [[Nouvelle-Angleterre|colonies anglaises]] et [[Nouvelle-France|françaises]] et leurs [[Confédération Wabanaki|alliés amérindiens]] en Amérique du Nord.

Finalement, cette guerre aboutit au [[traité de Ryswick]] (1697), par lequel la France reconnaît la légitimité de [[Guillaume III d'Orange-Nassau|Guillaume d'Orange]] au trône anglais. Si le [[Liste des monarques d'Angleterre|souverain anglais]] sort renforcé de l'épreuve, la France, surveillée par ses voisins de la [[ligue d'Augsbourg]], n'est plus en mesure de dicter sa loi. Globalement, ce traité est mal accueilli en France{{sfn|Petitfils 2002|p=512}}.

La [[guerre de Succession d'Espagne]], quant à elle, oppose encore la France à quasiment tous ses voisins, à l'exception de l'Espagne. Elle se conclut par les [[traités d'Utrecht (1713)]] et le [[traité de Rastatt]] ({{Date-|1714}}). Ces traités sont écrits en français, qui est la [[langue diplomatique]] européenne, situation qui perdurera jusqu'en {{Date-|1919}}.

=== Dernières années (1711-1714) ===
[[Fichier:Nicolas de Largillière 003.jpg|vignette|{{Louis XIV}} et sa famille, par [[Nicolas de Largillierre]].|alt=Tableau représentant la famille royale.]]
{{article détaillé|Descendance de Louis XIV{{!}}Descendance de {{Louis XIV}}}}

La fin du règne est assombrie par la perte, entre {{Date-|1711}} et {{Date-|1714}}, de presque tous ses [[Liste des héritiers du trône de France|héritiers]] légitimes{{sfn|Bluche 1986|p=860}} et par une santé déclinante. En 1711, le [[Louis de France (1661-1711)|Grand Dauphin]], seul fils légitime survivant, décède de la [[variole]] à {{nobr|49 ans}}{{sfn|Deschodt 2008|p=250}}. En [[1712]], une épidémie de [[rougeole]] prive le roi de l'aîné de ses trois petits-fils. Le nouveau [[Dauphin (titre)|dauphin]], l'[[Louis de France (1682-1712)|ex-duc de Bourgogne]], père du futur [[Louis XV]], meurt à {{nobr|29 ans}} avec [[Marie-Adélaïde de Savoie|son épouse]] et [[Louis de France (1707-1712)|son fils]] de {{nobr|5 ans}} (un premier enfant était déjà mort en bas âge en {{Date-|1705}}). Ne survit qu'un petit garçon de deux ans, [[Louis XV|Louis]], sauvé de l'épidémie (et des médecins<ref>{{Ouvrage |auteur1=François Bluche |titre={{Louis XV}} |éditeur= |année= |passage=16-17 |isbn=}}.</ref>) par [[Charlotte de La Mothe-Houdancourt|sa gouvernante]]{{sfn|Deschodt 2008|p=252}}, mais qui reste affaibli : il est le dernier arrière-petit-fils légitime du roi régnant, d'autant plus isolé qu'en [[1714]], son oncle, le [[Charles de France (1686-1714)|duc de Berry]], le plus jeune des petits-fils du roi, meurt sans héritier, des suites d'une [[chute de cheval]].

Pour tenter de faire face à un manque d'héritier légitime, {{Louis XIV}} décide de renforcer la [[Maison de France|maison royale]] en accordant, par un édit du {{Date-|29 juillet 1714}}, le droit de succession, « à défaut de tous les princes de sang royal »<ref>François Lebrun, dans ''Journal de la France…'', Quarto Gallimard, 2001.</ref>, au [[Louis-Auguste de Bourbon (1670-1736)|duc du Maine]] et au [[Louis-Alexandre de Bourbon|comte de Toulouse]], deux fils [[Bâtard légitimé|bâtards légitimés]] qu'il avait eus avec [[Madame de Montespan]]. Cette décision viole les [[Lois fondamentales du royaume de France|lois fondamentales du Royaume]], qui ont toujours écarté du trône les enfants bâtards et se heurte à une forte incompréhension{{sfn|Bluche 1986|p=787}}. Il semble que le roi soit prêt à renier les vieilles lois de succession pour écarter du trône et de la [[Régent de France|régence]] son neveu [[Philippe d'Orléans (1674-1723)|Philippe d'Orléans]], son successeur potentiel, qu'il trouve paresseux et [[Débauche|débauché]]{{sfn|Bluche 1986|p=871}}.

=== Mort du roi et succession ===
{{Article détaillé|Mort de Louis XIV{{!}}Mort de {{Louis XIV}}}}
[[Fichier:Thomas Jones Barker - La Mort de Louis XIV au palais de Versailles.jpg|vignette|''La mort de {{Louis XIV}}'', [[peinture d'histoire]] de [[Thomas Jones Barker]] (en), vers 1835-1840.]]
Le {{Date-|1er septembre 1715}}, aux alentours de {{Heure|8|15}} du matin, le roi meurt d'une [[ischémie]] aiguë du membre inférieur, causée par une [[embolie]] liée à une [[Trouble du rythme cardiaque|arythmie]] complète, compliquée de [[gangrène]]{{sfn|Deschodt 2008|p=272}}, à l'âge de {{nobr|76 ans}}. Il est entouré de ses [[courtisan]]s. L'agonie a duré plusieurs jours.

Sa mort met un terme à un [[Règne (politique)|règne]] de soixante-douze années et cent jours dont cinquante-quatre années de règne effectif.

Le [[Parlement de Paris]] casse son testament dès le {{Date-|4 septembre 1715-}}{{sfn|Deschodt 2008|p=272}}, ouvrant une ère de retour en force des nobles et des parlementaires. Pour la plupart de ses sujets, le souverain vieillissant est devenu une figure de plus en plus lointaine. Le cortège funéraire est même hué ou raillé sur la route de [[Saint-Denis (Seine-Saint-Denis)|Saint-Denis]]. Cependant, de nombreuses cours étrangères, même traditionnellement ennemies de la [[France]], ont conscience de la disparition d'un monarque d'exception ; ainsi {{Souverain2|Frédéric-Guillaume Ier (roi de Prusse)|de Prusse}} n'a besoin de donner aucune précision de nom lorsqu'il annonce solennellement à son entourage : {{Citation|Messieurs, le roi est mort}}{{sfn|Deschodt 2008|p=273}}.

[[Fichier:Basilica di saint Denis luigi XIV 2.JPG|vignette|upright|[[Cénotaphe]] de {{Louis XIV}} dans la [[basilique Saint-Denis]].|alt=Caveau du roi]]
Le corps de {{Louis XIV}} est déposé dans le [[Caveau funéraire|caveau]] des [[Maison capétienne de Bourbon|Bourbons]], dans la [[crypte]] de la [[Nécropole royale de la basilique de Saint-Denis|basilique Saint-Denis]]{{Note|groupe=n|Archives départementales des Yvelines - Versailles (Notre-Dame)(S 1715-1715 ; vue 61/78 ; page 54 du registre) : {{citation|L'an mil sept cent quinze le 4e de 7bre les entrailles de Tres haut, Tres puissant et Tres Excellent Prince {{souverain-|Louïs XIV}}. Roi de france et de navarre, decedé le 1er du courant ont eté transportées à l'Église de Nre Dame de Paris, le 6e dud. mois le cœur a eté transferé à la maison de St. Louïs des Jesuites, à Paris ; Et le corps a eté conduit le 9e. du même mois à l'abbaïe roïalle des Benedictins de St. Denis en france en presence de nous soussigné curé de Versailles.}} (signé : Huchon).}}. Son cercueil sera [[Profanation des tombes de la basilique Saint-Denis|profané le {{Date-|14 octobre 1793}}]] et son corps sera jeté dans une [[fosse commune]] attenante à la basilique, vers le nord<ref>{{Ouvrage |auteur1=Francine Demichel |titre=Saint-Denis ou le Jugement dernier des rois |éditeur=éditions PSD |année=1993 |passage=260 |isbn=}}.</ref>.

Au {{s-|XIX}}, {{Louis-Philippe Ier}} commande un monument dans la [[Chapelle des Bourbons|chapelle commémorative des Bourbons]] à Saint-Denis, en {{Date-|1841}}-{{Date-|1842}}. L'architecte [[François Debret]] est chargé de concevoir un [[cénotaphe]], en remployant plusieurs sculptures d'origines diverses : un médaillon central représentant un portrait du roi de profil, réalisé par l'atelier du sculpteur [[François Girardon|Girardon]] au {{s-|XVII}}, mais dont l'auteur précis n'est pas connu, entouré de deux figures de [[Vertu]]s sculptées par [[Jacques-Philippe Le Sueur|Le Sueur]] et provenant du tombeau de [[Guillaume du Vair]], évêque-comte de [[Lisieux]], et surmonté d'un ange sculpté par [[Jacques Bousseau]] au {{s-|XVIII}}, provenant de l'église de [[Quartier de Picpus|Picpus]]. De part et d'autre de cet ensemble de sculptures sont placées quatre colonnes en marbre rouge provenant de l'[[église Saint-Landry]], et des [[bas-relief]]s provenant du tombeau de [[Louis de Cossé de Brissac (1625-1661)|Louis de Cossé]] à l'église du [[couvent des Célestins de Paris]] (les génies funéraires provenant du même tombeau, ont été déplacés par [[Eugène Viollet-le-Duc|Viollet-le-Duc]] au [[musée du Louvre]])<ref>{{Lien web |url=https://saintdenis-tombeaux.1fr1.net/t292-le-tombeau-de-louis-xiv-en-realite-cenotaphe-du-xixs |titre={{Louis XIV}} - Le « tombeau » de {{Louis XIV}} (en réalité cénotaphe du {{s mini-|XIX}}) |site=Saint-Denis, cimetière des Rois |consulté le=11 11 2019}}.</ref>.

== Figure de l'absolutisme à la française ==
[[Fichier:Louis-xiv-lebrunl.jpg|vignette|upright|{{Louis XIV}} en {{Date-|1661}} par [[Charles Le Brun]]. À {{nobr|23 ans}}, il décide de prendre réellement le pouvoir en devenant monarque absolu.]]

Sous {{Louis XIV}}, parfois appelé le ''Roi-Soleil'' (appellation tardive qui remonte à la [[monarchie de Juillet]], même si le roi prend cet emblème lors de la fête du [[Grand Carrousel]], le {{Date-|5 juin 1662}}<ref>Adolphe Laurent Joanne, ''Les environs de Paris illustrés'', L. Hachette et cie, {{Date-|1668}}.</ref>), la [[Monarchie de droit divin|monarchie devient absolue de droit divin]]. La légende raconte qu'il aurait alors dit aux parlementaires réticents le célèbre mot {{Citation|[[L'État, c'est moi]] !}}, mais le fait est erroné. En réalité, {{Louis XIV}} se dissocie de l'État, dont il se définit lui-même comme étant seulement le premier serviteur<ref>{{Lien web |url=http://www.balde.net/formations/Institutions%202006/instit211-S2.html |titre=La théorie de l'absolutisme au {{s-|XVII}} |consulté le=8 avril 2008 |archive-url=https://web.archive.org/web/20080408041108/http://www.balde.net/formations/Institutions%202006/instit211-S2.html |archive-date=8 avril 2008}}.</ref>{{,}}<ref>[[s:fr:Le Siècle de Louis XIV/28|''Le Siècle de {{Louis XIV}}'', page 28]], [[Wikisource]], ''[[Le Siècle de Louis XIV|Le Siècle de {{Louis XIV}}]]'' de [[Voltaire]], consulté le {{Date-|24 mars 2011}}.</ref>. D'ailleurs, sur son [[lit de mort]], il déclare en {{Date-|1715}} : {{Citation|Je m'en vais, mais l'État demeurera toujours}}<ref>[[Jean-Christian Petitfils]], « Le Roi Soleil et Dieu », émission ''Au cœur de l'histoire'', {{Date-|16 avril 2012}}.</ref>. Pourtant, la phrase « l'État, c'est moi » résume l'idée que ses contemporains se sont fait du roi et de ses réformes centralisatrices. D'un point de vue plus philosophique, pour les théoriciens de l'[[absolutisme]] du {{s-|XVII}} français, imprégnés de [[néoplatonisme]], cette formule signifie que l'intérêt du roi n'est pas seulement le sien propre, mais aussi celui du pays qu'il sert et qu'il représente. [[Jacques-Bénigne Bossuet|Bossuet]] note à ce propos : {{citation|le roi n'est pas né pour lui-même, mais pour le public}}{{sfn|Mcclure 2006|p=5}}.

=== Pratique de l'absolutisme ===
==== Pensée absolutiste ====
[[Fichier:Hobbes De Cive.tif|vignette|upright|[[Thomas Hobbes]] (1588-1679) qui a écrit en France son livre majeur [[Léviathan (Thomas Hobbes)]] est un contemporain de {{Louis XIV}}.|alt=Buste de Hobbes à {{nobr|58 ans}} de trois quart, regard scrutateur, lèvres timidement pincées, calotte sur la tête.]]

''Les Mémoires pour l'instruction du dauphin'' donnent un aperçu de la pensée de {{Louis XIV}} sur l'absolutisme. Le livre n'a pas été écrit directement par le roi. Il a été {{citation|pour partie dicté au président Octave de Prérigny puis à [[Paul Pellisson]]{{sfn|Perez 2004|p=27}}}}, tandis que pour l'autre partie, le roi a juste indiqué en note ce qu'il voulait voir dans le livre. Si ces ''Mémoires'' constituent un ensemble assez disparate {{citation|de tableaux militaires et de pensées sans autre fil conducteur que la chronologie{{sfn|Perez 2004|p=28}}}}, il a malgré tout permis de donner à {{Louis XIV}} {{citation|la figure du roi-écrivain}} que Voltaire a reprise et amplifiée, en faisant de {{Louis XIV}} un roi-philosophe platonicien précurseur du despotisme éclairé{{sfn|Perez 2004|p=46}}. Si l'on considère le texte en lui-même, il est fortement imprégné, comme l'est d'ailleurs la société cultivée du [[Grand Siècle (histoire de France)|Grand Siècle]]{{sfn|Perez 2004|p=34}}, de pensée néo-stoïcienne.

Ce livre montre bien l'attrait de {{Louis XIV}} pour la concentration du pouvoir. Chez lui, le pouvoir est d'abord synonyme de liberté d'action tant face aux ministres qu'à tout autre corps constitué. La pensée de {{Louis XIV}}, proche ici de celle de [[Armand Jean du Plessis de Richelieu|Richelieu]], est résumée par la formule {{citation|Quand on a l'État en vue, on travaille pour soi}}, formule qui s'oppose à la pensée de [[Thomas Hobbes]] qui met plus l'accent sur le peuple et la multitude{{sfn|Perez 2004|p=36}}. Toutefois, chez {{Louis XIV}}, la liberté est limitée par des thématiques stoïciennes : la nécessité de résister aux passions, la volonté de se dépasser, l'idée d'{{citation|équilibre tranquille (l’''euthymia'' d'un [[Sénèque]]{{sfn|Perez 2004|p=38}})}}. Dans ses ''Mémoires'', {{Louis XIV}} note :{{Citation bloc|C'est qu'en ces accidents qui nous piquent vivement et jusqu'au fond du cœur, il faut garder un milieu entre la sagesse timide et le ressentiment emporté, tâchant pour ainsi dire, d'imaginer pour nous-même ce que nous conseillons à un autre en pareil cas. Car, quelque effort que nous fassions pour parvenir à ce point de tranquillité, notre propre passion, qui nous presse et nous sollicite au contraire, gagne assez sur nous pour nous empêcher de raisonner avec trop de froideur et d'indifférence{{efn|''Mémoires'' {{page|71-72}}, cité in Perez{{sfn|Perez 2004|p=38}}.|group=n}}.}}

Atteindre cet équilibre suppose un combat contre soi-même. {{Louis XIV}} remarque, {{citation|il faut se garder contre soi-même, prendre garde à son inclinaison et être toujours en garde contre son naturel}}{{efn|''Mémoires'' {{page|72}}, cité in Perez{{sfn|Perez 2004|p=39}}.|group=n}}. Pour atteindre cette sagesse, il recommande l'introspection : {{citation| il est utile […] de se remettre de temps en temps devant les yeux les vérités dont nous sommes persuadés}}{{efn|''Mémoires'' {{page|28}}, in Perez{{sfn|Perez 2004|p=41}}.|group=n}}. Dans le cas du dirigeant, il ne faut pas seulement bien se connaître, il faut également bien connaître les autres : {{citation|Cette maxime qui dit que pour être sage il suffit de se bien connaître soi-même, est bonne pour les particuliers ; mais le souverain, pour être habile et bien servi, est obligé de connaître tous ceux qui peuvent être à la portée de la vue}}{{efn|''Mémoires'' {{page|237}}, in Perez{{sfn|Perez 2004|p=40}}.|group=n}}.

==== Droit divin ====
Lors du sacre de Reims, le roi {{citation|est placé à la tête du corps mystique du royaume}} et devient, au terme d'un processus commencé sous [[Philippe IV le Bel|Philippe le Bel]], le chef de l'Église de France{{sfn|Maral 2012|p=178-179}}. Le roi est le lieutenant de Dieu dans son pays et, d'une certaine façon, ne dépend que de lui. Dans son livre ''Mémoires pour l'instruction du dauphin'', il note {{citation|Celui qui a donné des rois aux hommes a voulu qu'on les respectât comme ses lieutenants, se réservant à Lui seul le droit d'examiner leur conduite}}{{sfn|Maral 2012|p=180}}. Chez {{Louis XIV}}, la relation à Dieu est première, son pouvoir venant directement de Lui. Il n'est pas d'abord humain (''{{langue|la|de jure humano}}'') comme chez [[Francisco Suárez]] et [[Robert Bellarmin]]{{sfn|Maral 2012|p=183}}. Chez le Grand roi, la relation à Dieu ne doit pas être seulement « utilitaire ». Il déclare au dauphin {{citation|Gardez-vous bien, mon fils, je vous en conjure, de n'avoir de la religion que cette vue d'intérêt, très mauvaise quand elle est seule, mais qui d'ailleurs ne vous réussirait pas, parce que l'artifice se dément toujours et ne produit pas longtemps les mêmes effets que la vérité}}{{sfn|Maral 2012|p=182}}.

{{Louis XIV}} est particulièrement attaché à trois hommes de Dieu : [[David (roi d'Israël)|David]], [[Charlemagne]] et [[Louis IX|Saint Louis]]. Il expose le tableau ''David jouant de la harpe'' dans son appartement à Versailles. Charlemagne est représenté aux [[Hôtel des Invalides|Invalides]] et à la [[chapelle royale de Versailles]]. Enfin, il fait déposer au [[Château de Versailles]] des reliques de Saint Louis. Par contre, il n'aime guère être comparé à {{souverain3|Constantin Ier (empereur romain)}} et fait transformer la [[statue équestre]] que [[Le Bernin]] a réalisée de lui en Constantin, en [[statue équestre de Louis XIV sous les traits de Marcus Curtius|statue équestre de {{Louis XIV}} sous les traits de Marcus Curtius]]{{sfn|Maral 2012|p=183}}.

==== Pratique modérée de l'absolutisme ====
[[Fichier:Jacques-Bénigne Bossuet 1.PNG|vignette|upright|Portrait de Bossuet par [[Hyacinthe Rigaud]].|alt=Tableau représentant un homme.]]

Contrairement à la vision de [[Jacques-Bénigne Bossuet|Bossuet]] qui tend à assimiler le roi à Dieu, {{Louis XIV}} ne se considère que comme le lieutenant de Dieu pour ce qui concerne la France{{sfn|Petitfils 2002|p=219}}. À ce titre, il se voit comme l'égal du pape et de l'empereur. Dieu est pour lui un dieu vengeur, ce n'est pas le Dieu de douceur que commence à promouvoir [[François de Sales]]. C'est un Dieu qui, par l'intermédiaire de sa Providence, peut châtier de façon [[immanence|immanente]] ceux qui s'opposent à lui. En ce sens, la peur de Dieu vient limiter l'absolutisme{{sfn|Petitfils 2002|p=222 et 386-387}}.

Même chez Bossuet - un pro-absolutiste pour qui {{citation|Le prince ne doit rendre compte à personne de ce qu'il ordonne}} - le pouvoir royal a des limites. Dans son livre ''Politique tirée des propres paroles de l'Écriture sainte'', il écrit : {{citation|Les rois ne sont pas pour cela affranchis des lois}}. En effet, la voie que doit suivre le roi est pour ainsi dire balisée : {{citation|Les rois doivent respecter leur propre puissance et ne l'employer qu'au bien public}}, {{citation |le prince n'est pas né pour lui-même mais pour le public}}, {{citation|Le prince doit pourvoir aux besoins du peuple}}{{sfn|Maral 2012|p=215}}.

{{Louis XIV}} est plus politique et plus pragmatique que les grands ministres qui l'assistent pendant la première partie de son règne. Il se méfie d'ailleurs de leur absolutisme pré-technocratique. Parlant d'eux, il note en substance : {{citation|nous n'avons pas affaire à des anges mais à des hommes à qui le pouvoir excessif donne presque toujours à la fin quelque tentation d'en user}}{{sfn|Petitfils 2002|p=223}}. À cet égard, il reproche à [[Jean-Baptiste Colbert|Colbert]] ses références répétées au [[Armand Jean du Plessis de Richelieu|cardinal de Richelieu]]{{sfn|Petitfils 2002|p=223}}. Cette pratique modérée est aussi visible chez les intendants qui recherchent le consensus avec les territoires dont ils ont la charge{{sfn|Cornette 2000|p=580}}. Mais cette modération a son revers. Ne voulant pas recommencer les erreurs de la [[Fronde (histoire)|Fronde]], {{Louis XIV}} est amené à composer avec les institutions traditionnelles, ce qui a pour conséquence d'empêcher une modernisation en profondeur du pays et de laisser se maintenir nombre {{citation|d'institutions désuètes et parasitaires}}{{sfn|Petitfils 2002|p=702}}. Par exemple, si les magistrats doivent {{citation|rigoureusement se tenir à l'écart des zones sensibles de la politique royale comme la diplomatie, la guerre, la fiscalité ou les grâces}}, le corps de la magistrature n'est ni réformé, ni restructuré : au contraire, il est renforcé dans ses prérogatives{{sfn|Petitfils 2002|p=702}}. De même, alors qu'il veut rationaliser l'administration, les besoins financiers le poussent à vendre des offices, de sorte que, pour [[Roland Mousnier]], la {{citation| monarchie est tempérée par la vénalité des offices}}<ref name="Cornette">[http://www.histoire.presse.fr/livres/les-classiques/la-venalite-des-offices-de-roland-mousnier-01-01-2005-6140 ''« La Vénalité des offices » de Roland Mousnier'', par Joël Cornette, magazine ''L'Histoire'', {{n°|294}}, {{date-|janvier 2005}}, {{p.|98}}].</ref>. Notons ici que, si pour Mousnier, malgré tout, {{Louis XIV}} est un révolutionnaire ''i.e'' un homme de changement, de réformes profondes, Roger Mettan dans ''Power and Factions in {{Louis XIV}}'s France'' (1988) et Peter Campbell dans son ''{{Louis XIV}}'' (1994), le voient comme un homme dépourvu d'idée réformatrice{{sfn|Petitfils 2002|p=703}}.

==== La cour comme instrument de l'absolutisme ====
La cour permet de domestiquer la noblesse{{sfn|Petitfils 2002|p=448}}. Certes, elle n'attire que de {{unité|4000}} à {{unité|5000|nobles}}, mais il s'agit des personnages les plus en vue du royaume. Revenus sur leur terre, ceux-ci imitent le modèle versaillais et répandent les règles du bon goût{{sfn|Petitfils 2002|p=448}}. Par ailleurs, la cour permet de surveiller les Grands et le roi prend bien soin d'être informé de tout{{sfn|Petitfils 2002|p=449}}. L'étiquette assez subtile qui la régit lui permet d'arbitrer les conflits et de répandre une certaine discipline. Enfin, la cour lui fournit un vivier où sélectionner le personnel de l'administration civile et militaire{{sfn|Petitfils 2002|p=447}}. Des règles de préséance byzantines renforcent l'autorité du roi en le laissant maître de décider ce qui doit être, tandis que s'installe une liturgie royale qui contribue à l'affirmation de son pouvoir divin{{sfn|Petitfils 2002|p=442}}.

==== Oppositions à l'absolutisme durant la Fronde ====
[[Fichier:Champaigne portrait richelieu eb.jpg|vignette|gauche|upright|''Le [[Armand Jean du Plessis de Richelieu|Cardinal de Richelieu]]'' par [[Philippe de Champaigne]], [[musée des Beaux-Arts de Strasbourg]].|alt=Tableau représentant un homme]]

Pour Michel Pernot, {{citation| La Fronde, tout bien pesé, est la conjonction de deux faits majeurs : d'une part l'affaiblissement de l'autorité royale pendant la minorité de {{Louis XIV}} ; d'autre part la réaction brutale de la société française à l'[[État]] moderne voulu par {{souverain2|Louis XIII}} et [[Armand Jean du Plessis de Richelieu|Richelieu]]{{sfn|Pernot 2012|p=399-400}}}}. La grande noblesse, comme les petite et moyenne noblesses et les Parlements, ont des objections à avancer à la monarchie absolue, telle qu'elle se constitue. La grande noblesse est divisée par les ambitions de ses membres qui n'ont guère l'intention de partager le pouvoir et n'hésiteront d'ailleurs pas à combattre les petite et moyenne noblesses{{sfn|Pernot 2012|p=402-403}}. Celle-ci vise à {{citation|instaurer en France la monarchie mixte ou ''Ständestaat'', en donnant le premier rôle dans le royaume aux [[États généraux (France)|États généraux]]}}. En cela, elle s'oppose aux Grands qui veulent surtout garder une influence forte dans les instances principales de l'État {{incise|en y siégeant eux-mêmes ou en y faisant siéger des fidèles}} et aux Parlements qui ne veulent surtout pas entendre parler des [[États généraux (France)|États généraux]]{{sfn|Pernot 2012|p=403}}.

Le Parlement n'est absolument pas un parlement au sens moderne. Il s'agit de {{citation|tribunaux d'appel jugeant en dernier ressort}}{{sfn|Pernot 2012|p=14}}. Les parlementaires sont propriétaires de leur charge, qu'ils peuvent transmettre à leur héritier moyennant le paiement d'une taxe appelée la ''[[paulette (impôt)|paulette]]''{{sfn|Pernot 2012|p=16}}. Les lois, ordonnances, édits et déclarations doivent être enregistrés avant d'être publiés et appliqués. À cette occasion, les parlementaires peuvent émettre des objections ou « remontrances » quant au contenu, lorsqu'ils pensent que les lois fondamentales du royaume ne sont pas respectées. Pour faire plier le Parlement, le roi peut adresser une ''[[lettre de jussion]]'', à laquelle le Parlement peut répliquer par des remontrances réitérées. Si le désaccord persiste, le roi peut utiliser la procédure du [[lit de justice]] et imposer sa décision{{sfn|Pernot 2012|p=15}}. Les magistrats aspirent à {{citation|rivaliser avec le gouvernement dans les affaires politiques}}{{sfn|Pernot 2012|p=17}} et ce d'autant plus que, au même titre que le conseil du roi, ils émettent des arrêts. De nombreux magistrats sont opposés à l'absolutisme. Pour eux, le roi ne doit utiliser que sa {{citation|puissance réglée, c'est-à-dire limitée à la seule légitime}}{{sfn|Pernot 2012|p=18}}. Lors du lit de justice du {{Date-|18 mai 1643}}, l'avocat général [[Omer Talon]] demande à la régente {{citation|de nourrir et élever sans entrave sa majesté dans l'observation des lois fondamentales et dans le rétablissement de l'autorité que doit avoir cette compagnie (c'est du Parlement qu'il s'agit), anéantie et comme dissipée depuis quelques années, sous le ministère du Cardinal de Richelieu}}{{sfn|Pernot 2012|p=18}}.

==== Oppositions à l'absolutisme après la Fronde ====
La crise financière du milieu des années soixante-dix est accompagnée d'une forte hausse de la fiscalité, autant par l'augmentation des taux que par la création de nouveaux impôts. Cela entraîne des révoltes dans le Bordelais et surtout en Bretagne ([[révolte du papier timbré]]), où les forces armées doivent rétablir l'ordre{{sfn|Petitfils 2002|p=386-387}}. Le Languedoc et la Guyenne connaissent une conspiration animée par Jean-François de Paule, seigneur de Sardan, soutenu par [[Guillaume III d'Orange-Nassau|Guillaume d'Orange]]. Cette conspiration est assez vite étouffée{{sfn|Petitfils 2002|p=390-391}}. Toutefois, si l'on considère qu'en France les révoltes ont de tout temps été chose courante, force est de constater qu'elles sont rares sous le règne de {{Louis XIV}}. Cela tient pour beaucoup au fait que, contrairement à ce qui s'est passé durant la [[Fronde (histoire)|Fronde]], elles ne reçoivent que peu de soutien de la noblesse {{incise|en dehors du [[complot de Latréaumont]]}} car celle-ci est employée dans les armées du roi ou occupée à la cour. Par ailleurs, le roi dispose d'une force armée qu'il peut déployer rapidement et la répression est rigoureuse{{sfn|Petitfils 2002|p=389}}. Malgré cela, le poids de l'opinion publique reste fort. En {{Date-|1709}}, période de famine et de défaite militaire, elle contraint le monarque à se séparer de son secrétaire d'État à la Guerre, [[Michel Chamillart]]{{sfn|Petitfils 2002|p=633}}.

=== Gouvernement royal ===
==== Obéissance des Provinces et des Parlements ====
[[Fichier:Moulage du contre-sceau du grand sceau de Louis XIV, roi de France. 1 - Archives Nationales - SC-D116bis.jpg|vignette|Moulage du contre-sceau du grand sceau de {{Louis XIV}}, roi de France. [[Archives nationales (France)|Archives nationales]] SC-D116bis.|alt=Sceau du roi]]

Le roi se fait très tôt obéir par les Provinces : en réponse aux révoltes de la Provence (Marseille en particulier), le jeune {{Louis XIV}} envoie [[Louis-Joseph de Vendôme|le duc de Mercœur]] pour réduire la résistance et réprimer les rebelles. Le {{Date-|2 mars 1660}}, le roi étant entré dans la ville par une brèche ouverte dans les remparts, il change le régime municipal et soumet le Parlement d'Aix. Les mouvements de contestation en Normandie et en Anjou se terminent en [[1661 en France|{{Date-|1661}}]]. Malgré le déploiement de force, l'obéissance est {{Citation|plus acceptée qu'imposée}}<ref>Joël Cornette, ''Absolutisme et Lumières 1652-1783'', Hachette Supérieur.</ref>{{,}}<ref name="Papon">{{Ouvrage |auteur1=Jean Pierre Papon |titre=Histoire générale de Provence |volume=4 |éditeur=Moutard |année=1786 |présentation en ligne={{Google Livres|whhDAAAAcAAJ|page=585|surligne=}}}}.</ref>.

Le jeune souverain impose son autorité aux Parlements. Dès {{Date-|1655}}, il impressionne les parlementaires en intervenant, en costume de chasse et le fouet à la main, pour faire cesser une délibération. Le pouvoir des Parlements est diminué par la mise en place de [[Lit de justice|lits de justice]] sans la présence du roi, ainsi que par la perte de leur titre de « cour souveraine » en {{Date-|1665}}, et par la limitation, en {{Date-|1673}}, de leur [[droit de remontrance]]<ref>{{Ouvrage |auteur1=François Lebrun |titre=La Puissance et la Guerre |sous-titre=1661-1715 |éditeur=[[éditions du Seuil]] |année=1997 |pages totales=307 |isbn=978-2-02-024965-2 |lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=LnD4AgAAQBAJ&pg=PT39 |titre chapitre=La surveillance des grands corps de l'État}}.</ref>.

==== Réorganisation administrative et financière ====
La première partie du règne de {{Louis XIV}} est marquée par de grandes réformes administratives et surtout par une meilleure répartition de la fiscalité. Les douze premières années voient le pays en paix retrouver une relative prospérité<ref>F. Lebrun, section « {{Louis XIV}} », ''Journal de la France'' (Gallimard, 2001).</ref>. On passe progressivement d'une monarchie judiciaire (où la principale fonction du roi est de rendre justice) à une monarchie administrative (le roi est à la tête de l'administration) ; de grandes ordonnances administratives accentuent le pouvoir royal : les terres sans seigneur deviennent terres royales, ce qui permet la réorganisation fiscale et celle des droits locaux. Le roi crée le [[Code Louis]] en [[1667]], stabilisant la procédure civile, l'[[Ordonnance criminelle de 1670|ordonnance criminelle]] en {{Date-|1670}}, l'[[Ordonnance de 1669|ordonnance sur le fait des eaux et forêts]] (étape cruciale de la réorganisation des Eaux et Forêts) et l'édit sur les classes de la Marine en {{Date-|1669}}, l'[[Code Savary|ordonnance de commerce]] en {{Date-|1673}}…

Le conseil royal est divisé en plusieurs conseils, d'importance et de rôles divers. Le Conseil d'en haut traite des affaires les plus graves ; le Conseil des dépêches, de l'administration provinciale ; le Conseil des finances, des finances comme son nom l'indique ; le Conseil des parties, des causes judiciaires ; le Conseil du commerce, des affaires commerciales et enfin le Conseil des consciences est chargé des religions catholique et protestante{{sfn|Bluche 1986|p=145}}. {{Louis XIV}} ne veut pas qu'il y ait des princes de sang ni de duc aux conseils, se souvenant des problèmes rencontrés lors de la Fronde lorsqu'ils siégeaient à ces conseils{{sfn|Bluche 1986|p=149}}. Les décisions du roi sont préparées dans un certain secret. Les édits sont rapidement enregistrés par les Parlements, puis rendus publics dans les provinces où les [[intendant (royaume de France)|intendants]], ses administrateurs, prennent de plus en plus le pas sur les gouverneurs, issus de la noblesse d'épée{{sfn|Bluche 1986|p=149}}.

