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LA MANNE DE SAINT NICOLAS


Il jaillit du corps de certains saints, le plus souvent après leur mort, une liqueur odorante. Il en est ainsi, entre autres, pour saint Amboise, sainte Walburge, saint Ange, saint Matthieu, saint Démétrios, sainte Thérèse, saint André et … saint Nicolas. En tout une trentaine de saints ont joui de ce privilège, mais pour le plus grand nombre, ce miracle n’a pas continué. Ce sont les saints myroblytes.

De nombreux récits attestent de la présence de la manne qui s’écoule du corps de saint Nicolas dès sa mort et dans son tombeau de Myre.

Michel l’Archimandrite a écrit : « Après avoir parfumé tout le monde avec sa très odorante et sainte conduite, il passa au repos éternel, et son Corps, précieux et exhalant le parfum de la vertu, fut enseveli dans son église, où il se mit à donner une huile suave, qui fournissait un remède contre les maladies et éloignait les maléfices. (1)» Ribet s’exprime ainsi : « Après sa mort, il coula de ses ossements une huile odoriférante, salutaire à tous les maux, prodige qui attira, des régions les plus lointaines, des foules avides de le contempler, et qui venaient chercher auprès du saint le soulagement de leurs misères tant physiques que morales. (2)» Et le Révérend Père Gerardo Cioffari le plus éminent spécialiste nicolaïen contemporain raconte ainsi, d’après les textes de l’époque, l’ouverture à Myre de la sépulture de saint Nicolas par Mathieu : « Quand la tombe fut ouverte, il trouva le cercueil entièrement rempli d’un saint liquide qui recouvrait le Corps du Saint jusqu’au nombril. (3)» Le nuage de parfum qui s’en dégagea, porté par le vent, atteignit d’ailleurs les marins, compagnons de Mathieu, qui étaient restés au port. Saint Théodore Studite déclare que « la tombe qui contient les reliques de saint Nicolas est plus odoriférante que les fleurs… (4)»

Après la translation du corps de saint Nicolas de Myre à Bari, la liqueur, appelée manne, a continué de couler de ses ossements.

Un jour que sainte Brigitte était venue en pèlerinage à ce tombeau de Bari, et méditait sur ce prodige de la manne, elle aperçut en esprit, raconte-elle, un personnage tout embaumé d’une huile odorante, qui lui tint ce discours : « Je suis l’évêque Nicolas, qui vous apparais dans l’extérieur que j’avais dans ma vie mortelle. Tous mes membres étaient alors souples et flexibles au service de Dieu, comme un instrument imbibé d’huile qui cède sans résistance à toutes les impulsions que la main lui imprime. Au fond de mon âme surabondait la louange, sur mes lèvres la parole de Dieu, et la patience dans le travail ; et je puisais tout cela dans les vertus d’humilité et de chasteté que j’ai aimées par-dessus toutes les autres. Et maintenant, c’est parce que la plupart de ceux qui sont dans le monde n’ont point leurs os humectés de la grâce divine, qu’ils rendent un son vain, s’entrechoquent pour se détruire, vivent stériles de tout fruit de justice, et sont abominables aux yeux de Dieu. Vous, du moins, sachez que comme la rose a son parfum et le raisin sa saveur, ainsi Dieu a accordé à mon corps la faveur singulière d’en faire découler une huile salutaire ; car non seulement il honore ses élus dans les cieux, mais encore il les glorifie et les exalte sur la terre, afin qu’ils soient pour plusieurs une cause d’édification, et qu’ils les rendent participants de la grâce qu’ils ont reçue. (5) » Romanos le Mélode appelle notre saint « le vase de myrrhe du Christ. » Ce qui fit donner chez les grecs le surnom de myroblyte (celui qui répand la myrrhe) à saint Nicolas (6). De nos jours encore, la manne emplit le tombeau de saint Nicolas. Le terme manne rappelle cette nourriture tombée en pluie du ciel pour sauver de la famine les juifs qui, fuyant l’Égypte, étaient destinés à la terre promise. Cependant le terme grec de « muron », parfum, fait penser à une substance huileuse alors qu’en réalité la manne de saint Nicolas est une eau pure qui en terme chimique est dite « quasi pure.» La manne se forme dans le tombeau et vient au contact de ses restes sacrés. Le phénomène n’est pas facilement explicable. Il est tout à fait exclu que cela soit dû à des infiltrations d’eau de l’extérieur, l’imperméabilité de la cavité, un sarcophage de marbre, où se trouvent les os est attestée. Il est arrivé que l’on creuse au niveau des fondations de la basilique, près du tombeau, et l’on a trouvé de l’eau salée provenant de la mer proche, or la manne ne contient pas de sel. Les pères dominicains de Bari écrivent dans le bollettino qu’indépendamment des solutions que donnent les différentes hypothèses de l’explication naturelle ou surnaturelle du phénomène, la manne est une authentique relique parce que c’est un liquide qui reste au contact des os du saint. Ainsi la manne peut être réservée au culte et à la dévotion dus aux reliques de saint Nicolas. L’abbé Laroche écrit : « Les saints, pour la plupart, ne sont honorés que dans leur pays d’origine ou dans la contrée qu’ils ont illustrée par leurs vertus, ou dans les églises qui possèdent les précieux restes de leur corps. Mais par sa puissance près de Dieu, saint Nicolas ayant mérité d’être honoré dans tous les âges et tous les pays, et son corps ne pouvant être divisé à l’infini, comme l’aurait demandé la piété des fidèles, Dieu pour favoriser la dévotion envers son illustre serviteur, a voulu multiplier ses reliques par l’écoulement perpétuel de la manne. (7)» En 1953, à l’occasion des travaux de restauration de la crypte, les os sacrés, recueillis et rassemblés dans une urne spéciale, restèrent exposés pendant trois ans à la vénération des fidèles dans la salle du trésor, et le drap sur lequel cette urne avait été posée fut trouvé tout mouillé. Ce tissu de lin est à présent exposé dans le Trésor. Jusqu’au début du vingtième siècle, chaque pèlerin pouvait lors d’une courte cérémonie regarder par l’orifice supérieur du tombeau, le seul, un trou rond de dix centimètres de diamètre. Il contemplait alors les os du saint baignés de manne. A cette occasion le custode officiant offrait à boire au pèlerin quelques gouttes du précieux liquide. Depuis 1980 la manne est officiellement prélevée chaque année le 9 mai, fête de la translation, à la fin d’une solennelle célébration religieuse, par le recteur de la basilique de Bari, en présence du Délégué Pontifical, de l’Archevêque de Bari, des autorités, du clergé et des fidèles. Le prélèvement est réalisé à l’aide d’une sonde de caoutchouc qui vient remplir un flacon de verre. L’évêque donne la bénédiction à l’assemblée émue des fidèles avec l’ampoule de cristal dans laquelle il vient de verser le précieux liquide.

