Théorème de périodicité de Fine et Wilf

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En mathématiques, en informatique théorique, et notamment en combinatoire des mots, le théorème de Fine et Wilf est un résultat classique sur les périodes d'un mot. Il est nommé ainsi d'après les mathématiciens Nathan Fine et Herbert Wilf qui l'on démontré en 1965. On le trouve aussi sous la dénomination théorème de périodicité de Fine et Wilf ou théorème de Fine et Wilf sur les mots.

Le théorème de Fine et Wilf indique la longueur maximale exacte que peut avoir un mot avec deux périodes p et q sans avoir le plus grand commun diviseur de p et q comme une période. Cette valeur est p + q - pgcd(p,q).

Période[modifier | modifier le code]

Soit , avec des lettres, un mot sur un alphabet . Une période de est un entier tel que pour . Il revient au même de dire que s'écrit sous la forme , pour un entier positif , où est un mot de longueur , et est un préfixe de .

Énoncés[modifier | modifier le code]

Le théorème de Fine et Wilf peut s'énoncer de plusieurs manières équivalentes.

Premier énoncé[modifier | modifier le code]

Voici un premier énoncé :

Théorème — Soit un mot qui possède deux périodes et . Si , alors est une période de .

De plus, est la plus petite valeur pour laquelle l'énoncé est vrai.

Par exemple, le mot , de longueur 7, a les périodes 4, 5 (et 6), mais n'a pas la période pgcd(4,5)=1, et sa longueur est 7<4+5-1=8. Un autre exemple est un mot de Fibonacci comme le mot de longueur 11 qui possède les périodes 5 et 8 et pas la période 1 : il est de longueur 11<5+8-pgcd(5,8)=12. De fait, tous les mots sturmiens centraux sont des exemples où la borne de l’énoncé est atteinte.

L'énoncé peut aussi être exprimé de façon contraposée comme suit : Soit w un mot qui a deux périodes p et q, sans que pgcd(p,q) ne soit une période. Alors w est de longueur au plus p+q−pgcd(p,q)−1.

Deuxième énoncé[modifier | modifier le code]

Le théorème peut aussi être énoncé sous la forme suivante :

Théorème — Soient et deux mots, et supposons que les mots et , pour des entiers positifs et , ont un préfixe commun de longueur . Alors et sont puissances d'un mot de longueur .

Le premier énoncé implique clairement le deuxième. Réciproquement[1], supposons le deuxième énoncé vrai et que a deux périodes et et est de longueur au moins . Alors on a avec , un préfixe de et un préfixe de . Soit un multiple commun de et plus grand que et ; alors et ont tous deux le préfixe , et et sont puissance d'un mot de longueur , et ce nombre est une période de .

Les hypothèses de l'énoncé précédent peut être affaiblies sans modification de la conclusion comme suit :

Théorème (variante) — Soient et deux mots, et supposons qu'il existe deux mots de et qui ont un préfixe commun de longueur . Alors et sont puissances d'un mot de longueur .

Troisième énoncé[modifier | modifier le code]

Une autre formulation est l'énoncé original de l'article de Fine et Wilf[2] :

Théorème (énoncé original) — Soient et deux suites périodiques, respectivement de période et . Si pour entiers consécutifs, alors pour tout .

Là aussi, les auteurs ajoutent que l'énoncé est faux si est remplacé par une valeur plus petite.

La démonstration originale que voici a bénéficié, d'après les auteurs, d'une formulation de Ernst G. Straus. On peut supposer que les et sont des nombres réels. On peut aussi supposer que pour , car si pour , alors la périodicité des suites implique que pour tout .

La périodicité des suites s’exprime par une forme particulière de leurs séries génératrices. On définit des séries formelles

et .

Par la périodicité, on a

et

pour des polynômes et de degré au plus et . Maintenant, comme le polynôme divise et on a

pour un polynôme de degré au plus . Si les premiers coefficients de sont nuls, alors le polynôme est identiquement nul, donc .

