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« Technologies et vieillissement » : différence entre les versions

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Dans les sociétés en réseaux actuelles, caractérisées par la dissémination et l’usage intensif des TIC (technologies d’information et de communication), les sujets « idéaux » sont relativement jeunes et branchés<ref>Sawchuk & Crow 2012a</ref>. D’une part, les avancées technologiques sont perçues pour l’aide qu’elles peuvent apporter aux aînés (voir par exemple [[gérontechnologie]]). D’autre part, cet accent sur la santé et l’« amélioration » des aînés les situe dans une perspective de vulnérabilité et néglige d’autres aspects relationnels, pratiques et ludiques de ces technologies.
{{À wikifier|date=avril 2015}}

Dans les sociétés en réseaux actuelles, caractérisées par la dissémination et l’usage intensif des TIC (technologies d’information et de communication), les sujets « idéaux » sont relativement jeunes et branchés<ref>Sawchuk, K., & Crow, B. (2010). Into the grey zone: Seniors, cell phones and milieus that matter. In B. Poppinga (ed.), Observing the mobile user experience: Proceedings of the {{1st}} international workshop held in conjunction with NordiCHI ({{p.|17–20}}). Oldenburg, Germany: HaptiMap. Retrieved from http://omue10.offis.de/files/OMUE10-Proceedings.pdf.</ref>. D’une part, les avancées technologies sont perçues pour l’aide qu’elles peuvent apporter aux aînés (voir par exemple [[gérontechnologie]]). D’autre part, cet accent sur la santé et l’« amélioration » des aînés les situe dans une perspective de vulnérabilité et néglige d’autres aspects relationnels, pratiques et ludiques de ces technologies.




== Vie sociale et personnelle ==
== Vie sociale et personnelle ==
Bien que les réseaux soient d’anciennes formes d’organisation sociale, ils en sont devenus une forme centrale au cours des dernières décennies, avec la diffusion des technologies d’information et de communication<ref name="Castells">Castells, M. (2000). Materials for an exploratory theory of the network society. British Journal of Sociology, 51, 5-24.</ref>. La flexibilité et la communication éphémère des réseaux se remarquent au niveau de la mondialisation (i.e. marchés financiers, États), mais se retrouvent également sur le plan culturel, dans une culture organisée autour de systèmes intégrés de médias électroniques et numériques. C’est ce qui explique une certaine exclusion des gens qui se situent en dehors de ces réseaux; ce qui ne fait pas partie des réseaux étant ignoré par ceux-ci<ref name="Castells" />. Plusieurs projets mentionnés plus bas tentent d’intégrer les aînés aux réseaux ou de créer des réseaux alternatifs.
Bien que les réseaux soient d’anciennes formes d’organisation sociale, ils en sont devenus une forme centrale au cours des dernières décennies, avec la diffusion des technologies d’information et de communication<ref name="Castells">Castells 2000</ref>. La flexibilité et la communication éphémère des réseaux se remarquent au niveau de la mondialisation (i.e. marchés financiers, États), mais se retrouvent également sur le plan culturel, dans une culture organisée autour de systèmes intégrés de médias électroniques et numériques. C’est ce qui explique une certaine exclusion des gens qui se situent en dehors de ces réseaux; ce qui ne fait pas partie des réseaux étant ignoré par ceux-ci<ref name="Castells" />. Plusieurs projets mentionnés plus bas tentent d’intégrer les aînés aux réseaux ou de créer des réseaux alternatifs.