La manne distribuée ensuite aux fidèles est de l’eau bénite dans laquelle a été versée une petite quantité de manne pure.

La manne est traditionnellement conservée comme relique par les fidèles de Bari en bouteilles décorées par des peintres locaux avec des épisodes de la vie, des miracles ou des patronages de saint Nicolas. Ces bouteilles sont très précieuses aussi bien sous l’aspect dévotionnel que culturel ou artistique. Ces flacons de ce précieux liquide sont d’un usage très ancien à Myre, en 1088 Niceforos parle d’ « unum lecytum vitreum », un flacon en verre, et Giovanni Arcidiacono (Jean Archidiacre) d’une « vitrea ampullula », une petite fiole de verre. Dans les siècles suivant la translation jusqu’à nos jours de nombreux auteurs ont témoigné de l’usage de fioles décorées pour conserver la manne. Certains noms de ces décorateurs sur verre du dix-huitième et dix-neuvième siècle sont parvenus jusqu’à nous comme Lapegna, Dentamaro et Montrone. Une collection de ces fioles de manne magnifiquement décorées, est conservée au Trésor de la basilique de Bari. Jusque dans la première moitié du vingtième siècle la boutique de la basilique de « Saint-Nicolas de Bari » vendait des bouteilles vides et l’acheteur allait la faire remplir au tombeau par le prêtre ou à la basilique qui en conservait dans de grands bocaux. Aujourd’hui à cette boutique il est proposé à la vente divers flacons, grands ou petits, décorés ou non, emplis de manne. En fait il s’agit, rappelons-le, de manne mêlée à de l’eau bénite, parfois avec une huile.

Le caractère miraculeux de la manne.

Extrait d’un office de saint Nicolas du douzième siècle : Répons : De son tombeau de marbre découle une huile sacrée qui guérit les aveugles, dont les yeux en sont oints, rend l’ouïe aux sourds, et remet en santé tous ceux qui sont débiles. Les peuples courent en foule, empressés de voir les merveilles qui se font par l’entremise de Nicolas. Antienne : O bonté du Christ, digne d’être relevée par toutes sortes de louanges ! C’est elle qui manifeste au loin les mérites de Nicolas, son serviteur ; car de la tombe de ce saint découle une huile, et elle guérit tous ceux qui sont dans la langueur.