Énoncés complémentaires[modifier | modifier le code]

L'article original de Fine et Wilf contient deux autres résultats, voisins du premier :

Théorème — Soient f(x) et g(x) deux fonctions périodiques continues de périodes a et b respectivement, où a/b est un nombre rationnel de la forme a/b=p/q avec p et q premiers entre eux. Si f(x)=g(x) sur un intervalle de longueur a+b-b/q, alors f=g. Le résultat est faux si a+b-b/q est remplacé par une valeur plus petite.

et

Théorème — Soient f(x) et g(x) deux fonctions périodiques continues de périodes a et b respectivement, où a/b est un nombre irrationnel. Si f(x)=g(x) sur un intervalle de longueur a+b, alors f=g. Le résultat est faux si a+b est remplacé par une valeur plus petite.

Structure des périodes[modifier | modifier le code]

Le théorème de Fine et Wilf répond à l'observation que toutes les périodes d'un mot ne sont pas multiples de la plus petite période, en constatant que les « grandes » périodes ne sont pas de cette forme. La structure des périodes a été étudié notamment par Guibas et Odlysko qui ont prouvé[3] :

Pour tout mot w, il existe un mot v de même longueur sur un alphabet binaire qui a le même ensemble de périodes.

Variantes[modifier | modifier le code]

De nombreuses variantes ont été étudiées, par exemple une extension à plus de deux périodes[4],[5], à plusieurs dimensions[6], et à des périodes abéliennes[7]. Deux mots u et v sont dits commutativement équivalents s'ils contiennent chacune le même nombre d'occurrences de chaque facteur. Ainsi, aabbb, babab, bbbaa sont commutativement équivalent. Un mot w possède une période abélienne de longueur p s’il se factorise en

,

sont de longueur p et commutativement équivalents, et où t est un préfixe d'un mot commutativement équivalent aux . L’entier p est une appelé une période abélienne de w (ou période abélienne initiale). Par exemple, le mot babaaabaabb possède les périodes abéliennes 5, 7,...,11, mais pas 6 parce que baabb possède 3 occurrences de b et n'est donc pas facteur abélien de babaaa.

Soient p, q >1 deux entiers premiers entre eux. Si un mot w possède deux périodes abéliennes p et q avec |w|≥pq, alors w est puissance d’une lettre..

De plus, des majorations sur la longueur de w existent, mais dans le cas où p et q ne sont pas premiers entre eux, il peut ne pas avoir de majorant. Ainsi, le mot infini

aabbbabababa...

a les périodes abéliennes 4 et 6, mais n'a pas la période 2.

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Ziosilvio, « Fine and Wilf’s theorem on words », sur planetmath.org, .
  2. Fine et Wilf 1965.
  3. Voir par exemple Carton 2008, Th. 1.12.
  4. Gabriella Castelli, Filippo Mignosi et Antonio Restivo, « Fine and Wilf’s theorem for three periods and a generalization of Sturmian words », Theoretical Computer Science, vol. 218,‎ , p. 83-94.
  5. R. Tijdeman et L. Zamboni, « Fine and Wilf words for any periods », Indag. Math N.S., vol. 14, no 1,‎ , p. 135-147.
  6. Filippo Mignosi, Antonio Restivo et Pedro V. Silva, « On Fine and Wilf’s theorem for bidimensional words », Theoretical Computer Science, vol. 292,‎ , p. 245–262.
  7. Juhani Karhumäki, Svetlana Puzynina et Aleksi Saarela, « Fine and Wilf's theorem for k-abelian periods », Int. J. Found. Comput. Sci., World Scientific, vol. 24, no 7,‎ , p. 1135-1152 (ISSN 0129-0541, DOI 10.1142/s0129054113400352, résumé).

Bibliographie[modifier | modifier le code]

Article original
Manuels
En ligne

Articles connexes[modifier | modifier le code]