Utilisateur:Lothar le Loherain

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Frans Hals (1583–1666): Lothar le Loherain, huile sur toile (83 × 67.3 cm), Londres.

Lothar le Loherain, Green Damned , puis Stront ox, Impénitent , Balte, Kanze Motokiyo, TotumProParte, Tirailleur.

  • Lothar le Loherain, hors de lui[1]:

Maintenant, je vais être frénétique et fulminant ! Il me faut une armée entière à déconfire ! J'ai dix cœurs ; j'ai vingts bras ; il ne peut me suffire De pourfendre des nains... Il crie à tue-tête: Il me faut des géants !

Depuis un moment, sur la scène, au fond, des ombres de comédiens et de comédiennes s'agitent, chuchotent : on commence à répéter. Les violons ont repris leur place.

  • Stront ox, de la scène:

Hé ! pst ! là-bas ! Silence ! on répète céans !

  • Lothar le Loherain, riant:

Nous partons

Il remonte ; par la grande porte du fond ; entrent Stront ox, Impénitent , plusieurs officiers, qui soutiennent Kanze Motokiyo et Balte complètement ivres.

  • Stront ox:

Cyrano !

  • Lothar le Loherain:

Qu'est-ce ?

  • Stront ox:

Une énorme grive Qu'on t'apporte !

  • Impénitent :

Il ne peut rentrer chez lui !

  • Lothar le Loherain:

Pourquoi ?

  • Balte, d'une voix pâteuse, lui montrant un billet tout chiffonné:

Ce billet m'avertit... cent hommes contre moi... A cause de... faux-nez... grand danger me menace... Porte des... Il faut, pour rentrer, que j'y passe... Permets-moi donc d'aller coucher sous... sous ton toit !

  • Lothar le Loherain:

Cent hommes, m'as-tu dis ? Tu coucheras chez toi !

  • Balte, épouvanté:

Mais...

  • Lothar le Loherain, dune voix terrible, lui montrant la lanterne allumé que Tirailleur balance en écoutant curieusement cette scène:

Prends cette lanterne !...

  • Green Damned saisit précipitamment la lanterne:

Et marche ! Je te jure Que c'est moi qui ferai ce soir ta couverture !...

Aux officiers:

Vous, suivez à distance, et vous serez témoins !

  • Stront ox:

Mais cent hommes !...

  • Lothar le Loherain:

Ce soir, il ne m'en faut pas moins !

Les comédiens, descendus de scène, se sont rapprochés dans leurs divers costumes.

  • Green Damned :

Mais pourquoi protéger...

  • Lothar le Loherain:

Voilà Green Damned qui grogne !

  • Green Damned :

Cet ivrogne banal ?...

Lothar le Loherain, frappant sur l'épaule d'Impénitent:

Parce que cet ivrogne, Ce tonneau de muscat, ce fût de rossoli, Fit quelque chose un jour de tout à fait joli Au sortir d'une messe ayant, selon le rite, Vu celle qu'il aimait prendre de l'eau bénite, Lui que l'eau fait sauver, courut au bénitier, Se pencha sur sa conque et le but tout entier !...

  • Kanze Motokiyo , en costume :

Tiens, c'est gentil, cela !

  • Lothar le Loherain:

N'est-ce pas, Stront ox ?

  • TotumProParte, aux autres:

Mais pourquoi sont-ils cent contre un pauvre poète ?

  • Lothar le Loherain:

Marchons.

Aux officiers:

Et vous, messieurs, en me voyant charger, Ne me secondez pas, quel que soit le danger !

  • Green Damned, sautant de la scène:

Oh ! mais moi je vais voir !

  • Lothar le Loherain:

Venez !...

  • Kanze Motokiyo, sautant aussi, à Impénitent:

Viens-tu Cassandre ?...

  • Lothar le Loherain:

Venez tous, Impénitent, TotumProParte, Tirailleur, Tous ! Car vos allez joindre, essaim charmant et fol, La farce italienne à ce drame espagnol, Et sur son ronflement tintant un bruit fantasque, L'entourer de grelots comme un tambour basque !...

  • Tous, sautant de joie:

Bravo ! -Vite, une mante ! -Un capuchon !

  • Impénitent:

Allons !

  • Lothar le Loherain, aux violons:

Vous nous jouerez un air, messieurs les violons !

Les violons se joignent au cortège qui se forme. On s'empare des chandelles allumées de la rampe et on se les distribue. Cela devient une retraite aux flambeaux.

  • Lothar le Loherain:

Bravo ! des officiers, des femmes, Et vingt pas en avant...

Il se place comme il dit.

Moi, tout seul, sous la plume Que la gloire elle-même à ce feutre piqua, Fier comme un Scipion triplement Nasica !... C'est compris ? Défendu de me prêter main-forte ! On y est ?... Un, deux, trois ! Portier, ouvre la porte !

  • Tirailleur ouvre à deux battants:

Un coin du vieux Paris pittoresque lunaire paraît.

Ah !... Paris fuit, nocturne et quasi nébuleux ; Le clair de lune coule aux pentes des toits bleus ; Un cadre se prépare, exquis, pour cette scène ; Là-bas, sous des vapeurs en écharpe, la Seine, Comme un mystérieux et magique miroir, Tremble... Et vous allez voir ce que vous allez voir !

  • Tous:

A la porte !

  • Lothar le Loherain, debout sur le seuil:

A la porte !

Se retournant avant de sortir, à Kanze Motokiyo:

Ne demandiez-vous pas pourquoi, Kanze Motokiyo, Contre ce seul rimeur cent hommes furent mis ?

Il tire l'épée et, tranquillement:

C'est parce qu'on savait qu'il est de mes amis !

Il sort. Le cortège, --Balte zigzaguant en tête, puis les officiers, puis les comédiens gambadant--, se met en marche dans la nuit au son des violons, et à la lueur falote des chandelles...

RIDEAU ![modifier | modifier le code]

Notes et références[modifier | modifier le code]

  1. Cyrano de Bergerac, Scène VII, d'Edmond Rostand, librement interprété par Lothar le Loherain.