Utilisateur:Thypot

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« Il se passe, en ce moment, un de ces miracles de la conscience nationale, un de ces gestes de la France, qui parfois, au long des siècles, viennent illuminer notre histoire. Dans cette communauté, qui n'est qu'une seule pensée, un seul élan, un seul cri, les différences s'effacent, les individus disparaissent. Innombrables Français dont je m'approche tour à tour, à l'Étoile, au Rond-Point, à la Concorde, devant l'Hôtel de Ville, sur le parvis de la cathédrale, si vous saviez comme vous êtes pareils. Vous, les enfants si pâles, qui trépignez et criez de joie ; vous, les femmes, portant tant de chagrins, qui me jetez vivats et sourires ; vous, hommes, inondés d'une fierté longtemps oubliée qui me criez votre merci ; vous, les vieilles gens qui me faites l'honneur de vos larmes. Ah ! Comme vous vous ressemblez ! Et moi, au centre de ce déchaînement, je me sens remplir une fonction qui dépasse de très haut ma personne, servir d'instrument au destin.[1] »

— Charles de Gaulle


«  Une puissance supérieure me pousse à un but que j'ignore ; tant qu'il ne sera pas atteint je serai invulnérable, inébranlable ; dès que je ne lui serai plus nécessaire, une mouche suffira pour me renverser. »

— Napoléon Bonaparte


«  Si nous voulons que tout reste tel que c'est, il faut que tout change. [2] »

— Tomasi di Lampedusa


«  Nec pluribus impar.  »

— Louis XIV


«  Il voyagea.

Il connut la mélancolie des paquebots, les froids réveils sous la tente, l’étourdissement des paysages et des ruines, l’amertume des sympathies interrompues.

Il revint.

Il fréquenta le monde, et il eut d’autres amours, encore. Mais le souvenir continuel du premier les lui rendait insipides ; et puis la véhémence du désir, la fleur même de la sensation était perdue. Ses ambitions d’esprit avaient également diminué. Des années passèrent ; et il supportait le désœuvrement de son intelligence et l’inertie de son cœur.[3] »

— Gustave Flaubert


«  Or, un dimanche, pendant qu’on était aux vêpres, Frédéric et Deslauriers, s’étant fait préalablement friser, cueillirent des fleurs dans le jardin de Mme Moreau, puis sortirent par la porte des champs, et, après un grand détour dans les vignes, revinrent par la Pêcherie et se glissèrent chez la Turque, en tenant toujours leurs gros bouquets.

Frédéric présenta le sien, comme un amoureux à sa fiancée. Mais la chaleur qu’il faisait, l’appréhension de l’inconnu, une espèce de remords, et jusqu’au plaisir de voir, d’un seul coup d’œil, tant de femmes à sa disposition, l’émurent tellement, qu’il devint très pâle et restait sans avancer, sans rien dire. Toutes riaient, joyeuses de son embarras ; croyant qu’on s’en moquait, il s’enfuit ; et, comme Frédéric avait l’argent, Deslauriers fut bien obligé de le suivre.

On les vit sortir. Cela fit une histoire qui n’était pas oubliée trois ans après.

Ils se la contèrent prolixement, chacun complétant les souvenirs de l’autre ; et, quand ils eurent fini :

— C’est là ce que nous avons eu de meilleur ! dit Frédéric.

— Oui, peut-être bien ? c’est là ce que nous avons eu de meilleur ! dit Deslauriers.[4] »

— Gustave Flaubert


«  Rastignac, resté seul, fit quelques pas vers le haut du cimetière et vit Paris tortueusement couché le long des deux rives de la Seine où commençaient à briller les lumières. Ses yeux s’attachèrent presque avidement entre la colonne de la place Vendôme et le dôme des Invalides, là où vivait ce beau monde dans lequel il avait voulu pénétrer. Il lança sur cette ruche bourdonnante un regard qui semblait par avance en pomper le miel, et dit ces mots grandioses : "A nous deux maintenant !"

Et pour premier acte du défi qu’il portait à la Société, Rastignac alla dîner chez madame de Nucingen.[5] »

