Leucose bovine

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Le terme de leucose bovine regroupe un ensemble d'affections qui touchent aux lignées cellulaire immunitaires des bovins.

Types de leucose[modifier | modifier le code]

On distingue deux formes de leucose bovine[1]:

  • la leucose bovine enzootique (LBE) est une maladie infectieuse et contagieuse des bovins d'origine virale (retrovirus du genre Deltaretrovirus ). Les signes cliniques de la LBE se manifestent généralement chez les animaux âgés d'au moins trois ans[2],[3],[4].
  • la leucose bovine sporadique, qui se manifeste généralement chez les jeunes bovins, sous trois une des formes suivantes : juvénile[5], thymique ou cutanée. Les causes de la Leucose bovine sporadique ne sont pas encore connues.

Symptômes[modifier | modifier le code]

L'expression de la LBE peut se décomposer en trois phases[3],[4],[6]:

  • la phase asymptomatique. Selon l'ANSES[6], l'animal infecté par le virus présente "Un syndrome grippal peut être exceptionnellement observé dans les jours qui suivent l’infection mais, dans la très grande majorité des cas, les bovins ne présentent aucun signe clinique et sont asymptomatiques. Pour 50 % à 70 % des bovins infectés, cette phase asymptomatique va persister toute la vie de l’animal."
  • la phase de lymphocytose persistante se développe chez environ un tiers des bovins infectés. Ces animaux développeront une prolifération lymphocytaire persistante chronique sans signe clinique apparent. La lymphocytose peut se maintenir pendant de nombreuses années.
  • la phase tumorale. Les bovins infectés développeront une leucémie, un lymphome ou dans la majorité des cas, un lymphosarcome multicentrique[3]. Les signes cliniques dépendent de la localisation des tumeurs. L’envahissement des nœuds lymphatiques superficiels est fréquent. Lorsque les tumeurs siègent dans les nœuds lymphatiques intra-abdominaux et le tube digestif, l’évolution de la maladie est lente par obstruction du tube digestif, avec anorexie, amaigrissent et baisse de production progressive de l'animal atteint. L'envahissement de la rate peut entrainer la mort subite de l'animal. Les tumeurs ont aussi être observées dans le cœur, l’utérus, la moelle épinière, les poumons et l'espace rétro-oculaire.

L'évolution vers la lymphocytose persistante ou la phase tumoral est multifactorielle: facteurs génétiques propres à l'animal, interactions virus-hôte, environnement, etc.

Le virus de la LBE engendre des dysfonctionnements immunologiques chez le bovin infecté et une plus grande susceptibilité à d’autres maladies d’étiologie infectieuse. Des enquêtes ont aussi mis en évidence une diminution de la production laitière, la diminution de la fertilité, une moins bonne réponse vaccinale et la diminution de l'âge d'abattage des animaux infectés[4]. Selon l'Organisation mondiale de la santé animale (OMSA) - anciennement Office International des Épizooties (OIE), « malgré l'absence de signes cliniques évidents au cours de la longue période d'infection infraclinique, les pertes économiques causées par des infections persistantes par le virus de la LBE sont pertinentes ».

Transmission[modifier | modifier le code]

Le virus de la LBE est transmis d'un bovin infecté à un bovin indemne par voie verticale et horizontale. Environ 10% des veaux sont infectés par leur mère in utéro ou au moment de la mise bas. La transmission de virus d'une vache infectée à son veau par le colostrum ou le lait a aussi été rapportée[7].

La transmission du virus se fait majoritairement par un vecteur qui permet le transfert de sang porteur de lymphocytes infectants d'un animal à l'autre[3]. Le risque de transmission iatrogène, par des pratiques vétérinaires ou zootechniques à l'aide d'outils souillées par du sang est élevé. La transmission du virus a été constaté lors de l'utilisation répétée d'une même aiguille ou de gant de fouille, mais aussi lors d'écornages ou parages sanglants, transfusions sanguines, tatouages, poses de boucles auriculaires, ou encore l'utilisation de semences provenant d'un taureau infecté. Le risque de transmission par contact entre animaux est élevé dans les élevages à forte prévalence. Le virus est transmissible par certains insectes piqueurs hématophages (notamment les tabanidés)[8].

Diagnostic[modifier | modifier le code]

Le diagnostic clinique de la LBE est relativement rare, et repose sur la mise en évidence d'un lymphosarcome.

Le virus peut être mis en évidence directement dans les tissus d'un animal infecté par polymerase chain reaction (PCR) ou microscopie électronique. Les tests d'immunodiffusion sur gélose (AGID) et (ELISA) sont utilisés pour détecter les anticorps contre le virus de la LBE dans le sérum et/ou le lait[4]. Ces tests ont été utilisés par différents pays pour éradiquer la LBE de leur cheptel bovin.

Le virus de la LBE et les autres espèces animales[modifier | modifier le code]

La manifestation de signes cliniques après infection naturelle ne se produit que chez les bovidés (Bos taurus et Bos indicus), les buffles d'eau et les capybaras. Les moutons développent aussi des tumeurs suite à l'inoculation expérimentale du virus de la LBE. Plusieurs espèces de mammifères (moutons, chèvres, cerfs, antilopes, lapins, rats, cobayes, chats, chiens, singes rhésus, chimpanzés, cochons) produisent des anticorps en réponse à l'infection expérimentales[9].

Le virus de la LBE a été retrouvée chez l'homme, et son implication dans l'apparition de certains cancers du sein fait l'objet d'études épidémiologiques[10],[11],[12] et débat[13]. La transmission du virus à l'homme dans le lait ou la viande de vaches infectées est suspecté[14]. L'Organisation mondiale de la santé animale (OMSA) considère que le virus de la LBE n'est pas dangereux pour l'homme.

