Lud-en-Brume
| Titre original |
(en) Lud-in-the-Mist |
|---|---|
| Format | |
| Langue | |
| Auteur | |
| Genre | |
| Date de parution | |
| Pays | |
| Éditeur |
Prix Elbakin.net (d) () |
Lud-en-Brume (titre original : Lud-in-the-Mist) est un roman de fantasy précurseur du genre, écrit par la romancière et poétesse britannique Hope Mirrlees et publié pour la première fois en . Troisième roman de l'autrice, il s'agit de l'une des premières œuvres de fantasy rédigées par une femme ; il s'inscrit dans le courant du réenchantement, né durant l'entre-deux-guerres.
Peu reconnu à sa sortie et oublié pendant plusieurs décennies, Lud-en-Brume est réédité pour la première fois en par Ballantine Books, puis à de nombreuses reprises à partir des années , avec une préface de Neil Gaiman. Il est traduit en français en , et remporte, en , le prix Elbakin.net du « Meilleur roman fantasy traduit ».
Résumé
[modifier | modifier le code]Le roman se déroule dans l'état imaginaire de Dorimare, dont la capitale est la ville marchande de Lud-en-Brume[1]. Autrefois gouverné par le fantasque et cruel duc Aubrey, lié au pays des fées voisin (Faërie), Dorimare a rejeté toute forme de magie après sa chute, deux siècles avant le début de l'intrigue[1],[2]. Depuis, les marchands et bourgeois qui dirigent la contrée imposent un strict rationalisme et considèrent comme obscène toute allusion à Faërie[2],[3]. Le protagoniste, Nathaniel Chanteclerc, maire de Lud-en-Brume, est un notable d’âge mûr attaché à ses devoirs civiques et aux produits locaux, mais il est hanté depuis sa jeunesse par une mystérieuse note de musique, mélancolique et troublante, qui évoque la présence refoulée de la magie[3],[4].
L’équilibre fragile de Lud-en-Brume bascule quand Ranulph, le fils de Nathaniel, adopte un comportement étrange après avoir consommé du fruit féerique, substance interdite mais introduite clandestinement en ville par le cours de la rivière Dapple[2],[5]. Dans le même temps, sa fille Prunella et ses camarades de classe tombent sous l’emprise de la musique des fées lors de leurs leçons de danse[3],[5]. Nathaniel découvre que ces événements sont liés au médecin Endymion Lalorgne, personnage ambigu, auteur anonyme d’un traité sur les survivances féeriques à Dorimare et complice de forces surnaturelles hostiles : Lalorgne pousse Ranulph vers la frontière de Faërie et orchestre une crise politique qui menace l’ordre établi[3].
Confronté à la disparition de ses enfants et à l'ébranlement de ses certitudes, Nathaniel est contraint d’affronter ce qu’il avait toujours voulu nier : la réalité de Faërie, l’influence persistante du duc Aubrey et la présence des « gens silencieux », une appellation qui désigne les fées ainsi que les revenants en quête de vengeance[3]. Son enquête prend la forme d’un récit mêlant conte de fées et roman policier, marqué par une atmosphère tantôt comique, tantôt gothique[5].
Le roman atteint son climax lorsque Nathaniel franchit la frontière de Faërie : dans cet univers aux contours oniriques et changeants, il parvient à libérer les écolières envoûtées, puis son fils. Sa victoire repose sur l’invocation de la Loi, conçue comme un antidote rationnel à l’illusion féerique, plutôt que sur la magie elle-même[3]. Au terme du récit, Nathaniel sort transformé : jadis notable sceptique et timoré, il devient l’intermédiaire entre Lud et le monde féerique, tandis que Dorimare tout entier apprend à réintégrer ce que ses habitants avaient voulu refouler[3],[5].