[[Fichier:Colbert-5.jpg|vignette|droite|upright|[[Jean-Baptiste Colbert]] succède à [[Nicolas Fouquet|Fouquet]] après avoir organisé son « élimination ».|alt=Tableau représentant un homme]]
[[Fichier:After Jacob Ferdinand Voet - François Michel Le Tellier - Versailles MV 3522.jpg|vignette|upright|[[François Michel Le Tellier de Louvois|François-Michel Le Tellier]], marquis de Louvois, [[Secrétaire d'État de la Guerre#France|secrétaire d'État à la Guerre]], rival de Colbert au sein du conseil royal.|droite|alt=Tableau représentant un homme]]

{| class="wikitable"
|'''Conseil du roi''' ou '''étroit''', il se compose de trois Conseils
| Rôles
|-
|Conseil d'En-haut
''<small>Composé de ministres d'État que seul le roi peut convoquer</small>''
|Vrai gouvernement, il traite les plus hautes affaires politiques et diplomatiques. Il se réunit trois fois par semaine{{sfn|Deschodt 2008|p=97}}.
|-
|'''Conseil des finances''' ou '''royal'''
''<small>Contrôleur général, deux ou trois intendants des finances</small>''
|Il a repris les affaires de la surintendance. Il comprend le roi, un chef du conseil et trois conseillers, dont un intendant des finances. Il établit le budget, dresse les baux de fermes, répartit la [[Taille (impôt)|taille]]. Il se réunit trois fois par semaine{{sfn|Deschodt 2008|p=97}}.
|-
|'''Conseil des dépêches'''
''<small>Les quatre secrétaires d'État</small>''
|Étudie les rapports des intendants et des gouverneurs et en établit les réponses{{sfn|Deschodt 2008|p=97}}.
|}

{| class="wikitable"
|Les autres conseils
|Rôles
|-
|'''Conseil des parties''' ou '''privé'''
''<small>30 conseillers d'État, 98 maîtres des requêtes</small>''
|Haute Cour de justice, questions administratives. Le roi n'y assiste presque jamais, laissant la présidence au Chancelier{{sfn|Bluche 1986|p=147}}.
|-
|'''Conseil du commerce'''
''<small>12 négociants élus, 6 officiers</small>''
|Vie économique. Existence éphémère {{Date-|1664}}-{{Date-|1676}}, n'a réellement fonctionné que trois ou quatre ans{{sfn|Bluche 1986|p=158}}. Il sera remplacé en {{Date-|1700}} par un bureau du commerce, simple commission du conseil privé qui préparera l'édit de {{Date-|1701}} permettant aux nobles de pratiquer le commerce en gros sans déroger{{sfn|Bluche 1986|p=149}}.
|-
|'''Conseil de conscience''', présidé par le roi
''<small>Confesseur du roi, archevêque de Paris, et un ou deux prélats</small>''
|Questions religieuses et nominations aux bénéfices vacants{{sfn|Bluche 1986|p=161}}.
|}

{| class="wikitable"
| '''Les Ministres'''
| '''Rôles'''
|-
|'''Le Chancelier''' (inamovible)
|Justice
|-
|'''Le contrôleur général des finances''' (amovible) ''<small>Charge créée en {{Date-|1665}}</small>''
|Grand administrateur de la vie financière et économique
|-
|'''Les quatre secrétaires d'État''' (amovibles)

* des Affaires étrangères
* de la Guerre
* de la Marine
* de la Maison du roi
|Ils se partagent aussi la France en quatre secteurs, où ils exercent les fonctions de ministre de l'intérieur, de même que le contrôleur général des finances.
|}

[[Fichier:Louis pontchartrain.JPG|vignette|upright|Portrait de [[Louis II Phélypeaux de Pontchartrain|Louis Phélypeaux de Pontchartrain]] ({{Date-|1643}}-{{Date-|1727}}), un ministre clé de la fin du règne de {{Louis XIV}}.|alt=Tableau représentant un homme]]

À partir de la création du Conseil royal des finances ({{Date-|12 septembre 1661}}) les finances, dirigées désormais par un contrôleur général, en l'occurrence [[Jean-Baptiste Colbert|Colbert]], supplantent la justice en tant que première préoccupation du [[Conseil d'en haut]]. Celui qui aurait normalement dû être chargé de la justice, le [[chancelier]] [[François Michel Le Tellier de Louvois|François-Michel Le Tellier de Louvois]], finit lui-même par délaisser la justice pour se consacrer essentiellement aux affaires de guerre. Au fil du temps, deux clans dans l'administration se constituent, rivalisent et cohabitent. Le clan Colbert gère tout ce qui touche à l'économie, la politique étrangère, la marine et la culture, alors que le clan [[Michel Le Tellier (homme d'État)|Le Tellier]]-Louvois a la mainmise sur la Défense{{sfn|Deschodt 2008|p=124}}. Le roi fait ainsi sienne la devise « diviser pour mieux régner ».

Jusqu'en [[1671]], alors que s'amorcent les préparatifs de la [[guerre de Hollande]], le clan Colbert domine. Cependant, les réticences de Colbert, à nouveau résistant devant de grandes dépenses, commencent à le discréditer aux yeux du roi. De plus, l'écart d'âge entre Colbert ({{nobr|52 ans}} à l'époque) et le roi ({{nobr|33 ans}}) pousse presque naturellement le souverain à se rapprocher de [[François Michel Le Tellier de Louvois|Louvois]], qui n'a que {{nobr|30 ans}} et la même passion : la guerre. Jusqu'en {{Date-|1685}}, c'est le clan Louvois qui est le plus influent. En {{Date-|1689}}, {{souverain3|Louis II Phélypeaux de Pontchartrain}}, nommé contrôleur général avant de devenir secrétaire d'État (1690), s'impose à la première place. En {{Date-|1699}}, il est élevé à la dignité de chancelier, tandis que son fils Jérôme lui succède{{sfn|Sarmant 2012|p=268}}.

En {{Date-|1665}}, la fonction publique ne compte que {{nobr|800 membres}} appointés (membres des conseils, secrétaires d'État, conseillers d'État, maîtres des requêtes et commis) alors qu'elle compte {{nombre|45780|officiers}} de finance, de justice et de police propriétaires de leur charge{{sfn|Deschodt 2008|p=99}}.

==== Relations avec Paris ====
[[Fichier:Gabriel Nicolas de La Reynie - Pierre Mignard.jpg|vignette|gauche|upright|[[Gabriel Nicolas de La Reynie]] ({{Date-|1625}}-{{Date-|1709}}), premier lieutenant général de police de Paris, est considéré comme le père de la [[Direction centrale de la Police judiciaire (France)|police judiciaire française]].]]
Le jeune roi se méfie de Paris, une ville qu'il a vu se révolter et qu'il ne quitte pour Versailles qu'en {{Date-|1682}}. La ville est perçue comme une concentration dangereuse d'épidémies, d'incendies, d'inondations, d'encombrements et désordres de tout genre<ref name="Historia 737">Françoise Labalette, ''Historia'' {{numéro|737}}.</ref>. Elle attire des individus qui espèrent vivre mieux auprès des riches : escrocs, brigands, voleurs, mendiants, infirmes, hors-la-loi, paysans sans terre et autres déshérités{{sfn|Bluche 1986|p=224}}. La [[Cour des Miracles]], le plus célèbre de ses ghettos incontrôlables, compterait {{nb|30000 individus}}, soit 6 % de la population parisienne.

L'édit de fondation de l'hôpital général de Paris ({{Date-|27 avril 1656}}), dit de « Grand Renfermement », a pour objet d'éradiquer la mendicité, le vagabondage et la prostitution. Conçu sur le modèle de l'hospice de la Charité établi en {{Date-|1624}} à Lyon, il est desservi par la [[compagnie du Saint-Sacrement]] en trois établissements ([[Quartier de la Salpêtrière|la Salpêtrière]], [[Bicêtre]] et [[Maison de Sainte-Pélagie|Sainte-Pélagie]]). Mais, en dépit des peines et des expulsions prévues pour ceux qui ne regagnent pas l'hôpital, cette mesure, qui horrifie [[Vincent de Paul]], est un échec, faute d'effectifs suffisants pour la faire appliquer. De plus, la police est disséminée en différentes factions qui rivalisent entre elles. La situation, mal maîtrisée, empire et {{Citation|on rapporte que le roi n'en dort plus la nuit}}.

Le {{Date-|15 mars 1667}}, Colbert nomme l'un de ses proches, [[Gabriel Nicolas de La Reynie|La Reynie]] à la charge de la [[Lieutenant général de police|lieutenance générale de police]] qui vient d'être créée{{sfn|Bluche 1986|p=226}}. Intègre et travailleur, La Reynie a déjà participé au conseil de réforme de la justice. L'ordonnance civile de Saint-Germain-en-Laye ({{Date-|3 avril 1667}}) organise un contrôle précis des affaires intérieures. Elle vise une approche globale de la criminalité, notamment en fusionnant les quatre services de police de Paris. Les attributions de La Reynie, nommé en {{Date-|1674}} Lieutenant général de police, sont étendues : maintien de l'ordre public et des bonnes mœurs, ravitaillement, salubrité (ébouage, pavage des rues, fontaines d'eau, etc.), sécurité (rondes, éclairage des rues par des lanternes, lutte contre la délinquance et les incendies, liquidation des « zones de non-droit »… Son service a la confiance du gouvernement royal, et s'occupe donc également des grandes et petites affaires criminelles dans lesquelles de hauts aristocrates pourraient être mêlés : [[complot de Latréaumont]] (1674), [[affaire des poisons]] (1679-1682), etc.<ref name="Historia 737" />.

La Reynie s'acquitte de cette tâche épuisante avec intelligence pendant {{nobr|30 ans}}, jusqu'en {{Date-|1697}} et instaure à Paris une « sécurité inconnue »{{sfn|Bluche 1986|p=227}}. Mais peu avant son retrait, la situation commence à se dégrader. Le [[Marc René de Voyer de Paulmy d'Argenson (1652-1721)|marquis d'Argenson]], qui lui succède, est un homme rigoureux et sévère qui entreprend une intransigeante remise en ordre, l'administration royale se faisant plus répressive. Il instaure une sorte de police secrète d'État, qui semble servir les intérêts des puissants et accentuer le despotisme d'un règne vieillissant. Ses services lui valent, en {{Date-|1718}}, lors de la [[Régence (1715-1723)|Régence]], la place enviée de [[Ministre de la Justice (France)|garde des Sceaux]]<ref>''Histoire de Paris'', Dulaure, {{t.}}7, {{Date-|1629}}, {{p.|155}}.</ref>.

=== Homme de guerre ===
{{Article détaillé|Guerres de Louis XIV{{!}}Guerres de {{Louis XIV}}}}
[[Fichier:Rigaud Hyacinthe - Louis XIV, roi de France.jpg|vignette|upright|{{Louis XIV}} représenté en chef des armées par Hyacinthe Rigaud en {{Date-|1701}}.|alt=Tableau représentant un homme]]
{{Louis XIV}} a consacré près de trente-trois ans de règne sur cinquante-quatre à faire la guerre. Sur son lit de mort, il confesse au futur {{Louis XV}} {{Citation|j'ai souvent entrepris la guerre trop légèrement et l'ai soutenue par vanité}}{{sfn|Bluche 1986|p=325}}. De fait, les dépenses militaires, notamment en temps de guerre, ont accaparé la part la plus importante du budget de l'État (jusqu'à près de 80 % en {{Date-|1692}}){{sfn|Petitfils 2002|p=343}}. Il reçoit une formation militaire poussée sous la conduite de [[Henri de La Tour d'Auvergne (vicomte de Turenne)|Turenne]]. À vingt ans, il participe à la [[Bataille des Dunes (1658)|bataille des Dunes]] à [[Dunkerque]] ({{Date-|23 juin 1658}}), où ses troupes, conduites par Turenne, remportent une victoire décisive contre Condé et l'Espagne{{sfn|Bluche 1986|p=109-110}}.

==== Réorganisation de l'armée ====
La réorganisation de l'armée est rendue possible par celle des finances. Si Colbert a réformé les finances, c'est [[Michel Le Tellier (homme d'État)|Michel Le Tellier]] puis son fils, le [[François Michel Le Tellier de Louvois|marquis de Louvois]], qui aident le roi à réformer l'armée. Les réformes portent notamment sur l'unification des soldes, la création de l'[[hôtel des Invalides]] ([[1670]]) et la réforme du recrutement{{sfn|Bluche 1986|p=327}}. Cela a pour effet de réduire le taux de désertions et d'augmenter le niveau de vie du personnel militaire. Le roi charge également [[Sébastien Le Prestre de Vauban|Vauban]] de construire une ceinture de fortifications autour du territoire (politique du [[pré carré]]){{sfn|Bluche 1986|p=163}}. Au total, au cœur de son règne, le Royaume dispose d'une armée de {{unité|200000|hommes}}, ce qui en fait de loin la première armée d'Europe, capable de tenir tête à des coalitions rassemblant de nombreux pays européens{{sfn|Petitfils 2002|p=577}}. Lors de la [[guerre de Hollande]] (1672-1678), l'armée aligne environ {{unité|250000|hommes}}, elle en aligne {{unité|400000}} lors des guerres de [[Guerre de la Ligue d'Augsbourg|Neuf Ans]] (1688-1696) et de [[Guerre de Succession d'Espagne|Succession d'Espagne]] (1701-1714){{sfn|Cornette 2000|p=585}}. Le financement des armées en campagne est assuré, pour environ un quart, par les contributions payées par les territoires étrangers où elles interviennent{{sfn|Cornette 2000|p=587}}.

==== Marine ====
[[Fichier:La-reale-1679.jpg|vignette|gauche|Représentants de l'État visitant la galère ''la Réale'' en construction à l'[[arsenal]] de [[Marseille]]. Tableau attribué à [[Jean-Baptiste de La Rose]].|alt=Tableau représentant un chantier naval ancien]]

À la mort de [[Jules Mazarin|Mazarin]], en {{Date-|1661}}, la [[Marine royale (France)|marine royale]], ses ports et ses arsenaux sont en piteux état{{sfn|Bluche 1986|p=331}}. Seule une dizaine de vaisseaux de ligne est en état de fonctionnement, alors que la Marine anglaise en compte {{unité|157}}, dont la moitié sont des vaisseaux importants, embarquant de {{unité|30 à 100|canons}}. Pour sa part, la flotte de la république des [[Provinces-Unies]] compte {{nobr|84 vaisseaux}}.

Contrairement à une idée très répandue, {{Louis XIV}} s'[[Histoire de la marine française de Richelieu à Louis XIV#La marine de Louis XIV (1661-1715)|intéresse personnellement aux questions navales]] et contribue avec [[Jean-Baptiste Colbert|Colbert]] à l'essor de la marine de guerre française{{sfn|Bluche 1986|p=333}}. Le {{Date-|7 mars 1669}}, il crée le titre de [[Liste des ministres français de la Marine et des Colonies|secrétaire d'État à la Marine]] et nomme officiellement [[Jean-Baptiste Colbert|Colbert]] premier titulaire du poste{{sfn|Bluche 1986|p=332}}. Malgré tout, pour le roi, le plus important ''{{langue|la|in fine}}'' n'est pas la mer, mais la terre, car c'est là, selon lui, qu'on acquiert la grandeur{{sfn|Petitfils 2002|p=342}}.

Colbert et son fils vont mobiliser des ressources humaines, financières et logistiques sans précédent, permettant de créer presque ''{{langue|la|ex nihilo}}'' une puissance militaire navale de premier rang. À la mort du ministre, en {{Date-|1683}}, la « [[Histoire de la marine française de Richelieu à Louis XIV|Royale]] » compte {{nobr|112 vaisseaux}} et dépasse de quarante-cinq unités la ''[[Royal Navy]]''{{sfn|Bluche 1986|p=333}}, mais les officiers, du fait de la relative jeunesse de la flotte, manquent souvent d'expérience{{sfn|Petitfils 2002|p=340}}.

Si la marine intervient dans les conflits et joue un rôle important dans les tentatives de restaurer {{Souverain2|Jacques II (roi d'Angleterre)|d'Angleterre}}, elle est aussi utilisée dans la lutte contre les [[barbaresques]]. Si l'[[expédition de Djidjelli]] de {{Date-|novembre 1664}}, destinée à mettre fin au piratage des barbaresques en Méditerranée, se solde par un échec cuisant<ref>{{Ouvrage |auteur1=Joëlle Chevé |titre=Marie-Thérèse d'Autriche |sous-titre=épouse de {{Louis XIV}} |éditeur=[[Pygmalion (maison d'édition)|Pygmalion]] |année=2015 |pages totales=568 |isbn=978-2-7564-1751-6 |lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=CV-xCQAAQBAJ&pg=PT357&dq=pirates+barbaresques+kabyles}}.</ref>, les expéditions de {{Date-|1681}} et de {{Date-|1685}} de l'escadre d'[[Abraham Duquesne]] permettent de détruire de nombreux navires dans la [[baie d'Alger]]{{sfn|Maral 2012|p=213}}.

==== Guerres menées ====
{{Louis XIV}} engage le royaume dans une multitude de guerres et batailles :
{| class="wikitable alternance" style="text-align:center; width:100%;"
|+ Guerres de {{Louis XIV}}
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|
! scope=col | Date
! scope=col | Allié(s)
! scope=col | Ennemi(s)
! scope=col | [[Casus belli]]
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! scope=row | [[Guerre de Dévolution]]
| [[1667]]-[[1668]]
| Aucun
| [[Espagne]],<br>À partir de {{Date-|1668}} : [[Royaume d'Angleterre|Angleterre]], [[Provinces-Unies]], [[Suède]]
| Non-paiement à la France de la dot de l'infante d'Espagne, [[Marie-Thérèse d'Autriche (1638-1683)|Marie-Thérèse]].
| '''[[Traité d'Aix-la-Chapelle (1668)]]'''
|-
! scope=row | [[Guerre de Hollande]]
| {{Date-|1672}}-{{Date-|1678}}
| [[Royaume d'Angleterre|Angleterre]], [[Suède]], [[Électorat de Cologne]], [[Principauté épiscopale de Münster]]
| [[Provinces-Unies]], [[Saint-Empire romain germanique|Saint-Empire]], [[Espagne]], [[Brandebourg]], [[Danemark-Norvège]]
| Après la [[guerre de Dévolution]], {{Louis XIV}} croit devoir se débarrasser de la [[Triple-Alliance de La Haye]], et surtout des [[Provinces-Unies]] s'il veut continuer à conquérir les territoires espagnols.
| '''[[Traités de Nimègue|Traité de Nimègue]]''' et '''[[Traité de Westminster (1674)|Traité de Westminster]]'''
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! scope=row | [[Guerre des Réunions]]
| {{Date-|26 octobre 1683}} - {{Date-|15 août 1684}}
| Aucun
| [[Espagne]]
| La France exige les territoires ruraux des alentours des villes conquises lors des guerres de [[Guerre de Dévolution|Dévolution]] et de [[Guerre de Hollande|Hollande]], ainsi que le dicte la [[coutume]].
| '''Victoire française''' et '''[[Trêve de Ratisbonne]]'''
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! scope=row | [[Guerre de la Ligue d'Augsbourg]]
| {{Date-|24 septembre 1688}} - {{Date-|septembre 1697}}
| [[Jacobitisme|Jacobites]], [[Empire ottoman]]
| '''[[Ligue d'Augsbourg]]''' : [[Provinces-Unies]], [[Royaume d'Angleterre|Angleterre]], [[Saint-Empire romain germanique|Saint-Empire]], [[Duché de Savoie|Savoie]], [[Espagne]], [[Suède]] (jusqu'en {{Date-|1691}}), [[Royaume de Portugal|Portugal]], [[Royaume d'Écosse|Écosse]]
| Dans le cadre de sa [[politique des Réunions]],{{Louis XIV}} prend possession de divers territoires, dont [[Strasbourg]] et les [[Trois-Évêchés]].
| '''[[Traité de Ryswick|Traités de Ryswick]]''' : {{Louis XIV}} reconnaît {{Souverain2|Guillaume III d'Orange-Nassau|d'Orange}} comme roi d'Angleterre, d'Écosse et d'Irlande.
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! scope=row | [[Guerre de Succession d'Espagne]]
| [[1701]]-[[1714]]
| [[Espagne]], [[Électorat de Bavière]], [[Électorat de Cologne]]
| [[Provinces-Unies]], [[Royaume d'Angleterre|Angleterre]], [[Saint-Empire romain germanique|Saint-Empire]], [[Duché de Savoie|Savoie]], [[Royaume de Portugal|Portugal]], [[Archiduché d'Autriche|Autriche]], [[Royaume de Prusse|Prusse]], [[Couronne d'Aragon|Aragon]], [[camisard]]s
| {{Louis XIV}} accepte le testament de {{Souverain2|Charles II (roi d'Espagne)|d'Espagne}}, qui fait du [[Philippe V (roi d'Espagne)|duc d'Anjou]], petit-fils de {{Louis XIV}} et de l'[[Marie-Thérèse d'Autriche (1638-1683)|infante d'Espagne]], le roi d'Espagne.
| '''[[Traités d'Utrecht (1713)|Traité d'Utrecht]]''' : [[Philippe V (roi d'Espagne)|Philippe d'Anjou]] est reconnu comme roi d'Espagne mais renonce à ses droits de succession au trône de France.<br/>'''[[Traité de Rastatt]]''' : signé entre le Royaume de France et l'Archiduché d'Autriche
|}

Ces guerres agrandissent considérablement le territoire : sous le règne de {{Louis XIV}}, la France conquiert la [[Haute-Alsace]], [[Metz]], [[Toul]], [[Verdun]], le [[Comté de Roussillon|Roussillon]], l'[[Artois (province)|Artois]], la [[Flandre française]], [[Cambrai]], le [[comté de Bourgogne]], la [[Sarre (département)|Sarre]], le [[comté de Hainaut|Hainaut]] et la [[Basse-Alsace]]. Toutefois, revers de la médaille, cette politique pousse les autres pays européens, inquiets de cette volonté de puissance, à s'allier de plus en plus souvent contre la France. Si celle-ci reste puissante sur le continent, elle est donc relativement isolée, tandis que l'Angleterre connaît une prospérité économique croissante et qu'un sentiment national commence à poindre en Allemagne{{sfn|Petitfils 2002|p=664-665}}.

== Politique étrangère ==
[[Fichier:France 1643 to 1715-fr.svg|vignette|upright=1.5|Territoire sous règne français et conquêtes de {{Date-|1643}} à {{Date-|1715}}.|alt=carte représentant le territoire français et ses ajouts de {{Date-|1643}} à {{Date-|1715}}.]]
[[Fichier:Dominions House Habsburg abdication Charles V.jpg|vignette|gauche|Possessions des Habsbourg en 1556.|alt=La carte représente les possessions de la dynastie Habsbourg dans l'Europe du {{s-|XVI}}.]]
{{Louis XIV}} poursuit d'abord la stratégie de ses prédécesseurs depuis {{François Ier}} pour dégager la France de l'encerclement hégémonique des [[Maison de Habsbourg|Habsbourg]] en Europe, en menant une guerre continuelle contre l'[[Monarchie catholique espagnole|Espagne]], en particulier sur le front des [[comté de Flandre|Flandres]]. Toutefois, les guerres d'après les [[traités de Westphalie]] s'inscrivent dans un cadre différent. La France est alors perçue comme une menace par les autres pays et doit faire face à deux nouvelles puissances montantes : l'Angleterre protestante et les Habsbourg d'Autriche.

=== Domaine réservé du roi ===
La politique étrangère est un domaine où le monarque s'implique personnellement. Il écrit dans ses mémoires : {{citation|On me vit traiter immédiatement avec les ministres étrangers, recevoir les dépêches, faire moi-même une partie des réponses et donner à mes secrétaires la substance des autres}}{{sfn|Petitfils 2002|p=326}}. Un des grands moteurs de la politique étrangère de {{Louis XIV}} est la recherche de la gloire. Pour lui, la gloire n'est pas seulement une question d'amour-propre, mais tient aussi au désir de s'inscrire dans la lignée des hommes dont le souvenir perdure à travers les siècles. Un de ses premiers objectifs est de protéger le territoire national, le pré carré de Vauban{{sfn|Petitfils 2002|p=324}}. Le problème est que cette politique est vue, notamment après {{Date-|1680}} quand la puissance de la France s'affirme, comme une menace par les autres pays européens{{sfn|Petitfils 2002|p=324}}.

Pour mener cette politique, le roi s'entoure de collaborateurs de talent, tels [[Hugues de Lionne]] (1656-1671), puis [[Simon Arnauld de Pomponne]] (1672-1679), auquel succède [[Charles Colbert de Croissy]] (1679-1691), plus brutal et plus cynique, avant que Pomponne ne revienne en {{Date-|1691}}, lorsqu'une politique plus accommodante est jugée nécessaire. Le dernier responsable des affaires étrangères, [[Jean-Baptiste Colbert de Torcy]], fils de Colbert, est considéré par [[Jean-Christian Petitfils]] comme {{citation|un des plus brillants ministres des Affaires étrangères de l'ancien régime}}{{sfn|Petitfils 2002|p=327}}.

La France dispose alors de quinze ambassadeurs, quinze envoyés et deux résidents dont certains sont d'excellents négociateurs. Autour d'eux gravitent des négociateurs officieux et des agents secrets parmi lesquels un certain nombre de femmes, telles la baronne de Sack, Madame de Blau ainsi que [[Louise Renée de Penancoët de Keroual|Louise de Keroual]], qui devient la maîtresse de {{souverain3|Charles II (roi d'Angleterre)}}{{sfn|Petitfils 2002|p=328}}{{,}}<ref>{{Ouvrage |auteur1=Lucien Bély |titre=Espions et ambassadeurs au temps de {{Louis XIV}} |éditeur=[[Librairie Arthème Fayard|Fayard]] |année=2014 |isbn= |lire en ligne=https://books.google.ca/books?id=OfG-muv1yYYC&pg=PT128}}.</ref>. L'arme financière est aussi utilisée : bijoux offerts aux femmes ou maîtresses de puissants, attribution de pensions, etc. Deux ecclésiastiques, [[Guillaume-Egon de Fürstenberg]], qui devint abbé de Saint-Germain-des-Prés, et son frère{{sfn|Petitfils 2002|p=328-329}}, figurent en tête de liste des pensionnés.

Si le roi est d'abord préoccupé par les affaires européennes, il s'intéresse également aux colonies françaises en Amérique, sans négliger l'Asie et l'Afrique. En {{Date-|1688}}, il envoie des [[Mission jésuite en Chine|jésuites]] français auprès de l'empereur chinois et amorce ainsi les relations sino-françaises<ref>{{Lien web |titre=La Chine à Versailles |url=https://presse.chateauversailles.fr/expositions/expositions-au-chateau/la-chine-a-versailles/ |site=presse.chateauversailles.fr |éditeur=Espace presse du Château de Versailles |consulté le=18 novembre 2019}}.</ref>. Après avoir reçu en 1701 une lettre du négus {{souverain3|Iyasou Ier d'Éthiopie}} à la suite du périple de [[Jacques-Charles Poncet]], il envoie une ambassade sous la conduite de [[François Janus Le Noir Du Roule|Lenoir Du Roule]] dans l'espoir de nouer des relations diplomatiques. Ce dernier et ses compagnons sont cependant massacrés en 1705 à [[Sennar]]{{Sfn|Bély|2015|loc=Lucien Bély, « Poncet Jacques-Charles (1655-?) »|p=1082-1083}}.

=== Alliance traditionnelle contre les Habsbourg (1643-1672) ===
[[Fichier:Europe après les Traités de Westphalie - 1648.png|vignette|upright=1.5|Carte simplifiée de l'Europe après la [[Traités de Westphalie|paix de Westphalie]] en {{Date-|1648}}.|alt=Carte représentant l'Europe après la paix de Westphalie]]

Dans un premier temps, pour se dégager de l'encerclement des Habsbourg, le jeune {{Louis XIV}} avec son ministre [[Jules Mazarin|Mazarin]] fait alliance avec les principales puissances protestantes, reprenant ainsi la politique de ses deux prédécesseurs et de [[Armand Jean du Plessis de Richelieu|Richelieu]].

Cette [[guerre franco-espagnole]] connaît plusieurs phases. Quand le règne débute, la France soutient directement les puissances protestantes contre les Habsbourg, notamment lors de la [[guerre de Trente Ans]]. Les [[traités de Westphalie]] signés en {{Date-|1648}} voient le triomphe du dessein européen de [[Armand Jean du Plessis de Richelieu|Richelieu]]{{sfn|Cornette 2000|p=565}}. L'empire des Habsbourg est coupé en deux, avec d'un côté la [[Maison de Habsbourg|maison d'Autriche]] et de l'autre l'Espagne, tandis que l'Allemagne reste divisée en multiples États. Par ailleurs, ces traités sanctionnent la montée en puissance des États nationaux et instaurent une forte distinction entre la politique et la théologie, raisons pour lesquelles, le pape {{souverain2|Innocent X}} est fortement opposé à ce traité{{sfn|Cornette 2000|p=565}}. Les processus ayant mené à ces traités serviront de base aux congrès multilatéraux des deux siècles à venir{{sfn|Cornette 2000|p=565}}.

Durant la [[Fronde (histoire)|Fronde]], l'Espagne tente d'affaiblir le roi en soutenant la révolte militaire du [[Louis II de Bourbon-Condé|Grand Condé]] (1653) contre {{Louis XIV}}{{sfn|Bluche 1986|p=106}}. En {{Date-|1659}}, des victoires françaises et une alliance avec les [[puritanisme|puritains]] anglais (1655-1657) et les puissances allemandes ([[Ligue du Rhin]]) imposent à l'Espagne le [[traité des Pyrénées]] (soudé par le mariage entre {{Louis XIV}} et l'infante en {{Date-|1659}}){{sfn|Bluche 1986|p=131}}. Le conflit reprend à la mort du roi d'Espagne (1665) quand {{Louis XIV}} entame la [[guerre de Dévolution]] : au nom de l'héritage de son épouse, le roi réclame que des villes frontalières du royaume de France, en [[Pays-Bas méridionaux|Flandre espagnole]], lui soient dévolues{{sfn|Bluche 1986|p=351}}.

À l'issue de cette première période, le jeune roi est à la tête de la première puissance militaire et diplomatique d'Europe, s'imposant même au [[Alexandre VII|pape]]. Il a agrandi son royaume vers le nord ([[Artois (province)|Artois]], achat de [[Dunkerque]] aux Britanniques) et conservé, au sud, le [[Comté de Roussillon|Roussillon]]{{sfn|Bluche 1986|p=358}}. Sous l'influence de [[Jean-Baptiste Colbert|Colbert]], il a aussi construit une marine et agrandi son domaine colonial pour combattre l'hégémonie espagnole.

=== Guerre de Hollande (1672-1678) ===
{{article détaillé|Guerre de Hollande}}

La guerre de Hollande est souvent considérée comme {{citation|l'une des erreurs les plus graves du règne}} et les historiens ont beaucoup glosé sur les raisons de cette guerre{{sfn|Petitfils 2002|p=363}}. {{Louis XIV}} a-t-il fait la guerre à la Hollande parce qu'elle est un des pivots de la propagande anti-française et qu'on y imprime des écrits sur sa vie scandaleuse et son arbitraire ? Ou bien parce que la Hollande est alors la puissance maritime dominante ainsi qu'un grand centre financier ? S'agit-il d'un conflit opposant les Hollandais protestants aux Français catholiques ? Pour l'auteur américain Paul Somino, il s'agit surtout, chez le roi, de poursuivre un rêve de gloire{{sfn|Petitfils 2002|p=364-365}}.

[[File:Louis XIV par Claude Lefèvre La Nouvelle Orléans.jpg|vignette|{{Louis XIV}} portant la moustache « à la royale »{{efn|group=n|Fine moustache en croc dont les pointes relevées sont maintenues appliquées par de la cire{{sfn|Delalex 2015|p=84}}.}}, portrait de {{Date-|1670}} par [[Claude Lefèbvre]].|alt=Tableau représentant un homme]]

Ni [[Michel Le Tellier (homme d'État)|Le Tellier]] ni [[François Michel Le Tellier de Louvois|Louvois]] ne sont les instigateurs de cette guerre, même s'ils s'y rallient. De même, [[Jean-Baptiste Colbert|Colbert]] s'y oppose au début, car cela menace la stabilité économique du royaume. En fait, le mauvais génie pourrait bien avoir été [[Henri de La Tour d'Auvergne (vicomte de Turenne)|Turenne]] qui pense que la guerre sera courte, ce dont le [[Louis II de Bourbon-Condé|Grand Condé]] doute{{sfn|Petitfils 2002|p=365-366}}.

Au départ, les victoires succèdent aux victoires jusqu'à ce que les Hollandais ouvrent les écluses et inondent le pays, arrêtant la progression des troupes. Les Hollandais proposent alors la paix à des conditions avantageuses pour les Français, qui malgré tout refusent{{sfn|Petitfils 2002|p=371}}. La situation de blocage amène une révolution du peuple hollandais contre l'oligarchie temporisatrice et porte au pouvoir [[Guillaume III d'Orange-Nassau|Guillaume d'Orange]], un adversaire d'autant plus redoutable qu'il deviendra roi d'Angleterre{{sfn|Petitfils 2002|p=374-375}}. L'Espagne et plusieurs États allemands se mettent alors à aider la Hollande. Les massacres de population auxquels le [[François-Henri de Montmorency-Luxembourg|maréchal de Luxembourg]] laisse ses troupes se livrer, servent la propagande anti-française de Guillaume d'Orange{{sfn|Petitfils 2002|p=377}}.

En mer, les forces alliées anglo-françaises ne sont pas très heureuses face à la Marine hollandaise ; sur terre, en revanche, le roi remporte une victoire en [[Siège de Maastricht (1676)|prenant la ville de Maëstricht]]{{sfn|Petitfils 2002|p=378}}. Mais cette victoire renforce la détermination des autres pays qui commencent à craindre la puissance française. En Angleterre en {{Date-|1674}}, {{Charles II}}, menacé par le [[Parlement d'Angleterre|Parlement anglais]], fait défection{{sfn|Petitfils 2002|p=380}}. Dès {{Date-|1674}}, des négociations sont envisagées, qui ne débuteront réellement qu'en {{Date-|mai 1677}} à Nimègue{{sfn|Petitfils 2002|p=398}}.

Par les [[Traités de Nimègue]], la France reçoit {{citation|la Franche-Comté, le Cambrésis, une partie du Hainaut avec Valenciennes, [[Bouchain (Nord)|Bouchain]], [[Condé-sur-l'Escaut]] et [[Maubeuge]], une partie de la Flandre maritime avec [[Ypres]] et [[Cassel (Nord)|Cassel]], et le reste de l'Artois qui lui manquait}}{{sfn|Petitfils 2002|p=400}}.

Mais ce traité défavorable à l'Empereur rompt la politique de Richelieu et de Mazarin qui visaient à ménager les États germaniques. En conséquence, si le peuple français de même que les grands seigneurs applaudissent le roi et si les élus parisiens lui décernent le titre de Louis le Grand, cette paix est porteuse de menaces futures{{sfn|Petitfils 2002|p=401-402}}.