— Honoré de Balzac


«  Il fallait oublier Fœdora, me guérir de ma folie, reprendre ma studieuse solitude ou mourir. Je m’imposai donc des travaux exorbitants, je voulus achever mes ouvrages. Pendant quinze jours, je ne sortis pas de ma mansarde, et consumai toutes mes nuits en de pâles études. Malgré mon courage et les inspirations de mon désespoir, je travaillais difficilement, par saccades. La muse avait fui. Je ne pouvais chasser le fantôme brillant et moqueur de Fœdora. Chacune de mes pensées couvait une autre pensée maladive, je ne sais quel désir, terrible comme un remords. J’imitai les anachorètes de la Thébaïde. Sans prier comme eux, comme eux je vivais dans un désert, creusant mon âme au lieu de creuser des rochers. Je me serais au besoin serré les reins avec une ceinture armée de pointes, pour dompter la douleur morale par la douleur physique. Un soir, Pauline pénétra dans ma chambre. — Vous vous tuez, me dit-elle d’une voix suppliante ; vous devriez sortir, allez voir vos amis. — Ah ! Pauline ! votre prédiction était vraie. Fœdora me tue, je veux mourir. La vie m’est insupportable. — Il n’y a donc qu’une femme dans le monde ? dit-elle en souriant. Pourquoi mettez-vous des peines infinies dans une vie si courte ? — Je regardai Pauline avec stupeur. Elle me laissa seul. Je ne m’étais pas aperçu de sa retraite, j’avais entendu sa voix, sans comprendre le sens de ses paroles. Bientôt je fus obligé de porter le manuscrit de mes mémoires à mon entrepreneur de littérature. Préoccupé par ma passion, j’ignorais comment j’avais pu vivre sans argent, je savais seulement que les quatre cent cinquante francs qui m’étaient dus suffiraient à payer mes dettes ; j’allai donc chercher mon salaire, et je rencontrai Rastignac, qui me trouva changé, maigri. — De quel hôpital sors-tu ? me dit-il. — Cette femme me tue, répondis-je. Je ne puis ni la mépriser ni l’oublier. — Il vaut mieux la tuer, tu n’y songeras peut-être plus, s’écria-t-il en riant. — J’y ai bien pensé, répondis-je. Mais si parfois je rafraîchis mon âme par l’idée d’un crime, viol ou assassinat, et les deux ensemble, je me trouve incapable de le commettre en réalité. La comtesse est un admirable monstre qui demanderait grâce, et n’est pas Othello qui veut ![6] »

— Honoré de Balzac


«  J'ai vu l'Empereur — cette âme du monde — sortir de la ville pour aller en reconnaissance ; c'est effectivement une sensation merveilleuse de voir un pareil individu qui, concentré ici sur un point, assis sur un cheval, s'étend sur le monde et le domine.[7] »

— Hegel


« Les grands talents sont, pour l'ordinaire, plus rivaux qu'amis ; ils croissent et brillent séparés, de peur de se faire ombrage : les moutons s'attroupent et les lions s'isolent.[8] »

— Antoine de Rivarol


« - Tais-toi, lui criai-je, viens là et gagne ta pitance. Je la jetai sur mon lit et m'y étendis à côté d'elle, comme ma propre statue sur mon tombeau. Je vous le demande, à vous, hommes du siècle, qui, à l'heure qu'il est, courez à vos plaisirs, au bal ou à l'Opéra, et qui ce soir, en vous couchant, lirez pour vous endormir quelque blasphème usé du vieux Voltaire, quelque badinage raisonnable de Paul-Louis Courier, quelque discours économique d'une commission de nos Chambres, qui respirerez, en un mot, par quelqu'un de vos pores, les froides substances de ce nénuphar monstrueux que la Raison plante au cœur de nos villes ; je vous le demande, si par hasard ce livre obscur vient à tomber entre vos mains, ne souriez pas d'un noble dédain, ne haussez pas trop les épaules ; ne vous dites pas avec trop de sécurité que je me plains d'un mal imaginaire, qu'après tout la raison humaine est la plus belle de nos facultés, et qu'il n'y a de vrai ici-bas que les agiotages de la Bourse, les brelans au jeu, le vin de Bordeaux à table, une bonne santé au corps, l'indifférence pour autrui, et le soir, au lit, des muscles lascifs recouverts d'une peau parfumée.

Car quelque jour, au milieu de votre vie stagnante et immobile, il peut passer un coup de vent. Ces beaux arbres que vous arrosez des eaux tranquilles de vos fleuves d'oubli, la Providence peut souffler dessus ; vous pouvez être au désespoir, messieurs les impassibles ; il y a des larmes dans vos yeux. Je ne vous dirai pas que vos maîtresses peuvent vous trahir ; ce n'est pas pour vous peine si grande que lorsqu'il vous meurt un cheval ; mais je vous dirai qu'on perd à la Bourse, que, quand on joue avec un brelan, on peut en rencontrer un autre ; et si vous ne jouez pas, pensez que vos écus, votre tranquillité monnayée, votre bonheur d'or et d'argent, sont chez un banquier qui peut faillir, ou dans des fonds publics qui peuvent ne pas payer ; je vous dirai qu'enfin, tout glacés que vous êtes, vous pouvez aimer quelque chose ; il peut se détendre une fibre au fond de vos entrailles, et vous pouvez pousser un cri qui ressemble à de la douleur. Quelque jour, errant dans les rues boueuses, quand les jouissances matérielles ne seront plus là pour user votre force oisive, quand le réel et le quotidien vous manqueront, vous pouvez d'aventure en venir à regarder autour de vous avec des joues creuses et à vous asseoir sur un banc désert à minuit.[9] »

— Alfred de Musset

  1. Charles de Gaulle, Mémoires de guerre
  2. Tomasi di Lampedusa, Le Guépard
  3. Gustave Flaubert, L'éducation sentimentale
  4. Gustave Flaubert, L'éducation sentimentale
  5. Honoré de Balzac, Le Père Goriot
  6. Honoré de Balzac, La Peau de chagrin
  7. G.W.F. Hegel, Correspondance
  8. Antoine de Rivarol
  9. Alfred de Musset, La confession d'un enfant du siècle