=== Technologies au quotidien ===
=== Technologies au quotidien ===
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== Technologies de communication, accès et littératie ==
== Technologies de communication, accès et littératie ==
Depuis plusieurs années, dans les études communicationnelles, informatiques et médiatiques, des questions d’accès et d’appropriation des technologies, et leurs risques d’exclusion, ont été soulevées<ref name="Wyatt p63">Wyatt, S. 2003, « Non-Users Also Matter: The Construction of Users and Non-Users of the Internet », dans N. Oudshoorn et T. Pinch (dir.), How Users Matter: The Co-Construction of Users and Technology, Cambridge, MA, MIT Press, {{p.|67-80}}.</ref><ref>Jauréguiberry, F., 2010, « Les théories sur le non-usage des technologies de communication », texte présenté au colloque Regards croisés entre la sociologie de la communication et la sociologie des sciences et des techniques, 19-21 mai 2010, Namur (Belgique).</ref>. L’accès et l’inclusion dépendent de plusieurs éléments comme les coûts, le design, les opérateurs, et les occasions d’apprentissage<ref>Clement, A., & Shade, L. R. (2000). The access rainbow: Conceptualizing universal access to the information/communications infrastructure. In M. Gurstein (Ed.), Community informatics: Enabling communities with information and communications technologies ({{p.|1-20}}). Hershey, PA: Idea Group.</ref>. Cela fait en sorte que les aînés se retrouvent souvent plus ou moins exclus des avancées technologiques. Par exemple, des applications pour téléphone portable permettent de calculer le temps d’attente dans diverses situations (en indiquant les délais ou le rang). Cette idée profite plus ou moins aux personnes âgées, qui utilisent ces technologies en moins grand nombre, alors qu’elles fréquentent pourtant les cliniques et les hôpitaux de manière régulière<ref name="Parazelli">Karl Rettino Parazelli, Éviter le piège de l'âgisme numérique. Le Devoir, Économie, Actualités économiques, mardi 27 janvier 2015.</ref>.
Depuis plusieurs années, dans les études communicationnelles, informatiques et médiatiques, des questions d’accès et d’appropriation des technologies, et leurs risques d’exclusion, ont été soulevées<ref name="Wyatt p63">Wyatt 2003</ref><ref>Jauréguiberry 2010</ref>. L’accès et l’inclusion dépendent de plusieurs éléments comme les coûts, le design, les opérateurs, et les occasions d’apprentissage<ref>Clement & Shade 2000</ref>. Cela fait en sorte que les aînés se retrouvent souvent plus ou moins exclus des avancées technologiques. Par exemple, des applications pour téléphone portable permettent de calculer le temps d’attente dans diverses situations (en indiquant les délais ou le rang). Cette idée profite plus ou moins aux personnes âgées, qui utilisent ces technologies en moins grand nombre, alors qu’elles fréquentent pourtant les cliniques et les hôpitaux de manière régulière<ref name="Parazelli">Parazelli 2015</ref>.


Au Canada, en 2010, 29 % des personnes de 75 ans et plus et 60 % de celles de 65 à 74 ans avaient utilisé Internet au cours du mois précédent, tandis que l’utilisation d’Internet chez les personnes de 15 à 24 ans était presque universelle<ref>Statistiques Canada: http://www.statcan.gc.ca/pub/75-006-x/2013001/article/11768-fra.htm </ref>. Au Québec, 53 % des gens ont un téléphone intelligent dont 75% chez les 25-34 ans, 24% chez les 65-74 ans et 13% chez les 75 ans et plus<ref name="Parazelli" />.
Au Canada, en 2010, 29 % des personnes de 75 ans et plus et 60 % de celles de 65 à 74 ans avaient utilisé Internet au cours du mois précédent, tandis que l’utilisation d’Internet chez les personnes de 15 à 24 ans était presque universelle<ref>[http://www.statcan.gc.ca/pub/75-006-x/2013001/article/11768-fra.htm Statistiques Canada]</ref>. Au Québec, 53 % des gens ont un téléphone intelligent dont 75% chez les 25-34 ans, 24% chez les 65-74 ans et 13% chez les 75 ans et plus<ref name="Parazelli" />.
L’accès à l’information des aînés, important pour préserver leur indépendance et favoriser leur inclusion sociale, renvoie notamment à la littératie et à l’accessibilité numérique. La [[littératie]] est la capacité de comprendre et utiliser l’information écrite dans la vie courante et d'ainsi étendre ses connaissances (OCDE, [http://www.oecd.org/fr/education/innovation-education/39438013.pdf rapport]). Elle réfère donc à la fois à la faculté de reconnaître un besoin en information, à localiser les informations, les sélectionner et les organiser. Plus précisément, la littératie numérique désigne le savoir et les compétences utilisées à travers plusieurs outils communicationnels en réseau comme les téléphones intelligents, les ordinateurs et les tablettes. Certains chercheurs parlent aussi de [[translittératie]] qui tient compte de la variété des plateformes.
L’accès à l’information des aînés, important pour préserver leur indépendance et favoriser leur inclusion sociale, renvoie notamment à la littératie et à l’accessibilité numérique. La [[littératie]] est la capacité de comprendre et utiliser l’information écrite dans la vie courante et d'ainsi étendre ses connaissances (OCDE). Elle réfère donc à la fois à la faculté de reconnaître un besoin en information, à localiser les informations, les sélectionner et les organiser. Plus précisément, la littératie numérique désigne le savoir et les compétences utilisées à travers plusieurs outils communicationnels en réseau comme les téléphones intelligents, les ordinateurs et les tablettes. Certains chercheurs parlent aussi de [[translittératie]] qui tient compte de la variété des plateformes.