=== Réunions (1683-1684) ===
{{article détaillé|Guerre des Réunions|Trêve de Ratisbonne}}
[[Fichier:Louis14-Versailles1685.jpg|vignette|upright=1.5|Le {{Date-|15 mai 1685}} : le [[Francesco Maria Imperiale Lercari|doge de Gênes]] est contraint de venir s'excuser dans la [[galerie des Glaces]] de [[Versailles]] (par [[Claude Guy Hallé]], [[château de Versailles]]).|alt=Tableau représentant le Doge de Gènes s'excusant devant Louis XIV.]]

Comme les traités précédents ne définissent pas exactement les frontières des nouvelles possessions, {{Louis XIV}} veut profiter de sa puissance pour rattacher à la France tous les territoires ayant un jour relevé de la souveraineté des villes ou territoires nouvellement acquis. À cet effet, des magistrats étudient les actes passés afin d'interpréter les traités au mieux des intérêts français{{sfn|Petitfils 2002|p=405}}. En [[Franche-Comté]], par exemple, une chambre du Parlement de [[Besançon]] est chargée de cette tâche. Le cas le plus délicat est celui de [[Strasbourg]], une [[Ville libre d'Empire|ville libre]]. Au départ, {{Louis XIV}} modère ses juristes sur ce cas. Toutefois, lorsqu'un général de l'Empire se rend dans cette ville, il change d'avis et, à l'automne {{Date-|1681}}, décide de l'occuper{{sfn|Petitfils 2002|p=409}}. Cette politique inquiète. En {{Date-|1680}}, l'Espagne et l'Angleterre signent un pacte d'entraide. {{Louis XIV}} menace alors {{Souverain2|Charles II (roi d'Angleterre)|d'Angleterre}} de publier les termes du [[Traité de Douvres|traité secret de Douvres]] qui le lie à la France et lui octroie des espèces sonnantes et trébuchantes, ce qui le fait changer d'avis{{sfn|Petitfils 2002|p=410}}. L'inquiétude persiste en Allemagne, même si la France accorde des subsides à des États comme le [[Brandebourg]]. Enfin, {{Louis XIV}} ne joue pas réellement franc-jeu avec l'Autriche qu'il soutient officiellement, tout en ménageant l'[[Empire ottoman|ennemi ottoman]] qui [[Siège de Vienne (1683)|menace Vienne en {{Date-|1683}}]]. Finalement, la [[Trêve de Ratisbonne]] confirme pour vingt ans la plupart des avancées françaises notamment à Strasbourg{{sfn|Petitfils 2002|p=414}}. Parmi les alliés de l'Espagne, {{Louis XIV}} a pris en grippe la [[république de Gênes]] qui n'a pas traité l'ambassadeur de France avec le respect qui lui était dû. Il fait bombarder la ville par la flotte française de [[Abraham Duquesne-Monier|Duquesne]] et la détruit en partie. En {{Date-|1685}}, le [[doge]] de Gênes doit venir à Versailles s'incliner devant le roi{{sfn|Petitfils 2002|p=414}}.

=== Guerre de neuf ans ou guerre de la Ligue d'Augsbourg (1688-1697) ===
{{article détaillé|Guerre de la Ligue d'Augsbourg{{!}}Guerre de Neuf Ans|Première guerre intercoloniale}}

Les causes du déclenchement de la nouvelle guerre sont multiples. Pour l'[[Liste des souverains du Saint-Empire|empereur]] {{Souverain2|Léopold Ier (empereur du Saint-Empire)}}, le traité de Ratisbonne n'est que provisoire. Il doit être revu quand il aura vaincu les Turcs à l'est{{sfn|Petitfils 2002|p=488}}. Au contraire, {{Louis XIV}} insiste pour que la [[trêve de Ratisbonne]] soit prorogée. Par ailleurs, l'attitude de {{Louis XIV}} envers les protestants irrite les Hollandais qui inondent la France de [[libelle]]s contre le régime tyrannique de {{Louis XIV}} et contre un roi qualifié d'Antéchrist{{sfn|Petitfils 2002|p=488}}. En Angleterre, le roi catholique, {{souverain2|Jacques II (roi d'Angleterre)}}, allié peu fiable de {{Louis XIV}}, est renversé pendant la [[Glorieuse Révolution]] de {{Date-|1688}}-{{Date-|1689}} et remplacé par le protestant [[Guillaume III d'Orange-Nassau|Guillaume d'Orange]]{{sfn|Petitfils 2002|p=495}}. En Savoie, {{Louis XIV}} traite le [[Victor-Amédée II|Duc Victor-Amédée]] comme un vassal{{sfn|Petitfils 2002|p=489}}. En Allemagne, le roi veut faire valoir les droits de la [[Anne de Bavière (1648-1723)|princesse Palatine]] sur le Palatinat, de manière à éviter que le nouvel électeur ne soit un fidèle de l'empereur. En juillet {{Date-|1686}}, craignant une nouvelle extension des « réunions », les princes allemands forment la ligue d'Augsbourg, qui comprend l'empereur, le roi d'Espagne, le roi de Suède, l'électeur de Bavière, celui du Palatinat et le duc de Holstein-Gottorp{{sfn|Petitfils 2002|p=491}}. Durant la même période, les rapports de la France avec {{souverain2|Innocent XI}}, déjà tendus depuis l'[[affaire de la régale]], ne s'améliorent pas{{sfn|Petitfils 2002|p=492}}.

==== Opérations militaires ====
[[Fichier:Battle of Beachy Head (1690)-fr.svg|vignette|Carte de la bataille navale du [[Bataille du cap Béveziers|cap Béveziers]].|alt=Carte repensant Tableau représentant la bataille navale du cap Béveziers.]]
[[Fichier:NIND MVB-Bombardement ISO200.jpg|vignette|La [[Grand-Place de Bruxelles]] en feu pendant la nuit du 13 au {{date-|14 août 1695}} (anonyme, musée de la Ville de Bruxelles).]]
Le {{Date-|24 septembre 1688}}, le roi s'estimant menacé par la ligue d'Augsbourg et las des tergiversations concernant la trêve de Ratisbonne, se déclare contraint d'occuper [[Philippsburg]] si, sous trois mois, ses adversaires n'acceptent pas une conversion de la trêve de Ratisbonne en un traité définitif et si l'évêque de Strasbourg ne devient pas électeur de Cologne. Parallèlement, sans attendre la réponse, il fait occuper Avignon, Cologne et Liège{{sfn|Petitfils 2002|p=493}} et met le siège devant [[Siège de Philippsburg (1688)|Philippsburg]]. En {{Date-|1689}}, afin d'intimider ses adversaires, Louvois provoque le [[sac du Palatinat]], action qui, loin d'effrayer ses adversaires, a pour effet de les renforcer, puisque l'électeur de Brandebourg, {{souverain3|Frédéric Ier de Prusse}}, l'électeur de Saxe, le duc de Hanovre et le Landgrave de Hesse rejoignent la coalition de l'empereur{{sfn|Petitfils 2002|p=497}}.

Les armées françaises connaissent d'abord des revers, tant et si bien qu'en {{Date-|1689}}, [[Madame de Maintenon]], le dauphin et le [[Louis-Auguste de Bourbon (1670-1736)|Duc du Maine]] poussent {{Louis XIV}} à changer ses généraux. Rentré en grâce, le [[François-Henri de Montmorency-Luxembourg|maréchal de Luxembourg]] remporte la [[bataille de Fleurus (1690)]], un succès que {{Louis XIV}} et Louvois, peu habitués à la guerre de mouvement, n'exploitent pas{{sfn|Petitfils 2002|p=500}}. Sur mer, [[Anne Hilarion de Costentin de Tourville|Tourville]] disperse une flotte anglo-hollandaise le {{Date-|10 juillet 1690-}} à [[Bataille du cap Béveziers|Cap Bézeviers]]. Par contre, en Irlande, les troupes de {{Souverain2|Jacques II (roi d'Angleterre)}} et de [[Antonin Nompar de Caumont|Lauzun]] sont battues par {{Souverain3|Guillaume III d'Orange-Nassau}} nouveau roi d'Angleterre{{sfn|Petitfils 2002|p=501}}. Le {{date-|10 avril 1691}}, {{Louis XIV}} prend [[Mons]] après avoir [[Siège de Mons (1691)|assiégé]] la ville ; il entreprend ensuite le [[siège de Namur (1692)]], tandis que {{souverain2|Victor-Amédée II}} envahit le Dauphiné{{sfn|Petitfils 2002|p=503}}.

L'année {{Date-|1692}} est aussi celle de l'échec de la [[bataille de la Hougue]], où la flotte française, qui doit aider {{souverain-|Jacques II}} à reconquérir son royaume, est battue. Cette défaite fait renoncer la France à pratiquer sur mer la guerre d'escadre et lui fait préférer le recours aux corsaires{{sfn|Petitfils 2002|p=504-506}}. En {{Date-|1693}}, la [[Bataille de Neerwinden (1693)|bataille de Neerwinden]], une des plus sanglantes du siècle, voit la victoire des Français qui s'emparent d'un grand nombre de drapeaux ennemis. En Italie, le maréchal [[Nicolas de Catinat]] bat Victor-Amédée à la [[Bataille de La Marsaille]] ({{Date-|octobre 1693}}){{sfn|Petitfils 2002|p=507}}. Sur mer en {{Date-|1693}}, la flotte de la Méditerranée aide l'armée française de Catalogne à s'emparer de [[Roses|Rosas]], puis de concert avec la flotte de [[Anne Hilarion de Costentin de Tourville|Tourville]], coule ou détruit {{nobr|83 navires}} d'un convoi anglais qui, escorté par les Anglo-Hollandais, faisait route vers [[Izmir|Smyrne]]{{sfn|Petitfils 2002|p=583}}. Malgré tout, la guerre s'enlise quand {{souverain2|Charles XI}} de Suède décide de proposer une médiation{{sfn|Petitfils 2002|p=510-511}}.

==== Paix de Ryswick ====
{{article détaillé|Traité de Ryswick}}
[[Fichier:Vauban picture.jpg|vignette| ''Sébastien Le Prestre de Vauban'' estime que la [[traité de Ryswick|paix de Ryswick]] est la plus infâme depuis les [[Traités du Cateau-Cambrésis|traités de Cateau-Cambrésis]].|alt=Tableau représentant Vauban]]

La Savoie est la première à faire la paix avec la France, forçant ainsi ses alliés à une suspension des hostilités en Italie. Finalement l'Angleterre, la Hollande et l'Espagne signent un accord en {{Date-|septembre 1697}} et sont rejoints le {{Date-|30 octobre 1697-}} par l'empereur et les princes allemands{{sfn|Petitfils 2002|p=503}}. La France reçoit [[Saint-Domingue (colonie française)|Saint Domingue]] (l'actuel [[Haïti]]) et conserve Strasbourg, tandis que les Hollandais lui rendent [[Pondichéry]]. En revanche, elle doit rendre Barcelone, Luxembourg ainsi que les places fortes des Pays-Bas occupées depuis le [[Traités de Nimègue|traité de Nimègue]]. {{Louis XIV}} reconnaît Guillaume d'Orange comme roi d'Angleterre, tandis que les Hollandais obtiennent de la France des avantages commerciaux. La France a certes obtenu des frontières plus linéaires, mais elle est placée sous la surveillance des autres pays. Guillaume d'Orange et l'Angleterre sortent renforcés et ont imposé leur concept de {{citation|balance de l'Europe}}, c'est-à-dire l'idée qu'il convient d'éviter qu'il y ait en Europe continentale une puissance dominante. La paix est mal accueillie en France. Les Français ne comprennent pas qu'après tant de victoires proclamées, il ait été fait tant de concessions. [[Sébastien Le Prestre de Vauban|Vauban]] estime même qu'il s'agit de la paix la {{citation|plus infâme depuis celle de [[Traités du Cateau-Cambrésis|Cateau-Cambrésis]]}}{{sfn|Petitfils 2002|p=512}}.

=== Guerre de succession d'Espagne (1701-1714) ===
{{Article détaillé|Guerre de Succession d'Espagne|Deuxième guerre intercoloniale}}

==== Contexte ====
La fragilité de la santé de {{souverain2|Charles II (roi d'Espagne)|d'Espagne}}, resté sans enfant, pose très tôt le problème de sa succession, que se disputent les Bourbons de France et les Habsbourg d'Autriche{{sfn|Petitfils 2002|p=572-573}}. Le problème est quasi insoluble : tant la solution française que l'autrichienne a pour effet de créer un déséquilibre des forces en Europe. Il s'ensuit nombre de pourparlers en vue d'élaborer un partage équilibré, qui n'aboutissent à rien de concret. Finalement, les Espagnols convainquent {{Charles II}} que le mieux serait un candidat français au trône, une position que, pour des raisons internes à l'Italie, le pape {{souverain2|Innocent XII}} soutient{{sfn|Petitfils 2002|p=578}}. {{Louis XIV}} hésite beaucoup à accepter l'héritage que lui offre {{Charles II}}. Le Conseil d'en haut, qu'il consulte, est divisé. En effet, accepter le testament, c'est mettre un Bourbon sur le trône d'Espagne et non pas agrandir la France comme le permettrait un traité. C'est d'ailleurs la position défendue par [[Sébastien Le Prestre de Vauban|Vauban]]{{sfn|Petitfils 2002|p=581}}. D'un autre côté, laisser l'Espagne aux Habsbourg, c'est risquer l'encerclement. Enfin, économiquement, l'Espagne est alors un pays exsangue, avec moins de {{nobr|6 millions}} d'habitants en métropole, et difficile à redresser, comme le constateront les Français un temps employés à cette tâche. Finalement, {{Louis XIV}} accepte parce qu'il ne peut s'empêcher de voir le testament comme un {{citation|ordre de Dieu}}{{sfn|Petitfils 2002|p=582}}.

Les Autrichiens prennent cette décision comme un ''{{langue|la|casus belli}}'' et font alliance avec l'électeur palatin, l'électeur de Hanovre et celui de Brandebourg, que les princes germaniques autorisent à se nommer [[Liste des monarques de Prusse|roi de Prusse]]. Guillaume d'Orange en Angleterre et Anthonie Heinsius en Hollande ne sont pas favorables au testament, mais se heurtent à des opinions publiques qui ne veulent pas de guerre{{sfn|Petitfils 2002|p=583-584}}. Si la guerre est malgré tout enclenchée, c'est en partie à la suite des maladresses de {{Louis XIV}}, qui veut conserver au nouveau roi d'Espagne des droits sur le royaume de France et qui « bouscule » des garnisons hollandaises en Belgique sans respecter les clauses prévues dans les traités{{sfn|Petitfils 2002|p=587}}.

De son côté, le nouveau roi d'Angleterre, Guillaume d'Orange, s'active à réarmer son nouveau pays et est d'autant plus opposé à {{Louis XIV}} que celui-ci a soutenu le roi déchu {{souverain-|Jacques II}}. Aussi, et bien que le « Grand Roi » ait tenté le dialogue, le {{Date-|14 mai 1702}}, l'Angleterre, la Hollande et l'empereur lui déclarent la guerre, rejoints par le Danemark, le roi de Prusse et de nombreux princes et évêques allemands{{sfn|Petitfils 2002|p=591}}. Les animateurs militaires de cette coalition sont le [[Eugène de Savoie-Carignan|prince Eugène de Savoie]], [[Anthonie Heinsius]] et le [[John Churchill (1er duc de Marlborough)|duc de Marlborough]]{{sfn|Petitfils 2002|p=592}}. De son côté, si la France compte des maréchaux médiocres comme [[François de Neufville de Villeroy|Villeroy]] ou [[Camille d'Hostun|Tallard]], elle compte aussi deux chefs, [[Louis-Joseph de Vendôme|Vendôme]] et [[Claude Louis Hector de Villars|Villars]], dont les capacités militaires sont à la mesure de celles de leurs adversaires, Marlborough et le prince Eugène{{sfn|Petitfils 2002|p=595}}.

==== Défaites militaires, pourparlers de paix dilatoires et appel au peuple ====
[[Fichier:Villars a Denain1.jpg|vignette|upright=1.2|Villars à la [[bataille de Denain]], peinture de [[Jean Alaux]] (1788-1858).|alt=Tableau représentant Villars à la bataille de Denain.]]

La guerre commence par une série de défaites, excepté la percée victorieuse de [[Claude Louis Hector de Villars]] en Allemagne{{sfn|Petitfils 2002|p=612}}. La Provence est envahie et Toulon assiégé en {{Date-|1707}}{{sfn|Petitfils 2002|p=614-615}}. En Flandre, la mésentente entre le [[Louis-Joseph de Vendôme|duc de Vendôme]] et le [[Louis de France (1682-1712)|duc de Bourgogne]] conduit à une retraite désastreuse en {{Date-|1708}}{{sfn|Petitfils 2002|p=615-616}}. Au Conseil d'en haut, des divergences se font jour tandis que la situation financière se dégrade. Aussi {{Louis XIV}} demande-t-il, en {{Date-|1709}}, une suspension des combats et l'ouverture de négociations de paix. Le problème est que ses adversaires font preuve de beaucoup d'exigences. Ils veulent notamment le contraindre à reconnaître un Habsbourg comme souverain de l'Espagne{{sfn|Petitfils 2002|p=631}}.

Face à cette situation difficile, {{Louis XIV}} rédige ou fait rédiger par Torcy un appel au peuple, où il explique sa position. Il écrit notamment :
{{citation bloc|Je passe sous silence les insinuations qu'ils ont faites de joindre mes forces à celle de la Ligue, et de contraindre le roi, mon petit-fils, à descendre du trône, s'il ne consentait pas volontairement à vivre désormais sans États, à se réduire à la condition d'un simple particulier. Il est contre l'humanité de croire qu'ils aient seulement eu la pensée de m'engager à former avec eux pareille alliance. Mais, quoique ma tendresse pour mes peuples ne soit pas moins vive que celle que j'ai pour mes propres enfants ; quoique je partage tous les maux que la guerre fait souffrir à des sujets aussi fidèles, et que j'aie fait voir à toute l'Europe que je désirais sincèrement de les faire jouir de la paix, je suis persuadé qu'ils s'opposeraient eux-mêmes à les recevoir à des conditions également contraires à la justice et à l'honneur du nom FRANÇAIS{{sfn|Petitfils 2002|p=637}}.}}

Le mot ''français'', écrit en majuscule dans le texte original, est un {{citation|appel au patriotisme}}. Le roi, en opposition avec la pensée absolutiste, ne demande pas l'obéissance mais le soutien du peuple{{sfn|Petitfils 2002|p=637}}. La lettre, lue aux troupes par le maréchal de Villars, provoque un sursaut chez les soldats, qui, lors de la [[bataille de Malplaquet]], font preuve d'une grande combativité. S'ils doivent finalement battre en retraite, ils infligent à leur ennemi des pertes deux fois plus importantes que celles qu'ils ont à déplorer{{sfn|Petitfils 2002|p=639}}.

==== Paix voulue par la France et l'Angleterre : traités d'Utrecht ====
[[Fichier:Carte administrative de l'Acadie.svg|vignette|upright=1.5|gauche|Carte de l'[[Acadie]].|alt=carte de l'Acadie]]{{article détaillé|Traités d'Utrecht (1713)|alt=carte de l'Acadie.}}

En avril {{Date-|1710}}, les ''[[Tory|Tories]]'' arrivent au pouvoir en Angleterre et, sous l'impulsion du [[Henry St John (1er vicomte Bolingbroke)|vicomte Bolingbroke]], considèrent que l'objectif premier de la politique étrangère anglaise se trouve désormais sur mer et dans les colonies. Selon [[Jean-Christian Petitfils|J.-C. Petitfils]], cette décision fait vraiment entrer ce pays {{citation|dans le concert des grandes puissances mondiales}}{{sfn|Petitfils 2002|p=642}}. Les Anglais, qui ne veulent ni d'une Espagne française ni d'une Espagne autrichienne, acceptent, lors des ''Préliminaires de Londres'', que {{Souverain2|Philippe V (roi d'Espagne)|d'Espagne}} reste roi d'Espagne, à condition que {{Louis XIV}} s'engage à ce que le roi d'Espagne ne puisse pas être aussi roi de France. Les autres belligérants trouvent cela insuffisant. Mais les Anglais sont déterminés et exercent une pression notamment financière sur leurs alliés. Comme de son côté le maréchal de Villars gagne la [[bataille de Denain]] et triomphe d'une armée qui menaçait d'envahir la France{{sfn|Petitfils 2002|p=660}}, les membres de la [[Grande Alliance (1701)|Grande Alliance]] acceptent finalement de négocier et de signer les [[Traités d'Utrecht (1713)]]. Philippe conserve le trône d'Espagne, les Anglais reçoivent l'[[Saint-Christophe (île)|île Saint-Christophe]], la [[baie d'Hudson|baie]] et le [[détroit d'Hudson]], l'[[Acadie]] et [[Terre-Neuve (Nouvelle-France)|Terre Neuve]], et la France leur consent, au niveau commercial, la clause de la {{citation|nation amie}}. Les Hollandais rendent Lille à la France, qui conserve l'Alsace. Les Habsbourg sont confirmés dans leur possession des [[Pays-Bas autrichiens|ex-Pays-Bas espagnols]], du [[Duché de Milan|Milanais]], du [[royaume de Naples]] et de la [[Sardaigne]]. {{souverain2|Victor-Amédée II}} recouvre la souveraineté de la [[Savoie]] et du [[comté de Nice]]{{sfn|Petitfils 2002|p=663}}.

== Économie ==
[[Fichier:Louis XIV 1666 Charles le Brun.jpg|vignette|Le roi et Colbert par [[Charles Le Brun]].|alt=Tableau représentant Colbert et le roi.]]

D'un point de vue économique, deux périodes sont à distinguer : celle d'avant {{Date-|1680}}, assez brillante, et celle de {{Date-|1680}}-{{Date-|1715}}, où le gouvernement de plus en plus solitaire de {{Louis XIV}} prive les forces économiques de moyens de se faire entendre{{sfn|Petitfils 2002|p=705-706}}, ce qui pénalise l'économie d'autant plus que l'état des finances devient inquiétant.

Les conditions climatiques furent très défavorables: le règne coïncide avec le [[minimum de Maunder]] (1645- 1715), une période extrêmement froide<ref>Jean Pierre Legrand, Michel Le Goff, 1992. ''Les observations météorologiques de Louis Morin entre 1670 et 1713'', Monographie de la Direction de la météorologie nationale, {{n°|6}}.</ref> qui produit d'importantes disettes, plusieurs [[épidémie]]s et [[épizootie]]s; en 1693-1694, le printemps très pluvieux suivi d'un échaudage l'été provoque une famine suivie d'une épidémie qui tuent {{formatnum:1300000}} personnes; lors du « grand hiver » 1708-1709 le froid a tué directement environ deux cent mille personnes, et indirectement quatre cent mille par famine et épidémie<ref>[[Emmanuel Leroy-Ladurie]], 2005. ''Histoire humaine et comparée du climat - Canicules et glaciers {{sp-|XIII|-|XVIII|s}}''. Paris, Fayard, {{p.|509-518}}.</ref>.

=== Colbertisme ===
{{article connexe| Colbertisme}}
Le terme de « colbertisme » ne date que du {{s-|XIX}}, lorsque les manuels scolaires de la [[Troisième République (France)|Troisième République]] en font une {{citation|référence obligée}}. Colbert, [[Maximilien de Béthune (duc de Sully)|Sully]] et [[Anne Robert Jacques Turgot|Turgot]] servant alors de contrepoint aux nombreux héros guerriers de l'histoire de France{{sfn|Guéry 1989|p=298}}. Les travaux de cette époque confortent l'idée développée par [[Ernest Lavisse]] selon laquelle Colbert aurait proposé au roi {{Louis XIV}} une politique économique entièrement nouvelle, une politique qui leur paraît pouvoir servir de modèle à l'industrialisation de la France à la fin du {{S-|XIX}}{{sfn|Guéry 1989|p=298}}. En opposition avec cette version, en {{Date-|1976}}, [[Alain Peyrefitte]] fait du colbertisme l'origine de ce qu'il nomme ''[[Le Mal français]]''{{sfn|Guéry 1989|p=298}}. Colbert, pour les historiens de la fin du {{s-|XX}} suit la politique économique dominante entre {{Date-|1450}} et {{Date-|1750}}, appelée mercantilisme au {{S-|XIX}}{{sfn|Guéry 1989|p=301}}. Selon Poussou, plutôt que du mercantilisme, la France pratique alors une économie de rattrapage visant à se mettre au niveau des Hollandais qui, vers {{Date-|1661}}, sont la puissance maritime et commerciale dominante{{sfn|Poussou 2017|p=158}}. Pour Richard Kuisel<ref>{{Ouvrage |auteur1=Richard F. Kuisel |titre=Le capitalisme et l'État en France |sous-titre=modernisation et dirigisme au {{S mini-|XX}} |lieu=Paris |éditeur=[[Éditions Gallimard]] |année=1984 |isbn=}}.</ref>, Colbert inventerait un {{citation|style gaulois}} de gouvernance économique mêlant État, corporations et forces du marché{{sfn|Guéry 1989|p=311}}. Alain Guéry{{sfn|Guéry 1989|p=305}} et Herbert Lüthy indiquent : {{citation|La tragédie de Colbert, dans ses succès comme dans ses échecs, c'est d'avoir dû remplacer partout l'[[L'Éthique protestante et l'Esprit du capitalisme|esprit capitaliste]], absent par l'intervention bureaucratique et par les artifices des privilèges, des monopoles, des concessions, des capitaux fournis par l'État et de la réglementation officielle. De ce point de vue, le Colbertisme apparaît comme un succédané du calvinisme dans le domaine de l'organisation sociale}}{{sfn|Lüthy 1965|p=69}}.

Colbert, comme avant lui {{souverain2|Louis XI}}, Sully et Richelieu, veut réduire le décalage existant entre le potentiel économique de la France et l'activité assez médiocre de l'économie réelle{{sfn|Guéry 1989|p=300}}. Colbert conçoit le commerce extérieur comme un commerce d'État à État{{sfn|Guéry 1989|p=303}} : aussi veut-il mettre fin à un commerce extérieur déficitaire. Pour inverser cette tendance, il souhaite donc diminuer les importations de produits de luxe italiens ou flamands et créer ou favoriser les industries du pays. Colbert n'hésite pas à pratiquer l'espionnage industriel, notamment au détriment de la Hollande et de Venise{{sfn|Bluche 1986|p=215}}, à qui il « emprunte » les secrets de la verrerie. En octobre {{Date-|1664}}, il peut ainsi créer la « manufacture de glaces, cristaux et verres », qui deviendra plus tard [[Saint-Gobain]]{{sfn|Bluche 1986|p=217}}. Un édit de {{Date-|1664}} autorise l'établissement des manufactures royales de tapisserie de haute et basse lice à Beauvais et en Picardie{{sfn|Bluche 1986|p=217}}. Cette politique d'entreprises créées en dehors des corporations a un certain succès ; en revanche, sa volonté de contrôler les corporations est un échec, d'autant qu'il entendait de la sorte regrouper des ateliers et arriver à une plus grande rationalisation de la production{{sfn|Guéry 1989|p=304-305}}. Colbert essaye aussi d'améliorer la qualité de l'industrie textile établie depuis longtemps en Picardie et en Bretagne en publiant force édits{{sfn|Poussou 2017|p=157}}. Il favorise aussi les voies de communication, notamment les voies fluviales ([[canal d'Orléans]], canal de Calais à Saint-Omer, [[canal du Midi]]){{sfn|Poussou 2017|p=157}}.

À partir du début du {{s-|XVII}}, la France se désole de voir le commerce maritime dominé par les Hollandais, les Flamands, les Anglais et les Portugais. Aussi le roi entreprend-il de bâtir une flotte et de créer des compagnies commerciales : [[Compagnie française des Indes orientales|Compagnie des Indes orientales]] (océan Indien), [[Compagnie française des Indes occidentales|Compagnie des Indes occidentales]] (Amériques), [[Compagnie du Levant]] (Méditerranée et [[Empire ottoman]]) et [[Compagnie du Sénégal]] (Afrique) pour promouvoir le [[commerce triangulaire]] des [[esclavage|esclaves]]. Mais cela n'aboutit qu'à des {{citation|demi-réussites}} (comme la Compagnie des Indes orientales, qui s'éteint un siècle après sa fondation) ou {{citation|d'évidents échecs}} (comme la Compagnie des Indes occidentales, dissoute dix ans après sa naissance){{sfn|Poussou 2017|p=157}}.

[[Fichier:Johann Wilhelm Preyer - Früchtestilleben mit Sektkelch.jpg|vignette|Le champagne a été inventé par [[Dom Pérignon]] sous {{Louis XIV}}.]]

Si les agents économiques privés sont réticents à rejoindre les grandes compagnies, ils font malgré tout preuve de dynamisme. À la fin du règne, les [[Bretons]] vendent leurs toiles en Espagne et les Malouins durant la [[guerre de Succession d'Espagne]] sont actifs dans l'Atlantique sud{{sfn|Poussou 2017|p=161-162}}. Par ailleurs, c'est à cette époque qu'est inventé le [[champagne (AOC)|champagne]]. Enfin la fabrication de drap fin se développe dans le Carcassonnais tandis que la soierie Lyonnaise s'impose au détriment de la production italienne{{sfn|Poussou 2017|p=164}}. Toutefois, {{citation|les marchands et négociants s'accommodaient mal du dirigisme de Colbert}}{{sfn|Poussou 2017|p=165}} et se montreront plus dynamiques quand [[Louis II Phélypeaux de Pontchartrain|Pontchartrain]] prendra le relais, même si la [[Édit de Fontainebleau (1685)|révocation de l'édit de Nantes]] a privé la France de négociants et surtout d'artisans et ouvriers spécialisés protestants qui contribueront à l'émergence de concurrents dans les pays qui les accueilleront{{sfn|Poussou 2017|p=165}}. Il convient de noter aussi que sur la période, les dépenses militaires ainsi que les constructions entreprises en grand nombre dans le royaume entretiennent une forte demande intérieure qui favorise la production et le commerce{{sfn|Poussou 2017|p=167}}.

=== Colonies ===
==== Colonies d'Amérique du Nord ====
[[Fichier:QueenAnnesWarBefore-fr.svg|vignette|upright=1.5|L'Amérique du Nord vers 1702. Les territoires français sont représentés en bleu, les territoires anglais en rouge, les espagnols en orange.|alt=carte de l'Amérique du Nord]]{{article détaillé|Nouvelle-France}}

En 1663, {{Louis XIV}} fait de la [[Nouvelle-France]] une province royale en prenant le contrôle de la [[Compagnie de la Nouvelle-France]]. Dans le même temps, la [[Société Notre-Dame de Montréal]] cède ses possessions à la [[Compagnie des prêtres de Saint-Sulpice]]<ref>{{Ouvrage |langue=en |auteur1=[[Brian Young (historien)|Brian Young]] |titre=In Its Corporate Capacity : the Seminary of Montreal as a Business Institution, {{Date-|1616}}-{{Date-|1676}} |lieu=Montréal |éditeur=McGill-Queen's University Press |année=1986 |passage=3-37 |isbn=}}.</ref>. Pour peupler la colonie, le gouvernement paie le voyage des futurs colons. Parallèlement, pour favoriser la natalité dans la colonie même, il organise l'opération des « [[Filles du Roi|filles du roi]] » visant à envoyer au Canada de jeunes orphelines : entre {{Date-|1666}} et {{Date-|1672}}, {{Unité|764|à=1000|orphelines}} débarquent au [[Québec]]. Avec cette politique, la population compte rapidement {{unité|3000|personnes}} supplémentaires<ref>{{Ouvrage |langue=en |auteur1=[[Alan Taylor (historien)|Alan Taylor]] |titre=American Colonies |sous-titre=The Settling of North America |lieu=New York |éditeur=[[Penguin Books]] |année=2001 |pages totales=526 |passage=365-366 |isbn=978-0-14-200210-0}}.</ref>. En outre, de {{Date-|1660}} à {{Date-|1672}}, l'État consent un effort budgétaire important et envoie un million de livres pour développer l'industrie et le commerce. Après {{Date-|1672}}, les finances royales ne permettent plus d'investir fortement dans cette colonie{{sfn|Havard 2019|p=98}}.

En 1665, {{Louis XIV}} envoie au Québec une garnison française, le [[régiment de Carignan-Salières]]. Le gouvernement de la colonie est réformé et comprend un gouverneur général et un intendant qui dépendent tous deux du ministère de la Marine. Cette même année, [[Jean Talon]] est choisi par le ministre de la Marine, [[Jean-Baptiste Colbert|Colbert]], pour devenir l'intendant de la Nouvelle-France. Dans les années {{Date-|1660}}-{{Date-|1680}}, une réflexion intervient sur le devenir de cette colonie. À cette occasion, deux thèses s'affrontent : pour Talon et le [[Louis de Buade de Frontenac|comte de Frontenac]], il convient de créer un État qui irait jusqu'au Mexique ; à Paris, Colbert soutient la thèse d'un peuplement et du développement d'un territoire limité compris entre [[Montréal]] et [[Québec]]{{sfn|Havard 2019|p=99-100}}. C'est la thèse des gens du Québec qui triomphe. Plusieurs raisons expliquent cette issue. Les trappeurs et les chasseurs en quête de fourrures et de richesses minières poussent à une expansion des territoires non désirée par Paris. Les missionnaires, poussés par la soif de convertir, vont également dans le même sens. C'est ainsi qu'en {{Date-|1673}}, le [[Jacques Marquette|père Marquette]] et [[Louis Jolliet]], après avoir atteint le [[Mississippi (fleuve)|Mississippi]], le descendent jusqu'à l'embouchure de l'[[Arkansas]]{{sfn|Havard 2019|p=98}}. C'est à cette époque qu'est construit le [[fort Frontenac]], suivi en {{Date-|1680}} du [[fort Crèvecœur]], puis du [[fort Prud'homme]]. Enfin, en {{Date-|1682}}, l'explorateur [[René-Robert Cavelier de La Salle]] atteint le [[delta du Mississippi]] et en prend possession au nom de {{Louis XIV}} et nomme cette vaste région la [[Louisiane]] en l'honneur du roi{{sfn|Blanchard 2006|p=132}}. Cette expansion provoque un changement dans l'équilibre économique de la colonie, qui, dominée jusque vers {{Date-|1650}} par la pêche, devient à compter de cette date de plus en plus tournée vers les fourrures<ref>{{Article |langue=en |auteur=Melville H. Watkins |titre=A Staple Theory of Economic Growth |journal=The Canadian Journal of Economics and Political Science |volume=29 |numéro=2 |pages=141-158 |date=mai 1963 |jstor=139461 |doi=10.2307/139461 | issn = 0315-4890}}.</ref>. Le commerce de la Nouvelle-France vers le continent européen transite quant à lui principalement par [[La Rochelle]] dont la flotte triple entre {{Date-|1664}} et {{Date-|1682}}{{sfn|Poussou 2017|p=163}}.