Genèse et contexte de rédaction
[modifier | modifier le code]
Lud-en-Brume est le troisième roman de Hope Mirrlees. Il est écrit après ses deux premiers romans réalistes, Madeleine: One of Love’s Jansenists () et Le Choc en retour (The Counterplot, ), et son poème moderniste Paris, publié en [6],[7]. Il s'agit de son unique œuvre de fantasy ; elle s'inscrit dans une période littéraire marquée par une floraison d’œuvres de ce genre dans l’entre-deux-guerres, aux côtés de textes de Lord Dunsany ou Sylvia Townsend Warner[8],[9].
En effet, comme d'autres récits des années , Lud-en-Brume peut être lu comme une réponse au désenchantement engendré par la Première Guerre mondiale. Dans la lignée d’ouvrages tels que La Fille du roi des elfes de Dunsany, ce roman fait partie d'un courant de la fantasy britannique qui plaide pour un réenchantement, notamment parce qu'il met en scène le topos d’un royaume féerique séparé du monde humain[9],[10]. Le motif du fruit défendu est central dans le roman ; il s’inscrit également dans une tradition littéraire antérieure, notamment celle du poème narratif Marché gobelin (Goblin Market) de Christina Rossetti (publié en ), que Mirrlees reprend et reconfigure dans un cadre post-victorien[8],[11].
L’œuvre est aussi à l'image des réseaux intellectuels et artistiques de l’autrice. Mirrlees évolue dans le cercle avant-gardiste du Bloomsbury Group, et côtoie notamment Virginia Woolf et T. S. Eliot[12],[13]. C'est l'helléniste et anthropologue Jane Ellen Harrison, sa compagne et son mentor intellectuel, qui exerce l'influence la plus importante sur l'écriture de Mirrlees. Harrisson défend une lecture sociologique de la mythologie grecque et souligne le rôle des pratiques rituelles, une vision qui transparaît dans Lud-en-Brume où la confrontation entre le rationalisme bourgeois et les résidus de magie s’inspire de ses théories[6],[12],[13].
Lud-en-Brume est le prolongement des préoccupations esthétiques et intellectuelles de Mirrlees. Là où son poème Paris explore une sensibilité moderniste cosmopolite, Lud-en-Brume traduit une quête dans le registre allégorique en réinvestissant l'héritage du conte de fées et du folklore européen. Des critiques y voient une transposition des tensions contemporaines de son écriture : la consommation de fruit féérique a pu être interprétée comme une métaphore de l’inspiration poétique, du désir sexuel, de la rébellion de la jeunesse ou encore de la diffusion des drogues dans les années 1920[14]. De même, le procès du personnage médecin, Endymion Lalorgne, est rapproché de faits divers judiciaires de l’époque ; enfin, les bouleversements sociaux et politiques de Dorimare peuvent évoquer la montée du bolchevisme et de l’anarchisme dans l’Europe de l’entre-deux-guerres[14].
Certains critiques, comme Jean Mills, proposent une lecture queer du roman. Ils soulignent que le monde imaginaire de Dorimare et de Faërie, avec son fruit interdit et ses transgressions des normes sociales, inscrit dans la fiction les désirs et les subjectivités marginalisés de Mirrlees elle-même, et évoque son couple avec Jane Ellen Harrison[15].
Analyse
[modifier | modifier le code]Genre littéraire
[modifier | modifier le code]Lud-en-Brume est un roman difficile à classer : il relève de plusieurs genres littéraires et sous-genres, selon les interprétations critiques. À sa parution, il a été décrit comme un conte de fées doté d’une profondeur morale et psychologique, voire comme une allégorie[16]. Julia Briggs qualifie le texte de « fable » sur la vie bourgeoise, perturbée par l’irruption du fruit féerique[17]. Le roman est souvent rapproché de la high fantasy en raison de certains éléments annonciateurs de l’univers tolkienien, tels que les noms de personnages et de lieux. Cette classification est jugée erronée par Jean Mills : contrairement aux récits épiques du genre, Lud-en-Brume ne cherche pas à construire un monde secondaire grandiose et autonome, ni à proposer de happy end caractéristique du conte de fées, tel que théorisé par Tolkien[16]. Farah Mendlesohn met en lumière la dimension « liminale » de l’œuvre : le surnaturel y est encodé dans une forme de latence et de refus d’interprétation, maintenant une ambiguïté qui perdure au-delà de la fin du récit, et qui se situe alors à la frontière entre fantastique et fantasy[18]. Jean Mills souligne son inscription dans une tradition de satire ménippée, perceptible à travers les motifs du grotesque et du carnavalesque, utilisés par Mirrlees pour explorer des enjeux littéraires, sociaux et politiques, et proposer un espace de subversion et d’inclusion[16].
