Querelle médicale de 1756 en France sur la saignée

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Querelle médicale de 1756 en France sur la saignée

Histoire[modifier | modifier le code]

Jacques Barbeu du Bourg

« « C'est à la faiblesse de la Faculté qu'on doit la recrudescence de tant d'erreurs ! Elle a fait condamner l'antimoine, et tolère pourtant qu'aujourd'hui des médecins ignares guérissent leurs malades avec de l'émétique. De la fermeté, M. le Doyen ! Fermez la bouche à quiconque trouve des réserves à l'emploi de la saignée. Souvenez-vous du temps où Sidobre tira huit fois du sang à un varioleux, où Chirac et Besse saignèrent soixante-quatre fois un rhumatisant qu'un purgatif guérit à la soixante-cinquième reprise. Rappelez malades et médecins à leur devoir et que nul n'ose plus guérir anti-réglementairement ! La phlébotomie se meurt ! Les lancettes se rouillent ! Aux armes ». ».

En 1756 parut dans le Journal œconomique une lettre de M. X... à M. Le Camus, docteur-régent de la Faculté de Médecine de Paris : elle osait prôner l'émétique et déprécier les mérites de la saignée répétée dans le traitement des maladies aiguës, telles que les fluxions de poitrine.

Pour les principes, la Faculté veillait : elle était réunie le pour délibérer sur l'admission des bacheliers qui venaient de passer l'examen de matière médicale, quand le Journal œconomique lui fut communiqué.

Le doyen Chomel s'émeut, s'indigne, demande à l'assemblée de répudier sur le champ une doctrine aussi pernicieuse, et les docteurs fulminent une excommunication immédiate contre cette hérésie. La thèse incriminée est jugée un système funeste, contraire aux axiomes admis depuis Hippocrate, un système faux, erroné, né de l'ignorance et de l'inexpérience ; la saignée longue et copieuse est chaudement recommandée dans les maladies inflammatoires ; on décide de rechercher immédiatement le fauteur anonyme de l'hérésie et de publier sur l'heure, pour que nul n'en ignore, le décret de la très salutaire Faculté de médecine de Paris.

L'auteur de la Lettre réclamait un compère qui voulût bien le dénoncer : le compère se trouva et fut Jacques Barbeu du Bourg; c'est à lui du moins que M. Pauly[1] attribue la Lettre à M. Ch***, doyen de la Faculté de médecine de Paris au sujet d'un décret du 26 juin sur la nécessité des saignées réitérées, par M***, docteur régent de la même Faculté; lettre qui parut le 6 juillet.

Elle commence par un éloge ironiquement pompeux de la vigilance du doyen contre toute atteinte à la saine doctrine et accuse le docteur Marteau d'être l'auteur de ces blasphèmes ; elle félicite Chomel d'avoir osé violer, pour en obtenir condamnation, les statuts de la Faculté et la promesse faite à l'inculpé de provoquer trois délibérations sur la question en litige; elle lui demande d'exécuter avec la dernière rigueur son décret vengeur; de rayer à tout jamais des œuvres d'Hippocrate les maximes où ce médicastre grec expose les contre-indications de la saignée, d'excommunier Sydenham, Boerhaave qui ordonne de laisser quelques forces aux malades, et Gesner qui osa guérir Haller d'une péripneumonie sans le phlébotomiser.

Ce libelle de douze pages eut quelque succès ; on en fit une deuxième édition de dix-neuf pages : médecins et philiatres se l'arrachaient, et Chomel, sur les épaules duquel Barbeu venait de lancer la robe de Purgon, fut couvert de ridicule et ne fut pas réélu aux élections décanales d'octobre.

Barbeu resta sur ses positions et proclama sa conviction à tous présents et à venir en faisant placarder une affiche ainsi conçue : M. Barbeu Dubourg, docteur en médecine de la Faculté de Paris cy-devant précepteur de Messieurs de Matignon et auteur de deux livres d'histoire nouvellement donnés au public avertit qu'il continue de traiter les fluxions de poitrine et autres maladies inflammatoires sans saignée. Il est protégé par le Frère Philippe, religieux apothicaire de la Charité, qui répond de ses succès.

Bibliographie[modifier | modifier le code]

  • Lettre à M. Ch., doyen de la Faculté de médecine de Paris, au sujet d'un décret du sur la nécessité des saignées réitérées,par M***, docteur régent de la même faculté. 1756, 2 éditions. Anonyme, attribuée à Barbeu par Pauly dans sa Bibliographie des Sciences médicales, Paris, 1872.

Source[modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Pauly, Bibliographie des Sciences médicales, Paris, 1874.