Pour une pleine participation des citoyens à la vie économique, culturelle et sociale, l'[[accessibilité numérique]] est requise et réfère à la mise en place de ressources numériques pour tous, donc de diminuer les différences d’accès selon la langue, le lieu, le matériel et les services disponibles, les aptitudes physiques et mentales, etc. Certains auteurs ont parlé d’une [[Fracture numérique (générationnelle)|fracture numérique générationnelle]] pour aborder des approches différentes face aux nouveaux médias entre les « jeunes » et les « vieux ». Celle-ci fait toutefois « cliché », étant donné l’hétérogénéité dans les cohortes, les périodes de la vie qui influencent l’intérêt vers les TIC, et le fait que l’âge ne soit qu’un seul élément dans l’habileté à les utiliser (l’habitude serait aussi très importante)<ref name="Loos">Loos, E. (2012). Senior citizens: Digital immigrants in their own country? Observatorio (OBS*) Journal, vol.6 - {{n°|1}}, 001-023.</ref>.
Pour une pleine participation des citoyens à la vie économique, culturelle et sociale, l'[[accessibilité numérique]] est requise et réfère à la mise en place de ressources numériques pour tous, donc de diminuer les différences d’accès selon la langue, le lieu, le matériel et les services disponibles, les aptitudes physiques et mentales, etc. Certains auteurs ont parlé d’une [[Fracture numérique (générationnelle)|fracture numérique générationnelle]] pour aborder des approches différentes face aux nouveaux médias entre les « jeunes » et les « vieux ». Celle-ci fait toutefois « cliché », étant donné l’hétérogénéité dans les cohortes, les périodes de la vie qui influencent l’intérêt vers les TIC, et le fait que l’âge ne soit qu’un seul élément dans l’habileté à les utiliser (l’habitude serait aussi très importante)<ref name="Loos">Loos 2012</ref>.
Eugène Loos, qui parle d’un spectre plutôt que d’une fracture, identifie d’ailleurs des présupposés par rapport aux aînés et aux TIC :
Eugène Loos, qui parle d’un spectre plutôt que d’une fracture, identifie d’ailleurs des présupposés par rapport aux aînés et aux TIC :
* les aînés constituent un groupe homogène
* les aînés constituent un groupe homogène
* ce groupe ne veut ou ne peut pas utiliser les médias numériques
* ce groupe ne veut ou ne peut pas utiliser les médias numériques
* ce n’est pas réellement un problème puisque cette génération va s’éteindre et que toutes les nouvelles générations n’ont aucun problème avec la centralité de ces médias dans nos sociétés<ref name="Loos" />.
* ce n’est pas réellement un problème puisque cette génération va s’éteindre et que toutes les nouvelles générations n’ont aucun problème avec la centralité de ces médias dans nos sociétés<ref name="Loos" />.
Dans les politiques publiques, on s’intéresse avant tout à la santé et la sécurité des aînés sans intégrer la communication et les médias (i.e. Vieillir et vivre ensemble au Québec en 2012, "Canada’s aging population: Seizing the opportunity" en 2009, Villes amies de aînés de l’Organisation mondiale de la Santé, Commission européenne - L’année pour le vieillissement actif en 2012). Également, peu de politiques en communication intègrent les aînés (comme le Comité permanent des transports et des communications - Plan pour un Canada numérique en 2010). À cet effet, l’un des volets de la politique [http://www.mfa.gouv.qc.ca/fr/publication/Documents/politique-vieillir-et-vivre-ensemble.pdf Vivre et vieillir ensemble] (Québec) inclut quelques millions pour favoriser la compréhension et l’utilisation des TIC dans le but de maintenir la vie active des aînés dans leur milieu de vie à travers l’utilisation des nouvelles technologies. Cet aspect reste sous-développé et les sommes restreintes. Des organismes, comme la FADOQ, offrent des cours aux aînés.
Dans les politiques publiques, on s’intéresse avant tout à la santé et la sécurité des aînés sans intégrer la communication et les médias (i.e. Vieillir et vivre ensemble au Québec en 2012, "Canada’s aging population: Seizing the opportunity" en 2009, Villes amies de aînés de l’Organisation mondiale de la Santé, Commission européenne - L’année pour le vieillissement actif en 2012). Également, peu de politiques en communication intègrent les aînés (comme le Comité permanent des transports et des communications - Plan pour un Canada numérique en 2010). À cet effet, l’un des volets de la politique (Québec) inclut quelques millions pour favoriser la compréhension et l’utilisation des TIC dans le but de maintenir la vie active des aînés dans leur milieu de vie à travers l’utilisation des nouvelles technologies. Cet aspect reste sous-développé et les sommes restreintes. Des organismes, comme la FADOQ, offrent des cours aux aînés.