Le roman est également analysé comme une œuvre moderniste : il entre en résonance, par ses symboles, avec le contexte historique des années : le fruit féerique fonctionne comme une image polysémique, elle peut évoquer l’inspiration artistique, la liberté sexuelle ou la consommation de cocaïne[19]. Enfin, Roz Kaveney considère Lud-en-Brume comme un texte fondateur de la dark fantasy, dans la mesure où il associe l’ennui et l’exploitation sociale des bourgeois de Lud à la sauvagerie meurtrière du monde féerique, et où il propose le droit comme principe susceptible de réconcilier ces deux forces[20].
Style
[modifier | modifier le code]Le style de Hope Mirrlees, dans Lud-en-Brume, est marqué par un mélange de registres qui reflète la complexité générique du roman. Influencée par la tradition ménippée et l'esthétique carnavalesque (telle que décrite par Mikhaïl Bakhtine), l'autrice recourt à la vulgarité et au scandaleux, en mettant en scène des personnages burlesques aux comportements exagérés, proches de la folie ou de l’hallucination[21]. Ces excès ne relèvent pas seulement de l’effet comique : ils révèlent l’hypocrisie et les contradictions de la société bourgeoise[21]. À ce registre satirique, s’ajoute une utilisation de la langue qui relève d’une forme de symbolisme. Certains chercheurs lisent chez Mirrlees un usage du langage poétique comme une forme de résistance à une modernité rationaliste et désenchantée : sa prose renoue avec la tradition romantique, où le langage magique répare la fracture entre nature et surnaturel[22]. Le ton général du roman oscille entre préciosité et étrangeté ; Roz Kaveney note son caractère « assured and urbane » (« assuré et raffiné ») ainsi que sa capacité à introduire une menace diffuse et un bizarre inquiétant[23].
Thèmes et interprétation
[modifier | modifier le code]Le fruit défendu et le désir
[modifier | modifier le code]
Le motif du fruit défendu occupe une place centrale dans Lud-en-Brume. Le fruit féérique, produit en provenance de Faërie, est à la fois importé et innommable : il incarne un désir interdit, perçu comme indécent et antisocial par les habitants de Dorimare[24],[25]. Cette dimension rappelle la tradition littéraire du péché originel biblique, tout en la complexifiant : chez Mirrlees, le fruit n’est pas uniquement sacrilège, il est remède et source de réconciliation. Consommé, il provoque une crise sociale et identitaire, mais ouvre également la voie à une régénération spirituelle et collective[26].
Le fruit joue donc le rôle d’un outil liminaire : il rend possible une traversée vers l’inconnu et une confrontation avec le refoulé, psychologique ou culturel. Comme le note Eva Lencina, il est moins un objet en soi qu’un « MacGuffin » : sa fonction est de déclencher le processus (narratif et symbolique) de désordre, de guérison, de retour du sacré[26].
Mythes et réenchantement
[modifier | modifier le code]Le récit s’articule autour du mouvement de réenchantement, caractéristique des textes de la période de l'entre-deux-guerres. Dorimare est d’abord décrite comme un État bourgeois, rationnel et désacralisé ; la religion et la poésie ont été reléguées et remplacées par la loi et le commerce[25]. Pourtant, le folklore et les croyances populaires (chansons, danses, dictons) témoignent de la persistance d’un substrat mythique et rituel, qui réapparaît au fil de l’intrigue[19].
Ce retour du mythe s’inscrit dans le cadre théorique des ritualistes de Cambridge : Mirrlees s’inspire de Jane Ellen Harrison pour montrer que les mythes trouvent leur origine dans des pratiques rituelles et communautaires[27]. Le personnage de Winckelmann, double fictif de l’archéologue Johann Joachim Winckelmann, est le porte-parole des idées de Harrison[27]. L’imaginaire de Mirrlees fonctionne comme une réactualisation de la pensée mythique face à une modernité jugée désenchantée[22].