Distribution[modifier | modifier le code]

Statuts LBE déclarés à l'OIE en 2017

Le virus de la LBE était probablement présent en Europe au XIXe siècle et aurait été importé sur le continent américain au cours de la première moitié du XXe siècle. Le commerce de bovins, et en particulier de vaches laitières à haut potentiel génétique provenant de l'Amérique du Nord auraient ensuite contribué à la diffusion du virus de la LBE à travers le monde. Plusieurs programmes nationaux d'éradication ont été instaurés en Europe occidentale à la fin du XXe siècle, et aujourd'hui, la maladie sévit essentiellement en Amérique et en Europe centrale et de l'est. Les pays officiellement reconnus indemnes de LBE poursuivent des programmes de surveillance continus[9].

La LBE en France[modifier | modifier le code]

La région Aquitaine était l'une des plus touchées par cette maladie dans les années 1980[15]. Le dépistage et l'éradication de la LBE est devenue obligatoire depuis le [16] et la France a été reconnue officiellement indemne de leucose bovine enzootique par la Commission européenne en 1999 (décision CE/1999/465).

Néanmoins, la Réunion a été exclue de la réglementation nationale par dérogations successives[17], puis par des arrêtés ministériels en 2015[18] (annulés par le Conseil d’État en [19]), et dernièrement par arrêté ministériel en [20]. En 2018, la séroprévalence LBE dans les troupeaux Réunionnais était de 100% dans les élevages laitiers, de 55% pour les troupeaux adhérents à la coopérative viande et de 38% chez les éleveurs indépendants[21].

Références[modifier | modifier le code]

  1. Milleman Y & Belbis G, « Les deux types de leucose bovine », Le Point Vétérinaire,‎ , p. 66 (lire en ligne)
  2. (en) Polat M. et col, « Epidemiology and genetic diversity of bovine leukemia virus. », Virolojy journal,‎ (lire en ligne)
  3. a b c et d (en) Reginald Johnson, Bovine Leukemia Virus in Current Veterinary Therapy Food Animal Practice, 4th edition, Philadelphie, Howard & Smith, , p. 266-299
  4. a b c et d (en) Office International des Épizooties (OIE), Manuel des tests de diagnostic et des vaccins pour les animaux terrestres 2019, (lire en ligne), Chapter 3.4.9 Bovine Enzootic Leukosis
  5. (en) Bundza A. et col, « Sporadic bovine leukosis: a description of eight calves received at Animal Diseases Research Institute from 1974-1980. », Canadian Vet journal,‎ , p. 280-283 (lire en ligne)
  6. a et b Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, « impact de la leucose bovine enzootique dans les départements d’outre-mer », Avis de l'ANSES,‎ (lire en ligne)
  7. (en) Ruiz V et col, « Bovine Leukemia Virus Infection in Neonatal Calves. Risk Factors and Control Measures », Frontiers in veterinary science,‎ (lire en ligne)
  8. (en) Buxton BA et col, « Role of insects in the transmission of bovine leukosis virus: potential for transmission by stable flies, horn flies, and tabanids. », American Journal of Veterinary Research,‎ , p. 123-126
  9. a et b Office International des Épizooties (OIE), Code sanitaire pour les animaux terrestres, (lire en ligne), CHAPITRE 11.6.LEUCOSE BOVINE ENZOOTIQUE
  10. (en) Buehring G et col, « Exposure to Bovine Leukemia Virus Is Associated with Breast Cancer: A Case-Control Study », PLOS ONE,‎ (PLOS ONE | DOI:10.1371/journal.pone.0134304)
  11. (en) Gillet NA et Willems L, « Whole genome sequencing of 51 breast cancers reveals that tumors are devoid of bovine leukemia virus DNA », Retrovirology,‎ (lire en ligne)
  12. (en) Buehring G et col, « Bovine leukemia virus linked to breast cancer in Australian women and identified before breast cancer development », PLoS ONE Open access,‎ ([https://doi.org/10.1371/journal. pone.0179367 lire en ligne])
  13. (en) Martinez Cuesta L et col, « Can Bovine Leukemia Virus Be Related to Human Breast Cancer? A Review of the Evidence », Journal of Mammary Gland Biology and Neoplasia,‎ , p. 101–107 (lire en ligne)
  14. (en) Olaya-Galan NN et col, « Bovine leukaemia virus DNA in fresh milk and raw beef for human consumption », Epidemiol. Infect.,‎ , p. 3125–3130 ([https://doi.org/10.1017/S0950268817002229 sur%20le%20site%20https://www.cambridge.org lire en ligne])
  15. GDS Aquitaine, « Caractéristiques de la Leucose bovine », sur gds-aquitaine.fr (consulté le )
  16. Arrêté du 31 décembre 1990 fixant les mesures techniques et administratives relative à la prophylaxie collective et à la police sanitaire de la leucose bovine enzootique., sur Légifrance
  17. « La leucose bovine ne serait pas à l'origine des problèmes des éleveurs », (consulté le )
  18. Arrêté du 4 septembre 2015 modifiant l'arrêté ministériel du 29 juillet 2013 relatif à la définition des dangers sanitaires de première et deuxième catégorie pour les espèces animales, sur Légifrance
  19. Conseil d'État, 3ème - 8ème chambres réunies, 20/03/2017, 395326, sur Légifrance
  20. Arrêté du 27 octobre 2017 modifiant l'arrêté du 31 décembre 1990 fixant les mesures techniques et administratives relatives à la prophylaxie collective et à la police sanitaire de la leucose bovine enzootique, sur Légifrance
  21. « Santé du cheptel bovin à La Réunion - Focus sur la Leucose », (consulté le )