Durant la guerre de la [[ligue d'Augsbourg]], les Français doivent faire face aux [[Iroquois]] jusqu'à ce qu'un traité de paix soit signé en {{Date-|1701}}. Cette même année {{Louis XIV}} demande que la Nouvelle-France et la Louisiane servent de barrière à l'expansion anglaise à l'intérieur du continent américain et qu'à cette fin soit crée une chaîne de postes, une idée qui ne se concrétisera qu'après la fin de la [[guerre de Succession d'Espagne]]. Lors des [[Traités d'Utrecht (1713)]], qui mettent fin à cette guerre, la Nouvelle-France est amputée de l'[[Acadie]] et de [[Terre-Neuve]]{{sfn|Havard 2019|p=113}}. À compter de {{Date-|1699}}, la France s'intéresse fort à la [[Louisiane]] à la fois pour des raisons géopolitiques, contenir l'Angleterre, et économiques : on espère que ce territoire sera aussi riche en minerais que le Mexique. Comme au Canada, les Français s'allient à des Indiens. Dans ce cas avec des tribus du golfe du Mexique elles-mêmes en lutte avec les [[Creeks]] et les [[Chicachas]] alliés des Anglais. En proie à des difficultés financières, le gouvernement veut confier le territoire à l'initiative privée, mais la bourgeoisie commerçante française n'est pas très enthousiaste. Finalement [[Antoine de Lamothe-Cadillac]], le fondateur de [[Détroit (Michigan)|Détroit]], arrive à convaincre le financier [[Antoine Crozat]] à s'intéresser à cette colonie en lui faisant miroiter l'existence possible de mines. En {{Date-|1712}}, un bail de quinze ans est signé avec Crozat qui reçoit mandat d'y envoyer annuellement deux navires chargés de vivres et de colons{{sfn|Havard 2019|p=124}}. Si les explorateurs ne trouvent ni or ni argent, seulement du plomb, du cuivre et de l'étain en Louisiane, la recherche de mines contribue malgré tout au peuplement du pays des Indiens [[Illinois (peuple)|Illinois]]. Par ailleurs, la révolte des Indiens contre les Anglais installés à Charleston et en Caroline du Sud permet aux Français, entre {{Date-|1715}}-{{Date-|1717}}, d'étendre leur influence en Louisiane{{sfn|Havard 2019|p=125}}.

==== Colonies pratiquant le commerce triangulaire ====
{{article détaillé|Commerce triangulaire|Code noir}}
[[Fichier:Royal Standard of King Louis XIV.svg|vignette|gauche|Pavillon du Roi-Soleil.|alt=Pavillon du Roi-Soleil.]]

===== Afrique =====
En [[1659]], un premier comptoir français, nommé « Saint-Louis » en hommage au roi, est installé sur l'île de [[Saint-Louis (Sénégal)|Ndar]] au [[Sénégal]]. À la suite de l'échec de la Compagnie des Indes occidentales, le pays est cédé à la [[Compagnie du Sénégal]] en [[1673]] pour transférer des [[esclavage|esclaves]] noirs aux [[Antilles]]. Le roi fournit une grande part des capitaux pour assurer la traite négrière, prêtant également des vaisseaux de guerre et des soldats. Des possessions sont arrachées aux Hollandais, comme [[Gorée]] en 1677 par le vice-amiral Jean d'Estrées, et des traités sont établis avec les rois locaux. Nommé par le roi, [[André Bruë]] noue ainsi des relations diplomatiques avec [[Lat Soukabé Ngoné Fall]] et d'autres souverains comme le roi de [[Royaume de Galam|Galam]]{{Sfn|Bély|2015|loc=Lucien Bély, « Afrique, Africains »|p=58-59}}.

Selon l'historien [[Tidiane Diakité]], {{Louis XIV}} serait de tous les rois de France et de l'Europe le seul à s'être autant intéressé à l'Afrique<ref>{{Article |auteur=[[Jacques Bins de Saint-Victor]] |périodique=Le Figaro littéraire |titre=Le soleil noir |date=6 juin 2013 |page=2 |lire en ligne=https://www.arlea.fr/IMG/pdf/le-soleil-noir.pdf}}.</ref>{{,}}{{sfn|Diakité 2013}} : il est celui qui eut la correspondance la plus fournie avec des rois d'[[Afrique]], celui qui dépêcha auprès d'eux le plus d'émissaires et chargés de mission, et il reçut des Africains à la cour. Certains fils de rois noirs, comme le prince [[Aniaba]], furent élevés à [[Versailles]], baptisés par les soins du roi qui caressait l'espoir d'une évangélisation de l'[[Afrique]] ; il favorisa l'envoi de missionnaires, y compris en [[Éthiopie]], royaume chrétien pourtant {{Citation|infecté de plusieurs hérésies}}<ref>''Mémoire royal du {{Date-|5 juillet 1702}} fixant la mission du sieur de la Roule''.</ref>. Cet objectif d'évangélisation est d'ailleurs associé à celui du développement du commerce avec l'Afrique ; le [[royaume de France]] était alors en concurrence avec les nations commerçantes d'Europe du Nord dans ce domaine.

[[Fichier:Triangular trade.png|vignette|Schéma classique du commerce triangulaire entre l'Afrique, les Amériques et l'Europe.|alt=carte représentant le commerce triangulaire.]]

Toujours selon Diakité, {{Louis XIV}} semble avoir été attiré par ce continent mystérieux, dominé par des rois méconnus, eux-mêmes fascinés par le prestige de celui que les explorateurs français s'attachaient à présenter comme le {{Citation|plus grand roi de l'Univers}}. Pour {{Louis XIV}}, l'Afrique était un des enjeux du rayonnement de la monarchie française, au-delà des questions économiques et religieuses. Les Hollandais cherchèrent d'ailleurs en vain à ruiner cette image en mettant en avant la médiocrité des Français dans le commerce, leurs prétentions et leurs mauvaises manières{{sfn|Diakité 2013}}.

===== Antilles et Guyane =====
Le règne de {{Louis XIV}} marque un essor territorial, économique et démographique profond de la présence française dans les Antilles. Les possessions seigneuriales passent sous le contrôle direct de la monarchie ; la monoculture de la canne à sucre remplace peu à peu la production de tabac et la population évolue d'approximativement {{nombre|12000|individus}} à environ de {{nombre|75000}} à {{nombre|100000|individus}}{{Sfn|Bély|2015|loc=Reynald Abald, « Antilles françaises »|p=98-101}}. L'expansion sera très forte à Haïti qui passe de {{nobr|18 plantations}} en {{Date-|1700}} {{nobr|à 120}} en {{Date-|1704}}{{sfn|Poussou 2017|p=167}}.

En [[1664]], sur ordre du roi, [[Joseph-Antoine Le Febvre de La Barre]] reprend la [[Guyane|Guyane française]] aux Néerlandais alors même que la France leur est alliée{{sfn|Roy|1907}}. L'année suivante, Colbert rachète la [[Guadeloupe]] à [[Charles Houël]], ancien directeur de la [[Compagnie des îles d'Amérique]] et l'île de la [[Martinique]] à [[Jacques Dyel du Parquet]] (?). Tous ces territoires sont confiés en gestion à la Compagnie des Indes occidentales. Quand celle-ci fait faillite en {{Date-|1674}}, ces territoires sont rattachés au domaine royal. En [[1697]], le [[traité de Ryswick]] attribue à la France la moitié ouest de l'[[Hispaniola|île de Saint-Domingue]] (aujourd'hui [[Haïti]]){{sfn|Petitfils 2002|p=503}}. En {{Date-|1676}}, {{souverain3|Jean II d'Estrées}} reconquiert véritablement la Guyane, qui est désormais un enjeu de politique internationale récurrent en raison des litiges avec les Portugais{{Sfn|Bély|2015|loc=Lucien Bély, « Guyane »|p=604-605}}.

Dans le but de fournir une main-d’œuvre servile aux plantations, et dans le cadre de la codification absolutiste du Royaume, {{Louis XIV}}, en {{date|mars 1685}}, promulgue le « [[Code noir]] ». Par cette ordonnance, {{Louis XIV}} améliore la condition des esclaves<ref>{{Lien web |titre=Le Code noir ou Edit du Roy |url=https://www.assemblee-nationale.fr/histoire/esclavage/code-noir.pdf |site=assemblee-nationale.fr}}</ref> : les dimanches et fêtes chrétiennes seront obligatoirement chômés ; une nourriture suffisante est exigée, les maîtres doivent habiller suffisamment leurs esclaves ; les époux et les enfants ne doivent pas être séparés lors d'une vente ; la torture est interdite ; pour éviter les viols, les rapports sexuels avec les esclaves sont interdits ; les maîtres ne peuvent tuer leurs esclaves ; et des limites sont fixées aux châtiments corporels. Le [[Code noir]] reconnaît également aux esclaves certaines formes de droits, très limités cependant, notamment religieux, juridiques, de propriété et de retraite. Mais toutes ces dispositions sont mal appliquées, du fait de la pression des colons sur la justice.

Par ailleurs, l'ordonnance expulse les [[Juifs]] des [[Antilles françaises|Antilles]], définit les règles de métissage et régularise le plein usage des [[esclavage|esclaves]] dans les [[Empire colonial français|colonies]], auquel il donne un cadre juridique. Le Code noir entérine une législation différenciée sur le territoire, car un esclave en [[France métropolitaine|métropole]] est en principe affranchi, et impose leur christianisation. L'édit se voit étendu à Saint-Domingue en {{date-|1687}}, en Guyane en {{date-|1704}}, et par la suite aux Mascareignes et en Louisiane{{Sfn|Bély|2015|loc=Lucien Bély, « Code noir, esclavage »|p=310-312}}.

À la fin du {{s|XX}}, de nombreuses critiques dénonceront l'ordonnance, responsable d'une institutionnalisation de l'esclavage, et de ses sévices concernant les [[Châtiment corporel|châtiments corporels]] (amputations par exemple, en cas de fuite…) ; le Code noir est considéré par le philosophe [[Louis Sala-Molins]] comme {{citation|le texte juridique le plus monstrueux qu'aient produit les Temps modernes}}<ref>{{Lien web |auteur=[[Louis Sala-Molins]] |url=https://www.persee.fr/doc/rfsoc_0035-2969_1990_num_31_1_1100 |titre=''Le Code noir ou le calvaire de Canaan''}}.</ref>. Les thèses de Sala-Molins sont cependant critiquées par des historiens, qui lui reprochent de manquer entièrement de rigueur, et d'avoir une lecture partielle du Code noir<ref>{{Lien web |titre=Article du Monde : Les travaux sur le Code noir ne doivent pas se plier aux dogmes |url=https://www.lemonde.fr/idees/article/2015/09/02/les-travaux-sur-le-code-noir-ne-doivent-pas-se-plier-aux-dogmes_4743422_3232.html |site=lemonde.fr |date=09 juillet 2015}}</ref>. Jean Ehrard fait notamment remarquer que les [[Châtiment corporel|châtiments corporels]], qui sont limités par l'ordonnance, sont alors les mêmes qu’en métropole, pour toute personne non noble<ref name=":1">{{Article |langue=fr|prénom1=Alessandro |nom1=Tuccillo |titre=Review of Jean Ehrard, Lumières et esclavage. L’esclavage et l’opinion publique en France au XVIIIe siècle, Bruxelles, Versaille, 2008 |périodique=academia.edu ; ENS Lyon |date=2012 |lire en ligne=https://www.academia.edu/1897094/Review_of_Jean_Ehrard_Lumi%C3%A8res_et_esclavage._L_esclavage_et_l_opinion_publique_en_France_au_XVIIIe_si%C3%A8cle_Bruxelles_Versaille_2008_in_http_montesquieu.ens-lyon.fr_2012 |consulté le=2019-10-09 }}.</ref>{{,}}<ref>{{Lien web |titre=Le corps puni : le châtiment sous l'Ancien Régime |url=https://www.scienceshumaines.com/le-corps-puni-le-chatiment-sous-l-ancien-regime_fr_13741.html|site=scienceshumaines.com}}</ref>. L'historien rappelle qu'à cette époque, il existe des dispositions équivalentes à celles du Code noir pour des catégories comme les marins, les soldats ou les vagabonds. Jean Ehrard rappelle enfin que les colons s’opposèrent même au Code noir, parce qu'ils étaient désormais censés fournir aux esclaves des moyens de subsistance, que normalement ils ne leur garantissaient pas.

=== Agriculture importante ne mettant pas à l'abri de famines ===
[[Fichier:Corn stalks in Benton County, Indiana.png|vignette|gauche|Le [[maïs]] (ou blé d'Inde, ''Zea mays''), est originaire d'[[Amérique]] où il constituait la base de l'[[alimentation]] des [[Amérindiens]], il se répand en France sous {{Louis XIV}}.]]
L'[[agriculture]] française est alors la plus importante d'Europe{{sfn|Poussou 2017a|p=139}} avec un primat donné aux céréales : le [[seigle]] associé ou non au [[millet (graminée)|millet]] comme dans les Landes de Gascogne, le [[sarrasin (plante)|sarrasin]] en Bretagne, et évidemment le [[blé]]. Sous {{Louis XIV}}, le [[maïs]] s'implante dans le Sud-Ouest et en Alsace{{sfn|Poussou 2017a|p=139-140}}. Le pain est alors fait soit de [[méture]] (mélange de froment, de seigle et d'orge) soit de [[méteil]] (froment et seigle){{sfn|Poussou 2017a|p=145}}. La culture de la vigne et l'élevage contribuent également à la prédominance de l'agriculture française. La vigne est alors cultivée jusqu'en Picardie et en Île-de-France, tandis que la fabrication d'[[eaux-de-vie]] se développe en Charente, dans la basse vallée de la Loire, dans la vallée de la Garonne et en Languedoc{{sfn|Poussou 2017a|p=140}}. Les Hollandais exportent les eaux-de vie et les excédents céréaliers du Toulousain{{sfn|Poussou 2017a|p=146}}. L'élevage est une ressource vitale en montagne où la transhumance prend des dimensions spectaculaires. L'élevage sert aux populations montagnardes à acheter des céréales et du vin. Dans les exploitations céréalières, l'élevage de mouton prédomine. Par, contre hormis les régions d'élevage comme l'Auvergne, le Limousin et la Normandie, les chevaux et les bêtes à cornes sont rares en campagne et se concentrent plutôt autour des villes{{sfn|Poussou 2017a|p=142}}.

L'agriculture céréalière française est pratiquée dans de petites exploitations. D'après l'historien [[Gérard Noiriel]], sous le règne de {{Louis XIV}}, la moitié des paysans sont des journaliers (ouvriers agricoles). Ils disposent d'un lopin de quelques ares, sur lequel ils ont construit une maison d'une seule pièce. Ils cultivent aussi un potager, avec quelques poules et quelques brebis pour la laine. La fraction la plus pauvre de la paysannerie est composée de manœuvriers qui ne possèdent que quelques outils manuels (faucille, fourche). Du printemps jusqu'au début de l'automne, ils travaillent sur les terres d'un seigneur, d'un membre du clergé ou d'un riche laboureur. Ils participent aux moissons, aux foins et aux vendanges. En hiver, ils cherchent à se faire embaucher comme hommes de peine. Plus de moitié des revenus des paysans sont ponctionnées par divers impôts : [[Taille (impôt)|taille]], [[dîme]], auxquels s'ajoutent les taxes sur le sel, sur le tabac, sur l'alcool et les droits seigneuriaux<ref>{{Lien web |auteur=Gérard Noiriel |titre=Ni intemporelle ni passive, la France paysanne |url=https://www.monde-diplomatique.fr/mav/166/NOIRIEL/60092 |site=monde-diplomatique.fr |éditeur=Le Monde diplomatique|date=2019-08-01}}.</ref>. Toutefois, la misère paysanne n'est pas générale, et il existe {{citation|une paysannerie aisée}}, comprenant de grands exploitants, des fermiers, des laboureurs, de petits vignerons en Val de Seine, ou des « haricotiers » dans le Nord{{sfn|Petitfils 2002|p=526}}.

La France va connaître sous {{Louis XIV}} deux grandes famines. Celle de {{Date-|1693}}-{{Date-|1694}} n'est pas liée à un hiver trop rude mais à un été assez froid, marqué par des pluies diluviennes qui gâchent les récoltes. Le gouvernement ayant ravitaillé prioritairement Paris et l'armée, des séditions éclatent tandis que la population afflue vers les villes. Le bilan est de {{nombre|1300000|morts}}, soit presque autant que durant la guerre de {{Date-|1914}}{{sfn|Petitfils 2002|p=528-529}}. Lors du grand hiver de 1709 la [[Seine]], le [[Rhône]] et la [[Garonne]] sont pris par les glaces. Les oliviers meurent et les semis ne donnent que peu de fruits. Il s'ensuit une famine sévère, malgré des importations de blé étranger. Le bilan de la famine s'élève à {{nombre|630000|morts}}{{sfn|Petitfils 2002|p=627}}.

On peut se demander pourquoi ces famines alors que l'agriculture française est la plus importante d'Europe. Pour répondre à cette question, il convient de noter que les exploitations céréalières ont en moyenne moins de cinq hectares et qu'elles n'ont pas modernisé leur mode de production comme le font au {{S-|XVII}} les Hollandais et les Anglais{{sfn|Poussou 2017a|p=148}}, de sorte qu'en réalité, l'agriculture céréalière française en temps normal arrive juste à nourrir la population française alors la plus importante d'Europe. Aussi, pour [[Jean-Pierre Poussou]]{{sfn|Poussou 2017a|p=152}}, de 30 % à 40 % du territoire est {{citation|de manière chronique, pour des raisons géographiques en situation de fragilité alimentaire}}. Le commerce intérieur des céréales pourrait remédier à cela, mais il est rendu difficile par des problèmes de transport et freiné par des lourdeurs administratives. Par ailleurs, lors des deux grandes famines, les Hollandais qui auraient pu apporter en France du blé de la Baltique sont en guerre avec {{Louis XIV}}. En fait, ce n'est qu'au {{S-|XVIII}} que l'agriculture permettra de faire franchir la {{citation|barrière des 20 à {{nobr|23 millions}} d'habitants à laquelle elle se heurtait depuis des siècles}}{{sfn|Poussou 2017a|p=153}}.

=== Problèmes financiers et impôts ===
Lorsqu'il prend le pouvoir, le {{Date-|13 avril 1655}}, le roi, alors âgé de {{nobr|16 ans}}, décrète dix-sept édits visant à renflouer les caisses de l'État, ce qui a pour effet de faire passer le total des revenus fiscaux du royaume de {{nobr|130 millions}} de livres en {{Date-|1653}} à plus de {{nobr|160 millions}} en {{Date-|1659}}-{{Date-|1660}}<ref>[http://www.canalacademie.com/ida7430-Nicolas-Fouquet-le-coup-de-majeste-de-Louis-XIV-et-la-fete-de-Vaux-le-Vicomte-17-aout-1661.html Nicolas Fouquet, le « coup de majesté » de {{Louis XIV}} et la fête de Vaux-le-Vicomte {{date-|17 août 1661}}] sur Canal Académie.</ref>. La guerre entraîne dès {{Date-|1675}} un accroissement du déficit public, qui passe de {{nobr|8 millions}} en {{Date-|1672}} à {{nobr|24 millions}} en {{Date-|1676}}{{sfn|Petitfils 2002|p=384}}. Pour faire face, Colbert augmente les impôts existants, ressuscite d'anciens impôts et en crée d'autres. Il invente aussi une sorte de bons du trésor et crée une caisse des emprunts. La guerre de Hollande marque la fin du colbertisme, car l'État n'est plus en mesure de soutenir l'industrie ni directement par des aides ni indirectement par ses commandes{{sfn|Petitfils 2002|p=403}}.[[Fichier:Bank of England Charter sealing 1694.jpg|vignette|''Établissement de la charte de la Banque d'Angleterre (1694)'', par Lady Jane Lindsay.|alt=Tableau représentant la signature de la charte créant la Banque D'Angleterre.]]

En {{Date-|1694}}, pour faire face aux dépenses notamment militaires, {{Louis XIV}} crée un impôt sur le revenu qui touche tout le monde, y compris le dauphin et les princes : l'impôt de [[capitation]]. Cet impôt distingue vingt-et-une classes de contribuables à partir d'une analyse multicritère qui ne tient pas seulement compte des trois classes (noblesse, clergé, tiers état), mais aussi des revenus réels des personnes{{sfn|Petitfils 2002|p=530-531}}. La capitation sera supprimée en {{Date-|1697}} puis rétablie en {{Date-|1701}}, mais elle perd alors sa fonction d'impôt sur le revenu, car celui-ci est repris par le dixième denier (« dixième ») inspiré par la [[dîme]] royale, préconisée par [[Sébastien Le Prestre de Vauban|Vauban]]{{sfn|Petitfils 2002|p=643}}. En 1697, la monarchie établit une [[taxe sur les étrangers]] et leurs héritiers, abandonnée au bout de quelques années et dont le résultat financier est décevant<ref>{{Ouvrage|auteur1=Jean-François Dubost|auteur2=Peter Sahlins|titre=Et si on faisait payer les étrangers?|sous-titre=Louis XIV, les immigrés et quelques autres|lieu=Paris|éditeur=[[Groupe Flammarion|Flammarion]]|année=1999|pages totales=475|isbn=9782082118064}}</ref>.

Selon [[Jean-Christian Petitfils]], Il ne faudrait pas exagérer le poids des impôts en France sous {{Louis XIV}}. Une étude anglaise a en effet montré que, en {{Date-|1715}}, les Français sont moins taxés que les Anglais. Les impôts ne représentent alors que {{unité|0,7|hectolitres}} de grain de froment par contribuable en France, {{nobr|contre 1,62}} en Angleterre. En fait, la France est alors un pays qui thésaurise beaucoup, et de ce point de vue ce ne sont pas tant les sujets dans leur ensemble qui sont pauvres, que l'État qui n'a pas réellement modernisé son système fiscal{{sfn|Petitfils 2002|p=704-705}}. Des études menées dans les années {{Date-|1980}} se sont interrogés sur la question du financement de l'État. En particulier deux choses les ont frappés, tout d'abord les impôts sont toujours payés et d'autre part le pays au moins jusque vers {{Date-|1780}} a été de plus en plus prospère{{sfn|Goubert 1996|p=226}}.

Les études montrent que le roi et l'appareil d'État délèguent à des financiers le prélèvement des impôts tout en exigeant d'eux en contrepartie le paiement de sommes forfaitaires. De la sorte, ils font supporter par les financiers les aléas économiques{{sfn|Goubert 1996|p=226}}. Ces financiers que très longtemps on a cru de basse extraction sont en fait très bien intégrés dans la société et servent de prête-noms à des aristocrates fortunés{{sfn|Dessert 1984|p=98}}. De sorte que comme l'écrit [[Françoise Bayard]]{{sfn|Cornette 2000|p=571}} {{citation|l'État réussit ce tour de force inouï de faire payer volontairement les riches}} même si ceux-ci reçoivent en compensation des intérêts. Par ailleurs, le Conseil du roi conserve la maîtrise des financiers et si nécessaire n'hésitent pas à recourir à la justice comme ce fut le cas pour Fouquet{{sfn|Dessert 1984|p=279}}. C'est à cette époque que se développe la notion de rente. C'est-à-dire de prêt à l'État qui rapporte un revenu fixe, relativement bien assuré. La rente constitue rapidement une part notable du patrimoine non seulement des gens d'affaires mais aussi de la dot des épouses{{sfn|Dessert 1984|p=22}}.

À la mort de {{Louis XIV}}, la France connaît une {{Citation|crise financière sans précédent}}, conséquence des guerres incessantes et des grands travaux<ref>[[Jean Goulemot]], ''La littérature des Lumières'', éditions [[Armand Colin]], [[2005]] [https://books.google.fr/books?id=SItLRROcVQQC&pg=PT5&dq=h%C3%A9ritage+financier+de+louis+xiv&hl=fr&sa=X&ei=uCorUq3JCKrI0wX9vYCYAg&ved=0CEYQ6AEwBA#v=onepage&q=h%C3%A9ritage%20fi|nancier%20de%20louis%20xiv&f=false lire en ligne].</ref>. Les embarras financiers de l'État deviennent {{Citation|l'élément le plus fâcheux de la situation du royaume}} en [[1715]]<ref>Michel Antoine, ''{{Louis XV}}'', [[Librairie Arthème Fayard|Éditions Fayard]], [[1989]] [https://books.google.fr/books?id=zOevvujOlJEC&pg=PT246&dq=h%C3%A9ritage+financier+de+louis+xiv&hl=fr&sa=X&ei=iSsrUrq7PKaq0QW2z4DwDA&ved=0CDoQ6AEwADgU#v=onepage&q=h%C3%A9ritage%20financier%20de%20louis%20xiv&f=false lire en ligne].</ref>, ce qui compliquera la tâche du régent [[Philippe d'Orléans (1674-1723)|Philippe d'Orléans]]. À la mort de {{Louis XIV}}, la dette s'élève à {{unité|3.5|milliards}} de [[livre (monnaie)|livres]] {{incise|soit entre {{unité|25}} et {{nobr|50 milliards}} d'[[euro]]s en 2010}} équivalant à dix années de recettes fiscales. {{Louis XIV}} n'a pas su doter la France d'une Banque centrale comme l'ont fait les Anglais avec la [[Banque d'Angleterre]], ce qui aurait permis de rationaliser le financement de l'État{{sfn|Petitfils 2002|p=403}}. Sous la [[Régence (1715-1723)|régence]], [[John Law de Lauriston|John Law]] créera une [[Histoire des bourses de valeurs#John Law dissout la dette de Louis XIV dans le Mississippi|nébuleuse de sociétés]] autour de la [[Banque générale]], au capital de {{nobr|6 millions}} de livres, fondée le {{Date-|2 mai 1716}} sur le modèle de la [[Banque d'Angleterre]], avec des actions échangeables contre les créances sur l'État, mais qui se soldera par un échec financier.

== Religion ==
Roi de [[droit divin]], {{Louis XIV}} est profondément imprégné par la religion qui lui a été inculquée par sa mère{{sfn|Maral 2012|p=283}}.

=== Roi très chrétien ===
Dès son enfance, sa journée, sa semaine et son année sont ponctuées de nombreux rites religieux afin de signifier aux yeux du public la grandeur de la fonction royale{{sfn|Maral 2012|p=57}}. [[Anne d'Autriche (1601-1666)|Anne d'Autriche]] lui impose des exercices de [[piété]] réguliers, dès sa première éducation religieuse, confiée à [[Hardouin de Péréfixe de Beaumont|Hardouin de Péréfixe]]. D'après l'[[François-Timoléon de Choisy|abbé de Choisy]], elle recourt à des méthodes rigoureuses pour lui inculquer un esprit religieux : {{Citation|Il n'y avait que sur le chapitre de la religion qu'on ne lui pardonnait rien ; et parce qu'un jour la reine mère, alors régente, l'entendit jurer, elle le fit mettre en prison dans sa chambre, où il fut deux jours sans voir personne, et lui fit tant d'horreur d'un crime qui va insulter Dieu jusque dans le Ciel, qu'il n'y est presque jamais retombé depuis, et qu'à son exemple le blasphème a été aboli par les courtisans qui en faisaient alors vanité}}{{sfn|Maral 2012|p=45}}. Le roi [[Se confesser|se confesse]] dès l'âge de {{nobr|9 ans}} {{incise|au père Charles Paulin<ref>{{Ouvrage |auteur1={{Louis XIV}} |titre=Œuvres de {{Louis XIV}} : mémoires historiques et politiques, mémoires et pièces militaires, lettres particulières ; opuscules littéraires ; pièces historiques, {{vol.|6}} |éditeur= |année=1806 |lire en ligne=https://books.google.ca/books?id=kjcTAAAAQAAJ&pg=PA351}}.</ref>}} et il fait sa [[première communion]] le jour de Noël {{Date-|1649}} (en mémoire du [[Baptême de Clovis|baptême]] de [[Clovis Ier|Clovis]]{{sfn|Maral 2012|p=49-50}}, au lieu de la traditionnelle date de [[Pâques]]) quelques jours après sa [[confirmation]]. Le lendemain des cérémonies du [[Sacre des rois de France|sacre]] du {{Date-|7 juin 1654}}, il devient grand-maître de l'[[ordre du Saint-Esprit]]{{sfn|Maral 2012}}.

Avant de sortir de son lit, et le soir au coucher, le roi reçoit l'[[eau bénite]] apportée par son [[Chambellan de France|chambellan]], se signe et, assis, récite l'office du [[Saint-Esprit]], dont il est grand-maître{{sfn|Maral 2012|p=58}}. Habillé, il s'agenouille et prie en silence. Au lever, il indique l'heure à laquelle il souhaite assister à la [[messe]] quotidienne, qu'il ne manque qu'exceptionnellement, en cas de campagne militaire. En tenant compte des jours où il assiste à plusieurs messes, on estime qu'il a été présent à environ trente mille messes dans sa vie{{sfn|Maral 2012|p=59}}. L'après-midi, il se rend régulièrement à l'office liturgique des [[vêpres]], célébrées et chantées les jours solennels{{sfn|Maral 2012|p=63}}.

Chaque résidence royale est dotée d'une [[Chapelle royale de Versailles|chapelle palatine]] à deux niveaux, avec tribune intérieure permettant au roi d'assister à la messe sans avoir à descendre au rez-de-chaussée{{Note|groupe=n|Le roi descendait dans la nef les jours où il communiait. Lorsque le roi assistait à la messe du rez-de-chaussée, il prenait place sur un prie-dieu : deux rangées de [[Gardes suisses (France)|suisses]] battaient du tambour jusqu'à ce qu'il fût agenouillé. Deux maîtres des requêtes restaient de part et d'autre du prie-Dieu, prêts à recevoir les éventuelles suppliques adressées au souverain : le principe d'un libre accès au souverain durant la manifestation publique de sa dévotion était respecté durant toute la messe.}}{{,}}{{sfn|Maral 2012|p=59-61}}. Le roi ne [[Communion|communie]] qu'en certaines occasions, lors des {{citation|bons jours du roi}} : le [[Samedi saint]], les vigiles de la [[Pentecôte]], de la [[Toussaint]] et de [[Noël]], le jour de l'[[Assomption de Marie|Assomption]] ou de l'[[Immaculée Conception]]. Il assiste au salut du [[Eucharistie|Saint-Sacrement]], célébré tous les [[Jeudi|jeudis]] et [[Dimanche|dimanches]] en fin d'après-midi, ainsi que durant toute l'[[Octave (liturgie)|octave]] de la [[Fête-Dieu]]{{sfn|Maral 2012|p=64}}.

[[Fichier:Meister des Hausbuches 003.jpg|vignette|redresse|Scène de lavement des pieds : panneau gauche d'un [[retable]] de la [[Passion du Christ]], [[Maître du Livre de Raison]], v.&nbsp;[[1475]], [[Gemäldegalerie (Berlin)|Gemäldegalerie]] de [[Berlin]]. |alt=Photo représentant un lavement des pieds.]]

==== Stricte observance des rites ====
En raison du [[Sacre des rois de France|sacre]], certains rites religieux s'appliquent au roi de France pour rappeler son statut particulier de roi [[très chrétien]]{{sfn|Maral 2012|p=87-88}}. {{Louis XIV}} les assume avec une dévotion croissante. D'abord, la présence du roi à la [[messe]] entraîne des actions liturgiques proches de celles prévues en présence d'un [[Cardinal (religion)|cardinal]], d'un [[archevêque]] métropolitain ou d'un [[évêque diocésain]]{{Note|groupe=n|Le roi ne prenait pas le deuil en noir, mais en violet couleur du deuil de l'évêque. Au cours de la [[messe]], le célébrant ne devait pas oublier d'accomplir au moins dix inclinations profondes en direction du souverain, que celui-ci fut présent dans la nef ou la tribune royale. À l'[[offertoire]], le roi était encensé de trois coups doubles, immédiatement après le célébrant, c'est-à-dire avant les cardinaux, évêques et autres clercs éventuellement présents. Pendant la [[messe]] basse, deux clercs de la Chapelle, agenouillés, devaient tenir des flambeaux allumés de la fin de la [[Préface (liturgie)|préface]] jusqu'à l'[[Élévation (liturgie)|élévation]] incluse, une disposition prévue également pour la messe basse célébrée par un évêque. Lors des cérémonies de l'[[Ordre du Saint-Esprit]], s'il y avait prestation de serment, le roi disposait d'un fauteuil placé sous un dais, du côté de l'[[Évangile]], une situation qui rappelle précisément aussi celle de l'évêque officiant. Le roi disposait alors exclusivement du baldaquin, privilège en principe réservé aux évêques pour toutes les églises de leur diocèse, l'évêque officiant devant alors se contenter d'une banquette ou d'un [[faldistoire]], comme s'il était en présence d'un prélat supérieur en dignité ou en juridiction. À [[Versailles]], dans la chapelle définitive, le [[prie-Dieu]] du roi était placé entre les deux rangées des stalles des [[Congrégation de la Mission|lazaristes]], c'est-à-dire dans le [[Chœur (architecture)|chœur]] liturgique, lieu en principe réservé aux clercs. Cette prérogative rappelle celle de l'empereur byzantin, qui seul avait eu le droit de franchir la barrière du [[chancel]].}}. Il est assimilé à un évêque sans juridiction ecclésiastique{{sfn|Maral 2012|p=89-94}}. De plus, dès l'âge de quatre ans, chaque [[jeudi saint]], comme tous les évêques catholiques, le roi procède à la cérémonie du [[lavement des pieds]] ou [[mandé royal]] (''{{langue|la|Mandatum}}'' ou de ''{{langue|la|Lotio pedum}}''){{sfn|Maral 2012|p=99}}. Sélectionnés la veille, examinés par le [[premier médecin du roi]], lavés, nourris et revêtus d'une petite robe de drap rouge, treize garçons pauvres sont amenés dans la grande [[Salle des Gardes|salle des gardes]], à l'entrée de l'appartement de la reine{{efn|Le chiffre treize rappelle la cérémonie alors accomplie en souvenir du miracle datant de l'époque de [[Grégoire Ier|Grégoire le Grand]], lorsque ce Pape vit arriver un ange, sous l'apparence d'un treizième enfant, à la [[Cène]] qu'il était en train de célébrer. Les autres chefs d'État catholiques ne lavent les pieds que de douze pauvres{{sfn|Maral 2012|p=97}}.|group=n}}. Enfin, en vertu d'un pouvoir [[Thaumaturgie|thaumaturgique]] dérivé du sacre, le roi de France est censé pouvoir guérir les [[écrouelles]], une forme ganglionnaire de la [[tuberculose]]. Cette dimension quasi [[Sacerdotal|sacerdotale]] est le signe que les [[rois de France]], qui ainsi {{Citation|font les miracles de leur vivant […] ne sont pas purs laïques, mais que participant à la prêtrise, ils ont des grâces particulières de Dieu, que même les plus réformés prêtres n'ont pas}}{{sfn|Maral 2012|p=99-100}}. Le roi, qui apparaît comme un intermédiaire du pouvoir de Dieu, prononce la formule {{Citation|le Roi te touche Dieu te guérisse}} (et non plus {{Citation|Dieu te guérit}}), le [[subjonctif]], laissant à Dieu seul la liberté de guérir ou non{{sfn|Maral 2012|p=102}}. [[Versailles]] devient ainsi un lieu de [[pèlerinage]] et les malades y sont accueillis sous les voûtes de l'[[Orangerie du château de Versailles|Orangerie]]. Au cours de son règne, le roi a touché près de {{unité|200000|[[écrouelles|crofuleux]]}}, mais il ne s'en plaignait pas, d'après le chroniqueur du ''[[Mercure de France|Mercure Galant]]''{{sfn|Maral 2012|p=100-104}}.