Paganisme, christianisme et syncrétisme
[modifier | modifier le code]Le roman articule des références païennes avec un symbolisme chrétien. Si le christianisme institutionnel est absent de l'œuvre, ses structures mythiques demeurent en filigrane : comme le montre Brian Attebery, Mirrlees substitue aux mythes chrétiens classiques (le Graal, le prêtre-roi) un ensemble composite de folklore anglais et de rites archaïques[28]. Nathaniel Chanteclerc renvoie à la figure de la justice sociale incarnée par la déesse grecque Thémis, et peut se comprendre comme une transposition d’une théologie implicite[29].
D’autres critiques soulignent la présence d’un sous-texte chrétien dans le roman. Eva Lencina met en évidence une structure trinitaire : Endymion Lalorgne dans le rôle du Père, détenteur d’un savoir secret ; Nathaniel Chanteclerc dans celui du Fils, marqué par la peur de la mort et la mélancolie ; et le duc Aubrey, figure de l’Esprit, souverain invisible de Faërie[30]. Toutefois, cette trinité est inversée par rapport à la tradition : c’est le Fils qui se trouve dans une posture de passivité et d’apprentissage[30]. Enfin, la symbolique du paradis perdu traverse le texte : la nostalgie d’un âge d’or inscrit le roman dans la tradition du motif de l’expulsion du jardin d’Éden, mais aussi dans l’utopie romantique et le rêve d’un renouveau social[31].
Subversion politique et critique sociale
[modifier | modifier le code]Lud-en-Brume peut aussi se lire comme une satire politique de la bourgeoisie. Le rejet de Faërie par les institutions de Dorimare traduit la volonté d’un État moderne de nier ses héritages spirituel et culturel, au profit d’une rationalité utilitariste[32]. La loi devient une fiction, un outil de refoulement collectif, que Nathaniel lui-même finit par dénoncer[27]. Cette dimension politique s’inscrit dans les idéaux de gauche de Mirrlees et Harrison, marqués par un rejet du capitalisme bureaucratique et une sympathie pour les utopies sociales[32]. La répression de l’imaginaire et de la magie peut être interprétée comme une métaphore des mécanismes d’exclusion mis en place par la bourgeoisie, qui refoule à la fois le désir, le folklore, et les classes populaires qui en sont porteuses[32].
Face à cela, l'absurde et le carnavalesque expriment la puissance subversive de l’imaginaire contre l’ordre établi. En ce sens, le roman apparaît comme une critique du conformisme social et un appel à une société réintégrant ses marges, ses passions et ses mythes[24],[33].
Lecture queer et allégorique
[modifier | modifier le code]Enfin, le roman a fait l’objet d’interprétations queers. Le fruit défendu serait une allégorie du désir non normatif ; il suscite fascination et répulsion dans une société qui a peur de la transgression. La relation entre Nathaniel et les figures masculines de Faërie (Lalorgne, Portunus, Aubrey) serait alors un parcours initiatique vers l’acceptation d’une part refoulée de soi. Cette lecture est appuyée par le contexte biographique de Mirrlees et Harrison[27]. Le roman, en inscrivant la tension entre refoulement et dévoilement dans sa trame narrative, offre une métaphore de l’expérience queer, à la fois marginalisée et génératrice de nouveaux possibles sociaux et spirituels[27].
Publication et réception
[modifier | modifier le code]Premières éditions (1926-1927)
[modifier | modifier le code]Lud-en-Brume est publié pour la première fois en au Royaume-Uni chez William Collins, Sons[12],[34], puis en aux États-Unis chez Alfred A. Knopf[35]. Troisième roman de Hope Mirrlees, il est en même temps son dernier : contrairement à d’autres autrices britanniques de sa génération, comme Stella Benson ou Sylvia Townsend Warner, Mirrlees n’a pas poursuivi sa carrière littéraire après cette publication[36],[37].