=== Littératie au-delà des usages ===
=== Littératie au-delà des usages ===
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== Âgisme numérique ==
== Âgisme numérique ==
L’[[âgisme]] ayant trait aux médias numériques (« digital agism » dans la recherche anglophone) désigne l’exclusion des expériences des personnes âgées des recherches et de l’intolérance qui perpétue une certaine peur du vieillissement<ref>Cruikshank, M. (2003). Learning to be old: Gender, culture, and aging. Lanham, MD: Rowman & Littlefield.</ref>. Les représentations de la culture populaire nous montrent souvent des personnes âgées qui utilisent des technologies comme étant une source d’amusement, de ridicule. Prendre pour acquis que toutes les personnes âgées accusent un retard au plan technologique et ne comprennent pas le monde « dématérialisé », que les plus jeunes constituent le standard à côté duquel mesurer leur progression, et proposer des produits et des services en fonction de ces derniers uniquement, constituent une forme d’âgisme (âgisme numérique) selon Kim Sawchuk : « Les entreprises en technologie doivent adapter leurs produits pour saisir des occasions souvent négligées, mais surtout adapter leur service pour qu'un aîné qui entre dans un magasin ne soit pas exploité ou pris pour un imbécile. »<ref name="Parazelli" /> On peut plutôt renseigner les personnes âgées sur les bienfaits potentiels d'une vie « en réseau » et les accompagner au fil de leurs apprentissages, dans le but de diminuer les barrières à leur accès et leur participation, en plus de tirer des leçons de leur expérience des différents médias qu’ils ont côtoyés. L’idée est donc de créer les conditions les plus favorables dans lesquelles elles peuvent choisir d’être connectées ou non, et à quel degré. C’est ce que certains organismes communautaires et [[Vieillissement activiste|activistes]] tentent de favoriser.
L’[[âgisme]] ayant trait aux médias numériques (« digital agism » dans la recherche anglophone) désigne l’exclusion des expériences des personnes âgées des recherches et de l’intolérance qui perpétue une certaine peur du vieillissement<ref>Cruikshank 2003</ref>. Les représentations de la culture populaire nous montrent souvent des personnes âgées qui utilisent des technologies comme étant une source d’amusement, de ridicule. Prendre pour acquis que toutes les personnes âgées accusent un retard au plan technologique et ne comprennent pas le monde « dématérialisé », que les plus jeunes constituent le standard à côté duquel mesurer leur progression, et proposer des produits et des services en fonction de ces derniers uniquement, constituent une forme d’âgisme (âgisme numérique) selon Kim Sawchuk : « Les entreprises en technologie doivent adapter leurs produits pour saisir des occasions souvent négligées, mais surtout adapter leur service pour qu'un aîné qui entre dans un magasin ne soit pas exploité ou pris pour un imbécile. »<ref name="Parazelli" /> On peut plutôt renseigner les personnes âgées sur les bienfaits potentiels d'une vie « en réseau » et les accompagner au fil de leurs apprentissages, dans le but de diminuer les barrières à leur accès et leur participation, en plus de tirer des leçons de leur expérience des différents médias qu’ils ont côtoyés. L’idée est donc de créer les conditions les plus favorables dans lesquelles elles peuvent choisir d’être connectées ou non, et à quel degré. C’est ce que certains organismes communautaires et [[Vieillissement activiste|activistes]] tentent de favoriser.


