Acidification des sols

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L’acidification des sols est une notion importante en agriculture et sylviculture car c'est un processus influençant la fertilité des sols cultivables et augmentant la biodisponibilité de certains toxiques (métaux lourds) naturellement ou artificiellement présent dans les sols.

Bien que l'acidification soit naturelle dans certains contextes géomorphologiques (ex : tourbière acide), l’homme, par ses activités (pollution atmosphérique, engrais, activités minières…), peut fortement l'aggraver. Les sols artificiellement acidifiés sont plus vulnérables à l'érosion. Et de nombreux polluants y sont plus actifs, car plus biodisponibles. La part des acides naturels (acides organiques essentiellement) et des acides d'origine anthropique pourrait jouer un rôle [1] dans la gravité des effets environnementaux et sanitaires.

Tendances et variation globale des pH des sols dans le monde
 : sols acides ou acidifiés
 : pH plutôt neutre
 : sols alcalins
■ : absence de données.
En Europe, les efforts de diminution des intrants et retombées acides (fuel, gaz désoufrés, recul du charbon) ont porté leurs fruits (pour le SO2 et certains COV notamment, et moindrement pour les NOx (à cause des transports et des engrais), et NH3). Les dépassements de la « charge crititique » de retombées acide sont en diminution (unité : eq ha-1a-1). Attention, sur cette carte de l'Agence européenne pour l'environnement, les valeurs pour 2010 (carte de droite) étaient les valeurs-cibles prévues par l'adhésion à la mise en œuvre de la directive NEC (ces cibles peuvent ne pas avoir été atteintes)[2].

Éléments de définition

L'acidité d'un sol se définit par son potentiel hydrogène (pH).
En dessous d'un certain seuil (~6 sur l'échelle pH), le sol est trop acide pour la plupart des plantes cultivées : il limite l'activité biologique (fertilité) et sa structure même est dégradée. En effet, l'acidité a une influence sur l’assimilation des nutriments et oligo-éléments par une plante, ainsi que sur la présence des racines profondes ou des vers de terre qui structurent et aèrent le sol. De plus dans un sol acide, les métaux lourds et radionucléides sont beaucoup plus mobiles et bioassimilables (voir biodisponibilité).

Les résineux, quand ils sont densément présents, acidifient naturellement la litière et le sol sous les arbres (voire au-delà si ruissellement) ce qui entraîne à la longue une stérilisation d'abord superficielle puis plus profonde. Le sous-sol superficiel capte moins de carbone et perd une partie de sa vie biologique (moindre présence de micro-organismes, de vers de terre, de larves… traditionnels des sols arables). Seules les plantes acidophiles résistent ou s'installent (lierre, myrtille, certains lichens et champignons…). Il en va de même dans les zones humides avec les tourbières à sphaignes, dont l'acidité sélectionne quelques espèces de plantes acidiphiles (ex : molinie bleue, bruyères…, dont certaines remarquables par leurs adaptations (ex : droseras).

Avec la valorisation moderne des déchets dégradables par les particuliers pour faire du compost il est à noter que le placement du composteur sous un résineux (donc sur un sol acide dépourvu de vers) nécessitera un apport de vers appropriés pour que le compostage se réalise.

En agriculture

Les sols pauvres en calcaire (granitique, schisteux et tourbeux) sont très sensibles à l'acidification. L'agriculteur (comme le jardinier) peut corriger un « excès » (« excès » devant ici être entendu du point de vue de la rentabilité agronomique, car les sols naturellement plus acides peuvent aussi présenter une haute biodiversité ou des espèces plus rares) d'acidité par épandage de chaux, appelé « chaulage »[3], avec un dosage qui peut être calculé après analyse du pH du sol.

Les indications nécessaires sont le pH du sol, sa capacité d'échange cationique (CEC) ainsi que l'état de saturation de la CEC par les ions autres que hydrogène. Une augmentation du pH vise un pH de 6,5 à 7, cependant, il n'est pas conseillé d'augmenter le pH de plus d'une unité car la vie microbienne du sol en serait fortement affectée. La vie du sol est en effet directement impactée par un excès d'acide comme par un excès de base.

En sylviculture

L'acidification de sols déjà naturellement acides, par exemple importante en Europe du Nord, conduit à fragiliser les écosystèmes forestiers.

Le chaulage par hélicoptère ou au sol de sols et lacs acidifiés a été testé.
Il semble au moins provisoirement pouvoir favoriser les populations et l'activité de certains champignons mycorhizateurs (ex: Clavulina cristata (à forte activité glucuronidase), Lactarius subdulcis (à forte activité laccase) ou Xerocomus pruinatus caractérisé par une importante activité leucine-aminopeptidase[4]).

Toxicologie, écotoxicologie

Dans un milieu naturel ou sur les sites et sol pollués, certains éléments toxiques posent des problèmes de toxicité aggravés, car ils sont mieux solubilisés grâce aux pH faibles. C'est le cas du plomb (facteur de saturnisme pour l'homme, mais aussi de saturnisme animal, qui peut notamment toucher les espèces-gibier. C'est aussi le cas de l'aluminium (on parle alors de « toxicité aluminique »), de radionucléides, etc.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

Bibliographie

Références

  1. Collier, K. J., Ball, O. J., Graesser, A. K., Main, M. R., & Winterbourn, M. J. (1990). Do organic and anthropogenic acidity have similar effects on aquatic fauna?. Oikos, 33-38 (résumé)
  2. (en) Agence européenne pour l'environnement, Exceedance of critital loads of acidity, Carte présentant les changements dans l'exposition des écosystèmes européens à l'acidification (c.-à-d. là où la limite critique pour l'acidification est dépassée). Les valeurs pour 2010 sont calculées sur la base de l'application de la directive NEC (Directive 2001/81/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2001 fixant les plafonds d'émission nationaux pour certains polluants atmosphériques. En Chine, à cause de l'utilisation généralisée du charbon, les phénomènes de type pluies acides perdurent.
  3. http://www.pleinchamp.com/elevage/bovins-viande/actualites/chaulage-maintenir-le-ph-du-sol-des-prairies-permanentes-au-dessus-de-5
  4. François Rineau and Jean Garbaye, Does forest liming impact the enzymatic profiles of ectomycorrhizal communities through specialized fungal symbionts ? ; Mycorrhiza Volume 19, Number 7, 493-500, DOI: 10.1007/s00572-009-0249-y ([1])