À sa sortie, Lud-en-Brume reçoit peu d’échos médiatiques[38]. L'une des rares critiques, publiée dans Thersites, la revue du Newnham College de l'université de Cambridge, souligne sa portée morale et psychologique, et le rapproche de textes comme Les Voyages de Gulliver de Jonathan Swift ou La Reine des fées d’Edmund Spenser[16]. Malgré cette appréciation favorable, Lud-en-Brume tombe dans l’oubli, partageant le sort d’autres œuvres de fantasy du début du xxe siècle qui ne sont pas rééditées et passent longtemps inaperçues[39].
Redécouverte dans la collection « Ballantine Adult Fantasy series » (1970-1977)
[modifier | modifier le code]Lud-en-Brume est redécouvert par l'éditeur et romancier Lin Carter, qui l’intègre en 1970 dans la collection « Ballantine Adult Fantasy series » de Ballantine Books, qui publie aux États-Unis[12]. Cette initiative s’inscrit dans le contexte de la vague de popularisation de la fantasy, suscitée par la redécouverte de Tolkien dans les années , qui incite les éditeurs à explorer un fonds de textes précurseurs de la fantasy moderne[37],[40]. L’édition de Ballantine est publiée sans l’autorisation de Mirrlees, mais elle ranime l’intérêt pour le roman et l’inscrit dans un nouveau canon de la fantasy anglo-saxonne[12].
Cette réédition joue un rôle majeur dans la reconnaissance ultérieure de Lud-en-Brume. Elle influence directement plusieurs auteurs de fantasy, parmi lesquels James P. Blaylock et Neil Gaiman[11]. Le roman devient une référence pour une génération d’écrivains britanniques et influence leurs textes, notamment Stardust de Gaiman lui-même et Jonathan Strange et Mr Norrell de Susanna Clarke[41],[42] ; ils y voient une alternative aux modèles tolkieniens dominants dans les années et [43]. L'ouvrage est réédité à plusieurs reprises, notamment en 1977 par Del Rey, et reste disponible sur le marché anglophone[12].
Consécration critique (années 2000-2010)
[modifier | modifier le code]Après une période de relative invisibilité, Lud-en-Brume bénéficie d’une nouvelle mise en avant en , grâce à la collection « Gollancz Fantasy Masterworks » de Gollancz (filiale d'Orion Books)[12]. Cette édition, accompagnée d'une préface rédigée par Neil Gaiman et d'une introduction par Douglas A. Anderson, réaffirme le statut de l’ouvrage comme classique méconnu de la fantasy littéraire[12],[37],[16]. Gaiman y décrit le livre comme un texte hybride, oscillant entre récit pastoral, comédie, roman gothique et enquête policière, sans que l’un de ces registres ne l’emporte sur les autres. Cette caractérisation souligne l’une des particularités majeures du roman : sa résistance aux catégorisations génériques strictes[8].
La critique universitaire se penche sur l’œuvre, souvent grâce à l’impulsion de lecteurs et auteurs contemporains. Michael Swanwick consacre plusieurs articles à Mirrlees et contribue à la reconnaissance académique de son travail[12]. Farah Mendlesohn souligne le jeu de Lud-en-Brume avec les conventions du genre de la fantasy[16]. Ces réévaluations replacent le roman dans une généalogie de la fantasy moderne, aux côtés d'Un voyage en Arcturus de David Lindsay ou de La Fille du roi des elfes de Lord Dunsany[37],[39].
Traductions et réception contemporaine
[modifier | modifier le code]Lud-en-Brume est traduit pour la première fois en allemand en , sous le titre Flucht ins Feenland, chez Piper Verlag[44]. Il est traduit en français en par Julie Petonnet-Vincent, aux Éditions Callidor, dans la collection « L'Âge d'or de la fantasy »[45]. Cette édition contribue à faire connaître l’œuvre dans le monde francophone, où Mirrlees était confidentielle. La traduction reçoit un accueil enthousiaste, et remporte le prix Elbakin.net du « Meilleur roman fantasy traduit » de l'année [46]. Il est traduit en néerlandais en , sous le titre Lud-in-de-mist, chez De Boekerij[47].
