Initiative populaire « contre l'industrie privée des armements »

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Initiative populaire fédérale
Contre l'industrie privée des armements

Déposée le

Contre-projet Accepté[NB 1]
Votée le
Participation 54,33 %
Résultat : rejetée[NB 2]
Par le peuple non (par 73,2 %)
Par les cantons non (par 19 6/2)[NB 3]

L'initiative populaire « contre l'industrie privée des armements » est une initiative populaire suisse, rejetée par le peuple et les cantons le .

Contenu[modifier | modifier le code]

L'initiative propose de modifier l'article 41bis de la Constitution fédérale qui définissait le monopole fédéral de la poudre pour étendre ce monopole à la fabrication, à l'achat et à la vente d'armes, de munitions tout en donnant à la Confédération le droit d'attribuer des concessions sur ces sujets.

Le texte complet de l'initiative peut être consulté sur le site de la Chancellerie fédérale[1].

Déroulement[modifier | modifier le code]

Contexte historique[modifier | modifier le code]

À la fin de la Première Guerre mondiale, la Société des Nations élabore un projet de contrôle étatique du commerce des armes, classifiant celles-ci en quatre catégories (armes pouvant être utilisées à des fins militaires, armes destinées à la guerre, navires de guerre et aéronefs) qui n'est pas adopté, faute de majorité. De nouvelles propositions, en particulier venant des États-Unis et visant à restreindre le commerce des armes, resteront sans effet.

Au niveau national, plusieurs pétitions et interpellations demandent, dans la première moitié des années 1930 une législation sur ce domaine. Les autorités compétentes, tout en reconnaissant ce besoin de légiférer, jugent qu'une telle initiative aurait plus de valeur et d'efficacité au niveau international. Ce n'est que lorsque les débats se sont terminés sans succès à la Société des Nations que le sujet et revenu sur le devant de la scène nationale.

En lançant leur initiative, les initiants visent en particulier des industries d'armement privées qui pourraient, en cas de guerre produire sur le sol suisse (donc en territoire neutre) des armes et munitions vendues ensuite aux belligérants[2].

Récolte des signatures et dépôt de l'initiative[modifier | modifier le code]

La récolte des 50 000 signatures nécessaires a débuté le . Le de la même année, l'initiative a été déposée à la chancellerie fédérale qui l'a déclarée valide le [3].

Discussions et recommandations des autorités[modifier | modifier le code]

Le parlement[4] et le Conseil fédéral[5] recommandent tous deux le rejet de cette initiative. Dans son message aux Chambres fédérales, le gouvernement met en avant l'« arrêté fédéral relatif au contrôle de la fabrication et du commerce des armes, munitions et matériel de guerre » adopté par une commission parlementaire quelques mois plus tôt et allant dans le sens de l'initiative.

Le Conseil fédéral propose un contre-projet direct à l'initiative pour pallier quelques défauts rédactionnels de l'initiative ; en particulier, cette dernière précise que les armes et munitions ne peuvent être produites qu'« aux fins d'assurer la défense nationale », point de vue combattu par le Conseil fédéral qui veut laisser aux entreprises au bénéfice d'une concession la possibilité de vendre à l'étranger leur production. Ce contre-projet est accepté par le Parlement et présenté comme tel au vote populaire.

Votation[modifier | modifier le code]

Soumise à la votation le , l'initiative est refusée par la totalité des 19 6/2 cantons[NB 3] et par 73,2 % des suffrages exprimés[6]. Le tableau ci-dessous détaille les résultats par cantons pour ce vote[7] :

Le contre-projet du gouvernement est, quant à lui, approuvé par la totalité de 19 6/2 cantons et 68,8 % des suffrages exprimés[6]. Le tableau ci-dessous détaille les résultats par cantons pour ce contre-projet[7] :

Effets[modifier | modifier le code]

L'acceptation du contre-projet, couplé à un emprunt effectué par la Confédération, permit au pays de se réarmer et d'affronter le début de la Seconde Guerre mondiale avec un niveau de préparation bien meilleur que lors de la Première Guerre mondiale[2].

Par la suite, trois nouvelles initiatives vont aborder le sujet de l'exportation des armes et de l'armement : une première initiative « pour un contrôle renforcé des industries d'armement et l'interdiction d'exportation d'armes » est rejetée en 1972[8], une seconde « pour l'interdiction d'exporter du matériel de guerre » est à son tour rejetée en 1997[9] alors que la troisième, également appelée « pour l'interdiction d'exporter du matériel de guerre », connait le même sort en 2009[10].

Les résultats négatifs de ces différentes votations se retrouvent dans la loi fédérale sur le matériel de guerre[11] qui spécifie que la fabrication et l'exportation du matériel de guerre ne sont autorisés que lorsqu'ils sont « conformes aux règles du droit international public et aux principes de la politique étrangère suisse »[12].

Notes et références[modifier | modifier le code]

Notes[modifier | modifier le code]

  1. Jusqu'au 24 septembre 2000, le double oui à l'initiative populaire et au contre-projet est interdit et entraîne la nullité du vote ainsi exprimé. Depuis cette date, en cas de double-oui, c'est le projet qui récolte le plus de voix à la question subsidiaire qui entre en vigueur comme indiqué sur http://www.admin.ch/ch/f/pore/vi/procedure.html .
  2. Selon l'article 139 de la Constitution, une initiative proposée sous la forme d'un projet rédigé doit être acceptée à la fois par la majorité du peuple et par la majorité des cantons. Dans le cas d'une initiative rédigée en termes généraux, seul le vote du peuple est nécessaire.
  3. a et b Le premier chiffre indique le nombre de cantons, le second le nombre de cantons comptant pour moitié. Par exemple, 20 6/2 se lit « 20 cantons et 6 cantons comptant pour moitié ».

Références[modifier | modifier le code]

  1. « Texte de l'initiative populaire fédérale », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  2. a et b « Le Temps :: Exportation d'armes », sur military.ch (consulté le )
  3. « Initiative populaire 'contre l'industrie privée des armements' » (consulté le )
  4. « Arrêté fédéral »  (29 décembre 1937) de la Feuille fédérale référence FF 1937 III 753
  5. « Message du Conseil fédéral »  (21 juillet 1937) de la Feuille fédérale référence FF 1937 II 545
  6. a et b « Votation no 126 Tableau récapitulatif », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  7. a et b « Votation no 126 - Résultats dans les cantons », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  8. « Votation no 231 - Résultats dans les cantons », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  9. « Votation no 435 - Résultats dans les cantons », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  10. « Votation no 546 - Résultats dans les cantons », sur Chancellerie fédérale (consulté le )
  11. Loi fédérale du 13 décembre 1996 sur le matériel de guerre (LFMG) du , RS 514.51.
  12. « Rapport de la Commission de la politique de sécurité du Conseil des Etats du 28 août 2002 », sur parlement.ch (consulté le )