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Télégramme-circulaire du 24 juillet 1964 relative au port du monokini

Après les États-Unis et l'Angleterre, le monokini débarque en France à l'été 1964. Le 23 juin 1964, l'actrice Daphné Dayle se serait baignée seins nus et en maillot "deux pièces moins une" dans une piscine parisienne[1]. Le journal L'Aurore relate les les faits dans son édition du 24 juin 1964, accompagné fait le portrait de Ruben Torrès, "l'homme qui a inventé la nouvelle mode des maillots de bain "deux pièces pièces mois une". La journaliste Michèle Mercier conclut sur le fait qu'il n'existe aucune jurisprudence qui viserait à prévenir les attentats à la pudeur : "les plus audacieuses baigneuses prendront le risque"[1].

La première affaire judiciaire ne tarde pas : le 7 juillet 1964, la présence d'une jeune femme jouant au ping-pong en monokini sur une place privée crée un attroupement sur la croisette à Cannes[2],[3]. L'enquête révèle qu'elle a été engagée par le directeur de la plage contre une rétribution de 35 francs pour l'exhibition. Le ministère de l'Intérieur, inquiet du flou juridique en ce début de saison estivale, diffuse une un télégramme-circulaire aux préfets rappelant qu'il n'appartient pas aux maires de réglementer ou non le port en public de ce maillot dit "deux pièces moins une", puisqu'il tombe sous le coup de l'article 330 du Code pénal (outrage public à la pudeur). La presse s'en donne à cœur joie[3] :

  • "M. Frey met à l'index le monokini" (Combat, 24 juillet 1964) ;
  • "M. Frey condamne le "monokini""[4] (Le Monde, 25 juillet 1964) ;
  • Paris-presse, L'Intransigeant consacre une page complète à "L'Affaire des seins nus" le 25 juillet ;
  • "Monokini à la terrasse", annonce Le Figaro le 26 juillet, affirmant qu'une jeune femme s'est assise en monokini à la terrasse d'un café sur les Champs-Elysées ;
  • A Cabourg, le maire M. Thiers annonce être ouvert "dans la mesure où l'esthétique le permet"[5].

L'affaire de Cannes est jugée le 23 septembre 1964 : le tribunal correctionnel de Grasse condamne la jeune fille à 8 jours de prison avec sursis pour outrage public à la pudeur, et le directeur de plage à la même peine de 8 jours d'emprisonnement avec sursis et 1000 francs d'amende[3],[6]. Le 20 janvier 1965, la cour d'appel d'Aix-en-Provence relaxe la jeune femme ; s'appuyant notamment sur un arrêt rendu le 16 novembre 1937 par la cour d'appel de Riom, elle déclare par ailleurs "que le spectacle de la nudité du corps humain, fréquent à notre époque pour des raisons de sport, d'hygiène et d'esthétique, n'a rien en soi qui puisse outrager une pudeur normale, même délicate, s'il ne s'accompagne pas de l'exhibition des parties sexuelles ou d'attitudes ou gestes lascifs ou obscènes". Associations et particuliers s'insurgent[3]. Le 22 décembre 1965, la cour de cassation casse et annule, sans renvoi, l'arrêt de la cour d'appel, confirmant le délit d'outrage à la pudeur[2],[3].


Indissociable de l'émancipation des Françaises, le mouvement "seins nus" est amplifié par la mouvance post-68[2].

De nos jours, le monokini semble passé de mode, notamment auprès des jeunes. Ce geste n'a plus la portée symbolique qu'il avait pour leurs mères. La réticence vient d'un souci de se protéger du soleil (bien qu'il n'y ait pas plus de risque de développer un cancer sur la peau du sein qu'à un autre endroit du corps), mais aussi du fait que le monokini est tout simplement devenu « moins tendance » avec l'augmentation du culte du corps[7].

  1. a et b Michèle Mercier, « "C'est l'homme qui a inventé la nouvelle mode des maillots de bain ("deux pièces moins une")" », L'Aurore,‎
  2. a b et c Christophe Granger, « La jeune fille aux seins nus », dans Histoire par corps : Chair, posture, charisme, Presses universitaires de Provence, coll. « Corps et âmes », (ISBN 979-10-365-6969-2, DOI 10.4000/books.pup.33885, lire en ligne), p. 135–155
  3. a b c d et e Archives nationales (France), dossier de réglementation et de police administrative consacré au monokini (nombreuses coupures de presse), cote 19780349/8, [https://www.siv.archives-nationales.culture.gouv.fr/siv/UD/FRAN_IR_011177/d_8 notice d'inventaire en ligne].
  4. « M. Frey condamne le "monokini" », Le Monde,‎ (lire en ligne)
  5. « Le "monokini" permis à Cabourg », Combat,‎
  6. « Tribunal correctionnel de Grasse 23 septembre 1964 », Gazette du Palais,‎ 10-12 février 1975
  7. Cécile Mootz, « Sur les plages, le topless n'a plus la côte », sur midilibre.fr, (consulté le )