==== Monarque à l'écoute des sermons ====
Le roi assiste à des [[Sermon|sermons]], des [[Oraison (liturgie)|oraisons]] et à au moins vingt-six prédications lors de l'[[Avent]] et du [[Carême]]. Les [[Prédicateur|prédicateurs]] viennent d'horizons variés, Don Cosme appartient à l'[[Feuillants|ordre des Feuillants]], le père Séraphin est de l'[[Frères mineurs capucins|ordre des Capucins]]{{Note|groupe=n|La prédication à la Chapelle du roi venait sanctionner une renommée montante, acquise dans les grandes paroisses parisiennes exigeantes ; cette prédication ouvrait la carrière de l'épiscopat.}}{{,}}{{sfn|Maral 2012|p=81}}. Les thèmes de prédication sont libres, même si traditionnellement le sermon du {{Date-|1er novembre}} porte sur la [[saint]]eté, celui du {{Date-|2 février}} sur la pureté{{sfn|Maral 2012|p=71}}. C'est un des seuls espaces de critique possible sous l'[[absolutisme]] : les sermonneurs ne sont pas complaisants et mettent régulièrement en cause certains comportements du roi ou de la cour, et le lien entre la [[vertu]] du roi et le [[bonheur]] de son peuple est régulièrement mis en avant. [[Jacques-Bénigne Bossuet|Bossuet]], défenseur du [[droit divin]] et théoricien de la supériorité de la [[monarchie]] prône une politique royale en faveur des pauvres, insiste sur les devoirs du roi et défend un programme de politique chrétienne : protection de l'Église et de la [[Catholicisme|foi catholique]], éradication de l'[[Protestantisme en France|hérésie protestante]], répression des [[Blasphème|blasphèmes]] et des crimes publics, pratique des vertus et notamment de la [[justice]]{{sfn|Maral 2012|p=73-75}}.

=== Du libertinage à la dévotion ===
[[Fichier:Jacques-Bénigne Bossuet 3.jpg|vignette|redresse|[[Jacques-Bénigne Bossuet]], évêque et précepteur du Dauphin.|alt=Tableau représentant Bossuet.]]

Le jeune roi ne se laisse cependant pas dicter sa conduite par les religieux. Ainsi, il sait conserver le secret, même vis-à-vis de son [[Confession|confesseur]] comme c'est le cas lors de l'arrestation, en {{Date-|1652}}, du [[Jean-François Paul de Gondi|coadjuteur de Paris]] impliqué dans la [[Fronde (histoire)|Fronde]]{{sfn|Maral 2012}}. Il ne ménage pas non plus les [[wikt:dévot|dévots]], suivant en cela [[Jules Mazarin|Mazarin]] qui était défavorable à ce parti que soutient alors la [[Anne d'Autriche (1601-1666)|reine mère]]{{sfn|Petitfils 2002|p=163}} ; on le soupçonne même d'avoir soufflé à [[Molière]] l'idée du [[Le Tartuffe ou l'Imposteur|''Tartuffe'']], comédie visant les « faux-dévots »{{sfn|Petitfils 2002|p=163}}. Jusqu'à la fin des années {{Date-|1670}}, le roi et la cour s'adonnent à un fort libertinage qui choque les dévots. Le roi [[Conversion au christianisme|se convertit]] au moment où il se remarie secrètement avec [[Madame de Maintenon]]{{sfn|Petitfils 2002|p=305}}.

Dès qu'il occupe réellement le pouvoir, à partir de {{Date-|1661}}, {{Louis XIV}} affirme vouloir soumettre les factions religieuses du royaume dans une unité d'obéissance{{sfn|Petitfils 2002|p=163}}. Le {{Date-|13 décembre 1660}}, il fait savoir au [[Parlement français|Parlement]] qu'il a décidé d'éradiquer le [[jansénisme]], car il y voit un [[rigorisme]] rendant impossibles les hardiesses requises d'un chef d'État dans l'exercice de son autorité et l'obéissance due par les sujets{{Sfn|Maral 2012|p=15}}. Par ailleurs, il affirme son autorité et l'indépendance du [[clergé]] français par rapport au [[pape]]. {{souverain2|Alexandre VII}} est même menacé de guerre en [[1662]], car il veut réduire l'[[extraterritorialité]] de l'[[ambassade de France à Rome]] pour des raisons [[diplomatiques]] et de police. À cette occasion, le roi fait occuper [[Avignon]]{{sfn|Petitfils 2002|p=349-350}}.

En {{Date-|1664}}, il dissout les [[Congrégation religieuse|congrégations]] secrètes, notamment la [[compagnie du Saint-Sacrement]] qui compte autant de dévots [[jésuites]] que [[Jansénisme|jansénistes]]. Cette dissolution n'est pas seulement liée à la dévotion de ses membres, elle tient surtout au fait que le roi s'inquiète de la constitution d'un groupe échappant à son contrôle{{sfn|Petitfils 2002|p=163}}.

=== Relations avec les jansénistes ===
{{article connexe|Jansénisme}}

==== Épineuse question de la grâce ====
[[Fichier:Jacob Ferdinand Voet - Portrait of Innocenzo XI Odescalchi (cropped).jpeg|vignette|redresse|Pape {{souverain2|Innocent XI}} (1611-1689), [[Bienheureux]] de l'Église catholique et adversaire résolu du roi.|alt=Peinture représentant le pape Innocent XI de trois-quart face]]
Deux visions de la [[Grâce (christianisme)|grâce]] s'opposent à l'intérieur du christianisme depuis [[Pélage (hérésiarque)|Pélage]] et [[Augustin d'Hippone]]. Pour le premier, l'homme peut faire son [[Salut (christianisme)|salut]] par lui-même, sans recourir à la [[Grâce (christianisme)|grâce divine]]. Pour Augustin, au contraire, la nature corrompue des êtres humains ne permet pas le salut sans l'intervention de Dieu{{sfn|Petitfils 2002|p=157}}. Traditionnellement, l'Église opte pour un moyen terme entre les deux. La [[Renaissance]], en pariant sur la [[liberté humaine]], a eu tendance à revenir au [[pélagianisme]], ce qui a entraîné les réactions de [[Martin Luther|Luther]] et de [[Jean Calvin|Calvin]], proches sur ce point de l'[[augustinisme]]{{sfn|Petitfils 2002|p=157-158}}. Les jésuites, sous l'influence notamment de [[Tirso de Molina|Tirs de Molina]], développent quant à eux la notion de [[grâce suffisante]], qui est proche de la vision pélagienne de la grâce et débouche sur une religion humaine qui nie le côté tragique de la vie. Cela entraîne, en réaction, une ''réformation catholique'' plus augustinienne où s'illustrent de nombreux hommes d'Église français tels [[Pierre de Bérulle]], [[François de Sales]] ou [[Vincent de Paul]]. Au départ, les [[Jansénisme|jansénistes]] peuvent être vus comme participant de ce courant de réforme{{sfn|Petitfils 2002|p=158}}.

==== Politiques ====
[[Armand Jean du Plessis de Richelieu|Richelieu]] connait [[Jean Duvergier de Hauranne|Saint-Cyran]], un des fondateurs du jansénisme. Voyant en lui le successeur de [[Bérulle]] à la tête du parti dévot, il le fait enfermer{{sfn|Petitfils 2002|p=159}}. En {{Date-|1642}}, la bulle ''{{langue|la|[[In eminenti]]}}'' (1642) condamne certaines des thèses de l{{'}}''Augustinus'', un livre de [[Cornelius Jansen|Jansénius]]. Paradoxalement, le jansénisme en sort renforcé car cela donne l'occasion à [[Antoine Arnauld (1612-1694)|Antoine Arnauld]] d'écrire ''[[De la fréquente communion]]'' (1643), un livre clair et compréhensible qui s'oppose à la religion ''mondaine'' (tournée vers le monde) des jésuites{{sfn|Petitfils 2002|p=159}}. En {{Date-|1653}}, le pape {{souverain2|Innocent X}} émet la bulle ''{{langue|la|[[Cum occasione]]}}'', qui condamne cinq propositions dont il est sous-entendu qu'elles figurent dans le livre de Jansénius. [[Jules Mazarin|Mazarin]], désireux de se concilier le pape, décrète, après avoir consulté les évêques, que ces propositions figurent effectivement dans l'''Augustinus''{{sfn|Petitfils 2002|p=160}}. Les jansénistes commencent alors à être victimes de [[Rumeur|rumeurs]] et de pressions de l'appareil d'État{{sfn|Petitfils 2002|p=161}}. Le début du gouvernement personnel du roi voit les persécutions s'intensifier. Les religieuses de [[Port-Royal des Champs|Port-Royal]] sont dispersées en {{Date-|1664}}. Commence alors un jansénisme souterrain qui se poursuivra tout au long du {{s-|XVIII}}. Si la politique de Mazarin est uniquement marquée par des considérations de politique politicienne, les décisions de {{Louis XIV}} portent plus sur des questions de fond. Il se méfie des jansénistes car leur volonté d'autonomie les amène à s'opposer à un [[Absolutisme|pouvoir absolu]] de droit divin. De plus, ils sont portés sur l'[[Politique de rigueur|austérité]] alors que le roi aime les divertissements, la pompe, les arts{{sfn|Petitfils 2002|p=162}}.

=== Du droit de régale au gallicanisme ===
{{article connexe|Gallicanisme}}
Le [[droit de régale]] repose sur une [[coutume]] qui permet au roi de France de percevoir {{citation|les revenus des évêchés vacants et de nommer aux canonicats des chapitres, jusqu'à ce que le nouvel évêque ait fait enregistrer son serment par la cour des Comptes}}{{sfn|Petitfils 2002|p=468}}. Se fondant sur la [[jurisprudence]] du [[Parlement de Paris]], le roi décide en {{Date-|février 1663}} d'étendre cette pratique à tout le royaume, alors qu'elle n'en touchait que la moitié{{sfn|Petitfils 2002|p=468}}. Les évêques de tendance janséniste de [[Pamiers]] et d'[[Alet-les-Bains]] en appellent au pape au nom de la liberté de l'Église face au [[pouvoir séculier]]{{sfn|Petitfils 2002|p=471}}. Le pape {{souverain2|Innocent XI}} leur donne raison par trois [[Bref apostolique|brefs]]. En juillet {{Date-|1680}}, l'assemblée du clergé soutient la position royale. À la suite de divers incidents, le pape [[Excommunication|excommunie]] un des évêques nommés par le roi. Une nouvelle assemblée du clergé en {{Date-|juin 1681}} cherche à ménager les parties. Le roi cherche aussi un compromis en renonçant à certaines prérogatives. Le pape restant sur ses positions, l'[[assemblée du clergé]] adopte en {{Date-|mars 1682}} la [[Déclaration des Quatre articles]] qui servira de base au [[gallicanisme]]{{sfn|Petitfils 2002|p=470}}. L'{{nobr|article 1}} affirme la [[souveraineté]] du roi sur les affaires [[Temporel et spirituel|temporelles]] ; l'{{nobr|article 2}} accorde {{citation|la plénitude de puissance}} au pape sur les affaires spirituelles, tout en y apportant des restrictions ; l'{{nobr|article 3}} rappelle les principes de base du gallicanisme concernant la spécificité des règles, mœurs et constitutions du royaume de France ; le quatrième article émet de façon subtile des doutes sur la doctrine de l'[[infaillibilité pontificale]]{{sfn|Petitfils 2002|p=470}}. Devant le refus du pape d'accepter ces articles, les évêques français déclarent que {{citation|l'Église gallicane se gouverne par ses propres lois ; elle en garde inviolablement l'usage}}{{sfn|Petitfils 2002|p=470}}. Le Parlement de Paris enregistre les articles en {{Date-|mars 1682}}.

Cette épreuve de force a deux conséquences : le pape refuse d'approuver les nominations au poste d'évêque proposées par le roi, provoquant la vacance de nombreux postes ; l'appui du clergé français au roi oblige en quelque sorte ce dernier à adopter la ligne dure de l'Église de France face aux protestants{{sfn|Petitfils 2002|p=471}}. Malgré son opposition au pape {{souverain2|Innocent XI}}, {{Louis XIV}} ne songe pas à établir une Église gallicane indépendante de Rome, sur le modèle de l'[[Anglicanisme|Église anglicane]] anglaise. Selon [[Alexandre Maral]], il veut {{citation|être considéré davantage comme un collaborateur que comme un subordonné}}{{sfn|Maral 2012|p=145}} du pape. Son approbation des quatre articles du gallicanisme est liée au fort sentiment d'injustice ressenti face à un pape {{citation|usant et abusant d'armes spirituelles pour soutenir des intérêts temporels contraires à ceux de la France}}{{sfn|Maral 2012|p=145}}. Le gallicanisme du « Grand Roi » n'est pas mû par une volonté d'indépendance comme chez les anglicans, mais par une volonté de ne pas être un vassal de Rome{{sfn|Maral 2012|p=142-143}}.

L'affaire de la régale est compliquée à partir de 1679 par la [[querelle des Franchises]] : {{souverain-|Innocent XI}} souhaite mettre fin aux privilèges que les ambassadeurs des cours européennes détiennent à Rome, dans leurs quartiers respectifs. À la mort du [[François Annibal II d'Estrées|duc d'Estrées]], en {{Date-|janvier 1687}}, la police pontificale pénètre dans le quartier du [[palais Farnèse]] pour mettre fin aux droits de douane et de police des diplomates français, et le pape menace d'[[excommunication]] ceux qui tenteraient de relever les franchises. Le nouvel ambassadeur, le [[Henri-Charles de Beaumanoir de Lavardin|marquis de Lavardin]], reçoit du roi la mission de maintenir les franchises françaises, ce dont il s'acquitte en faisant occuper militairement une partie de Rome<ref>{{Ouvrage |auteur1=Charles Gérin |titre=L'Ambassade de Lavardin et la séquestration du nonce Ranuzzi (1687-1689) |lieu=Paris |éditeur=Librairie de Victor Palmé |année=1874 |pages totales=55 |lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=jHvj98282poC}}.</ref>.

=== Avec les protestants ===
[[Fichier:Révocation edit de nantes.jpg|vignette|redresse|La [[Édit de Fontainebleau (1685)|révocation de l'édit de Nantes]] interdit le [[protestantisme]] dans le royaume.|alt= Premier page de l'édit de Fontainebleau.]]

==== Persécutions ====
Le [[Protestantisme en France|protestantisme]] est, à l'époque de {{Louis XIV}}, minoritaire en France, comme il l'a toujours été. Rappelons ici qu'il n'a jamais constitué plus de 10 % de la population y compris lors des [[Guerres de Religion (France)|guerres de religion]] du {{XVIe siècle}}. En {{Date-|1660}}-{{Date-|1670}}, on estime le nombre des protestants à {{nobr|environ {{nb|787400}}}}{{sfn|Petitfils 2002|p=462}}. L'[[édit de Nantes|édit]], signé à Nantes le {{Date-|13 avril 1598}} par le roi de France {{souverain2|Henri IV (roi de France)}}, est un compromis qui laisse la liberté de culte aux protestants dans certaines limites et la possession de certaines [[Place forte|places fortes]] militaires. Cette possibilité de conserver des places fortes est révoquée sous le règne de {{souverain2|Louis XIII}} lors de la [[paix d'Alès]] en [[1629]].

À la cour, le parti [[Noblesse française|nobiliaire]] protestant est en voie de disparition : la conversion d'{{Henri IV}} et l'[[édit d'Alès]] l'a affaibli. {{Louis XIV}}, en « domestiquant » la noblesse, « domestiqua » aussi la religion : bon nombre de [[Noblesx protestants|nobles protestants]] doivent, pour acquérir une charge, se convertir à la religion du roi, le catholicisme.

Au plan local, par des arrêts du Conseil, {{Louis XIV}} restreint peu à peu les libertés accordées aux protestants par l'[[édit de Nantes]], vidant le texte de sa substance. La logique du « tout que ce qui n'était pas autorisé par l'édit est interdit » conduit à l'interdiction de tout [[prosélytisme]] et de certains métiers pour les membres de la [[Protestantisme|religion prétendument réformée]]. Avec l'arrivée au pouvoir de [[François Michel Le Tellier de Louvois|Louvois]], la pression sur les protestants s'alourdit par l'obligation qui leur est faite de loger les troupes, les [[dragonnades]]{{sfn|Petitfils 2002|p=462}}. Les dragonnades ont été d'abord utilisées en Bretagne en {{Date-|1675}}, pour venir à bout de la [[révolte du papier timbré]], mais la radicalisation de cette politique accélère les [[Conversion forcée|conversions contraintes]]{{sfn|Petitfils 2002|p=466}}. {{Louis XIV}}, qui reçoit de son administration des listes de conversions, y voit {{citation|l'effet de sa piété et de son autorité}}. Si le roi est mal informé par ses services et ses [[Courtisan|courtisans]] qui lui cachent la cruelle réalité, il n'en demeure pas moins que celui-ci, {{citation|formé par des confesseurs jésuites, nourri dès l'enfance de sentiments anti-protestants}}, ne demande qu'à croire ce qu'on lui dit{{sfn|Petitfils 2002|p=480}}.

==== Révocation de l'édit de Nantes ====
{{Article détaillé|Édit de Fontainebleau (1685)}}

Le {{Date-|17 octobre 1685}}, le roi signe l'[[Édit de Fontainebleau (1685)|édit de Fontainebleau]], contresigné et inspiré par le chancelier [[Michel Le Tellier (homme d'État)|Michel Le Tellier]]{{sfn|Petitfils 2002|p=481}}. Il vaut révocation de l'[[édit de Nantes]] (promulgué par {{souverain2|Henri IV (roi de France)}} en 1598) et fait du royaume un pays exclusivement [[Catholicisme|catholique]]. Le [[protestantisme]] est interdit sur tout le territoire et des [[Temple protestant|temples]] sont transformés en [[Église (édifice)|églises]]. À défaut de se convertir au catholicisme, nombre de [[huguenot]]s choisissent de s'exiler vers des pays protestants : l'[[Angleterre]], les États protestants d'[[Allemagne]], les [[Canton (Suisse)|cantons]] protestants de [[Suisse]], les [[Provinces-Unies]] et ses [[Empire colonial néerlandais|colonies]], comme celle du [[Le Cap|Cap]]. On estime à environ {{formatnum:200000}} le nombre d'exilés, dont beaucoup d'artisans ou de membres de la bourgeoisie{{sfn|Petitfils 2002|p=484}}. Néanmoins, les récents travaux de [[Michel Morineau|Michel Morrineau]] et de [[Janine Garrisson]] ont nuancé les conséquences économiques de la révocation{{sfn|Petitfils 2002|p=485}} : l'économie ne s'effondre pas en {{Date-|1686}} et la formation d'une [[diaspora]] française en Europe favorise l'exportation ou l'essor européen de la langue [[Français|française]], il n'en demeure pas moins que les conséquences humaines et religieuses sont sérieuses.

Ce geste politique est souhaité par le clergé et par le groupe des anti-protestants, proches de [[Michel Le Tellier (homme d'État)|Michel Le Tellier]]{{sfn|Petitfils 2002|p=458}}. Il semble que ceux-ci n'ont que très partiellement informé le roi de la situation des protestants, en profitant du fait que le camp des modérés est affaibli par la mort de [[Jean-Baptiste Colbert|Colbert]]{{sfn|Petitfils 2002|p=480}}.

À l'époque, l'unité religieuse est considérée comme nécessaire à l'unité d'un pays, en vertu de l'adage latin {{citation|''{{langue|la|cujus regio ejus religio}}'' (à chaque pays sa religion)}}, mis en avant par [[Guillaume Postel]]{{sfn|Petitfils 2002|p=459 et 487}}. Une telle fusion du politique et du religieux n'est d'ailleurs pas propre à la France : l'Angleterre, après l'exécution de {{souverain2|Charles Ier (roi d'Angleterre)}} {{incise|que {{Louis XIV}} a connu à l'époque de la [[Fronde (histoire)|Fronde]]}} impose en {{Date-|1673}} le ''{{langue|en|[[Test Act]]}}'', qui interdit aux catholiques l'accès aux fonctions publiques et aux [[Chambre des lords|Chambres des lords]] et [[Chambre des communes du Royaume-Uni|des communes]], mesure qui restera en vigueur jusqu'en {{Date-|1829}}.

L'édit de Fontainebleau est bien accueilli en général et pas seulement par les « papistes » et les dévots : {{citation|[[Jean de La Bruyère|La Bruyère]], [[Jean de La Fontaine|La Fontaine]], [[Jean Racine|Racine]], [[Roger de Bussy-Rabutin|Bussy-Rabutin]], [[Antoine Arnauld (1612-1694)|le Grand Arnauld]], [[Madeleine de Scudéry]] et beaucoup d'autres applaudirent}}, tout comme [[Madame de Sévigné]]{{sfn|Petitfils 2002|p=481}}. Cette décision redore le prestige de {{Louis XIV}} vis-à-vis des princes catholiques et lui restitue {{citation|sa place parmi les grands chefs de la chrétienté}}{{sfn|Petitfils 2002|p=482}}. [[Jacques-Bénigne Bossuet|Bossuet]] qualifie le roi, dans une [[Oraisons funèbres de Bossuet|oraison]] de {{Date-|1686}}, de {{citation|nouveau [[Constantin Ier (empereur romain)|Constantin]]}}{{sfn|Petitfils 2002|p=482}}.

Le pape {{souverain2|Innocent XI}} n'est pas enthousiasmé par l'action du roi. Selon [[Alexandre Maral]], ce pape, qui n'est pas hostile à la rigueur morale des jansénistes, semble avoir voulu la réunification des deux branches séparées (catholiques et protestants) de l'Église. Cette thèse est confortée par le fait qu'il fait [[Cardinal (religion)|cardinal]] en {{Date-|1686}} l'évêque de Grenoble [[Étienne Le Camus]], favorable à cette politique{{sfn|Maral 2012|p=133}}.

Chez beaucoup de protestants convertis, l'adhésion au catholicisme reste superficielle{{sfn|Petitfils 2002|p=483}}, comme le montrent des soulèvements de [[protestantisme|protestants]] dans le [[Languedoc]], dont la [[guerre des Cévennes]] entre les [[camisard]]s et les troupes royales constitue le paroxysme.

=== Judaïsme ===
{{Louis XIV}} fut moins hostile aux [[Histoire des Juifs en France#Les Juifs à Metz et en Lorraine|Juifs]] que ses prédécesseurs. Le début de son règne marque en effet une évolution dans la politique du pouvoir royal vis-à-vis du [[judaïsme]]. Dans l'esprit de la politique pragmatique de [[Jules Mazarin|Mazarin]], lorsqu'en [[1648]] les [[traités de Westphalie]] attribuent les [[Trois-Évêchés]], la [[Haute-Alsace]] et la [[Décapole (Saint-Empire)|Décapole]] à la France, le pouvoir choisit de ne pas exclure les Juifs qui y habitent, bien que l'édit de [[1394]] qui [[Expulsion des Juifs|les expulse]] de France soit encore théoriquement applicable<ref>{{Ouvrage |auteur1=Béatrice Leroy |titre=Les Édits d'expulsion des Juifs 1394-1492-1496-1501 |éditeur=Atlantica |année=1998 |isbn=}}.</ref>.

En [[1657]], le jeune {{Louis XIV}} est reçu solennellement, avec son frère, à la [[synagogue de Metz]]<ref>{{Lien web|url=http://judaisme.sdv.fr/histoire/villes/metz/rabbinat/rabbinat.htm|éditeur=Site du judaïsme d'Alsace et de Lorraine|titre = Le rabbinat de Metz des origines au début du {{s-|XX}}|consulté le= 24 novembre 2007|auteur = Colette Hahn}}.</ref>. Concernant les [[Histoire des Juifs en Alsace|Juifs alsaciens]], si au départ ils gardent le même statut que sous l'empire germanique, peu à peu les choses vont s'améliorer avec les [[lettres patentes]] de [[1657]]<ref name="RR">{{Ouvrage|auteur1=Rodolphe Reuss|titre=L'Alsace au {{s-|XVII}}|lieu=Paris|éditeur=|année=1898|lire en ligne=https://books.google.ca/books?id=iH6APakTwlcC&pg=PA575}}.</ref>. Enfin, les ordonnances de [[1674]], publiées par l'intendant Jacques de La Grange, font que le statut des Juifs de l'Alsace royale est aligné sur celui des [[Histoire des Juifs en Lorraine|Juifs de Metz]], et que le [[péage]] corporel est aboli pour eux. Ceux du reste de la province restent cependant assimilés à des étrangers, et donc soumis à ce péage corporel. Les Juifs d'Alsace royale ayant le même statut que les Juifs messins, un [[Rabbin|rabbinat]] des Juifs d'Alsace est créé en {{Date-|1681}}<ref name="RR" />.

Un certain nombre de [[Histoire des Juifs aux Pays-Bas|Juifs hollandais]], qui ont immigré à [[Recife|Pernambouc]], au [[Brésil]], [[Nouvelle-Hollande (Brésil)|sous domination hollandaise]] de {{Date-|1630}} à {{Date-|1654}}<ref>{{en}} {{lien web|url=http://www.jewishencyclopedia.com/view.jsp?artid=342&letter=P&search=isaac%20de%20pinto#1299|titre=JE, Recife (Pernambuco)|auteur=Cyrus Adler et L. Hühner}}.</ref>, doivent quitter ce pays quand les Portugais en reprennent le contrôle et y rétablissent l'[[Inquisition portugaise|Inquisition]]. Certains s'établissent alors aux [[Antilles françaises]] et la tradition veut que la capitale de la [[Guadeloupe]], [[Pointe-à-Pitre]], doive son nom à un Juif hollandais, appelé ''Peter'' ou ''Pitre'' selon la transcription en français<ref>{{Ouvrage|langue=fr|auteur1=Félix-Hilaire Fortuné|titre=La France et l'Outre-Mer antillais|sous-titre=quatre siècles d'histoire économique et sociale|lieu=Paris|éditeur=[[Éditions L'Harmattan]]|année=2001|pages totales=553|isbn=2-7475-0315-1|lire en ligne=https://books.google.com/books?id=JdeVpZE1nfAC&printsec=frontcover}}.</ref>. Toutefois, les Juifs quittent la [[Martinique]] quand ils en sont expulsés en {{Date-|1683}}, expulsion élargie à toutes les Antilles françaises par le [[Code noir]] de {{Date-|1685}}, dont le premier article enjoint à {{Citation|tous nos officiers de chasser de nos dites îles tous les Juifs qui y ont établi leur résidence, auxquels, comme aux ennemis déclarés du nom chrétien, nous commandons d'en sortir dans trois mois à compter du jour de la publication des présentes}}<ref>Suzy Halimi, ''Commerce(s) en Grande-Bretagne au {{s-|XVIII}}'', Publications de la Sorbonne, Paris, 1990, {{p.|36}} ([https://books.google.fr/books?id=UCZi4jO1ub8C&lpg=PP1&hl=fr&pg=PA36#v=snippet&q=code%20noir&f=true lire en ligne]).</ref>{{,}}<ref>{{Lien web |auteur1=Emmanuel Maistre |auteur2=[[Tristan Mendès France]] |auteur3=Michel Taube |titre=Nous sommes tous des juifs noirs |url=https://www.liberation.fr/tribune/2005/02/23/nous-sommes-tous-des-juifs-noirs_510631 |date=23 février 2005 |site= liberation.fr|consulté le=20 février 2019}}.</ref>.

=== Opposition royale au quiétisme de Fénelon ===
[[Fichier:Fenelon and the Duke of Burgundy.jpg|vignette|redresse|Fénelon et le [[Louis de France (1682-1712)|duc de Bourgogne]], par [[Alphonse de Neuville]] (1835-1885).|alt= Tableau représentant Fénelon.]]

L'[[Oraison (liturgie)|oraison]] (ou prière d'adoration) est en vogue aux {{s2|XVI|XVII}}, avec notamment [[Thérèse d'Avila|Sainte Thérèse d'Avila]], [[Jean de la Croix|Saint Jean de la Croix]] et en France, [[Pierre de Bérulle]] et [[François de Sales]]. En Espagne, [[Miguel de Molinos]] publie un ''Guide spirituel'' (1675), dans lequel il soutient une vision extrême de l'oraison où l'âme peut s'anéantir en Dieu et échapper au péché. D'abord favorable à cette position, le pape {{souverain2|Innocent XI}} finit par condamner {{nb|68}} des propositions de ce livre, par la bulle ''{{langue|la|[[Caelestis Pastor]]}}'' (1687){{sfn|Petitfils 2002|p=552}}. En France, cette pensée inspire [[Madame Guyon]], qui à son tour influence non seulement des dames de la cour, mais également [[Fénelon]], précepteur du [[Louis de France (1682-1712)|duc de Bourgogne]], fils du [[Louis de France (1661-1711)|Grand Dauphin]].

C'est le directeur spirituel de [[Maison royale de Saint-Louis|Saint-Cyr]], où l'épouse secrète de {{Louis XIV}} s'occupe de l'éducation des jeunes filles, qui, le premier, en {{Date-|mai 1693}}, s'inquiète de la progression de la doctrine de Madame Guyon dans cet établissement. Mis au courant, le roi soupçonne une [[cabale]] et enjoint à son épouse de rompre ses relations avec la dame en question{{sfn|Petitfils 2002|p=539}}. Par ailleurs, le roi en appelle à l'arbitrage de Bossuet qui passe alors pour le chef de l'[[Église catholique en France]]. De son côté, Fénelon, qui a rédigé en {{Date-|décembre 1693}} de façon anonyme une violente [[diatribe]] contre la politique royale, se voit refuser l'[[Archidiocèse de Paris|évêché de Paris]]{{sfn|Petitfils 2002|p=552}}. L'affaire religieuse se double maintenant d'une affaire politique. Les [[Compagnie de Jésus|jésuites]], qui ont fait condamner les thèses de Miguel de Molinos inspirateur du [[quiétisme]], soutiennent maintenant Madame Guyon, sa disciple. Cette attitude est dictée par leur volonté de s'opposer aux [[Gallicanisme|gallicans]] qui mènent l'attaque contre elle et contre Fénelon. Précisons ici que les gallicans sont partisans d'une certaine indépendance de l'Église de France vis-à-vis du pape, alors que les jésuites qui soutiennent le pape sont [[Ultramontanisme|ultramontains]]. Finalement, le souverain pontife se garde bien de condamner formellement Madame Guyon et se contente de réprouver vaguement quelques thèses{{sfn|Petitfils 2002|p=542}}.

Les choses auraient pu en rester là si Fénelon n'avait pas fait paraître, en {{Date-|1699}}, ''[[Les Aventures de Télémaque (Fénelon)|Les Aventures de Télémaque]]'', composé à l'intention des enfants royaux et exposant une critique de l'[[absolutisme]] royal. Le roi fait saisir cet ouvrage qui le renforce dans sa volonté de ne jamais faire revenir son auteur à la cour{{sfn|Petitfils 2002|p=542}}. L'opposition de Fénelon à la politique de {{Louis XIV}} semble basée sur un fort sentiment anti-[[machiavélisme]] qui refuse {{citation|la séparation entre la religion et la politique, la morale chrétienne et la morale d'État}}{{sfn|Petitfils 2002|p=538}}. La pensée de Fénelon nourrira tout un courant aristocratique marqué par l'idée d'une {{citation|monarchie patriarcale et tempérée, ennemie de la guerre, vertueuse, philanthropique}}{{sfn|Petitfils 2002|p=539}}.

=== Problèmes religieux de la fin du règne ===
==== Amélioration des relations avec le Vatican ====
Le rapprochement entre {{Louis XIV}} et {{souverain2|Innocent XI}} était très difficile voire impossible, en raison d'une opposition de fond. Quand il est élu, le pape ambitionne de devenir le directeur spirituel du roi. Dans une lettre de mars {{Date-|1679}}, il demande au chargé d'affaires de la nonciature que, par l'intermédiaire du [[François d'Aix de La Chaise|père de La Chaize]], confesseur du roi, il soit conseillé à {{Louis XIV}} de bien vouloir {{citation|réfléchir au moins pendant dix minutes et bénir le Seigneur tout en s'efforçant aussi de méditer souvent sur la vie éternelle et sur la caducité de la gloire et des biens temporels}}{{sfn|Maral 2012|p=126-127}}. Par ailleurs, ce pape n'est pas sans sympathie pour l'austérité et la rigueur des jansénistes. Dans l'[[affaire de la régale]], il donne d'ailleurs raison à deux évêques jansénistes, ce qui pousse le roi à adopter une attitude strictement gallicane{{sfn|Maral 2012|p=128-130}}. Enfin, leurs politiques respectives envers les musulmans et les protestants sont radicalement différentes : le pape voudrait que le roi soutienne l'empereur dans sa lutte contre les Turcs, ce que {{Louis XIV}} ne fait qu'à reculons, car ce n'est pas dans l'intérêt de la France{{sfn|Maral 2012|p=133-139}}. De même, au moment de la [[Guerre de la Ligue d'Augsbourg|guerre de Neuf Ans]], ce pape favorisera les intérêts de l'empereur lors de la succession à l'évêché de Cologne. En ce qui concerne les protestants, ce pape est plutôt en faveur de la concorde et guère favorable à l'[[Édit de Fontainebleau (1685)|édit de Fontainebleau]]{{sfn|Maral 2012|p=140}}.

L'élection d'{{souverain2|Alexandre VIII}} en {{Date-|1689}} change la donne. Celui-ci fait cardinal [[Toussaint de Forbin-Janson|Forbin-Janson]], que soutient le roi et qui, par reconnaissance, lui restitue [[Avignon]] et le [[Comtat Venaissin]]{{sfn|Maral 2012|p=141}}. Son successeur {{Souverain2|Innocent XII}}, élu en {{Date-|juillet 1691}}, commence à régler la question des évêques dont la nomination n'avait pas été validée par le Vatican depuis {{Date-|1673}}. En {{Date-|1693}}, le roi obtient des évêques français le retrait des quatre articles fondateurs du gallicanisme puis, peu à peu, l'affaire de la régale s'éteint{{sfn|Maral 2012|p=142}}. En 1700, au début de la [[guerre de Succession d'Espagne]], le nouveau pape {{souverain2|Clément XI}} aide {{Louis XIV}} en soutenant son candidat pour l'archevêché de Strasbourg, contre celui de l'Empereur{{sfn|Maral 2012|p=142}}.