En , le roman paraît en version poche chez l'éditeur Le Livre de poche, confirmant son entrée dans le paysage éditorial français[46]. Cette réédition favorise sa diffusion auprès d’un public plus large, et s’inscrit dans le mouvement de réhabilitation des grandes œuvres oubliées de la fantasy du début du xxe siècle. Aujourd’hui, Lud-en-Brume est considéré comme un texte culte par les amateurs du genre et comme une œuvre fondatrice dans l’histoire littéraire de la fantasy, dont l’influence se mesure autant chez des auteurs établis, comme Neil Gaiman ou Susanna Clarke, que dans la critique universitaire contemporaine[36],[43].
Adaptation
[modifier | modifier le code]En , Lud-en-Brume est adapté par la BBC sous forme d'une pièce radiophonique, qui est diffusée dans le cadre de l’émission Drama on 4[48]. Le texte est dramatisé par la scénariste Joy Wilkinson (autrice de la série Doctor Who)[48],[49]. Cette production s’inscrit dans un programme spécial consacré à Halloween, aux côtés d’une adaptation de Laura Willowes de Sylvia Townsend Warner, autre roman de l'imaginaire paru en [48]. Dans cette version audio de Lud-en-Brume, narrée par Olivia Poulet, Neil Gaiman prête sa voix au personnage du duc Aubrey dans un caméo remarqué[49]. La bande-son est composée et interprétée par le duo The Ciderhouse Rebellion[48].
Bibliographie
[modifier | modifier le code]
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
- (en) Brian Attebery, « “Make It Old”: The Other Mythic Method », dans Tomasz Ratajczak et Bogdan Trocha, In the Mirror of the Past: Of Fantasy and History, Cambridge Scholars Publishing, , 115 p. (ISBN 9781443867672, lire en ligne
), p. 3-19. 
- (en) Lizzie Harris McCormick, Jennifer Mitchell et Rebecca Soares, The Female Fantastic : Gendering the Supernatural in the 1890s and 1920s, New York, Routledge, , 246 p. (ISBN 978-1-351-10779-2).

- (en) Brian Stableford, The A to Z of Fantasy Literature, Lanham, Plymouth, The Scarecrow Press, Inc. (no 46), , 499 p. (ISBN 978-0-8108-6345-3).

Références
[modifier | modifier le code]- (en) Adam Roberts, Fantasy : A Short History, Bloomsbury Publishing, , 296 p. (ISBN 978-1-3504-0784-8, lire en ligne), p. 82-84.
- (en) Hal (Mithrandir) Broome, « Review: Lud-in-the-Mist, by Hope Mirrlees », Mallorn: The Journal of the Tolkien Society, no 4, , p. 14 (lire en ligne).
- Attebery 2014, p. 10-14.
- ↑ (en) Edward James et Farah Mendlesohn, The Cambridge Companion to Fantasy Literature, Cambridge University Press, (ISBN 978-0-521-42959-7).
- (en) Robin Anne Reid, Women in Science Fiction and Fantasy, Greenwood, (ISBN 978-0-313-33589-1), p. 39.
- Attebery 2014, p. 4.
- ↑ (en) John T. Connor, « Hope Mirrlees and the Archive of Modernism », Journal of Modern Literature, vol. 37, no 2, , p. 180-181 (DOI 10.2979/jmodelite.37.2.177, lire en ligne).
- Reid 2009, p. 36-39.
- Stableford 2009, p. 342-343.
- ↑ Stableford 2009, p. 139-140.
- Stableford 2009, p. 282.
- Reid 2009, p. 225-226.
- Attebery 2014, p. 8-10.
- Attebery 2014, p. 15-16.
- ↑ Harris McCormick, Mitchell et Soares 2019, p. 68-69.
- Harris McCormick, Mitchell et Soares 2019, p. 97-98.
