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Utilisateur:Catherine Tourangeau/Brouillon/Société civile

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La mobilisation de la société civile pendant la campagne référendaire[modifier | modifier le code]

Dès la fin de l’été 1994, alors que l’élection du Parti Québécois et de son chef Jacques Parizeau semble imminente, de nombreux acteurs de la société civile se préparent à une éventuelle campagne référendaire. C’est notamment le cas du Mouvement national des Québécoises et Québécois (MNQ), qui met par exemple sur pied des tables de concertation régionales au cours de l’automne 1994. Ces dernières facilitent la mobilisation rapide de nombreux acteurs de la société civile désireux de s’impliquer pour le camp souverainiste[1].

La société civile s’implique donc activement dans la campagne référendaire de 1995. Parmi les organisations civiles qui participent à la campagne référendaire du côté des forces souverainistes, une quinzaine joint les rangs d’une vaste et influente coalition nommée Partenaires pour la souveraineté. Composée des grandes centrales syndicales, des principales associations étudiantes et d’une dizaine d’organismes communautaires et culturels, cette coalition représente plus d’un million de Québécois et de Québécoises. Elle entend faire la promotion la souveraineté à l’extérieur des strictes cadres de la politique partisane. Sa création est formellement annoncée à l’occasion d’une conférence de presse le 21 janvier 1995[2]. Participent à cette conférence de presse la présidente de la Centrale de l’enseignement du Québec (CEQ) Lorraine Pagé, le président de la Confédération des Syndicats nationaux (CSN) Gérald Larose, le président de la Fédération des travailleurs du Québec (FTQ) Clément Godbout et la présidente du MNQ Louise Laurin[3].

De façon à assurer une coordination efficace des activités des organismes qu’ils représentent, les Partenaires pour la souveraineté se dotent rapidement d’un comité de coordination et d’une équipe permanente de quatre personnes issues des rangs des Partenaires ou embauchées sur une base contractuelle. Cette équipe permanente inclut notamment la porte-parole et ex-présidente de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal (SSJBM) Nicole Boudreau. Les Partenaires se dotent également d’un bureau de coordination situé sur le boulevard René-Lévesque, à Montréal, et d’un bulletin de liaison hebdomadaire : Le Référendum Express[4].

Au mois de mars 1995, les Partenaires pour la souveraineté précisent leurs idées dans le mémoire qu’ils présentent devant la Commission nationale sur l’avenir du Québec[5]. Rédigé par l'écrivaine Hélène Pedneault et intitulé « Vivre à haute voix au lieu de murmurer notre existence », ce document établit clairement les valeurs féministes et progressistes de la coalition souverainiste. Il insiste aussi pour présenter l’indépendance non pas comme « la fin [des] maux » des Québécois, mais bien comme « l’incarnation de [leurs] rêves »[6].

Le mois suivant la présentation de leur mémoire devant la Commission nationale, les Partenaires pour la souveraineté rencontrent le premier ministre du Québec Jacques Parizeau ainsi que le chef du Bloc québécois Lucien Bouchard. Au terme de leur première rencontre, la porte-parole des Partenaires Nicole Boudreau affirme devant les médias qu’il y aura désormais « une instance tripartite, composée du Bloc québécois, du Parti québécois et des Partenaires pour la souveraineté, qui s’assoiront à la table et qui discuteront ensemble de la meilleure stratégie possible pour gagner le référendum »[7]. Dans cet esprit, lors de la deuxième rencontre, Lucien Bouchard ajoute : « L’heure est à l’action. On est tous sur la même longueur d’onde. Tout va se faire en concertation avec les partenaires »[8].

Ayant ainsi établi le contact avec les chefs politiques, les Partenaires pour la souveraineté organisent une série d’événements pour mobiliser divers groupes de la société québécoise au cours du printemps et de l’été 1995. Un premier événement, le 17 mai 1995, cible les médias. Les suivant ciblent les jeunes, les Franco-Canadiens et les Acadiens, et les femmes[9].