===== Bulle ''{{langue|la|Vinean domini}}'' =====
[[Fichier:Noailles, Louis Antoine.jpg|vignette|redresse|Portrait du cardinal [[Louis-Antoine de Noailles]], archevêque de Paris.|alt= Tableau représentant le cardinal archevêque de Paris Louis-Antoine de Noailles.]]

À la fin du règne de {{Louis XIV}}, le clergé français est majoritairement proche d'un augustinisme modéré teinté de jansénisme, animé par l'archevêque de Paris [[Louis-Antoine de Noailles]], par l'archevêque de Reims [[Charles-Maurice Le Tellier]] (frère de Louvois), et par [[Jacques-Bénigne Bossuet]], évêque de Meaux, prédicateur et rédacteur des [[Déclaration des Quatre articles|Quatre articles de l'église gallicane]]. Le père [[Pasquier Quesnel]], vu comme un continuateur du jansénisme, vient interrompre cette progression lente du jansénisme, en défendant des thèses d'un gallicanisme radical dans la continuité de la pensée d'[[Edmond Richer]]. Il veut notamment l'élection des évêques et des curés par les chrétiens{{sfn|Petitfils 2002|p=673}}. Parallèlement, les jansénistes durs lancent « l'affaire du cas de conscience », portant sur l'[[Absolution (christianisme)|absolution]] à donner ou non à un prêtre qui n'admet pas que les cinq propositions du jansénisme condamnés par le pape figurent dans l'''[[Augustinus]]''{{sfn|Petitfils 2002|p=680}}. Fénelon, qui veut s'imposer contre Bossuet, adopte les thèses jésuites et insiste pour que Rome se prononce pour le refus de l'absolution, ce que fait le pape en promulguant la bulle ''{{langue|la|[[Vineam Domini|Vinean Domini Sabaoth]]}}'' en {{Date-|1705}}. Parallèlement, on assiste à un durcissement de l'attitude des dernières sœurs de [[Port-Royal des Champs|Port-Royal]], qui refusent d'accepter la position conciliante de l'archevêque de Paris. Elles sont alors [[Excommunication|excommuniées]] et le roi fait raser l'[[Port-Royal des Champs|abbaye]] par un arrêt de {{Date-|janvier 1710}}{{sfn|Petitfils 2002|p=676}}.

===== Bulle ''Unigenitus'' =====
{{article détaillé|Unigenitus{{!}}Bulle ''Unigenitus''}}

Le père [[Michel Le Tellier (jésuite)|Le Tellier]], nouveau confesseur du roi, et [[Fénelon]], veulent obtenir une condamnation franche des thèses du [[Pasquier Quesnel|père Quesnel]], à la fois pour des raisons religieuses et peut-être par ambition personnelle{{sfn|Petitfils 2002|p=680}}. En effet, ils espèrent ainsi obtenir la révocation ou la démission du [[Louis-Antoine de Noailles|cardinal de Noailles]], archevêque de Paris proche des thèses gallicano-augustiennes{{sfn|Petitfils 2002|p=679-680}}.

Le pape, d'abord réticent par crainte de relancer un conflit dans le clergé français, finit par céder et publie la bulle ''[[Unigenitus]]'' (1713), qui développe une vision hiérarchisée et dogmatique de l'Église{{sfn|Petitfils 2002|p=681}}. Les instigateurs français de la bulle imposent alors une interprétation dure du texte à l'intention du clergé français. Le cardinal de Noailles s'y oppose tout comme une large partie du bas clergé et des fidèles. Le roi et le pape ne parviennent pas à s'accorder sur la manière de faire obéir le cardinal, car le roi s'oppose à tout acte d'autorité pontificale qui mettrait en cause les libertés gallicanes<ref>{{Ouvrage|langue=fr|auteur1=[[Olivier Andurand]]|titre=La Grande affaire. Les évêques de France face à l'Unigenitus|lieu=Rennes|éditeur=[[Presses universitaires de Rennes]]|année=2017|pages totales=398|isbn=978-2-7535-5390-3}}.</ref>. Le Parlement et la haute administration s'opposent de leur côté à l'enregistrement de la bulle, et le roi meurt sans avoir pu les y forcer{{sfn|Petitfils 2002|p=684-685}}.

== Culture, arts et sciences : instruments de rayonnement et de pouvoir ==
La recherche de gloire chez {{Louis XIV}} ne passe pas seulement par la politique et la guerre : elle inclut les [[arts]], les lettres et les sciences ainsi que la construction de palais somptueux et des spectacles à grand déploiement{{sfn|Petitfils 2002|p=276}}. Même si le succès et l'instrumentalisation politique des références antiques s'intensifient dès la [[Renaissance]], la [[mythologie gréco-romaine]] se trouve particulièrement sollicitée à des fins de prestige et de [[propagande]] royale<ref>{{Ouvrage |langue=fr |auteur1=Gérard Sabatier |titre=Le prince et les arts |sous-titre=stratégies figuratives de la monarchie française de la Renaissance aux Lumières |lieu=Ceyzérieu |éditeur=[[Éditions Champ Vallon]] |collection=2010 |année=2010 |pages totales=460 |passage=Vocabulaire |isbn=978-2-87673-542-2}}.</ref>.

=== Sens du spectacle ===
[[Fichier:La Princesse d'Élide (Molière) 1664.jpg|vignette|upright=1.5|Représentation de ''[[La Princesse d'Élide]]'' à Versailles en {{Date-|1664}}, dans le cadre de la somptueuse fête des ''Plaisirs de l'Île enchantée''.|alt=Représentation de La Princesse d'Élide à Versailles.]]

Le roi accorde une grande importance aux fêtes spectaculaires (voir « [[Fêtes à Versailles]] »), ayant appris de [[Jules Mazarin|Mazarin]] l'importance du spectacle en politique et la nécessité de montrer sa puissance pour renforcer l'adhésion populaire{{sfn|Petitfils 2002|p=284}}. Dès [[1661]], alors que Versailles n'est pas encore construit, il détaille, de façon précise pour l'instruction du [[Louis de France (1661-1711)|Grand Dauphin]] venant de naître, les raisons qui doivent pousser un souverain à organiser des fêtes :
{{citation bloc|Cette société de plaisirs, qui donne aux personnes de la Cour une honnête familiarité avec nous, les touche et les charme plus qu'on ne peut dire. Les peuples, d'un autre côté, se plaisent au spectacle où, au fond, on a toujours pour but de leur plaire ; et tous nos sujets, en général, sont ravis de voir que nous aimons ce qu'ils aiment, ou à quoi ils réussissent le mieux. Par là nous tenons leur esprit et leur cœur, quelquefois plus fortement peut-être, que par les récompenses et les bienfaits ; et à l'égard des étrangers, dans un État qu'ils voient d'ailleurs florissant et bien réglé, ce qui se consume en ces dépenses qui peuvent passer pour superflues, fait sur eux une impression très avantageuse de magnificence, de puissance, de richesse et de grandeur […]{{Note|groupe=n|{{Ouvrage|auteur1={{Louis XIV}}|titre=Mémoires pour l'instruction du Dauphin|lieu=Paris|éditeur=Imprimerie nationale|année=1992|pages totales=281|passage=135|isbn=978-2-11-081230-8}}. On peut lire en ligne les [https://archive.org/details/mmoiresdelouisx01dreygoog/page/n7 deux volumes] de ces ''Mémoires'', avec une étude détaillée de leur composition par Louis Dreyss (1880).}}.}}

Afin d'éblouir la cour et la favorite du moment, il organise des fêtes fastueuses, pour lesquelles il n'hésite pas à faire venir des animaux d'Afrique. La plus célèbre et la mieux documentée de ces fêtes est sans doute [[Fêtes à Versailles#Les Plaisirs de l'Île enchantée (Mai 1664)|''Les Plaisirs de l'île enchantée'']], en {{Date-|1664}}. L'historien [[Christian Biet]] décrit ainsi l'ouverture de ces fêtes : {{citation bloc|Précédé d'un héraut d'armes vêtu à l'antique, de trois pages dont celui du roi, M. [[d'Artagnan]], de huit trompettes et de huit timbaliers, le roi s'est montré tel qu'en lui-même, sous un déguisement grec, sur un cheval au harnais couvert d'or et de pierreries. [...] Les comédiens de la troupe de Molière furent particulièrement admirés. Le Printemps, sous les traits de la [[Mademoiselle Du Parc|Du Parc]], parut sur un cheval d'Espagne. On la savait très belle, on l'aimait en coquette, elle fut superbe. Ses manières hautaines et son nez droit enthousiasmèrent les uns, ses jambes qu'elle savait montrer et sa gorge blanche mirent les autres dans tous leurs états. Le gros [[Du Parc (acteur)|Du Parc]], son mari, avait quitté ses rôles de grotesque pour jouer l'Été sur un éléphant couvert d'une riche housse. [[La Thorillière]], habillé en Automne, défilait sur un chameau, et tous s'émerveillèrent de ce que cet homme si fier imposât sa prestance naturelle à l'exotique animal. Enfin l'Hiver, représenté par [[Louis Béjart]], fermait la marche sur un ours. De mauvaises langues affirmèrent que seul un ours maladroit pouvait s'attacher à la claudication du préposé aux emplois de valets. Leur suite était composée de quarante-huit personnes, dont la tête était ornée de grands bassins pour la collation. Les quatre comédiens de la troupe de Molière récitèrent alors des compliments pour la reine, sous les feux de centaines de chandeliers peints de vert et d'argent, chargés chacun de vingt-quatre bougies{{sfn|Biet 2013|p=70-71}}.}}

=== Bâtisseur ===
[[Fichier:Versailles Garden.jpg|vignette|gauche|Le [[château de Versailles]] vu des jardins sud-ouest.|alt=Photo représentant le château de Versailles vu des jardins sud-ouest.]]
[[Fichier:Cathédrale Saint-Louis-des-Invalides, 140309 2.jpg|vignette|Le dôme de l'[[hôtel des Invalides]].|alt=Photo représentant le dôme des invalides.]]

Dans l'esprit du roi, la grandeur d'un royaume doit aussi se mesurer à son embellissement. Sur les conseils de Colbert, un des premiers chantiers du roi sera la restauration du palais et du [[jardin des Tuileries]]{{sfn|Petitfils 2002|p=276}}, confiée à [[Louis Le Vau]] et à [[André Le Nôtre]]. Les décors intérieurs sont l'œuvre de [[Charles Le Brun]] et des peintres de la brillante [[Académie royale de peinture et de sculpture]].

Après l'arrestation de [[Nicolas Fouquet|Fouquet]], dont il semble vouloir imiter la vie fastueuse symbolisée par le [[château de Vaux-le-Vicomte]], le roi dépense d'importantes sommes dans l'embellissement du [[Palais du Louvre|Louvre]] (1666-1678) {{incise|dont le projet est confié à [[Claude Perrault]], au détriment du [[Le Bernin|Bernin]], pourtant venu exprès de Rome|point}}. Il confie la restauration des jardins du [[château de Saint-Germain-en-Laye]], sa demeure principale avant Versailles, à [[André Le Nôtre|Le Nôtre]]{{sfn|Petitfils 2002|p=276}}. {{Louis XIV}} emménage au [[château de Versailles]] en [[1682]], après plus de vingt ans de travaux{{sfn|Bluche 1986|p=510}}. Ce château coûte moins de {{nobr|82 millions}} de livres, soit à peine plus que le déficit budgétaire de 1715{{sfn|Petitfils 2002|p=276}}. En {{Date-|1687}}, la construction du [[Grand Trianon]] est confiée à [[Jules Hardouin-Mansart]]. Outre le [[château de Versailles]], qu'il fait agrandir petit à petit tout au long de son règne, le roi fait aussi construire le [[château de Marly]] afin d'y recevoir ses intimes.

Paris lui doit aussi, entre autres, le [[pont Royal (Paris)|pont Royal]] (financé sur ses propres [[Denier (monnaie)|deniers]]), l'[[Observatoire astronomique|Observatoire]], les [[Avenue des Champs-Élysées|Champs-Élysées]], les [[Hôtel des Invalides|Invalides]], la [[place Vendôme]] ainsi que la [[place des Victoires]] (commémorant la victoire sur l'Espagne, l'Empire, le Brandebourg et les Provinces-Unies). Deux arcs de triomphe, la [[porte Saint-Denis]] et la [[porte Saint-Martin]], célèbrent les victoires du Roi-Soleil lors de ses guerres européennes{{sfn|Petitfils 2002|p=277}}.

Il fait aussi modifier profondément la structure de plusieurs villes françaises {{incise|[[Lille]], [[Besançon]], [[Belfort]], [[Briançon]]}} en les fortifiant grâce aux travaux de [[Sébastien Le Prestre de Vauban|Vauban]]. Il crée ou développe certaines villes, tel [[Versailles]] pour la cour, ou [[Neuf-Brisach]] et [[Sarrelouis]] pour défendre les acquisitions de l'Alsace et de la Lorraine. En {{Date-|1685}}, la [[ceinture de fer]] des fortifications défendant la France est pour l'essentiel achevée{{sfn|Petitfils 2002|p=334-335}}.

Pour faciliter le développement de [[Marine nationale (France)|la marine royale]], il développe les ports et arsenaux de [[Brest]] et de [[Toulon]], crée un port de guerre à [[Rochefort (Charente-Maritime)|Rochefort]], des ports de commerce à [[Lorient]] et [[Sète]] et fait construire le [[port franc]] et l'arsenal des galères à [[Marseille]]{{sfn|Petitfils 2002|p=339}}.

=== Langue française et classicisme littéraire ===
Sous {{Louis XIV}} se poursuit le processus engagé par {{Souverain2|Louis XIII}}, conduisant le français à devenir la langue des lettrés en Europe ainsi que la langue de la diplomatie, qu'elle continue à être au {{s-|XVIII}}{{sfn|Bury 2017|p=420}}. Cette langue est alors peu parlée en France, hors des cercles du pouvoir et de la cour, qui joue un rôle central dans sa diffusion et dans son élaboration{{sfn|Bury 2017|p=422-423}}. Le grammairien [[Claude Favre de Vaugelas|Vaugelas]] définit d'ailleurs le bon usage comme {{citation|la façon de parler de la plus saine partie de la cour}}{{sfn|Bury 2017|p=424}}. Poursuivant sur la lancée de ce dernier, [[Gilles Ménage (grammairien)|Gilles Ménages]] et [[Dominique Bouhours]] (auteur des ''Entretiens d'Ariste et d'Eugène'') insistent sur la clarté ainsi que sur la justesse de l'expression et de la pensée{{sfn|Bury 2017|p=425}}. Parmi les grands grammairiens de ce siècle figurent également [[Antoine Arnauld (1612-1694)|Antoine Arnauld]] et [[Claude Lancelot]], auteurs en 1660 de la ''[[Grammaire de Port-Royal]]''. Les femmes jouent un rôle important dans l'élaboration de la langue française, comme le montre, d'une certaine façon, la pièce de [[Molière]] ''[[Les Précieuses ridicules]]''. Ce sont elles qui lui apporte son souci de la nuance, son attention à la prononciation et son goût de la [[néologie]]. [[Jean de La Bruyère|La Bruyère]] écrit à leur sujet : {{citation|Elles trouvent sous leur plume des tours et des expressions qui souvent en nous ne sont l'effet que d'un long travail et d'une pénible recherche ; elles sont heureuses dans le choix des termes, qu'elles placent si juste que, tout connus qu'ils sont, ils ont le charme de la nouveauté, semblent être faits seulement pour l'usage où elles les mettent{{efn|group=n|Les Caractères, 1689, remarque 37 cité in Bury{{sfn|Bury 2017|p=426}}.}}}}. De son côté, [[Nicolas Boileau]], dans son ''Art poétique'', paru en {{Date-|1674}}, résume selon [[Pierre Clarac]], « la doctrine classique telle qu'elle avait été élaborée en France dans la première moitié du siècle. L'ouvrage n'a rien - et ne pouvait rien avoir - d'original dans son inspiration. Mais ce qui le distingue de tous les traités de ce genre, c'est qu'il est en vers et qu'il cherche à plaire plus qu'à instruire. Composé à l'usage des gens du monde, il obtient auprès d'eux le plus éclatant succès »<ref>{{lien web|titre=Nicolas Boileau|url=https://www.universalis.fr/encyclopedie/nicolas-boileau/2-le-theoricien-du-classicisme/|site=Universalis}}.</ref>. Vers {{Date-|1660}}, le roman héroïque, qui remonte à {{souverain2|Henri IV (roi de France)}}, décline, tandis que de nouvelles formes d'écrits, [[nouvelle]]s, lettres se développent et font l'objet de théorisation à travers notamment le Traité de l'origine des romans de Pierre-Daniel Huet ({{Date-|1670}}) et des Sentiments sur les lettres et sur l'histoire, avec des scrupules sur le style de Du Plaisir ({{Date-|1683}}){{sfn|Bury 2017|p=426}}.

Les Français de province parlent alors des langues régionales, le français ne deviendra la langue populaire commune que sous la Troisième République. De plus, durant cette période, même si les religions, afin de mieux être comprises de leurs ouailles, font un effort de scolarisation, le taux d'alphabétisation reste modeste et atteint dans les régions les plus favorisées jusqu'à 60 % des hommes et 30 % des femmes{{sfn|Bury 2017|p=427}}. Les élites administratives et politiques sont obligées d'être bilingues (français, langue régionale), ou trilingues quand on ajoute le latin. Malgré cela, il se forme un public de cour (modèle de l'[[honnête homme]]) qui valorise l'homme de lettres et lui attribue un {{citation|statut spécifique}}{{sfn|Bury 2017|p=422}}. Les hommes de lettres sont formés, comme les gens aisés, dans les collègues jésuites (une centaine), dans les collèges de l'Oratoire ou encore, comme [[Jean Racine]], aux « petites écoles » de Port-Royal où l'enseignement repose sur l'étude des classiques latins, [[Cicéron]], [[Horace]], [[Virgile]], [[Quintilien]]. Devenus écrivains, ils veulent les imiter non pas servilement mais de façon à les dépasser{{sfn|Bury 2017|p=432}}. Les auteurs de l'époque de {{Louis XIV}}, notamment [[Pierre Corneille|Corneille]], [[Jean Racine|Racine]], [[Molière]], [[Jean de La Fontaine|La Fontaine]], [[Jean de La Bruyère|La Bruyère]], [[Charles Perrault]], [[Fénelon]], [[Madame de La Fayette]], [[Madame de Sévigné]], ne sont appelés à leur tour classiques qu'à partir de [[Stendhal]], qui les nomme ainsi pour les opposer aux romantiques{{sfn|Bury 2017|p=432}}. Lorsqu'éclate la [[querelle des Anciens et des Modernes]] à la fin du règne, la France a su édifier une littérature et une langue dont le rayonnement durera au moins deux siècles{{sfn|Bury 2017|p=436}}.

Au {{s-|XVIII}}, [[Voltaire]] célèbre dans deux de ses livres, ''Le Temple du goût'' ({{Date-|1733}}) et ''[[Le Siècle de Louis XIV|Le Siècle de {{Louis XIV}}]]'', la littérature et la langue française de cette époque, symboles de l'excellence française. Fin du {{S-|XIX}}, au moment où la Troisième République entreprend son œuvre de scolarisation de masse, [[Gustave Lanson]] voit, dans la langue française et la littérature de l'époque de {{Louis XIV}}, un instrument de la {{citation|prépondérance française}}. Si, à la fin du {{s-|XIX}} et au début du {{s-|XX}}, les autorités se méfient de {{Louis XIV}}, elles magnifient malgré tout les auteurs classiques qu'elles donnent massivement à lire aux lycéens{{sfn|Bury 2017|p=421}}.

=== Patron des arts et des sciences ===
[[Fichier:Portrait de Louis XIV entouré des arts et des sciences.jpg|vignette|gauche|{{Louis XIV}} avec instruments de musique, fleurs et fruits, par Jean Garnier (1632-1705)<ref>{{Base Joconde|000PE005378}}.</ref>.|alt=Tableau présentant Louis XIV en protecteur des arts et des sciences.]]

Dans sa jeunesse, {{Louis XIV}} danse lors des ballets donnés à la cour, tel le Ballet des Saisons, à l'été {{Date-|1661}}. Il dansera son dernier ballet en {{Date-|1670}}{{sfn|Petitfils 2002|p=289}}. Au ballet succéderont les comédies-ballets tel ''[[Le Bourgeois gentilhomme]]'' de [[Molière]]. En {{Date-|1662}}, est fondée l'[[Académie royale de danse]]. Le roi chante aussi en s'accompagnant à la [[Guitare baroque|guitare]]. [[Robert de Visée]], musicien à la [[Maison du Roi#La Chambre du Roi|Chambre du Roi]], compose deux livres de pièces pour la ''guitarre'' dédiées au Roy. La musique fait partie de la vie de cour. Il ne passe pas un jour sans musique à Versailles. Tous les matins, après le conseil, {{Louis XIV}} écoute trois [[motet]]s à la [[chapelle royale de Versailles|chapelle royale]]<ref>[http://www.musebaroque.fr/MB_Archive/Articles/institutions_versailles.htm Les Institutions Musicales Versaillaises de {{Louis XIV}} à {{Louis XVI}}].</ref>.

Grand amateur de musique italienne, {{Louis XIV}} fait de [[Jean-Baptiste Lully]] le surintendant de la musique et le maître de musique de la famille royale. Toujours à l'affût de nouveaux talents, le roi lance des concours de musique : en {{Date-|1683}}, [[Michel-Richard de Lalande]] devient ainsi ''sous-maître'' de la [[Chapelle royale (Ancien Régime)|Chapelle royale]] et composera plus tard ses ''Symphonies pour les Soupers du Roy''.

Accordant une grande place au théâtre, {{Louis XIV}} {{citation|a orienté certains écrivains, moins par son goût et sa culture que par son prestige, vers la décence et la noblesse, vers le bon sens et la justesse{{sfn|Van Tieghem 1958|p=408}}}}. Son influence est considérable car il se comporte en mécène et finance les grandes figures culturelles de l'époque, dont il aime s'entourer. Artistes et écrivains rivalisent d'efforts et de talent pour mériter son appréciation. Ayant très tôt découvert le génie comique de [[Molière]], il fait restaurer pour lui, en {{Date-|1661}}, la salle du [[Palais-Royal]], où le comédien jouera jusqu'à sa mort{{sfn|Scherer 1958|p=315}}. Pour le récompenser, le roi octroie six mille livres de pension à sa troupe, qui devient officiellement « La Troupe du Roi au Palais-Royal » (1665) ; la même année, il devient le parrain de son premier enfant.

En même temps que la comédie acquiert avec Molière ses lettres de noblesse, la tragédie continue de s'épanouir et {{citation|tend à devenir une institution d'État{{sfn|Scherer 1958|p=306}}}}, atteignant un sommet avec [[Jean Racine|Racine]], que le roi récompensera du succès de [[Phèdre (Racine)|''Phèdre'']] (1677) en le nommant son historiographe{{efn|Son œuvre d'historiographe a malheureusement disparu dans un incendie en 1726{{sfn|Scherer 1958|p=325}}.|group=n}}. Selon [[Antoine Adam]],
{{citation bloc|La grandeur historique de {{Louis XIV}} avait été de donner au royaume un style. Que ce soit Bossuet ou La Rochefoucauld, ou Mme de Lafayette, que ce soient les héroïnes de Racine, tous et toutes ont en commun le sens de l'attitude, non pas théâtrale, mais magnifique. Ils sont comme portés à ce haut niveau par l'orgueil de la race ou du rang social, par le sentiment de leurs devoirs et de leurs droits. C'est aux environs de {{Date-|1680}} que ce style s'est affirmé avec le plus de force, c'est à cette époque que la France monarchique a eu le mieux conscience de vivre un moment exceptionnel de l'histoire{{sfn|Adam 1958|p=525}}.}}

[[Fichier:LouisXIV-Bernini.jpg|vignette|Buste de {{Louis XIV}} par [[Le Bernin]].|alt=sculpture en marbre blanc]]

La référence à l'Antiquité romaine s'impose en art. Le roi est représenté par les peintres comme étant le nouvel [[Auguste]], comme Jupiter, vainqueur des [[Titan (mythologie)|Titans]], comme [[Mars (mythologie)|Mars]], dieu de la guerre ou [[Neptune (mythologie)|Neptune]]. La nouvelle [[cosmologie religieuse|cosmologie]] s'oppose à la morale héroïque de Corneille. Elle vise à {{citation|redéfinir autour de la monarchie un nouvel ordre, un nouvel ensemble de valeurs}}{{sfn|Petitfils 2002|p=287}}. À partir de {{Date-|1660}}-{{Date-|1670}}, [[Nicolas Boileau]] fait l'éloge du bon sens et de la raison, ce qui contribue à ruiner {{citation|l'emphase tragique à la [[Pierre Corneille|Corneille]]}} caractéristique de l'aristocratie frondeuse du début du siècle. L'art vise alors à imposer à l'aristocratie des valeurs plus « romaines » destinées à {{citation|discipliner ses folles impulsions}}{{sfn|Petitfils 2002|p=288}}. Vers la fin du siècle, la tragédie s'essouffle et subit la désaffection du public{{sfn|Adam 1958|p=539}}.

En {{Date-|1648}}, est fondée l'[[Académie royale de peinture et de sculpture]], où sont formés tous les grands artistes du règne. Placée sous la protection de Colbert, elle est dirigée par [[Charles Le Brun]] et compte parmi ses fondateurs les plus grandes figures de la peinture française du milieu du siècle, tels [[Eustache Le Sueur]], [[Philippe de Champaigne]], et [[Laurent de La Hyre]]{{sfn|Petitfils 2002|p=281}}. Conçue sur le modèle des académies italiennes, elle permet aux artistes titulaires d'un brevet du roi d'échapper aux règles contraignantes des corporations urbaines, qui régissent depuis le Moyen Âge le métier de peintre et de sculpteur. Les membres de l'Académie mettent au point un système élaboré d'enseignement, de copie d'après les maîtres, de conférences destinées à théoriser le « beau » au service du monarque, et créent même une Académie de France à Rome, où sont envoyés les élèves les plus méritants. La plupart des grandes commandes du règne, dont les décors peints et sculptés du château de [[Versailles]], sont réalisées par les élèves formés dans cette nouvelle Académie royale{{sfn|Petitfils 2002|p=281}}. En {{Date-|1664}}, [[Jean-Baptiste Colbert|Colbert]] invite [[Le Bernin]], alors au sommet de sa gloire, pour la [[Palais du Louvre#Le Louvre de Louis XIV|restructuration du Louvre]]; si son projet est écarté, l'architecte-sculpteur italien réalise cependant un buste du roi en marbre blanc et une statue équestre qu'il livre vingt ans après son retour à Rome : d'abord « exilée » dans un coin peu prestigieux du [[parc de Versailles]], celle-ci est aujourd'hui conservée dans l'Orangerie du château (tandis qu'une copie orne actuellement la place devant la Pyramide du Louvre à Paris)<ref>Voir la [[c:File:Louis XIV Louvre HPIM0248.jpg|''Statue équestre du roi'' par Le Bernin]].</ref>. Cette dernière statue a été dévoilée à Versailles en même temps que le ''Persée et Andromède'' du sculpteur français [[Pierre Puget]], dont le célèbre [[Milon de Crotone (Puget)|''Milon de Crotone'']] orne déjà le parc depuis {{Date-|1682}}.

En {{Date-|1672}}, {{Louis XIV}} devient le protecteur officiel de l'[[Académie française]] : {{citation|Sur les conseils de Colbert, le roi lui offrit un domicile {{incise|au [[Palais du Louvre|Louvre]]}} un fonds pour couvrir ses besoins, des jetons pour récompenser la présence aux séances ; il lui offrit aussi quarante fauteuils {{incise|signe de l'égalité totale entre académiciens|fin}}<ref>[http://www.academie-francaise.fr/lacademie-francaise-pouvoir-intellectuel-pouvoir-politique-une-relation-compliquee-conference L'Académie française], site officiel.</ref>.}} En {{Date-|1666}}, il fonde l'''Académie des sciences'', destinée à concurrencer la ''Royal Society de Londres''{{sfn|Petitfils 2002|p=281}}. Son règne voit aussi la réorganisation du [[Jardin des plantes de Paris|Jardin des plantes]] et la création du Conservatoire des machines, arts et métiers{{sfn|Petitfils 2002|p=284}}.

== Profil et caractéristiques ==
=== Personnalité ===
[[Fichier:Lyon 2e - Place Bellecour - Statue équestre de Louis XIV, après restauration 01.jpg|vignette|[[Statue équestre de Louis XIV (Lyon)|Statue équestre de {{Louis XIV}}]] sur la [[place Bellecour]] ([[Lyon]]).|alt=Statue équestre de Louis XIV]]

Le « portrait de {{Louis XIV}} » occupe une place de choix dans les ''[[Mémoires de Saint-Simon|Mémoires]]'' de [[Louis de Rouvroy de Saint-Simon|Saint-Simon]] ({{nobr|381 pages}} dans l'édition [[Arthur de Boislisle|Boislisle]] de {{Date-|1916}}). Pour le mémorialiste, tout le « caractère » du roi découle de son trait fondamental, l'[[orgueil]], alimenté par la flatterie dont il fait sans cesse l'objet, et par son esprit qui est, dit-il, {{citation|au-dessous du médiocre […] mais capable de se former et de se raffiner}}<ref>{{article|auteur1=[[Leo Spitzer]]|titre=Le Portrait de {{Louis XIV}} par Saint-Simon |url=https://www.persee.fr/doc/simon_0409-8846_1979_num_7_1_967 |périodique=Cahiers Saint Simon |date=1979 |issn=0409-8846 |doi=10.3406/simon.1979.967|consulté le=2018-10-09 |page=45 et 49}}.</ref>. Selon l'historien moderne [[Thierry Sarmant]], l'orgueil de {{Louis XIV}} vient du sentiment d'appartenir à la plus ancienne, la plus puissante et la plus noble dynastie d'Europe, les [[Capétiens]], de même que de la grande confiance en sa capacité de gouverner qu'il gagne après des débuts hésitants<ref>{{Harvsp|Sarmant 2012|p=553}}.</ref>.

Certains de ses contemporains tel le [[Jacques Fitz-James|maréchal de Berwick]] ont souligné sa grande [[politesse]], et sa belle-sœur [[Élisabeth-Charlotte de Bavière|Madame Palatine]] son affabilité<ref>{{Lien web |nom1=Bluche |prénom1=François |titre={{Louis XIV}} |url=https://books.google.com/books?id=dYbbFOsbb50C&pg=PT326 |éditeur=Fayard |date=2014|isbn=9782213648026|consulté le=2018-10-09}}.</ref>. Il traite ses domestiques avec respect<ref>{{Ouvrage|auteur1=[[Alexandre Maral]]|titre={{Louis XIV}}. Un règne de grandeur|éditeur=Éditions Garnier|collection=Ils ont fait la France|année=2011|passage=210|isbn=}}.</ref>, Saint-Simon note d'ailleurs que sa mort n'est regrettée « que de ses valets inférieurs, de peu d'autres gens »<ref>{{article|auteur1=[[Leo Spitzer]]|titre=Le Portrait de {{Louis XIV}} par Saint-Simon|url=https://www.persee.fr/doc/simon_0409-8846_1979_num_7_1_967|périodique=Cahiers Saint Simon |date=1979|issn=0409-8846|doi=10.3406/simon.1979.967|consulté le=19 10 2018|page=65}}.</ref>. Il a d'ailleurs comme principal homme de confiance son fidèle valet [[Alexandre Bontemps]], organisateur de son mariage secret avec [[Madame de Maintenon]] et l'un des rares témoins de ce remariage<ref>{{Article |auteur1=[[Mathieu da Vinha]]|titre=Alexandre Bontemps, « favori » de {{Louis XIV}} ? |périodique=Bulletin du Centre de recherche du château de Versailles |date=2018-04-03 |issn=1958-9271 |lire en ligne=https://journals.openedition.org/crcv/14819|consulté le=2018-10-12}}.</ref>.

Malgré son surnom de « roi soleil », il est de nature [[timidité|timide]], ce qui n'est pas sans rappeler son père {{souverain2|Louis XIII}} et ses successeurs {{souverain2|Louis XV}} et {{souverain2|Louis XVI}}. Il redoute les conflits et les scènes, ce qui l'amène à s'entourer de plus en plus de ministres effacés et dociles tels que [[Étienne II d'Aligre|d'Aligre]], [[Louis Boucherat|Boucherat]], mais surtout [[Michel Chamillart|Chamillart]], l'un de ses favoris. Au demeurant, il n'est en confiance que dans un cercle restreint de parents, domestiques, ministres de longue date et quelques grands seigneurs{{Sfn|Sarmant 2012|p=550-551}}.

Au fil des années, il a su maîtriser sa timidité, sans la surmonter, et la fait paraître comme [[maîtrise de soi]]{{Sfn|Sarmant 2012|p=550-551}}. [[Primi Visconti]], un chroniqueur du {{XVIIe siècle}}, relate qu' {{Citation|en public, il est plein de gravité et très différent de ce qu'il est en son particulier. Me trouvant dans sa chambre avec d'autres courtisans, j'ai remarqué plusieurs fois que, si la porte vient par hasard à être ouverte, ou s'il sort, il compose aussitôt son attitude et prend une autre expression de figure, comme s'il devait paraître sur un théâtre}}<ref>{{Article |prénom1=Yann |nom1=Lignereux |titre=Le visage du roi, de {{souverain-|François Ier}} à {{Louis XIV}} |périodique=[[Revue d'histoire moderne et contemporaine]] |date=2010 |page=40|lire en ligne=https://www.cairn.info/revue-d-histoire-moderne-et-contemporaine-2010-4-page-30.htm#re34no126}}.</ref>. S'exprimant de manière laconique et préférant réfléchir seul avant de prendre une décision<ref name=ajd>{{Lien web |titre=Dans l'intimité de {{Louis XIV}}, le Roi-Soleil puissant et timide |url=http://ici.radio-canada.ca/emissions/aujourd_hui_l_histoire/2016-2017/chronique.asp?idChronique=421271 |site=Aujourd'hui l'histoire - Radio-Canada |consulté le=2018-10-09}}.</ref>, une de ses répliques célèbres est {{citation|je verrai}}, en réponse à des requêtes de toutes sortes{{Sfn|Sarmant 2012|p=550-551}}.