=== Non-usages ===
=== Non-usages ===
Le non-usage peut être dû à un manque d'accès ou de littératie, tout comme il peut constituer un choix. Dans un contexte ou les technologies de communication sont largement diffusées, ceux et celles qui ne les adoptent pas subissent une certaine pression sociale pour le faire ou pour se justifier<ref>Fernández-Ardèvol, M.; Arroyo, L. (2012): “Mobile telephony and older people: Exploring use and rejection”, Interactions: Studies in Communication & Culture, vol. 3 (1): 9-24.</ref>. Outre les usages fréquents et intenses, existe une variété de (non-)usages possibles: ne pas utiliser une technologie peut être signe de résistance ou d’abandon volontaire, alors qu’utiliser une technologie pose des questions de fréquence d’utilisation, de formes de participation, d'appropriation, de trajectoires personnelles et sociales qui doivent être étudiées pour pouvoir fournir un portrait nuancé<ref name="Wyatt p63" />{{,}}<ref>Breton, P. et S. Proulx, 2002, L'explosion de la communication à l'aube de {{s-|XXI|e}}, Montréal/Paris, Boréal/La Découverte.</ref>. Plusieurs personnes âgées complexifient l'incitation à l'adoption, la possession personnelle et l'usage intense des technologies de communication. Par exemple, certains partagent un téléphone cellulaire<ref>Sawchuk, K., & Crow, B. (2012). “I’m G-Mom on the Phone.” Feminist Media Studies, 12(4), 496–505.</ref>.
Le non-usage peut être dû à un manque d'accès ou de littératie, tout comme il peut constituer un choix. Dans un contexte ou les technologies de communication sont largement diffusées, ceux et celles qui ne les adoptent pas subissent une certaine pression sociale pour le faire ou pour se justifier<ref>Fernández-Ardèvol 2013</ref>. Outre les usages fréquents et intenses, existe une variété de (non-)usages possibles: ne pas utiliser une technologie peut être signe de résistance ou d’abandon volontaire, alors qu’utiliser une technologie pose des questions de fréquence d’utilisation, de formes de participation, d'appropriation, de trajectoires personnelles et sociales qui doivent être étudiées pour pouvoir fournir un portrait nuancé<ref name="Wyatt p63" />{{,}}<ref>Breton et Proulx 2002</ref>. Plusieurs personnes âgées complexifient l'incitation à l'adoption, la possession personnelle et l'usage intense des technologies de communication. Par exemple, certains partagent un téléphone cellulaire<ref>Sawchuk & Crow 2012b</ref>.


== Liste de projets ==
== Liste de projets ==

[[File:InterACTion.jpg|thumb|InterACTion workshop]]
[[File:InterACTion.jpg|thumb|InterACTion workshop]]
* InterACTion : Projet du réseau ACT (Ageing Communication Technology) qui tente de répondre aux besoins des aînés selon leurs désirs, en format un-à-un.
* InterACTion : Projet du réseau ACT (Ageing Communication Technology) qui tente de répondre aux besoins des aînés selon leurs désirs, en format un-à-un.
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== Voir aussi ==
== Voir aussi ==
=== Liens externes ===
=== Liens externes ===
* Bibliothèque Atwater: http://digital-literacy.atwaterlibrary.ca/about/
* [http://digital-literacy.atwaterlibrary.ca/about/ Bibliothèque Atwater]
* InterACTion: http://interactionmontreal.com/
* [http://interactionmontreal.com/ InterACTion]
* [http://www.mfa.gouv.qc.ca/fr/publication/Documents/politique-vieillir-et-vivre-ensemble.pdf%20Vivre%20et%20vieillir%20ensemble Politique Veillir et vivre ensembre]
* FADOQ: http://www.montreal.fadoq.ca/fr/Activites-et-loisirs/Ateliers/Ateliers-informatiques-ca/
* [http://www.montreal.fadoq.ca/fr/Activites-et-loisirs/Ateliers/Ateliers-informatiques-ca/ FADOQ]
* RIAQ: http://riaq.ca/
* [http://riaq.ca/ RIAQ]
* [http://www.oecd.org/fr/education/innovation-education/39438013.pdf Rapport OCDE sur la littéracie]


== Notes et références ==
== Notes et références ==
{{références|colonnes=2}}
=== Notes ===