Les femmes, qui forment plus de 50% de l’électorat québécois, font l’objet d’un effort de sensibilisation particulièrement important[10]. En effet, quelques semaines seulement avant le jour du scrutin, les sondages montrent que les femmes sont toujours moins disposées que les hommes à voter pour l’indépendance du Québec[11]. Les Partenaires attribuent en grande partie cet état de fait à la grande tendance des forces souverainistes à ignorer l’opinion des femmes. Afin de rejoindre les femmes où elles se trouvent, les Partenaires organisent l’Opération porte-voix, une tournée en autobus nolisé qui mène une cinquantaine de femmes aux quatre coins du Québec[12]. Y participent des femmes de divers milieux socioéconomiques et professionnels. Parmi ces femmes, on retrouve l’infirmière Lorraine Guay, l’ancienne ministre Monique Vézina et l’actrice Louisette Dussault[13]. La tournée prend fin à Montréal le 17 septembre 1995. Pour l’occasion, Hélène Pedneault conçoit et met en scène un spectacle à grand déploiement intitulé « SouveReines ». Ce dernier rassemble quelques centaines de militants et de militantes au populaire Club Soda de l’avenue Parc[14][15].

Outre ces diverses activités de mobilisation, les Partenaires pour la souveraineté entreprennent la production et la distribution de matériel promotionnel imprimé, dont des cartes postales et des autocollants, ainsi qu’une vidéocassette intitulée « Parole de Québécois-e ». Pendant deux semaines du mois de septembre, en parallèle avec l’Opération porte-voix, les Partenaires pour la souveraineté organisent un « blitz » radiophonique. Pour l’occasion, 70 stations de radio diffusent quotidiennement un message publicitaire de 30 secondes lu par la comédienne Johanne Fontaine et ponctué d’extraits de la chanson « Comme un million de gens », de l’artiste populaire Claude Dubois[16].

  1. MNQ, « Historique », sur Mouvement national des Québécoises et Québécois
  2. « Naissance d’une coalition souverainiste », Le Soleil, 21 janvier 1995, p. A10.
  3. Pierre O’Neill, « Le OUI ébauche son parapluie », Le Devoir, 21 janvier 1995, p. A8.
  4. Référendum Express, vol. 1, no 1, 17 février 1995, p. 1.
  5. André Bellemare, « Dernière journée des audiences de la commission nationale. Ultime offensive en faveur de la souveraineté », Le Nouvelliste, 29 mars 1995, p. 10.
  6. Partenaires pour la souveraineté, « Vivre à haute voix au lieu de murmurer notre existence »: Mémoire présenté à la Commission nationale sur l'avenir du Québec par Partenaires pour la souveraineté https://www.bibliotheque.assnat.qc.ca/DepotNumerique_v2/AffichageNotice.aspx?idn=39608
  7. Lia Lévesque, « L'union fait la force... L'avis de la coalition Partenaires pour la souveraineté », Le Nouvelliste, 11 avril 1995, p. 2.
  8. Lia Lévesque, « Parizeau accepte de faire une offre d'union économique au Canada », La Presse, 29 avril 1995, p. A1.
  9. Référendum Express, vol. 4, no 3 (vendredi 19 mai 1995), p. 1.
  10. Guy Lachapelle, « Le comportement politique des Québécoises lors de la campagne référendaire de 1995: une application de la théorie du dépistage », Politique et Sociétés, vol. 17, nos 1-2, p. 91-120.
  11. Micheline Dumont, « Parler à haute voix au lieu de murmurer notre existence », Le Devoir, 4 novembre 2015, p. A7.
  12. Lia Lévesque, « Les femmes souverainistes feront une tournée du Québec en autobus », Le Nouvelliste, 6 septembre 1995, p. 27.
  13. Témoignage de Suzanne Laferrière, recueilli par Sylvie Dupont, dans Qui est Hélène Pedneault? Fragments d'une femme entière, Montréal, Les Éditions du remue-ménage, 2013, p. 111.
  14. Lia Lévesque, « Les femmes s'intéressent à la souveraineté comme un outil de changement social », La Presse, 21 septembre 1995, p. B6.
  15. Témoignages de Nicole Boudreau, Gisèle Tremblay, Lorraine Pagé et Suzanne Laferrière, recueillis par Sylvie Dupont, dans Qui est Hélène Pedneault? Fragments d'une femme entière, Montréal, Les Éditions du remue-ménage, 2013, p. 110-111.
  16. « Blitz radiophonique pour le OUI », Le Soleil, 17 septembre 1995, p. A7.