Le roi lit moins que la moyenne de ses contemporains cultivés. Il préfère se faire lire les livres. Il aime en revanche la conversation. Un de ses interlocuteurs favoris, [[Jean Racine]], est aussi un de ses lecteurs préférés. {{Louis XIV}} lui trouve {{citation|un talent particulier pour faire sentir la beauté des ouvrages}}{{sfn|Bluche 1986|p=702}}. Racine lui lit notamment ''La Vie des hommes célèbres'' de [[Plutarque]]. À partir de {{Date-|1701}}, le roi se met à constituer une bibliothèque de livres rares, parmi lesquels figurent : ''Les Éléments de la politique'' de [[Thomas Hobbes]], ''Le Prince parfait'' de Jean Bauduin<ref>{{Ouvrage|langue=fr|prénom1=Jean|nom1=Baudoin|titre=Le Prince parfait et ses qualitez les plus éminentes : avec des conseils et des exemples moraux et politiques tirez des oeuvres de Juste-Lipse et des plus célèbres autheurs anciens et modernes qui ont écrit de l'Histoire universelle|éditeur=Cardin Besongne|année=1650|lire en ligne=https://books.google.ca/books?id=1FJ3Nkh557wC&printsec=frontcover|consulté le=2023-04-30}}</ref>, ''Le portrait du gouverneur politique'' de Mardaillan et ''[[La Dîme royale]]'' de [[Sébastien Le Prestre de Vauban|Vauban]]{{sfn|Bluche 1986|p=702-705}}{{,}}<ref>[https://books.google.ca/books?id=awIVAAAAQAAJ&dq=Le+portrait+du+gouverneur+politique&source=gbs_navlinks_s ''Les manuscrits françois de la Bibliothèque du Roi''].</ref>.

=== Emblème, devise et monogramme ===
{{Article détaillé|Us et coutumes à la cour de Versailles}}

==== Emblème ====
[[Fichier:1694 S Nec Pluribus Impar.jpg|vignette|''{{langue|la|Nec pluribus impar}}'' (« supérieur à tous »), la devise du roi.|alt=Représentant de la devise du roi NEC PLURIBUS IMPAR (« supérieur à tous »)]]

{{Louis XIV}} choisit pour [[emblème]] le [[soleil]]. C'est l'astre qui donne vie à toute chose, mais c'est aussi le symbole de l'ordre et de la régularité. Il régna en soleil sur la cour, les courtisans et la France. Les courtisans assistaient à la journée du roi comme à la course journalière du soleil. Il apparaît même déguisé en soleil lors d'une fête donnée à la cour en {{Date-|1653}}<ref>{{Lien web|url=http://sitelully.free.fr/b2.htm|titre=Le Ballet de la Nuit|auteur=MPB|année=1653|éditeur=Site Lully|consulté le= 6 avril 2009}} (parues dans ''[[La Gazette (France)|La Gazette de France]]'' en 1653).</ref>.

==== Devise ====
[[Voltaire]] rappelle, dans son ''[[s:Histoire du siècle de Louis XIV|Histoire du siècle de {{Louis XIV}}]]'', la genèse de la [[Devise (parahéraldique)|devise]] du Roi-Soleil. Louis Douvrier, spécialiste des monnaies antiques, en prévision du [[Carrousel (militaire)|carrousel]] de [[1662]], a l'idée d'attribuer un emblème et une devise à {{Louis XIV}}, qui n'en a pas. Cet ensemble ne plaît pas au roi qui le trouve ostentatoire et prétentieux. Douvrier, pour assurer malgré tout le succès de sa production, la promeut discrètement auprès de la cour qui s'enthousiasme de cette trouvaille et y voit l'occasion de montrer son éternel esprit de flatterie. Le [[Blason (héraldique)|blason]] comporte un globe éclairé par un soleil étincelant et la devise latine : ''{{langue|la|[[nec pluribus impar]]}}'', formule construite en [[litote]] dont le sens a prêté à discussion, signifiant littéralement « sans son pareil même dans un grand nombre »{{Note|groupe=n|Les héraldistes de l'époque furent prompts à y voir un plagiat d'un ancien blason ayant appartenu à {{Souverain2|Philippe II (roi d'Espagne)|d'Espagne}} qui signifiait pour la circonstance : {{Citation|Suffisant à toutes les étendues}}, à tous les mondes, voire : à plusieurs mondes… La concision de la formule latine admet de nombreux compléments sous-entendus. On fit alors remarquer que ce roi d'Espagne possédait encore à cette époque ''un empire où le soleil ne se couchait jamais''. On détourna donc le sens de cette devise vers la personnalité du roi qui n'en demandait pas tant. Cela lui fit tort, car elle lui attribua une attitude hautaine, distante et orgueilleuse, qu'il n'avait pas. <br>Le philologue des langues anciennes J. Saunier (1873-1949) indique, dans son ''Vocabulaire latin'', (1927), que le mot latin « par » a le sens premier d'« être capable », dans le sens d'être à la hauteur d'une tâche, de tenir tête à… et ''plures'' (''pluribus'') a le sens de « plus nombreux que » ; « plusieurs » se traduisant plutôt en latin classique par « multi, nonnulli… »}}. {{Louis XIV}} refuse toutefois de s'en parer et ne la porte jamais dans les [[Carrousel (équitation)|carrousels]]. Il semble que, par la suite, il ne fit que la tolérer, pour ne pas décevoir ses courtisans. [[Charles Rozan]] rapporte la parole que [[François Michel Le Tellier de Louvois|Louvois]] adresse au roi quand celui-ci déplore le sort de {{Souverain2|Jacques II (roi d'Angleterre)|d'Angleterre}} chassé de son pays : {{Citation|Si jamais devise a été juste à tous égards, c'est celle qui a été faite pour votre Majesté : ''Seul contre tous''}}<ref>Charles Rozan, ''Petites ignorances historiques et littéraires'', {{Date-|1688}}.</ref>.

==== Monogramme ====
Le [[Monogramme royal|monogramme]] de {{souverain-|Louis XIV}} représente deux lettres "L" [[Emplacement des figures héraldiques#Affront%C3%A9|affrontées]] :<gallery mode="packed" widths="200">
Fichier:Royal Monogram of King Louis XIV of France, Variant.svg|Monogramme de {{souverain-|Louis XIV}}.
Fichier:Monogramme Louis XIV Invalides entrée.jpg|Aux [[Hôtel des Invalides|Invalides]].
Fichier:Porte de l'Orangerie - Versailles détail.jpg|Porte de l'[[Orangerie du château de Versailles|Orangerie]], château de Versailles.
Fichier:Place Vendome monogramme Louis.jpg|[[Place Vendôme]].
</gallery>

=== Travail ===
{{Louis XIV}} travaille environ six heures par jour : de 2 à {{nobr|3 heures}} le matin et l'après-midi, sans compter le temps consacré à la réflexion et aux affaires extraordinaires, à la participation aux différents conseils et à la ''liasse'' c'est-à-dire aux tête-à-tête avec les ministres ou ambassadeurs{{Sfn|Bluche 1986|p=182}}. Le roi tient également à se tenir informé de l'opinion de ses sujets. C'est lui qui traite directement les demandes de grâce car, de la sorte, il peut s'instruire de l'état de ses peuples{{sfn|Deschodt 2008 |p=98}}. Après dix ans d'exercice du pouvoir, il écrit :
{{citation bloc|C'est ici la dixième année que je marche, comme il me semble, assez constamment dans la même route ; écoutant mes moindres sujets ; sachant à toute heure le nombre et la qualité de mes troupes et l'état de mes places ; donnant incessamment mes ordres pour tous leurs besoins ; traitant immédiatement avec les ministres étrangers; recevant et lisant les dépêches ; faisant moi-même une partie des réponses et donnant à mes secrétaires la substance des autres{{sfn|Bluche 1986|p=180}}.}}

Si l'historien [[François Bluche]] admet l'existence {{citation|d'accords instinctifs, implicites ou intuitifs entre le souverain et ses sujets}}, il pointe malgré tout {{citation|la relative insuffisance de relations entre le gouvernement et les sujets de Sa Majesté}}{{sfn|Bluche 1986|p=502-503}}.

=== Physionomie ===
[[Fichier:Louis XIV - Charles le Brun.jpg|vignette|{{Louis XIV}} représenté en [[Alexandre le Grand]].|alt=Tableau représentant le roi]]

Il a souvent été dit du roi qu'il n'était pas grand. En {{Date-|1956}}, Louis Hastier a déduit, à partir des dimensions de l'[[Armure (équipement)|armure]] qui lui a été offerte en {{Date-|1668}} par la [[république de Venise]], que le roi ne pouvait mesurer plus de {{unité|1.65|m}}. Cette déduction est aujourd'hui contestée car cette armure a pu être fabriquée selon un standard moyen de l'époque<ref>Joëlle Chevé, « Les 100 idées reçues (section Ancien Régime) », ''Le Point''-''Historia'', hors-série {{date-|mars 2010}}.</ref>. En effet, il s'agissait d'un présent honorifique n'étant pas destiné à être porté, si ce n'est dans les tableaux peints à sujet antique. Certains témoignages confirment que le roi était d'une belle prestance, ce qui laisse supposer que, pour son temps, il avait au moins une taille moyenne et une silhouette bien proportionnée. [[Françoise de Motteville|Madame de Motteville]] raconte, par exemple, que lors de l'entrevue sur l'[[île des Faisans]], en {{Date-|juin 1660}}, entre les jeunes promis présentés par les deux parties {{incise|française et espagnole}} que l'[[Marie-Anne-Victoire d'Espagne|Infante Reine]] {{Citation| le regardait avec des yeux tout à fait intéressés par sa bonne mine, parce que sa belle taille le faisait dépasser les deux ministres [Mazarin, d'un côté et don Louis de Haro, de l'autre] de toute la tête}}<ref>Valentin Conrart, ''Mémoires de Madame de Motteville sur Anne d'Autriche et sa cour'' (tome 4), 1855, {{p.|203}} ; citée par Joëlle Chevé).</ref>. Enfin, un témoin, [[François-Joseph de Lagrange-Chancel]], maître d'hôtel de la [[Élisabeth-Charlotte de Bavière|Princesse Palatine]], belle-sœur du roi, avance une mesure précise : {{Citation|Cinq [[pied (unité)#Le pied en France|pieds]], huit pouces de hauteur}}, soit {{unité|1.84|m}}<ref>cité par Joëlle Chevé.</ref>.

=== Santé ===
Si le règne de {{Louis XIV}} est d'une longueur exceptionnelle, malgré tout sa santé n'a jamais été bonne, ce qui lui vaut d'être quotidiennement suivi par un médecin : [[Jacques Cousinot]] de {{Date-|1643}} à {{Date-|1646}}, [[François Vautier]] en {{Date-|1647}}, [[Antoine Vallot]] de {{Date-|1648}} à {{Date-|1671}}, [[Antoine d'Aquin]] de {{Date-|1672}} à {{Date-|1693}}, enfin [[Guy-Crescent Fagon]] jusqu'à la mort du roi. Tous ont abondamment recours à des [[Saignée (médecine)|saignées]], à des [[Purgatif|purgations]] et à des [[Lavage de l'intestin|lavements]] aux [[clystère]]s {{incise|le roi aurait reçu plus de {{unité|5000|lavements}} en 50 ans<ref>{{Ouvrage|auteur1=Marcel J. Rheault|titre=La médecine en Nouvelle-France|sous-titre=les chirurgiens de Montréal, 1642-1760|éditeur=Les [[Éditions du Septentrion]]|année=2004|passage=41|isbn=|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=cysuJ8JMIdMC}}.</ref>|point}}. Par ailleurs, comme l'expliquent des notes sanitaires, il eut de nombreux ennuis peu {{Citation|royaux}}<ref>{{Article|auteur=Jérôme Watelet|titre=Les « maelströms » de selles du Roi-Soleil|périodique=La Lettre de l'Hépato-Gastroentérologue|date=octobre 2000|volume=3|numéro=5|pages=269}}.</ref>. Ainsi, il arrive à Louis d'avoir fort [[Halitose|mauvaise haleine]] à cause de ses ennuis dentaires, apparus en {{Date-|1676}} selon le journal de son dentiste Dubois ; il arrive alors à ses maîtresses de placer un mouchoir parfumé devant leur nez<ref>Sacha Bogololski, « Histoire du dentifrice », dans ''Actes de la SFHAD'', Marseille, {{date-|23 juin 2000}}, {{p.|1-5}}.</ref>. Par ailleurs, en [[1685]], alors qu'on lui arrache un des nombreux [[wikt:chicot #5|chicots]] de son maxillaire gauche, une partie de son palais est arrachée, provoquant une {{Citation|communication bucco-nasale}}<ref>{{Ouvrage|auteur1=Henri Lamendin|titre=Praticiens de l'art dentaire du {{sp-|XIV|au|XX}}|sous-titre=recueil d'anecdodontes|éditeur=[[Éditions L'Harmattan]]|année=2007|passage=52-53|lire en ligne=https://books.google.fr/books?id=lawUaZuOuU0C}}.</ref>.

La lecture du ''journal de santé du roi {{Louis XIV}}'', minutieusement entretenu par ses médecins successifs, est édifiante : il se passe peu de jours sans que le souverain soit l'objet d'une purgation, d'un lavement, d'un emplâtre, d'une [[pommade]] ou d'une saignée<ref>Vallot, D'Aquin et Fagon, ''[https://books.google.fr/books/about/Journal_de_la_sant%C3%A9_du_roi_Louis_XIV_de.html?id=hbkPAAAAQAAJ&redir_esc=y Journal de la santé de {{Louis XIV}}]'', édité par J.A. Le roi, aux éditions A. Durand, en 1862 ; ouvrage réédité par Stanis Perez aux éditions Millon, en 2004. Un article s'y référant en a été fait dans l'hebdomadaire ''Le Point'' du 18-{{date-|25 décembre 2008}} ({{Louis XIV}} « pourri de la tête aux pieds »).</ref>. On y trouve entre autres consignés :
* [[Variole|petite vérole]] en {{Date-|1647}} ;
* troubles gastriques et [[dysenterie]]s, indispositions chroniques chez ce monarque, réputé gros mangeur ;
* [[tumeur]]s : [[Mamelon|téton]] droit [[Cautérisation|cautérisé]] en {{Date-|janvier 1653}} ;
* [[gonorrhée]] : tenue secrète, cette maladie le tenaille régulièrement depuis mai {{Date-|1655}}, époque de ses premières liaisons ;
* vapeurs et [[Mal de dos|douleurs dorsales]] fréquentes : certaines ({{Date-|novembre 1647}}) attribuées à une attaque de [[syphilis]] ; avec [[pustule]]s sur tout le visage et d'autres parties du corps, suivie d'un début de « [[gangrène]] » des [[orteil]]s ;
* langueurs et fièvres variées: la [[fièvre typhoïde]] de juin {{Date-|1658}} lui fait perdre ses cheveux et le condamne à porter des perruques toute sa vie ;
* [[Mal de dent|maux de dents]] : en {{Date-|1685}}, toute sa [[dentition]] supérieure côté gauche est « arrachée », avec le voile du palais qui sera cautérisé plusieurs fois aux pointes de feu (les liquides lui ressortent parfois par le nez) ;
* [[fistule anale]] : cette malformation handicapante lui fera finalement subir une opération expérimentale la plus douloureuse qui soit (par le chirurgien [[Charles-François Félix|Félix]]) en {{Date-|novembre 1686}} (voir [[Fistule anale de Louis XIV|Fistule anale de {{Louis XIV}}]]) ;
* ennuis urinaires, accompagnés de probables [[Lithiase urinaire|calculs]] ([[Miction|mictions]] accompagnées de « pelotons de sable ») ;
* [[Goutte (maladie)|goutte]] : des attaques insupportables au pied droit et à la cheville gauche le tiennent longtemps immobilisé ou gênent sa marche {{incise|ses dernières années tiendront du supplice|point}}.

=== Maîtresses et favorites ===
[[Fichier:LouiseDeLaValliere01.jpg|vignette|Mademoiselle [[Louise de La Vallière]].|alt=portrait de femme en pied]]
{{Louis XIV}} a de très nombreuses maîtresses dont [[Louise de La Vallière]], [[Madame de Montespan|Athénaïs de Montespan]], [[Isabelle de Ludres|Marie-Élisabeth de Ludres]], [[Duchesse de Fontanges|Marie Angélique de Fontanges]], et [[Madame de Maintenon]] (qu'il épouse secrètement après la mort de la Reine, sans doute dans la nuit du 9 au {{Date-|10 octobre 1683}}, en présence du [[François d'Aix de La Chaise|Père de La Chaise]] qui donne la bénédiction nuptiale){{sfn|Deschodt 2008|p=88}}.

Le roi adolescent fait, à {{nobr|18 ans}}, la rencontre d'une nièce du cardinal [[Jules Mazarin|Mazarin]], [[Marie Mancini]]. S'ensuit entre eux une grande passion, qui mène le jeune roi à envisager un mariage, que ni sa mère, ni le cardinal ne consentent à accepter. Le monarque menace alors d’abandonner la couronne pour cette Italienne, française dans sa culture. Il s'effondre en sanglots lorsqu’elle est contrainte de quitter la cour, en raison de l’insistance de l’oncle de la jeune fille, qui est aussi parrain du roi, Premier ministre du royaume et prince de l'Église. Le primat préfère faire épouser au roi sa pupille, l'[[Infant d'Espagne|infante d'Espagne]]{{sfn|Deschodt 2008|p=55}}. En {{Date-|1670}}, [[Jean Racine]] s'inspire de l'histoire du roi et de Marie Mancini pour écrire ''[[Bérénice (Racine)|Bérénice]]''.

Plus tard, le roi fait aménager des escaliers secrets dans Versailles pour rejoindre ses différentes maîtresses<ref>Max Gallo, ''{{Louis XIV}} le Roi-Soleil''.</ref>. Ces liaisons irritent la [[compagnie du Saint-Sacrement]], un parti de dévots. [[Jacques-Bénigne Bossuet|Bossuet]], comme Madame de Maintenon, tentent de ramener le roi à plus de vertu.

{{Louis XIV}}, s'il aime les femmes, est conscient qu'il doit d'abord veiller aux affaires de l'État. Il note dans ses mémoires {{citation|il faut que le temps que nous donnons à nos amours ne soit jamais pris au préjudice de nos affaires}}{{sfn|Deschodt 2008|p=89}}. Il a une certaine méfiance vis-à-vis de l'influence que les femmes peuvent exercer sur lui. C'est ainsi qu'il refuse un bénéfice à une personne soutenue par {{Mme}} de Maintenon en disant {{citation|je ne veux absolument pas qu'elle s'en mêle}}{{sfn|Deschodt 2008|p=90}}.

On dénombre au moins quinze favorites et maîtresses supposées du roi, avant son mariage avec Madame de Maintenon :
* [[Marie Mancini]], nièce du [[Jules Mazarin|cardinal de Mazarin]] qui devient par la suite la femme du [[Connétable]] de [[Colonna (Italie)|Colonna]]{{sfn|Deschodt 2008|p=52}} ;
* [[Olympe Mancini]], comtesse de Soissons (1655), sœur de la précédente{{sfn|Deschodt 2008|p=46}} ;
* [[Henriette d'Angleterre|Henriette Anne Stuart d'Angleterre]], sa belle-sœur {{incise|le statut de maîtresse est contesté par des historiens|stop}}, notamment par [[Jean-Christian Petitfils]] qui parle de relation platonique<ref>Jean-Christian Petitfils, ''{{Louis XIV}}'', Perrin 1995, rééd. de la collection Tempus de 2002, {{p.|299}}.</ref> ;
* [[Louise de La Vallière|Louise Françoise de La Baume Le Blanc]], duchesse de La Vallière et de Vaujours ({{Date-|1644}}-{{Date-|1710}} (liaison avec le roi de {{Date-|1661}} à {{Date-|1667}}){{sfn|Deschodt 2008|p=81}} ;
* [[Catherine Charlotte de Gramont]], princesse de [[Monaco]], épouse du prince de Monaco{{sfn|Deschodt 2008|p=81}} ;
* Françoise-Athénaïs de Rochechouart de Mortemart, [[madame de Montespan|marquise de Montespan]] ({{Date-|1667}} à {{Date-|1681}}){{sfn|Deschodt 2008|p=82}} ;
* Bonne de Pons, [[Madame d'Heudicourt|marquise d'Heudicourt]] ([[1665]] ou [[1666]]) ;
* [[Anne de Rohan-Chabot|Anne-Julie de Rohan-Chabot]], [[principauté de Soubise|princesse de Soubise]] ({{Date-|1674}} à {{Date-|1676}}){{sfn|Deschodt 2008|p=83}} ;
* [[Isabelle de Ludres|Marie-Élisabeth de Ludres]] ({{Date-|1676}} à {{Date-|1677}}){{sfn|Deschodt 2008|p=86}} ;
* Lydie de Rochefort-Théobon{{sfn|Deschodt 2008|p=83}} ;
* [[Duchesse de Fontanges|Marie Angélique de Scoraille de Roussille]], marquise puis duchesse de Fontanges († {{date de décès-|||1681}}), dite « Mademoiselle de Fontanges »{{sfn|Deschodt 2008|p=85}} ;
* [[Claude de Vin des Œillets]], dite « mademoiselle des Œillets » ;
* Charlotte-Éléonore de La Mothe-Houdancourt{{sfn|Deschodt 2008|p=83}} ;
* Françoise d'Aubigné, [[Madame de Maintenon|marquise de Maintenon]], veuve du poète [[Paul Scarron]] dite « la belle Indienne », qu'il épouse en secret ([[mariage morganatique]]) après le décès de la reine{{sfn|Deschodt 2008|p=86}}.

À propos des maîtresses du roi, [[Voltaire]] remarque, dans ''[[Le Siècle de Louis XIV|Le Siècle de {{Louis XIV}}]]'' : {{citation|C'est une chose très remarquable que le public, qui lui pardonna toutes ses maîtresses, ne lui pardonna pas son confesseur}}. Par là, il fait allusion au dernier confesseur du roi, [[Michel Le Tellier (jésuite)|Michel Le Tellier]], auquel une chanson satirique attribue la bulle ''[[Unigenitus]]''{{sfn|Maral 2012|p=321}}.

=== Titres ===
* [[1638]]-[[1643]] : [[Son Altesse Royale|S.A.R.]] Monseigneur le Dauphin.
* [[1643]]-[[1715]] : [[Sa Majesté|S.M.]] le roi de France et de Navarre.

== Famille ==
=== Ascendance ===
{{boîte déroulante/début|alignT=center|titre=Ascendance de {{Louis XIV}} de France}}
<center>{{Ancêtres-compact6
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|1=1. {{Louis XIV}} de France
|2=2. {{Souverain2|Louis XIII|de France}}
|3=3. [[Anne d'Autriche (1601-1666)|Anne d'Autriche]]
|4=4. {{Souverain2|Henri IV (roi de France)|de France}}
|5=5. [[Marie de Médicis]]
|6=6. {{Souverain2|Philippe III (roi d'Espagne)|d'Espagne}}
|7=7. [[Marguerite d'Autriche-Styrie]]
|8=8. [[Antoine de Bourbon]]
|9=9. {{souverain2|Jeanne d'Albret|Jeanne III de Navarre}}
|10=10. {{souverain3|François Ier de Médicis}}
|11=11. [[Jeanne d'Autriche]]
|12=12. {{Souverain2|Philippe II (roi d'Espagne)|d'Espagne}}
|13=13. [[Anne d'Autriche (1549-1580)|Anne d'Autriche]]
|14=14. {{souverain3|Charles II d'Autriche-Styrie}}
|15=15. [[Marie-Anne de Bavière (1551-1608)|Marie-Anne de Bavière]]
|16=16. {{souverain3|Charles IV de Bourbon}}
|17=17. [[Françoise d'Alençon]]
|18=18. {{Souverain2|Henri II (roi de Navarre)|de Navarre}}
|19=19. [[Marguerite de Navarre (1492-1549)|Marguerite d'Angoulême]]
|20=20. {{souverain3|Cosme Ier de Toscane}}
|21=21. [[Éléonore de Tolède]]
|22=22. {{Souverain2|Ferdinand Ier (empereur du Saint-Empire)|du Saint-Empire}}
|23=23. [[Anne Jagellon]]
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|28=28. {{Souverain2|Ferdinand Ier (empereur du Saint-Empire)|du Saint-Empire}} '''(28=22)'''
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|31=31. [[Anne d'Autriche (1528-1590)|Anne d'Autriche]]
|32=32. [[François de Bourbon-Vendôme]]
|33=33. [[Marie de Luxembourg (1462-1546)|Marie de Luxembourg]]
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|35=35. [[Marguerite de Lorraine-Vaudémont]]
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|37=37. [[Catherine de Navarre]]
|38=38. [[Charles d'Orléans (1459-1496)|Charles d'Orléans]]
|39=39. [[Louise de Savoie]]
|40=40. [[Jean des Bandes Noires|Jean de Médicis]]
|41=41. [[Maria Salviati]]
|42=42. [[Pierre Alvarez de Tolède (1484-1553)|Pierre Álvarez de Tolède]]
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|45=45. [[Jeanne la Folle|{{souverain-|Jeanne Ire}} de Castille]]
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|47=47. [[Anne de Foix]]
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}}</center>
{{boîte déroulante/fin}}

=== Descendance ===
{{Article détaillé|Descendance de Louis XIV{{!}}Descendance de {{Louis XIV}}}}

{{Louis XIV}} a de nombreux [[Descendance de Louis XIV|enfants légitimes et illégitimes]].

[[File:Queen Marie Therese and her children from the Family of Louis XIV by Nocret.jpg|thumb|La reine Marie-Thérèse d'Autriche avec trois de ses enfants, le Grand Dauphin, la Petite Madame et le duc d'Anjou (1670)]]

De la reine, [[Marie-Thérèse d'Autriche (1638-1683)|Marie-Thérèse d'Autriche]], le roi a six enfants (trois filles et trois garçons) dont un seul, Louis de France, le « Grand Dauphin », survécut à l'enfance :
{|class=wikitable border="1" style="border-collapse: collapse;"
|- bgcolor="#cccccc"
|Nom||Naissance||Décès
|-
|[[Louis de France (1661-1711)|Louis de France, fils de France, le Grand Dauphin]] || {{Date-|1er novembre 1661}}|| {{Date-|14 avril 1711}}
|-
|[[Anne-Élisabeth de France]], fille de France||{{Date-|18 novembre 1662}}||{{Date-|30 décembre 1662}}
|-
|[[Marie-Anne de France]], fille de France||{{Date-|16 novembre 1664}}||{{Date-|26 décembre 1664}}
|-
|[[Marie-Thérèse de France (1667-1672)|Marie-Thérèse de France, fille de France, la Petite Madame]]||{{Date-|2 janvier 1667}}||{{Date-|1er mars 1672}}
|-
|[[Philippe Charles de France]], fils de France, duc d'Anjou||{{Date-|5 août 1668}}||{{Date-|10 juillet 1671}}
|-
|[[Louis-François de France]], fils de France, duc d'Anjou||{{Date-|14 juin 1672}}||{{Date-|4 novembre 1672}}
|}

De ses deux principales maîtresses, il eut {{nobr|10 enfants}} légitimés dont 5 seulement survivent à l'enfance{{Note|groupe=n|Liste selon Y. M. Bercé, qui ajoute que le roi était attentif à sa progéniture extra-conjugale, qu'il aimait beaucoup. Chacun fut reconnu par lettres patentes et ceux qui survécurent reçurent le nom de Bourbon, furent titrés et dotés. Cela concerne les maîtresses de longue date. Les enfants illégitimes, s'il y en eut, ont par nature une origine problématique.}} :

De l'union du roi avec [[Louise de La Vallière|Louise de La Baume Le Blanc, duchesse de La Vallière]] naissent cinq ou six enfants dont deux survivent à l'enfance{{sfn|Bluche 2005}}{{,}}{{sfn|Petitfils|2002a}}.

{| class=wikitable border="1" style="border-collapse: collapse;"
|- bgcolor="#cccccc"
|Nom||Naissance||Décès
|-
|Charles de La Baume Le Blanc, mort sans être légitimé||{{Date-|1663}}||{{Date-|1666}}
|-
|Philippe de La Baume Le Blanc, mort sans être légitimé||{{Date-|1665}}||{{Date-|1666}}
|-
|Louis de La Baume Le Blanc, mort sans être légitimé||{{Date-|1665}}||{{Date-|1666}}
|-
|[[Marie-Anne de Bourbon (1666-1739)|Marie-Anne, mademoiselle de Blois]] ([[1666]]-[[1739]]), mariée au [[Louis-Armand de Bourbon-Conti (1661-1685)|prince de Conti]]||{{Date-|1666}}||{{Date-|1739}}
|-
|[[Louis de Bourbon (1667-1683)|Louis de Bourbon, comte de Vermandois]]. Mort à seize ans lors de sa première campagne||{{Date-|1667}}||{{Date-|1683}}
|-
|}
De [[Madame de Montespan|Françoise-Athénaïs de Rochechouart, marquise de Montespan]], dite Madame de Montespan naissent :
[[Fichier:La mauresse de Moret (détail).jpg|vignette|redresse|Portrait de sœur [[Louise Marie Thérèse]], retrouvé dans les combles du musée de Melun en {{Date-|2014}} (attribué à [[Pierre Gobert]], vers {{Date-|1700}}).]]
{| class=wikitable border="1" style="border-collapse: collapse;"
|- bgcolor="#cccccc"
|Nom||Naissance||Décès
|-
|[[Louis-Auguste de Bourbon (1670-1736)|Louis-Auguste de Bourbon, duc du Maine]], marié à [[Louise-Bénédicte de Bourbon|Louis-Bénédicte de Bourbon-Condé]]||{{Date-|1670}}||{{Date-|1736}}
|-
|[[Louis-César de Bourbon|Louis-César de Bourbon, comte de Vexin]]||{{Date-|1672}}||{{Date-|1683}}
|-
|[[Louise-Françoise de Bourbon (1673-1743)|Louise-Françoise de Bourbon]], « Mademoiselle de Nantes », mariée au [[Louis III de Bourbon-Condé|prince de Condé]]||{{Date-|1673}}||{{Date-|1743}}
|-
|[[Louise Marie Anne de Bourbon (1674-1681)|Louise-Marie-Anne de Bourbon, mademoiselle de Tours]]||{{Date-|1674}}||{{Date-|1681}}
|-
|[[Françoise-Marie de Bourbon|Françoise-Marie de Bourbon, Mademoiselle de Blois]] ({{Date-|1677}}-{{Date-|1749}}), mariée au [[Philippe d'Orléans (1674-1723)|duc d'Orléans]]||{{Date-|1677}}||{{Date-|1749}}
|-
|[[Louis-Alexandre de Bourbon|Louis-Alexandre de Bourbon, comte de Toulouse]] ({{Date-|1678}}-{{Date-|1737}}), marié à [[Marie-Victoire de Noailles|Victoire de Noailles]]||{{Date-|1678}}||{{Date-|1737}}
|-
|
|}
En {{Date-|1679}}, l'[[affaire des poisons]] consomme la disgrâce dans laquelle [[Madame de Montespan]], ex-[[Liste des maîtresses des souverains de France|favorite]] du roi, était tombée quelques mois auparavant.

Le roi aurait eu d'autres enfants, mais qu'il n'a pas reconnus, comme [[Louise de Maisonblanche]] (1676-1718), avec [[Claude de Vin des Œillets]]. Il est également possible de noter le cas mystérieux des origines de [[Louise Marie Thérèse]], dite « la Mauresse de Moret ». Trois hypothèses sont avancées, ayant pour point commun de voir en elle « la fille du couple royal »<ref name=":02">{{Ouvrage|auteur1=Saint-Simon|titre=Mémoires|lieu=Paris|éditeur=Texte établi par Adolphe Chéruel, Hachette|année=1856|pages totales=(vingt volumes in-8°)|passage=tome 2 {{nobr|chapitre {{IV}}}}|lire en ligne=https://fr.wikisource.org/wiki/Mémoires_(Saint-Simon)}}.</ref>. Il pourrait s'agir de la fille adultérine de la reine Marie-Thérèse, d'un enfant caché du roi {{Louis XIV}} avec une comédienne<ref name="L'énigme de la fille noire de Louis XIV résolue par les archives ?22">{{Lien web|titre=L'énigme de la fille noire de {{Louis XIV}} résolue par les archives ?|url=http://archives.seine-et-marne.fr/louise-marie-therese-1675-1731|site=archives.seine-et-marne.fr|consulté le=17 février 2014|auteur=Serge Aroles}}.</ref> ou plus simplement d'une jeune femme baptisée et parrainée par le roi et la reine<ref name=":0">{{lien web|auteur1 = [[Franck Ferrand]] | auteur2 = [[Jean-Christian Petitfils]] | titre = Les grands portraits d'Au cœur de l'histoire - La Mauresse de Moret | url = http://www.europe1.fr/emissions/au-coeur-de-l-histoire/les-grands-portraits-dau-coeur-de-lhistoire-la-mauresse-de-moret-2642823 | site = [[Europe 1|europe1.fr]] | date = 15 décembre 2015}}.</ref>.

== {{souverain-|Louis XIV}} dans les arts et la culture ==
{{Article détaillé|Représentations de Louis XIV dans les arts et la culture}}
{{souverain-|Louis XIV}} apparaît dans de nombreuses [[Fiction|œuvres de fiction]], [[Roman (littérature)|romans]], [[Cinéma|films]], [[Comédie musicale|comédies musicales]]. Le cinéma et la télévision, suivant les époques, ont montré des images très diverses du roi, avec une prédilection pour l'épisode du masque de fer<ref>{{Article|prénom1=Michel|nom1=Pierssens|titre=Le temps des groupes|périodique=Revue d'histoire littéraire de la France|volume=102|numéro=5|date=2002|issn=0035-2411|issn2=2105-2689|doi=10.3917/rhlf.025.0789|lire en ligne=http://dx.doi.org/10.3917/rhlf.025.0789|consulté le=2021-12-05|pages=789}}</ref>.

== Dans l'historiographie ==
=== Points de vue des historiens ===
Les historiens sont divisés quant à la personnalité de {{Louis XIV}} et à la nature de son règne. Les divergences existent dès son époque, car la tendance est de confondre ce qui relève de l'individu et ce qui tient à l'appareil d'État. Aussi les historiographies oscillent entre une tentation [[apologétique]], exaltant l'époque comme un âge d'or français, et une tradition critique attentive aux conséquences néfastes d'une politique belliciste{{Sfn|Externbrink|Levillain|2018|p=13-15}}.