=== Références ===
== Bibliographie ==
{{références}}
* Philippe Breton et [[Serge Proulx]], L'explosion de la communication à l'aube du XXIe siècle, Montréal/Paris, Boréal/La Découverte, 2002, [https://questionsdecommunication.revues.org/5851 résumé].
* Manuel Castells, [http://faculty.georgetown.edu/irvinem/theory/Castells-NetworkSociety.pdf Materials for an exploratory theory of the network society], British Journal of Sociology, no 51, 2000, pp. 5-24.
* Andrew Clement et Leslie R. Shade, The access rainbow: Conceptualizing universal access to the information/communications infrastructure, dans M. Gurstein (dir.), Community informatics: Enabling communities with information and communications technologies (p.1-20), Hershey, PA: Idea Group, 2000.
* Margaret Cruikshank, [https://books.google.co.uk/books/about/Learning_to_be_Old.html?id=cnSuPfP9qAAC&redir_esc=y Learning to be old: Gender, culture], and aging, Lanham, MD: Rowman & Littlefield, 2003.
* Mereira Fernández-Ardèvol et L Arroyo, Mobile telephony and older people: Exploring use and rejection, Interactions: Studies in Communication & Culture, vol. 3, no 1, 2013, pp. 9-24.
* Francis Jauréguiberry, [http://anr.devotic.univ-pau.fr/?p=247 Les théories sur le non-usage des technologies de communication], texte présenté au colloque Regards croisés entre la sociologie de la communication et la sociologie des sciences et des techniques, 19-21 mai 2010, Namur (Belgique).
* Eugene Loos, Senior citizens: Digital immigrants in their own country? Observatorio (OBS*) Journal, vol.6, no 1, 2012, pp. 01-23.
* Karl Rettino Parazelli, [http://www.ledevoir.com/economie/actualites-economiques/430016/entretiens-concordia-economie-et-innovation-eviter-le-piege-de-l-agisme-numerique Éviter le piège de l'âgisme numérique], Le Devoir, Économie, Actualités économiques, mardi 27 janvier 2015.
* Kim Sawchuk et Barbara Crow, [http://omue10.offis.de/files/OMUE10-Proceedings.pdf Into the grey zone: Seniors, cell phones and milieus that matter], dans B. Poppinga (dir.), Observing the mobile user experience: Proceedings of the 1st international workshop held in conjunction with NordiCHI (p.17–20), Oldenburg, Germany: HaptiMap, 2012a.
* Kim Sawchuk et Barbara Crow, [http://www.tandfonline.com/doi/abs/10.1080/14680777.2012.741863#.VfcW_xF_Oko I’m G-Mom on the Phone], Feminist Media Studies, vol.12, no 4, 2012b, pp. 496–505.
* [https://en.wikipedia.org/wiki/Sally_Wyatt Sally Wyatt], Non-Users Also Matter: The Construction of Users and Non-Users of the Internet, dans N. Oudshoorn et T. Pinch (dir.), How Users Matter: The Co-Construction of Users and Technology (pp.67-80), Cambridge, MA, MIT Press, 2003.


{{Portail|informatique|société}}
{{Portail|informatique|société}}

Version du 14 septembre 2015 à 15:51

Dans les sociétés en réseaux actuelles, caractérisées par la dissémination et l’usage intensif des TIC (technologies d’information et de communication), les sujets « idéaux » sont relativement jeunes et branchés[1]. D’une part, les avancées technologiques sont perçues pour l’aide qu’elles peuvent apporter aux aînés (voir par exemple gérontechnologie). D’autre part, cet accent sur la santé et l’« amélioration » des aînés les situe dans une perspective de vulnérabilité et néglige d’autres aspects relationnels, pratiques et ludiques de ces technologies.


Vie sociale et personnelle

Bien que les réseaux soient d’anciennes formes d’organisation sociale, ils en sont devenus une forme centrale au cours des dernières décennies, avec la diffusion des technologies d’information et de communication[2]. La flexibilité et la communication éphémère des réseaux se remarquent au niveau de la mondialisation (i.e. marchés financiers, États), mais se retrouvent également sur le plan culturel, dans une culture organisée autour de systèmes intégrés de médias électroniques et numériques. C’est ce qui explique une certaine exclusion des gens qui se situent en dehors de ces réseaux; ce qui ne fait pas partie des réseaux étant ignoré par ceux-ci[2]. Plusieurs projets mentionnés plus bas tentent d’intégrer les aînés aux réseaux ou de créer des réseaux alternatifs.

Technologies au quotidien

Les technologies ne se réduisent pas aux aides médicales ni aux technologies d'information et de communication. Par exemple, pour plusieurs personnes âgées, les piluliers sont des technologies qui organisent non seulement leur prise de médicaments mais contribuent à réguler leur vie selon des périodes de temps définies et par le fait même à mettre à l'avant-plan le rapport au temps qui passe.

Technologies de communication, accès et littératie

Depuis plusieurs années, dans les études communicationnelles, informatiques et médiatiques, des questions d’accès et d’appropriation des technologies, et leurs risques d’exclusion, ont été soulevées[3][4]. L’accès et l’inclusion dépendent de plusieurs éléments comme les coûts, le design, les opérateurs, et les occasions d’apprentissage[5]. Cela fait en sorte que les aînés se retrouvent souvent plus ou moins exclus des avancées technologiques. Par exemple, des applications pour téléphone portable permettent de calculer le temps d’attente dans diverses situations (en indiquant les délais ou le rang). Cette idée profite plus ou moins aux personnes âgées, qui utilisent ces technologies en moins grand nombre, alors qu’elles fréquentent pourtant les cliniques et les hôpitaux de manière régulière[6].

