Wikipédia:Lumière sur/Marché noir en France pendant la Seconde Guerre mondiale

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Affiche de Vichy contre le marché noir, 1943.
Affiche de Vichy contre le marché noir, 1943.

Le marché noir en France pendant la Seconde Guerre mondiale est l'ensemble des transactions illégales sur le territoire métropolitain français, en zone occupée comme en zone libre, de l'armistice du 22 juin 1940 à la fin du conflit. L'article couvre également le marché noir dans la France de l'après-guerre jusqu'à la fin du rationnement en 1949.

Dans un contexte de pénurie et de réglementation du marché, le marché noir constitue un marché parallèle et clandestin qui correspond à diverses infractions à la législation mise en place par le régime de Vichy sur la production, le stockage, le transport, les quantités, la qualité et les prix des denrées. Ces fraudes s'accompagnent de corruption de fonctionnaires, falsification de documents et autres délits.

Des débuts de l'Occupation à la fin de l'année 1941, le marché noir, qui naît par des détournements au sein des circuits officiels et par la création de filières clandestines, est considéré comme honteux. Ses principaux clients sont des Français riches et les forces d'occupation allemandes et italiennes, qui organisent des bureaux d'achat. Le mythe de l'abondance cachée nourrit la délation et l'antisémitisme tout en fragilisant le régime de Vichy, accusé d'inefficacité. Ce dernier mène pourtant une répression sévère.

De la fin de l'année 1941 à 1943, le marché noir se généralise et se démocratise. Pour faire face à la pénurie, les filières clandestines du « marché gris » s'organisent et les citadins vont de plus en plus se ravitailler directement à la campagne, auprès de paysans qui vendent à des prix supérieurs à la taxation. La fraude devient courante dans le commerce et l'industrie. La pratique n'apparaît plus immorale quand il s'agit de survivre et l'Église catholique ne la condamne plus. Par la loi du , Vichy tolère de fait le petit marché noir et concentre la répression sur les gros trafics. Le marché noir et le marché gris additionnés représentent alors entre le cinquième et la moitié de la production agricole. Leur géographie est liée à la proximité des grandes villes, Paris au premier chef. Ceux qui s'enrichissent le plus ne sont pas forcément les petits commerçants, mais plutôt les grossistes en amont et les gros trafiquants.

En 1943-1944, le marché noir devient un enjeu patriotique. Les Allemands, qui augmentent considérablement leur pillage économique, cessent de s'approvisionner au marché noir et demandent aux autorités de Vichy une répression plus intense. C'est un des éléments de la politique de collaboration, à laquelle participe la Milice. Au contraire, la Résistance encourage certaines formes de marché noir, s'appuyant sur le ressentiment répandu dans les campagnes contre Vichy. Les autorités de Vichy quant à elles présentent les résistants comme des bandits du marché noir, ce qu'ils sont parfois, dans un contexte où la pénurie s'aggrave.

Après la Libération, la punition des trafiquants du marché noir est un des enjeux de l'épuration et répond à une forte demande sociale. Toutefois, la confiscation des profits illicites est partielle et lente, sauf pour les trafiquants les plus notoires. La situation économique ne s'améliore que lentement et le marché noir est florissant. Les difficultés de ravitaillement, le rationnement et par conséquent le marché noir perdurent jusqu'en 1949.

Le marché noir demeure prégnant dans la mémoire collective jusqu'à l'arrivée d'une nouvelle génération élevée dans la découverte de l'abondance des Trente Glorieuses. Son souvenir reste néanmoins présent à travers deux œuvres majeures, Au bon beurre et La Traversée de Paris.