- ↑ (en) Julia Briggs, « Hope Mirrlees and Continental Modernism », dans Bonnie Kime Scott, Gender in Modernism: New Geographies, Complex Intersections, University of Illinois Press, (ISBN 9780252074189, lire en ligne), p. 266.
- ↑ (en) Farah Mendlesohn, Rhetorics of Fantasy, Wesleyan University Press, , 336 p. (ISBN 9780819573919, lire en ligne), p. 242-243.
- Attebery 2014, p. 15.
- ↑ James et Mendlesohn 2012, p. 221.
- Harris McCormick, Mitchell et Soares 2019, p. 104.
- Lencina 2025, p. 358.
- ↑ (en) Lorna Sage, Germaine Greer et Elaine Showalter, The Cambridge guide to women's writing in English, Cambridge University Press, , 696 p. (ISBN 9780521668132, lire en ligne), p. 435.
- Harris McCormick, Mitchell et Soares 2019, p. 103-104.
- Attebery 2014, p. 11-12.
- Lencina 2025, p. 356-357.
- Harris McCormick, Mitchell et Soares 2019, p. 108-109.
- ↑ Attebery 2014, p. 16-17.
- ↑ Attebery 2014, p. 14-15.
- Lencina 2025, p. 354-355.
- ↑ Lencina 2025, p. 359.
- Harris McCormick, Mitchell et Soares 2019, p. 105-106.
- ↑ Harris McCormick, Mitchell et Soares 2019, p. 107.
- ↑ Vivien Féasson, La retraduction comme outil de légitimation du genre : Le cas de la fantasy en langue française, Paris, Université Paris Diderot, , 453 p. (HAL tel-03178933v1, lire en ligne), p. 72.
- ↑ James et Mendlesohn 2012, p. 146.
- (en) Brian Stableford, Gothic Grotesques: Essays on Fantastic Literature, Borgo Press, , 224 p. (ISBN 9781434403391, lire en ligne), p. 112-113.
- (en) Douglas A. Anderson, « Fairy Elements in British Literary Writings in the Decade Following the Cottingley Fairy Photographs Episode », Mythlore, vol. 32, no 1, , p. 8-9 (lire en ligne).
- ↑ (en) Edward Wagenknecht, « The Little Prince Rides the White Deer: Fantasy and Symbolism in Recent Literature », College English, vol. 7, no 8, , p. 433 (DOI doi.org/10.2307/370458, lire en ligne).
- (en) Farah Mendlesohn et Edward James, A Short History of Fantasy, Middlesex University Press, , 285 p. (ISBN 9781904750680, lire en ligne), p. 31.
- ↑ Attebery 2014, p. 10.
- ↑ (en) Caroline Duvezin-Caubet, « The Return of the Fairies: Jonathan Strange and Mr Norrell by Susanna Clarke », Fantasy Art and Studies, no 1, , p. 20-26 (lire en ligne
).
- ↑ (en) Eva Lencina, « Magick as a Threshold to the Forgotten: Hope Mirrlees and Susanna Clarke's Fantasy », Sinestesie Online, no 46, , p. 350-363 (ISSN 2280-6849, lire en ligne
).
- (en) Robert Eaglestone, Reading The Lord of the Rings: New Writings on Tolkien's Classic, Continuum, , 214 p. (ISBN 9780826484598), p. 162-163.
- ↑ (de) Thomas Harbach, « Review », Alien Contact, Shayol, no 3, , p. 74 (ISBN 978-3-926126-31-3).
- ↑ Féasson 2019, p. 153.
- « Lud-en-Brume », Elbakin.net, (lire en ligne [archive du ]).
- ↑ (nl) Debbie, « De 7 meest fantastische sf- & fantasyboeken van september », Hebban, (lire en ligne
).
- (en) « BBC - Drama on 4: Lud-in-the-Mist »
, sur BBC, (consulté le ).
- (en) Rich Johnston, « Neil Gaiman's Cameo Role In Lud-In-The-Mist, Streaming Now From BBC », Bleeding Cool, (lire en ligne
).
Liens externes
[modifier | modifier le code]
- Ressources relatives à la littérature :