Au Canada, en 2010, 29 % des personnes de 75 ans et plus et 60 % de celles de 65 à 74 ans avaient utilisé Internet au cours du mois précédent, tandis que l’utilisation d’Internet chez les personnes de 15 à 24 ans était presque universelle[7]. Au Québec, 53 % des gens ont un téléphone intelligent dont 75% chez les 25-34 ans, 24% chez les 65-74 ans et 13% chez les 75 ans et plus[6]. L’accès à l’information des aînés, important pour préserver leur indépendance et favoriser leur inclusion sociale, renvoie notamment à la littératie et à l’accessibilité numérique. La littératie est la capacité de comprendre et utiliser l’information écrite dans la vie courante et d'ainsi étendre ses connaissances (OCDE). Elle réfère donc à la fois à la faculté de reconnaître un besoin en information, à localiser les informations, les sélectionner et les organiser. Plus précisément, la littératie numérique désigne le savoir et les compétences utilisées à travers plusieurs outils communicationnels en réseau comme les téléphones intelligents, les ordinateurs et les tablettes. Certains chercheurs parlent aussi de translittératie qui tient compte de la variété des plateformes.

Pour une pleine participation des citoyens à la vie économique, culturelle et sociale, l'accessibilité numérique est requise et réfère à la mise en place de ressources numériques pour tous, donc de diminuer les différences d’accès selon la langue, le lieu, le matériel et les services disponibles, les aptitudes physiques et mentales, etc. Certains auteurs ont parlé d’une fracture numérique générationnelle pour aborder des approches différentes face aux nouveaux médias entre les « jeunes » et les « vieux ». Celle-ci fait toutefois « cliché », étant donné l’hétérogénéité dans les cohortes, les périodes de la vie qui influencent l’intérêt vers les TIC, et le fait que l’âge ne soit qu’un seul élément dans l’habileté à les utiliser (l’habitude serait aussi très importante)[8]. Eugène Loos, qui parle d’un spectre plutôt que d’une fracture, identifie d’ailleurs des présupposés par rapport aux aînés et aux TIC :

  • les aînés constituent un groupe homogène
  • ce groupe ne veut ou ne peut pas utiliser les médias numériques
  • ce n’est pas réellement un problème puisque cette génération va s’éteindre et que toutes les nouvelles générations n’ont aucun problème avec la centralité de ces médias dans nos sociétés[8].

Dans les politiques publiques, on s’intéresse avant tout à la santé et la sécurité des aînés sans intégrer la communication et les médias (i.e. Vieillir et vivre ensemble au Québec en 2012, "Canada’s aging population: Seizing the opportunity" en 2009, Villes amies de aînés de l’Organisation mondiale de la Santé, Commission européenne - L’année pour le vieillissement actif en 2012). Également, peu de politiques en communication intègrent les aînés (comme le Comité permanent des transports et des communications - Plan pour un Canada numérique en 2010). À cet effet, l’un des volets de la politique (Québec) inclut quelques millions pour favoriser la compréhension et l’utilisation des TIC dans le but de maintenir la vie active des aînés dans leur milieu de vie à travers l’utilisation des nouvelles technologies. Cet aspect reste sous-développé et les sommes restreintes. Des organismes, comme la FADOQ, offrent des cours aux aînés.

Littératie au-delà des usages

Au-delà des usages, de ce que les individus font avec les technologies, différents projets culturels visent à donner aux gens les connaissances et outils nécessaires à la compréhension des technologies qui permettent de créer les environnements culturels et médiatiques dans lesquels ils vivent. Par exemple, la Atwater Library de Montréal a mis sur pied un projet sur la création musicale numérique et un projet sur la photographie et la mémoire collective.

Âgisme numérique

L’âgisme ayant trait aux médias numériques (« digital agism » dans la recherche anglophone) désigne l’exclusion des expériences des personnes âgées des recherches et de l’intolérance qui perpétue une certaine peur du vieillissement[9]. Les représentations de la culture populaire nous montrent souvent des personnes âgées qui utilisent des technologies comme étant une source d’amusement, de ridicule. Prendre pour acquis que toutes les personnes âgées accusent un retard au plan technologique et ne comprennent pas le monde « dématérialisé », que les plus jeunes constituent le standard à côté duquel mesurer leur progression, et proposer des produits et des services en fonction de ces derniers uniquement, constituent une forme d’âgisme (âgisme numérique) selon Kim Sawchuk : « Les entreprises en technologie doivent adapter leurs produits pour saisir des occasions souvent négligées, mais surtout adapter leur service pour qu'un aîné qui entre dans un magasin ne soit pas exploité ou pris pour un imbécile. »[6] On peut plutôt renseigner les personnes âgées sur les bienfaits potentiels d'une vie « en réseau » et les accompagner au fil de leurs apprentissages, dans le but de diminuer les barrières à leur accès et leur participation, en plus de tirer des leçons de leur expérience des différents médias qu’ils ont côtoyés. L’idée est donc de créer les conditions les plus favorables dans lesquelles elles peuvent choisir d’être connectées ou non, et à quel degré. C’est ce que certains organismes communautaires et activistes tentent de favoriser.

