Jigai
Jigai (自害 ) est la forme de suicide rituel pratiqué essentiellement par les femmes, notamment les épouses et les filles des samouraïs.
Le mot est devenu célèbre en Occident après qu'il eut été mal compris par Lafcadio Hearn (1923) comme l'équivalent féminin du seppuku (forme rituelle de suicide masculin )[1],[2].
Description
[modifier | modifier le code]Lors de la période féodale, « n'ayant pas le droit de se faire seppuku à la manière des hommes, elles se tranchaient la gorge avec un poignard[3],[4] après s'être entravé les jambes afin de garder dans la mort une attitude décente[5]. »
Les rites cérémoniaux n’étaient pas les mêmes que pour les hommes. Contrairement au seppuku, le suicide féminin pouvait se pratiquer seul. La section de la veine jugulaire[6] ou l'artère carotide[7], entraînait une mort rapide. Le petit poignard utilisé était un tanto ou plutôt un kaiken[6], plus petit, que la femme portait toujours sur elle. Cette pratique était normalement réservée aux femmes nobles et de samouraïs. Un jeune garçon qui n'a pas passé son genpuku pouvait aussi pratiquer le jigai.
Cette forme de suicide ne s'effectuait que dans certaines situations[7] :
- en période de guerre, afin de préserver son honneur, avant l'arrivée des ennemis et en cas de défaite imminente ;
- une épouse de samouraï était sous l'entière responsabilité de son époux, et non pas de son seigneur. Si son mari venait à mourir, elle pratiquait le jigai en guise de loyauté, afin de le rejoindre dans l'autre monde ;
- parfois les servantes travaillant chez les familles nobles se donnaient la mort par jigai, à la suite de cruelles intrigues ou en signe de loyauté envers leur maîtresse ;
- dans les temps anciens, il était de coutume que les femmes d'officiers condamnés à mort les précèdent en pratiquant le jigai ;
- chez les femmes de samouraïs, en guise de protestation morale contre un mari dont le comportement serait intolérable.
Un des derniers fameux exemples de jigai est celui de la femme du général Nogi Maresuke, Nogi Shizuko, qui s'est suicidée de cette façon avec son mari qui lui s'est fait seppuku à la mort de l'empereur Meiji en 1912[8],[9].
Références
[modifier | modifier le code]- Page 203 in Lafcadio Hearn: Japan's great interpreter : a new anthology of his writings, 1894-1904, Lafcadio Hearn, Louis Allen, Jean Wilson, Routledge, 1992.
- Joshua S. Mostow Iron Butterfly Cio-Cio-San and Japanese Imperialism dans A Vision of the Orient: Texts, Intertexts, And Contexts of Madame Butterfly J. L. Wisenthal 2006 -page 190 « Lafcadio Hearn, in his Japan: An Interpretation of 1904, wrote of 'The Religion of Loyalty': In the early ages it appears to have been … jigai [lit., 'self-harm,' but taken by Hearn to mean the female equivalent of seppuku], byway of protest against … ».
- Elles utilisaient alors un petit poignard du type koshigatana sans garde: un aikuchi mais le plus souvent un plus petit kaiken (anc. kwaiken) (lit. « giron/poche (KAI, futokoro)+ couteau » : car elles le conservaient dans un des plis de leur kimono). Voir page 405 in A glossary of the construction, decoration and use of arms and armor in all countries and in all times, George Cameron Stone, Donald J. LaRocca, Courier Dover Publications, 1999.
- Voir aussi page 32 in Japanese Sword Mounts, Helen C Gunsaulus, Read Books, 2008 sur le kaiken et son usage dans le suicide des femmes de samourais.
- Tiré de l'article jigai, page 490 in Le Japon, dictionnaire et civilisation, Louis Frédéric, coll. « Bouquins », Robert Laffont, 1996.
- The Role of the Arms-Bearing Women in Japanese History by Ellis Amdur.
- The Religion of Loyalty Japan, an attempt at interpretation, by Lafcadio Hearn, The Macmillan Company, New York [1904]. p. 288-291.
- « when the Emperor Meiji died in 1912, the old general and his wife committed suicide (harakiri and jigai respectively) » (page 319 in Man's religions, John Boyer Noss, 6e édition Macmillan, 1980).
- « At the same time, and in the same room, Lady Nogi performed jigai. Here the purpose was that they might together continue their services to their beloved Emperor » (page 142 in Case history of Japan, Thomas Reginald Guise Lyell, Sheed & Ward, 1948).