==== Francophones ====
En France, alors que la discipline historique s'institutionnalise au {{s-|XIX}}, {{Louis XIV}} fait l'objet de biographies contradictoires. [[Jules Michelet]] lui est hostile et insiste sur le côté sombre de son règne ([[dragonnades]], [[Galères (peine)|galères]], [[Famine|disettes]], etc.). L'historiographie se renouvelle sous le [[Second Empire]] par l'entremise des opposants politiques, qu'ils soient orléanistes ou républicains. Pour les premiers, elle permet de minimiser la place de la Révolution et de la dynastie bonapartiste au sein de l'histoire française, pour les seconds d'opposer la grandeur du passé à la vulgarité du présent. Les études sur l'administration sont largement représentées, comme en témoignent les œuvres d'[[Adolphe Chéruel]] et de [[Pierre Clément (historien)|Pierre Clément]], ainsi que, dans une moindre mesure, celles consacrées à la politique religieuse et aux figures aristocratiques. La dénonciation générale de la révocation de l'édit de Nantes est associée, chez les historiens libéraux tels que [[Augustin Thierry]], à la valorisation du souverain établi comme un acteur majeur de la construction de l'État-nation moderne<ref>{{Chapitre |auteur1=Paule Petitier |titre chapitre={{Louis XIV}} ou les origines de la France contemporaine |sous-titre chapitre=le « Grand Roi » dans l'historiographie du Second Empire |auteurs ouvrage=Sven Externbrink & Charles-Édouard Levillain(dir.) |titre ouvrage=Penser l'après {{Louis XIV}} |sous-titre ouvrage=histoire, mémoire, représentation (1715-2015) |lieu=Paris |éditeur=Honoré Champion |année=2018 |passage=131-147}}.</ref>. Dans la seconde moitié du {{s-|XIX}}, [[Ernest Lavisse]] apporte des nuances, insistant, dans ses manuels scolaires comme dans ses cours, sur son despotisme et sa cruauté{{sfn|Bluche 1986|p=12-13}}. De manière similaire à ses collègues universitaires français, il pointe l'autoritarisme, l'orgueil du monarque, la persécution des jansénistes et des protestants, les dépenses excessives de Versailles, l'asservissement du mécénat culturel à la glorification royale, le nombre des révoltes et les guerres continuelles. Il reste cependant sensible à la renommée et aux succès initiaux du règne<ref> {{Chapitre |auteur1=Jean Leduc |titre chapitre=Ernest Lavisse juge de {{Louis XIV}} |auteurs ouvrage=Sven Externbrink & Charles-Édouard Levillain(dir.) |titre ouvrage=Penser l'après {{Louis XIV}} |sous-titre ouvrage=histoire, mémoire, représentation (1715-2015) |lieu=Paris |éditeur=Honoré Champion |année=2018 |passage=161-175}}.</ref>. Sous la [[Troisième République (France)|Troisième République]], le sujet est sensible car le monarchisme est encore vivace en France et constitue toujours une menace pour la république. Dans l'entre-deux guerres, au livre partial de l'académicien Louis Bertrand, répond un livre réquisitoire de [[Félix Gaiffe]], l'''Envers du Grand Siècle''{{sfn|Gouhier 1996|p=408}}. Dans les années {{Date-|1970}}, [[Michel de Grèce]] pointe les insuffisances de {{Louis XIV}}, tandis que [[François Bluche]] le réhabilite{{sfn|Petitfils 2002|p=12-13}}. À partir des années {{Date-|1980}}, le règne de {{Louis XIV}} est étudié sous l'angle des origines de l'État moderne en Europe et des agents économiques et sociaux. Ces recherches permettent de mieux comprendre l'opposition aristocratique à {{Louis XIV}} durant la Fronde{{sfn|Cornette 2000|p=569}}. Des études réalisées sur les thématiques de la finance et de la monnaie, par Daniel Dessert et [[Françoise Bayard]] notamment, conduisent à mieux comprendre comment la monarchie se finance et à remettre en question l'approche très favorable à Colbert adoptée sous la [[Troisième République (France)|Troisième République]]{{sfn|Cornette 2000|p=568}}. Enfin, des historiens comme [[Lucien Bély]], Parker, Somino et d'autres apportent des éclairages nouveaux sur les guerres menées par {{Louis XIV}}{{sfn|Goubert 1998|p=411}}.

==== Monde anglophone ====
L'approche britannique et américaine dominante du monarque, jusqu'au {{s-|XIX}} voire jusqu'au début du {{s-|XX}}, est marquée par une hostilité teintée de fascination. Il est à la fois considéré comme un despote affamant ses sujets afin de conduire ses guerres, et comme le propagateur intransigeant du catholicisme. En 1833, [[Thomas Babington Macaulay]], un historien ''[[conception whig de l'histoire|whig]]'', met en avant la cruauté et sa tyrannie dans son analyse de la guerre de succession d'Espagne. La légende noire attribuée à {{Louis XIV}} atteint son [[acmé]] dans les écrits de [[David Ogg]], qui en fait le précurseur de {{souverain2|Guillaume II (empereur allemand)}} et d'[[Adolf Hitler]] en 1933. Néanmoins, entre les années 1945 et 1980, les historiens anglo-américains contribuent à renouveler l'approche sur la nature du régime et sa place en Europe, tandis qu'en France, les spécialistes de cette époque tendent à délaisser le champ politique au profit des questions sociales et culturelles. Ils apportent des analyses neuves sur l'extension du rôle de l'État ainsi que sur la déconstruction de la propagande et des relations de pouvoir informelles. Malgré l'existence de l'américaine [[Society for French Historical Studies]] et de la britannique [[Society for the Study of French History]], les interactions avec la recherche française restent rares jusqu'aux années 1990. [[Jean Meyer (historien, 1924)|Jean Meyer]] compte parmi les chercheurs ayant promu les travaux anglo-américains au sein du public français. Bien entendu, il n'existe pas d'homogénéité de points de vue au sein de la communauté scientifique, Guy Rowlands rejoignant par exemple Roger Mettam sur le caractère conservateur du régime, mais lui refusant une dimension réactionnaire et affirmant une volonté sincère de réformes institutionnelles<ref>{{Chapitre |langue=en |auteur1=Guy Rowlands |titre chapitre=Life after death in foreign lands |sous-titre chapitre={{Louis XIV}} and Anglo-American historians |auteurs ouvrage=Sven Externbrink & Charles-Édouard Levillain (dir.) |titre ouvrage=Penser l'après {{Louis XIV}} |sous-titre ouvrage=histoire, mémoire, représentation (1715-2015) |lieu=Paris |éditeur=Honoré Champion |année=2018 |passage=179-209}}.</ref>.

==== Allemands ====
Entre les milieux des {{s2-|XIX|XX}}, et surtout après l'histoire française de [[Leopold von Ranke]], l'historiographie allemande porte un intérêt notable à {{Louis XIV}}, essentiellement pour sa politique étrangère, et ce d'un point de vue imprégné par l'essor du nationalisme. Le roi se trouve stigmatisé comme un agresseur de l'Allemagne, un despote et un débauché, coupable de trois guerres de brigandage (''{{langue|de|Raubkriege}}''). Il est décrit comme une menace pour {{Souverain2|Frédéric-Guillaume Ier de Brandebourg}}, perçu de manière [[Téléologie|téléologique]] comme un annonciateur de l'unification allemande. L'image se complexifie à la fin du {{s-|XIX}} : l'anthropologue racialiste [[Ludwig Woltmann]] le compte au nombre des hommes d'État prestigieux ; [[Richard Sternfeld]] lui reconnaît ses qualités administratives malgré son appétit de conquêtes. Dans l'entre-deux guerres, en dehors des pamphlets revanchards, les historiens allemands comme Georg Mentz intègrent les auteurs français à leurs travaux et tendent à dépersonnaliser les résultats du règne. Pendant le Troisième Reich, la condamnation des guerres se conjugue à une certaine estime pour l'absolutisme royal. Après {{Date-|1945}}, et sous l'influence du rapprochement franco-allemand, l'historiographie universitaire adopte un style moins passionnel et des travaux sont menés conjointement avec l'étranger comme l'illustrent Paul-Otto Höynck, [[Fritz Hartung]], [[Klaus Malettke]]. La recherche tend alors à s'internationaliser, à étudier le souverain dans le contexte du {{s-|XVII}}, indépendamment du présent, et à incorporer les innovations méthodologiques de l'histoire économique et sociale<ref> {{Chapitre |auteur1=Christian Kühner |titre chapitre=Le Roi-Soleil vu d'Outre-Rhin |sous-titre chapitre={{Louis XIV}} dans l'historiographie allemande (mi-{{s mini-|XIX}}- mi-{{s-|XX}}) |auteurs ouvrage=Sven Externbrink & Charles-Édouard Levillain(dir.) |titre ouvrage=Penser l'après {{Louis XIV}} |sous-titre ouvrage=histoire, mémoire, représentation (1715-2015) |lieu=Paris |éditeur=Honoré Champion |année=2018 |passage=247-271}}.</ref>.

== Notes et références ==
=== Notes ===
{{Références nombreuses|groupe=n}}

=== Références ===
{{Références nombreuses|taille=30}}

== Annexes ==
=== Bibliographie ===
{{légende plume}}
{{div col||30em}}
* {{Chapitre|auteur=[[Antoine Adam]]|titre chapitre=Ouvertures sur le {{s-|XVIII}}|titre ouvrage=Histoire des littératures, tome 3|collection=Encyclopédie de la Pléiade|lieu=Paris|année=1958|passage=525-565|id=Adam 1958}}
* [[Jean-Marie Apostolidès]], ''Le Roi-machine. Spectacle et politique au temps de {{Louis XIV}}'', Minuit, 1981. Sur la mise en scène du pouvoir royal.
* {{Ouvrage|auteur1=[[Françoise Bayard]]|titre=Le monde des financiers au {{s-|XVII}}|lieu=Paris|éditeur=[[Groupe Flammarion|Flammarion]]|année=1988|id=Bayard 1988}}.
* [[Lucien Bély]], ''{{Louis XIV}} : le plus grand roi du monde'', Gisserot, {{coll.}} Histoire, 2005 {{ISBN|978-2-87747-772-7}}.
* [[Lucien Bély]], ''Les secrets de {{Louis XIV}}'', Tallandier, 2013 {{ISBN|978-2847349214}}.
* {{Ouvrage|langue=fr|auteur1=[[Lucien Bély]]|directeur1=oui|titre=Dictionnaire {{Louis XIV}}|lieu=Paris|éditeur=[[Éditions Robert Laffont]]|collection=Bouquins|année=2015|pages totales=1405|isbn=978-2-221-12482-6|présentation en ligne=https://www.cairn.info/revue-histoire-economie-et-societe-2016-1-page-102.htm#pa30}}.
* [[Yves-Marie Bercé]], ''{{Louis XIV}}'', Cavalier Bleu {{coll.}} Idées reçues, 2005 {{ISBN|978-2-84670-122-8}}
* {{article|auteur=Christian Biet|titre=Molière et l'affaire Tartuffe (1664-1669)|périodique=Histoire de la justice|numéro=23|date=2013|passage=65-79|lire en ligne=|id=Biet 2013}}
* [[Faruk Bilici]], ''{{Louis XIV}} et son projet de conquête d'[[Istanbul]]'', Turk Tarih Kurumu, 2004 {{ISBN|978-975-16-1701-9}}.
* [[Peter Burke (historien)|Peter Burke]], ''{{Louis XIV}} : les stratégies de la gloire'', Seuil, 2007 ({{1re|édition}} 1995) {{ISBN|978-2-7578-0294-6}} {{plume}}.
* {{chapitre|auteur=Emmanuel Bury|titre chapitre=Lire et écrire dans le royaume de France au Grand siècle|titre ouvrage=Le siècle de {{Louis XIV}}|année=2017|id=Bury 2017|plume=oui}}
* {{Ouvrage|langue=fr|auteur1=Louis-Marie Blanchard|auteur2=Élise Blanchard|titre=L'Exploration de l'Amérique du nord|lieu=Paris|éditeur=Paulsen|année=2006|pages totales=364|isbn=978-2-916552-77-4|id=Blanchard 2006|plume=oui}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[François Bluche]]|titre=Au Temps de {{Louis XIV}}|sous-titre=Le Roi-Soleil et son siècle|éditeur=[[Hachette Livre|Hachette]]|collection=Vie quotidienne|année=1994|pages totales=363|isbn=|plume=oui}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[François Bluche]]|titre={{Louis XIV}}|lieu=Paris|éditeur=[[Librairie Arthème Fayard|Fayard]]|année=1986|pages totales=1039|isbn=|id=Bluche 1986|plume=oui}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[François Bluche]]|titre=Dictionnaire du Grand Siècle (1589-1715)|lieu=Paris|éditeur=[[Librairie Arthème Fayard|Fayard]]|année=2005|isbn=|id=Bluche 2005|plume=oui}}
* {{Ouvrage|langue=fr|prénom1=Jean-Philippe|nom1=Cénat|titre=Le roi stratège|sous-titre={{souverain-|Louis XIV}} et la direction de la guerre, 1661-1715|lieu=Rennes|éditeur=[[Presses universitaires de Rennes]]|collection=Histoire|année=2010|pages totales=386|isbn=978-2-7535-1093-7|doi=10.4000/books.pur.129252|présentation en ligne=https://journals.openedition.org/abpo/2212}}, {{lire en ligne|lien=https://www.cairn.info/revue-d-histoire-moderne-et-contemporaine-2011-4-page-207.htm|texte=présentation en ligne}}.
* [[Olivier Chaline]], ''Le Règne de {{Louis XIV}}'', Flammarion, 2005 {{ISBN|978-2-08-210518-7}}.
* {{Ouvrage|prénom1=Joël|nom1=Cornette|lien auteur1=Joël Cornette|directeur1=oui|titre=Chronique du règne de {{Louis XIV}}|lieu=Paris|éditeur=[[CDU Sedes|SEDES]]|collection=Regards sur l'Histoire|année=1997|isbn=|id=Cornette 1997|plume=oui}}
* {{article|auteur=[[Joël Cornette]]|titre=L'histoire au travail. Le nouveau {{citation|Siècle de {{Louis XIV}} : un bilan historiographique depuis vingt ans (1980-2000)}}|périodique=Histoire, économie, société|volume=19|numéro=4|date=2000|passage=561-605|id=Cornette 2000|plume=oui}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[Joël Cornette]]|directeur1=oui|titre=La mort de {{Louis XIV}} : apogée et crépuscule de la royauté|sous-titre={{Date-|1er septembre 1715}}|lieu=Paris|éditeur=[[Éditions Gallimard]]|collection=Les journées qui ont fait la France|année=2015|pages totales=367|isbn=|plume=oui}}
* [[André Corvisier]], ''La France de {{Louis XIV}}. Ordre intérieur et place en Europe ''SEDES, {{coll.}} Regards sur l'Histoire, 1994 {{ISBN|978-2-7181-3676-9}} {{plume}}.
* [[Vincent Cronin]], ''{{Louis XIV}}'', Perrin, 1967 {{ASIN|B0014XDEK0}} {{plume}}.
* {{Ouvrage|langue=fr|auteur1=Patrick Daguenet|titre=Marie-Angélique de Fontanges|sous-titre=La dernière passion du Roi-Soleil|lieu=Paris|éditeur=[[Éditions Perrin]]|année=2021|pages totales=500|isbn=978-2-262-09569-7}}
* Hélène Delalex, Alexandre Maral, Nicolas Milovanovic, ''{{Louis XIV}} pour Les Nuls'', Paris, First, 2011.
* Hélène Delalex, « Les amours de {{Louis XIV}} », dans la revue ''Château de Versailles. De l'ancien Régime à nos jours'', {{Numéro}}5, avril-{{Date-|juin 2012}}, {{p.|14-24}}.
* {{Ouvrage|langue=fr|auteur1=Delalex|titre={{Louis XIV}} intime|lieu=Paris|éditeur=[[Éditions Gallimard]]|année=2015|pages totales=191|isbn=978-2-07-014959-9|id=Delalex 2015|plume=oui}}
* {{Ouvrage|auteur1=Éric Deschodt|titre={{Louis XIV}}|lieu=Paris|éditeur=[[Éditions Gallimard|Gallimard]]|année=2008|isbn=|id=Deschodt 2008|plume=oui}}
* {{Ouvrage|langue=fr|prénom1=Daniel|nom1=Dessert|titre=Argent, pouvoir et société au Grand Siècle|lieu=Paris|éditeur=[[Librairie Arthème Fayard|Fayard]]|année=1984|pages totales=824|isbn=2-213-01485-X|présentation en ligne=https://www.persee.fr/doc/rhmc_0048-8003_1987_num_34_1_1398_t1_0154_0000_1|id=Dessert 1984|plume=oui}}
* {{Ouvrage|auteur1=Daniel Dessert|titre=La Royale, Vaisseaux et marins du Roi-Soleil|lieu=Paris|éditeur=[[Librairie Arthème Fayard|Fayard]]|année=1996|isbn=|id=Dessert 1996|plume=oui}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[Tidiane Diakité]]|titre={{Louis XIV}} et l'Afrique noire|lieu=Paris|éditeur=[[Arléa]]|année=2013|pages totales=233|isbn=|présentation en ligne=https://www.arlea.fr/Louis-XIV-et-l-Afrique-noire|id=Diakité 2013|plume=oui}}
* {{Ouvrage|langue=fr|auteur1=[[Sven Externbrink]]|directeur1=oui|auteur2=Charles-Édouard Levillain|directeur2=oui|titre=Penser l'après {{Louis XIV}}|sous-titre=histoire, mémoire, représentation (1715-2015)|lieu=Paris|éditeur=Honoré Champion|collection=Les dix-huitièmes siècles|année=2018|pages totales=319|isbn=978-2-7453-4806-7|plume=oui}}
* Stéphane Guerre, ''Louis XIV'', PUF, 2022.
* {{article|auteur=Alain Guéry|titre=Industrie et Colbertisme ; les origines de la forme française de la politique industrielle ?|périodique=Histoire, économie & société|volume=8|numéro=3|date=1989|id=Guéry 1989|plume=oui}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[Pierre Goubert]]|titre=Le Siècle de {{Louis XIV}}|lieu=Paris|éditeur=Livre de poche|année=1998|isbn=|id=Goubert 1998|plume=oui}}
* [[Hervé Hasquin]], ''{{Louis XIV}} face à l'Europe du Nord'', Racines, {{coll.}} Racines de l'Histoire, 1995 {{ISBN|978-2-87386-390-6}}.
* Ragnhild Hatton, ''L'Époque de {{Louis XIV}}'', Flammarion, 1992 ({{1re|édition}} 1969) {{ISBN|978-2-08-060990-8}}.
* {{Ouvrage|auteur1=Gilles Havard|auteur2=Cécile Vial|titre=Histoire de l'Amérique français|lieu=Paris|éditeur=[[Groupe Flammarion|Flammarion]]|année=2019|isbn=|id=Havard 2019|plume=oui}}
* Oscar Jané, ''{{Louis XIV}} et la Catalogne : de la politique au sud de l'Europe au {{s-|XVII}}'', Presses universitaires de Perpignan, 2017.
* {{Ouvrage|auteur1=Herbert Lüthy|titre=Le passé présent. Combats d'idées de Calvin à Rousseau|éditeur=Éd. du Rocher|année=1965|id=Lüthy 1965|plume=oui}}
* {{Ouvrage|langue=fr|langue originale=en|auteur1=[[John A. Lynn]]|traducteur=Bruno Demangeot|titre=Les Guerres de {{Louis XIV}}|lieu=Paris|éditeur=[[Éditions Perrin]]|collection=Tempus|année=2014|pages totales=561|isbn=978-2-262-04755-9|plume=oui}}
* Christophe Levantal, ''{{Louis XIV}}. Chronographie d'un règne'', Infolio, 2009{{ISBN|978-2-88474-151-4}}.
* [[Robert Mandrou]], ''{{Louis XIV}} en son temps'', PUF, {{coll.}} Peuples et Civilisations, 1990 {{ISBN|978-2-13-035864-0}} {{plume}}
* [[Philip Mansel]], ''{{Louis XIV}}, roi du monde'', Passés / Composés, 2020.
* {{Ouvrage|auteur1=[[Alexandre Maral]]|titre=Le Roi-Soleil et Dieu|sous-titre=essai sur la religion de {{Louis XIV}}|lieu=Paris|éditeur=[[Éditions Perrin]]|année=2012|isbn=|id=Maral 2012|plume=oui}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[Alexandre Maral]]|titre=Les derniers jours de {{Louis XIV}}|éditeur=[[Éditions Perrin]]|année=2014|isbn=|id=Maral 2014|plume=oui}}
* Henri Méchoulan, Joël Cornette (dir.), ''L'État classique, 1652-1715 : regards sur la pensée politique de la France dans le second {{s-|XVII}}'', Vrin, 1996
* {{Ouvrage|auteur1=[[Hubert Méthivier]]|titre=Le Siècle de {{Louis XIV}}|éditeur=[[Presses universitaires de France|PUF]]|collection=Que sais-je|année=1995|pages totales=441|isbn=978-2-253-90545-5|plume=oui}}
* {{Ouvrage|langue=en|auteur1=Ellen M. Mcclure|titre=Sunspots and the Sun King|lieu=Urbana and Chicago|éditeur=[[University of Illinois Press]]|année=2006|isbn=|id=Mcclure 2006|plume=oui}}
* [[Jean Meyer (historien, 1924)|Jean Meyer]], ''1638, La Naissance de {{Louis XIV}}'', Complexe, {{coll.}} Mémoire des siècles, 1989 {{ISBN|978-2-87027-303-6}}, [https://books.google.fr/books?id=mv1EbLIHOsgC&lpg=PP1&dq=isbn%3A2870273037&hl=fr&pg=PP1#v=onepage&q&f=false Extraits en ligne] {{plume}}
* Nicolas Milovanovic, Alexandre Maral (dir.), ''{{Louis XIV}}, l'homme et le roi'', le catalogue d'exposition, [[Versailles]], musée national du château, {{Date-|19 octobre 2009}} - {{Date-|7 février 2010}}, Paris, Skira Flammarion, 2009.
* {{article|titre=Les brouillons de l'absolutisme : les "mémoires" de {{Louis XIV}} en question|auteur1=Stanis Perez|journal=Dix-septième siècle|date=2004|volume=1|numéro=222|id=Perez 2004|plume=oui}}
* {{Ouvrage|auteur1=Michel Pernot|titre=La Fronde (1648-1653)|lieu=Paris|éditeur=[[Éditions Tallandier]]|année=2012|isbn=|id=Pernot 2012|plume=oui}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[Jean-Christian Petitfils]] (éd.)|titre=Le Siècle de {{Louis XIV}}|lieu=Paris|éditeur=[[Éditions Perrin]]|année=2017|isbn=|plume=oui}}
* {{Ouvrage|auteur1=[[Jean-Christian Petitfils]]|titre={{Louis XIV}}|lieu=Paris|éditeur=[[Éditions Perrin]]|année=2002|isbn=|id=Petitfils 2002|plume=oui}}
* {{Ouvrage|langue=fr|auteur1=[[Jean-Christian Petitfils]]|titre={{Louis XIV}}|lieu=Paris|éditeur=[[Éditions Perrin]]|année=2021|pages totales=1028|isbn=978-2-262-09739-4}} (nouvelle édition)
* {{Ouvrage|auteur1=[[Jean-Christian Petitfils]]|titre=Louise de la Vallière|lieu=Paris|éditeur=[[Éditions Perrin]]|année=2002|isbn=|id=Petitfils2002a|plume=oui}}
* {{Ouvrage|auteur1=Guillaume Poisson|titre=18 novembre 1663|sous-titre={{Louis XIV}} et les cantons suisses|éditeur=Presses polytechniques et universitaires romandes|année=2016|pages totales=140|isbn=}}.
* {{chapitre|auteur=[[Jean-Pierre Poussou]]|titre chapitre=Une économie en mouvement|titre ouvrage=Le siècle de {{Louis XIV}}|année=2017|id=Poussou 2017|plume=oui}}
* {{chapitre|auteur=[[Jean-Pierre Poussou]]|titre chapitre=Une grande et fragile agriculture|titre ouvrage=Le siècle de {{Louis XIV}}|année=2017|id=Poussou 2017a|plume=oui}}
* {{chapitre|titre ouvrage=The Catholic Encyclopedia|volume=2|lieu=New York|éditeur=Robert Appleton Company|nom=Roy|prénom=Joseph Edmond|titre chapitre=Antoine-Lefebvre, Sieur de la Barre|année=1907|url=http://www.newadvent.org/cathen/02308b.htm|consulté le=13 8 2018|plume=oui}}
* [[Gérard Sabatier]], ''Versailles ou la figure du roi'', Albin Michel, {{coll.}} « Bibliothèque des idées », 1999 {{ISBN|978-2-226-10472-4}}.
* {{Ouvrage|langue=fr|auteur1=[[Thierry Sarmant]]|auteur2=Mathieu Stoll|titre=Régner et gouverner|sous-titre={{Louis XIV}} et ses ministres|lieu=Paris|éditeur=[[Éditions Perrin]]|collection=Pour l'histoire|année=2010|pages totales=661|isbn=978-2-262-02560-1|présentation en ligne=https://www.cairn.info/revue-histoire-economie-et-societe-2012-2-page-137.htm#pa5}}, {{lire en ligne|lien=https://www.erudit.org/fr/revues/histoire/2012-v31-n1-histoire0205/1011686ar/|texte=présentation en ligne}}, {{lire en ligne|lien=https://www.lhistoire.fr/livres/r%C3%A9gner-et-gouverner-louis-xiv-et-ses-ministres|texte=présentation en ligne}}. {{commentaire biblio|Réédition : {{Ouvrage|langue=fr|auteur1=[[Thierry Sarmant]]|auteur2=Mathieu Stoll|titre=Régner et gouverner|sous-titre={{Louis XIV}} et ses ministres|lieu=Paris|éditeur=[[Éditions Perrin]]|collection=Tempus|numéro dans collection=739|année=2019|pages totales=888|format livre=poche|isbn=978-2-262-08029-7|présentation en ligne=https://clio-cr.clionautes.org/regner-et-gouverner-louis-xiv-et-ses-ministres-2.html}}.}}
* {{Ouvrage|langue=fr|auteur1=[[Thierry Sarmant]]|titre={{Louis XIV}}|sous-titre=homme et roi|lieu=Paris|éditeur=[[Éditions Tallandier|Tallandier]]|année=2012|pages totales=605|isbn=978-2-84734-722-7|id=Sarmant 2012|plume=oui}}
* [[Béatrix Saule]], ''La journée de {{Louis XIV}}, {{Date-|16 novembre 1700}}'', Actes Sud, 2003 {{ISBN|978-2-742-74279-0}}.
* {{Chapitre|auteur=[[Jacques Scherer]]|titre chapitre=La littérature dramatique sous {{Louis XIV}}|titre ouvrage=Histoire des littératures|tome=3|collection=Encyclopédie de la Pléiade|lieu=Paris|année=1958|passage=301-333|id=Scherer 1958|plume=oui}}
* Jean Schillinger (dir.), ''{{Louis XIV}} et le Grand Siècle dans la culture allemande après 1715'', PUN-Éditions universitaires de Lorraine, 2012
* {{Chapitre|auteur=Ph. Van Tieghem|titre chapitre=Les prosateurs du {{s-|XVII}}|titre ouvrage=Histoire des littératures|tome= 3|collection=Encyclopédie de la Pléiade|lieu=Paris|année=1958|passage=407-518|id=Van Tieghem 1958|plume=oui}}
* [[Voltaire]], [http://visualiseur.bnf.fr/CadresFenetre?O=NUMM-72771&M=imageseule ''Le siècle de {{Louis XIV}}''], 1751 {{plume}}.
* [https://archive.org/details/mmoiresdumarqu01souruoft Mémoires du marquis de Sourches sur le règne de {{souverain-|Louis XIV}}, publiés par le comte Gabriel-Jules de Cosnac et Arthur Bertrand, volume 1 ({{date-|septembre 1681}}-{{date-|décembre 1686}})], [https://archive.org/details/mmoiresdumarqu02souruoft volume 2 ({{date-|janvier 1687}}-{{date-|décembre 1688}})], [https://archive.org/details/mmoiresdumarqu03souruoft volume 3 ({{date-|janvier 1689}}-{{date-|décembre 1691}})], [https://archive.org/details/mmoiresdumarqu04souruoft volume 4 ({{date-|janvier 1692}}-{{date-|juin 1695}})], [https://archive.org/details/mmoiresdumarqu05souruoft volume 5 ({{date-|juillet 1695}}-{{date-|décembre 1697}})], [https://archive.org/details/mmoiresdumarqu06souruoft volume 6 ({{date-|janvier 1698}}-{{date-|décembre 1700}})], [https://archive.org/details/mmoiresdumarqu07souruoft volume 7 ({{date-|janvier 1701}}-{{date-|décembre 1702}})], [https://archive.org/details/mmoiresdumarqu08souruoft volume 8 ({{date-|janvier 1703}}-{{date-|juin 1704}})], [https://archive.org/details/mmoiresdumarqu09souruoft volume 9 ({{date-|juillet 1704}}-{{date-|décembre 1705}}], [https://archive.org/details/mmoiresdumarqu10souruoft volume 10 ({{date-|janvier 1706}}-{{date-|décembre 1707}})], [https://archive.org/details/mmoiresdumarqu11souruoft volume 11 ({{date-|janvier 1708}}-{{date-|juin 1709}})], [https://archive.org/details/mmoiresdumarqu12souruoft volume 12 ({{date-|juillet 1709}}-{{date-|décembre 1710}})], [https://archive.org/details/mmoiresdumarqu13souruoft volume 13 ({{date-|janvier 1711}}-{{date-|décembre 1712}})].
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=== Articles connexes ===
{{Catégorie principale|Louis XIV|{{Louis XIV}}}}
{{Autres projets
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}}

==== Famille ====
* [[Descendance de Louis XIV|Descendance de {{Louis XIV}}]] (ébauche de tableau de descendance)
* [[Généalogie des Bourbons]]
* [[Homme au masque de fer]]

==== Histoire générale ====
* [[Chronologie de la France sous Louis XIV|Chronologie de la France sous {{Louis XIV}}]]
* [[Formation territoriale de la France]]
* [[Guerres de Louis XIV|Guerres de {{Louis XIV}}]]
* [[Histoire de France au XVIIe siècle|Histoire de France au {{s-|XVII}}]]
* [[Histoire de la marine française de Richelieu à Louis XIV|Histoire de la marine française]]
* [[Société d'Ancien Régime]]

==== Politique ====
* [[Absolutisme]]
* [[Aménagement de la France au XVIIIe siècle|Aménagement de la France au {{s-|XVIII}}]]
* [[Dragonnades]]
* [[Jean-Baptiste Colbert]]
* [[Ministres de Louis XIV|Ministres de {{Louis XIV}}]]
* [[Politique anti-protestante de Louis XIV|Politique anti-protestante de {{Louis XIV}}]]

==== La cour ====
* [[Étiquette à la cour de France]]
* [[Us et coutumes à la cour de Versailles]]

==== Divertissements royaux ====
* [[Fêtes à Versailles]]

==== Versailles ====
* [[Château de Versailles]]
* [[Galerie des Glaces]]
* [[Grands Appartements du château de Versailles|Grands Appartements]]
* [[Grand Trianon]]
* [[Jardin de Versailles]]
* [[Orangerie du château de Versailles|Orangerie]]
* [[Parc de Versailles]]

==== Personnalités de son règne ====
{{colonnes|taille=25|
* [[Anne d'Autriche (1601-1666)|Anne d'Autriche]]
* [[Marie-Thérèse d'Autriche (1638-1683)|Marie-Thérèse d'Autriche]]
* [[André Le Nôtre]]
* [[Anne Hilarion de Costentin de Tourville|Anne Hilarion de Costentin, comte de Tourville]], maréchal de France
* [[Antoine Arnauld (1612-1694)|Antoine Arnauld]]
* [[Antonin Nompar de Caumont|Antonin Nompar de Caumont, duc de Lauzun]]
* [[D'Artagnan]]
* [[Blaise Pascal]]
* [[Charles Le Brun]]
* [[Charles Perrault]]
* [[Claude Louis Hector de Villars]]
* [[Élisabeth-Charlotte de Bavière|Élisabeth-Charlotte de Bavière, dite la Princesse Palatine]]
* [[François d'Aix de La Chaise|François d'Aix de La Chaise, dit le père La Chaise]]
* [[Madame de Maintenon|Françoise d'Aubigné, marquise de Maintenon]]
* [[François Michel Le Tellier de Louvois]]
* [[Gabriel Nicolas de La Reynie]]
* [[Henri de La Tour d'Auvergne (vicomte de Turenne)|Henri de La Tour d'Auvergne, vicomte de Turenne]]
* [[Jacques-Bénigne Bossuet]]
* [[Jean Bart]]
* [[Jean de La Bruyère]]
* [[Jean de La Fontaine]]
* [[Jean Racine]]
* [[Jean-Baptiste Colbert]]
* [[Jean-Baptiste Lully]]
* [[Jules Hardouin-Mansart]]
* [[Jules Mazarin]]
* {{Souverain2|Louis II de Bourbon-Condé|de Condé, dit le Grand Condé}}
* [[Louis Le Vau]]
* [[Louis de Rouvroy de Saint-Simon]]
* [[Madame de Montespan]]
* [[Madame de Sévigné]]
* [[Michel Le Tellier (homme d'État)|Michel Le Tellier]]
* [[Michel-Richard de Lalande]]
* [[Molière]]
* [[Nicolas Fouquet]]
* [[Philippe d'Orléans (1640-1701)|Philippe de France]]
* [[Pierre Corneille]]
* [[Pierre Mignard]]
* [[Pierre Séguier]]
* [[Sébastien Le Prestre de Vauban]]
}}

=== Liens externes ===
{{Liens}}
* [http://www.frontenac-ameriques.org/louis-de-frontenac/article/la-chapelle-royale-saint-louis Acte de naissance (ondoiement) et de baptême de {{Louis XIV}} avec leurs transcriptions]
* [https://artsandculture.google.com/story/HQWxVK3QbG1gdw Exposition en ligne sur Louis XIV]
* [https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/les-nuits-de-france-culture/l-estrade-de-l-histoire-presente-le-roi-soleil-au-clair-de-lune-radio-pastiche-de-1959-6786994 L'Estrade de l'Histoire présente "Le Roi-Soleil au Clair de Lune] Radio-Pastiche 1959 ; sur le site de Radio France (consulté le 15 août 2023) 

{{Palette|Rois de France|Saint-Louis Louis XIV|Maison de Bourbon|Louis XIV}}
{{Portail|XVIIe siècle|XVIIIe siècle|royaume de France|France du Grand Siècle|château de Versailles|monarchie}}
{{Bon article|oldid=165332862|date=11 décembre 2019}}

{{CLEFDETRI:Louis France 14}}
[[Catégorie:Louis XIV| ]]
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