Non-usages

Le non-usage peut être dû à un manque d'accès ou de littératie, tout comme il peut constituer un choix. Dans un contexte ou les technologies de communication sont largement diffusées, ceux et celles qui ne les adoptent pas subissent une certaine pression sociale pour le faire ou pour se justifier[10]. Outre les usages fréquents et intenses, existe une variété de (non-)usages possibles: ne pas utiliser une technologie peut être signe de résistance ou d’abandon volontaire, alors qu’utiliser une technologie pose des questions de fréquence d’utilisation, de formes de participation, d'appropriation, de trajectoires personnelles et sociales qui doivent être étudiées pour pouvoir fournir un portrait nuancé[3],[11]. Plusieurs personnes âgées complexifient l'incitation à l'adoption, la possession personnelle et l'usage intense des technologies de communication. Par exemple, certains partagent un téléphone cellulaire[12].

Liste de projets

InterACTion workshop
  • InterACTion : Projet du réseau ACT (Ageing Communication Technology) qui tente de répondre aux besoins des aînés selon leurs désirs, en format un-à-un.
  • Réseau FADOQ : Ateliers informatiques dans différentes régions du Québec.
  • Réseau d’information des aînés du Québec : offre aussi des ateliers.
  • Bibliothèque Atwater: différentes ateliers sur la littératie numérique.

Voir aussi

Liens externes

Notes et références

  1. Sawchuk & Crow 2012a
  2. a et b Castells 2000
  3. a et b Wyatt 2003
  4. Jauréguiberry 2010
  5. Clement & Shade 2000
  6. a b et c Parazelli 2015
  7. Statistiques Canada
  8. a et b Loos 2012
  9. Cruikshank 2003
  10. Fernández-Ardèvol 2013
  11. Breton et Proulx 2002
  12. Sawchuk & Crow 2012b

Bibliographie

  • Philippe Breton et Serge Proulx, L'explosion de la communication à l'aube du XXIe siècle, Montréal/Paris, Boréal/La Découverte, 2002, résumé.
  • Manuel Castells, Materials for an exploratory theory of the network society, British Journal of Sociology, no 51, 2000, pp. 5-24.
  • Andrew Clement et Leslie R. Shade, The access rainbow: Conceptualizing universal access to the information/communications infrastructure, dans M. Gurstein (dir.), Community informatics: Enabling communities with information and communications technologies (p.1-20), Hershey, PA: Idea Group, 2000.
  • Margaret Cruikshank, Learning to be old: Gender, culture, and aging, Lanham, MD: Rowman & Littlefield, 2003.
  • Mereira Fernández-Ardèvol et L Arroyo, Mobile telephony and older people: Exploring use and rejection, Interactions: Studies in Communication & Culture, vol. 3, no 1, 2013, pp. 9-24.
  • Francis Jauréguiberry, Les théories sur le non-usage des technologies de communication, texte présenté au colloque Regards croisés entre la sociologie de la communication et la sociologie des sciences et des techniques, 19-21 mai 2010, Namur (Belgique).
  • Eugene Loos, Senior citizens: Digital immigrants in their own country? Observatorio (OBS*) Journal, vol.6, no 1, 2012, pp. 01-23.
  • Karl Rettino Parazelli, Éviter le piège de l'âgisme numérique, Le Devoir, Économie, Actualités économiques, mardi 27 janvier 2015.
  • Kim Sawchuk et Barbara Crow, Into the grey zone: Seniors, cell phones and milieus that matter, dans B. Poppinga (dir.), Observing the mobile user experience: Proceedings of the 1st international workshop held in conjunction with NordiCHI (p.17–20), Oldenburg, Germany: HaptiMap, 2012a.
  • Kim Sawchuk et Barbara Crow, I’m G-Mom on the Phone, Feminist Media Studies, vol.12, no 4, 2012b, pp. 496–505.
  • Sally Wyatt, Non-Users Also Matter: The Construction of Users and Non-Users of the Internet, dans N. Oudshoorn et T. Pinch (dir.), How Users Matter: The Co-Construction of Users and Technology (pp.67-80), Cambridge, MA, MIT Press, 2003.