Discussion:Les Deux Cavaliers

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Commentaire d'un utilisateur[modifier le code]

Le film est d'abord porté par l'interprétation des deux comédiens principaux (James Stewart et Richard Widmark) qui s'amusent avec des dialogues piquants tout au long du film et témoignent d'un plaisir réciproque à jouer ensemble. Le sujet, tragique, de la perte d'identité et de l'affrontement de deux civilisations, est, comme toujours chez John Ford, abordé avec gravité et humour.


Les "grands" commentateurs (Peter Bogdanovich, Joseph Mc Bride, Tag Gallagher, Scott Eyman, Jean Roy, Philippe Haudiquet...) s'accordent tous à peu près sur le "ratage"...Ford a parait-il tourné dans un état quasi second, selon maints témoins-commentateurs indifférent à ce qui se passait sur le plateau, laissant les acteurs en roue libre, négligeant les décors, sur-éclairant des scènes inutilement, ou au contraire systématisant l'obscurité...et on en passe... (Indiens caricaturés, invraisemblance narrative, etc...)

Le réalisateur a entrepris le tournage pour faire une faveur à Harry Cohn, patron de la Columbia, en aurait detesté l'argument et a effectivement déclaré à Peter Bogdanovich en 1971 qu'il s'agissait là de la "worst crap I've ever made"... Vrai tout cela, et pourtant...Aujourd'hui comme hier, Two Rode Together, est un grand film, et un grand film de John Ford. Peut être parce qu'il est définitivement le plus atypique de l'oeuvre du cinéaste. Et ceci pour des raisons qui sont bien autres que celles qui relèveraient d'un travail plus ou moins soigné... Le héros Fordien, homme simple (Wagonmaster) ou plus "grand" que nature (y compris dans l'échec: the Searchers), se mesure à ce à quoi il croit, à des valeurs, fussent elles ideologiquement et/ou psychologiquement douteuses (Ethan Edwards)...Il "plays God", selon l'expression américaine, ce que refuse de faire Guthrie Mc Cabe, qui ramène deux prisonniers pour de l'argent...tout en méprisant son "logique accolyte" Mr Wringle, prêt à tout et n'importe quoi pour retourner à ses affaires (1000 dollars pour n'importe quel captif blanc d'environ seize ans). C'est précisément cette "toute-puissance" arrogante que Mc Cabe rejette, mais pas au point de ne pas saisir l'occasion...Pragmatisme avant tout: oui aux mille dollars...normal pour un sheriff qui touche dix pour cent sur tout à Tascosa (explication donnée à Jim Gary, parangon d'honnêteté et de bonne volonté: "Look at you...Jim...you're...you're a man of simple wants...I just deserve a little more..")...Quand Mr Wringle rompt son marché avec Mc Cabe (lucide en fait quant à l'impossibilité d'intégrer le gamin...), et avant que celui-ci n'ait le temps de réagir, l'adolescent change de mains, accepté par le "noble" Mc Candles, pour le bonheur de sa femme meurtrie par la perte de son enfant. Autre "faux", autre "manipulation", mais là humanité, sacrifice de soi...

Ford renvoie tout cela dos à dos: le môme , après avoir été encagé comme un animal, tue celle qui s'imagine sa mère avant d'être lynché...Mc Candles n'est pas "humainement plus efficace" que Mr Wringle. Les bons sentiments s'avèrent porteurs du pire...Ici, la noirceur est totale, tout n'est, fondamentalement, qu'échec... Reste qu'une telle philosophie (dont on pense ce que l'on veut) ne fait pas forcément un film...à fortiori un grand film. Le film est admirable. Là où certains disent laisser-aller et ennui (les vingt premières minutes par exemple), c'est nonchalance et poésie: de l'ouverture sous la véranda (le baillement) à l'arrivée poussièreuse du peloton de cavalerie, en passant par les considérations désabusées sur la Seniorita Gomez et l'expedition pronto des deux gamblers... justesse et langueur des plans, justesse des dialogues, qui semblent peu écrits, comme improvisés, surtout parce que ce qu'ils disent servent ici autre chose que l'avancée de l'action (finalement très "secondaire" au vu de ce que fait passer le film):... la vie et le temps qui passe.

(Ajouté par l'IP 90.33.34.169)