Groupes de Curie

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En physique, les groupes de Curie sont des groupes ponctuels (c’est-à-dire laissant au moins un point invariant) de symétrie (de l’espace tridimensionnel) possédant au moins un axe de symétrie d’ordre infini appelé axe d’isotropie et noté . Ces groupes, au nombre de sept, ont été introduits par P. Curie en 1894 pour caractériser la symétrie, non d’un cristal, mais d’un champ électrique ou d’un champ magnétique[1]. Ils sont aussi appelés groupes limites car ce sont des sur-groupes des 32 groupes ponctuels de symétrie des cristaux.

Les sept groupes de Curie[modifier | modifier le code]

Les groupes de Curie sont notés en utilisant des symboles de Hermann-Maugin[2],[3]: est un axe d'isotropie (axe de rotation d'angle quelconque), est un axe binaire, est un miroir, indique que le miroir est perpendiculaire à l'axe. On donne aussi, entre crochets, la notation originale de Curie. Chaque groupe est décrit par ses éléments de symétrie.

  • [] : le seul élément de symétrie est l’axe d’isotropie ; le groupe est isomorphe à SO(2);
  • [] : en plus de l’axe d’isotropie , il y a un miroir (et donc une infinité de miroirs) contenant l’axe d’isotropie ; le groupe est isomorphe à O(2);
  • [)] : en plus de l’axe d’isotropie , il y a un miroir perpendiculaire à l’axe , et donc un centre de symétrie situé à l’intersection de l’axe et du plan de symétrie;
  • [, ] : en plus de l’axe d’isotrope , il y a un axe binaire perpendiculaire (et donc une infinité d’axes binaires perpendiculaires) à l’axe ; il y a nécessairement un centre de symétrie à l’intersection commune des axes binaires;
  • [] : en plus de l’axe d’isotropie , il y a un miroir perpendiculaire à l’axe et un miroir (et donc une infinité de miroirs) contenant l’axe d’isotropie ; il y a nécessairement un centre de symétrie à l’intersection commune des axes binaires;
  • [] : toutes les droites passant par le point invariant sont des axes d’isotropie ; le groupe est isomorphe à SO(3);
  • [] : en plus des axes d’isotropie du groupe , le groupe contient un miroir passant par le point invariant, donc tous les miroirs passant par le point invariant et aussi un centre de symétrie situé au point invariant; le groupe est isomorphe à O(3).


Le groupe de symétrie associé à un champ électrique est , tandis que celui associé à un champ magnétique est .

Diagramme d'inclusion des groupes de Curie[modifier | modifier le code]

L'ensemble des groupes de Curie est ordonné pour la relation d'inclusion et forme un treillis.

Diagramme d'inclusion des sept groupes de Curie.

Le diagramme ci-contre montre les relations d'inclusion. L'inclusion est indiquée par un trait montant, vertical ou oblique. Le double trait horizontal entre et indique qu'ils sont isomorphes.

Le groupe est l'unique élément maximal de l'ensemble (c'est-à-dire le maximum). Inversement, le groupe est l'unique élément minimal de l'ensemble (c'est-à-dire le minimum).

On calcule les indices de sous-groupes suivants:

Une rotation du groupe est indexée par un paramètre continu réel, alors qu'une rotation du groupe est indexée par 3 paramètres réels (par exemple ses angles d'Euler). En résumé, on peut écrire formellement l'ordre des groupes de Curie ainsi[4] :

Groupes de Curie et principe de Curie[modifier | modifier le code]

Rappelons que les groupes de Curie ont été introduits à propos de l'établissement du principe général de symétrie connu comme le principe de Curie. Selon ce principe, le groupe de symétrie d'un cristal présentant une propriété physique ayant un groupe de symétrie est tel que . Voyons deux exemples.

  • La pyroélectricité. Sous l'effet de la chaleur, le cristal, sans modifier sa géométrie, va présenter une polarisation électrique spontanée. Les cristaux pyroélectriques ont donc pour groupe ponctuel de symétrie un sous-groupe du groupe de Curie associé au champ électrique. Peuvent donc être pyroélectriques les seuls cristaux de groupe de symétrie parmi les 10 possibilités suivantes : , , , , ,, , , , . Le vecteur polarisation se trouve alors le long de l'axe de symétrie (s'il existe) et est contenu dans le(s) plan(s) de symétrie (s'il(s) existe(nt)).
  • la piézoélectricité. Le cas de la piézoélectricité n'est pas aussi simple que celui de la pyroélectricité car on doit raisonner sur la symétrie du cristal déformé. On montre qu'il existe 20 classes compatibles avec la piézoélectricité, dont les 10 classes pyroélectriques. Par exemple, le quartz a pour groupe d'espace de la classe . En comprimant le quartz le long d'un axe binaire, le cristal pourra présenter de la piézoélectricité.
32 classes cristallines
20 classes piézoélectriques non piézoélectriques
10 classes polaires pyroélectriques non pyroélectriques
ferroélectriques non ferroélectriques
ex : BaTiO3, PbTiO3 ex : Tourmaline ex : Quartz

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Pierre Curie, Sur la symétrie dans les phénomènes physiques, symétrie d'un champ électrique et d'un champ magnétique (1894).
  2. S. Ravy, Structure de la Matière Condensée, Cours de Master 2, Concepts Fondamentaux de la Physique, 2015.
  3. J. Sivardière, La Symétrie en Mathématiques, Physique et Chimie, Presses universitaires de Grenoble, 1995, (ISBN 978-2706106064)
  4. Y. Sirotine et M. Chaskolskaïa, Fondements de la Physique des Cristaux, éditions Mir, Moscou, 1984.