L’abbé Laroche écrit : « On peut diviser en deux classes les miracles opérés par la manne : les uns ont pour but de manifester son caractère surnaturel et se rapportent à la manne elle-même ; les autres sont des guérisons merveilleuses opérées par la manne. (7) » Les miracles, qu’ils concernent la manne elle-même ou les guérisons, sont si nombreux qu’on ne peut les citer tous. Ils nous sont connus par les écrits de témoins oculaires ou par les miraculés eux-mêmes. En voici quelques uns : Jean Archidiacre, historien barésien, dans « historia translationis » en 1088, rapporte qu’un flacon de manne conservé par le prêtre Lupo est tombé d’une haute colonne sur la tombe de marbre du saint avec grand fracas. A la stupeur générale l’ampoule fut indemne. Nicolas de Soissons, au douzième siècle, évoque la confection de petites burettes barésiennes dans la vie de saint Godefroy évêque d’Amiens (1066-1115) : il raconte qu’une fiole de manne, offerte à saint Godefroy à Bari en 1109 par l’évêque du lieu, fut portée par le saint à son cou. Au port de saint Georges, où le vaisseau apportant saint Nicolas avait abordé, le flacon tomba sans se briser sur le sol rocailleux bien que le saint fût sur son cheval. Saint Godefroy le retrouva flottant sur l’eau, intacte, bien que frappée par les rames des pêcheurs.


Au sujet de la manne, Michel l’archimandrite, on l’a vu, parle de remède.

Ce caractère thaumaturgique a été reconnu très tôt. Les fidèles utilisent donc la manne pour le salut du corps et de l’esprit. Elle est alors répandue sur les parties malades du corps ou elle est administrée en boisson. Une prière spécifique est prévue pour l’administration de la manne au malade. La manne est aussi conservée comme une relique qui protège la famille et la maison (8). De nombreux témoignages de guérisons attestent de l’efficacité de la manne. Antonio Pùteo, archevêque de Bari écrit : « Moi Antonio Pùeto, par la grâce de Dieu et du siège apostolique, archevêque de Bari, ayant été pris l’an dernier d’une fièvre atroce, et avec des résultats vains avec presque tous les remèdes des médecins pour récupérer la santé, j’invoquai humblement le très glorieux pontife et confesseur Nicolas. A peine me fut donnée la manne, qui de ses os coule continuellement, qu’il s’ensuivit un somme calme et tranquille tant de l’âme que du corps (9). » En 1889, à Neufchâteau (Vosges), un jeune homme atteint de fièvre typhoïde était à toute extrémité ; son père, docteur en médecine, n’attendait plus que sa mort. Le curé, M. l’abbé Joly, qui m’a raconté le fait, demanda au père du jeune homme de faire l’essai de la manne de saint Nicolas, dont il possédait un petit flacon. Inutile de dire que tout fut permis par un père désespéré. Le curé fit une onction sur le front du jeune homme, qui dès le lendemain entrait en convalescence (7). Polycarpe KAYATA, Archimandrite, Curé de la paroisse Saint-Nicolas de Myre à Marseille, église de rite grec catholique, relate de très nombreux miracles dus à la manne de Saint Nicolas à la fin du dix-neuvième siècle et au début du vingtième, dont deux qui le concernent lui-même (10). Benoît XIV, dans son « Traité de la Canonisation » mentionne la manne de saint Nicolas et en reconnait le pouvoir expressément miraculeux. Pie IX avait constamment sur sa table de travail un flacon de la précieuse manne de saint Nicolas et lui devait la guérison de son mal de gorge.

Dans le livre de Bouvet, « La confrérie de saint Nicolas des apothicaires et des épiciers de Paris » (édition le Nœud de Vipère, 1949) l’auteur avance l’idée que cette société a choisi saint Nicolas comme patron à cause de la manne. En effet cette huile odoriférante guérissant les malades est citée dans divers documents de la confrérie.

La manne n’a jamais coulé à Saint-Nicolas-de-Port, cependant à l’issue de la procession traditionnelle de la « Saint-Nicolas d’été et d’hiver, les fidèles sont invités à recevoir la manne. Il s’agit d’une cérémonie de bénédiction où le prêtre trace le signe de la croix sur le front du récipiendaire avec de la manne de saint Nicolas. Cette petite cérémonie a lieu depuis la fin du dix-neuvième siècle grâce à l’abbé Laroche, chanoine honoraire de la Métropole de Bari, qui l’a proposée et en a reçu l’autorisation de Monseigneur l’évêque de Nancy.

Les pères dominicains de Bari écrivent : « Les reliques des saints (et la « manne » est une relique de saint Nicolas) comme les sacrements, sont pour nous croyants une aide spirituelle pour raviver notre foi et un soutien à notre faiblesse humaine. »

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(1) Michel l’archimandrite, vers 720, cité par Claude Kevers-Pascalis dans « Saint Nicolas » éditions Klopp 1998.

(2) Ribet dans « Mystique divine » cité par l’abbé Marin dans « Saint Nicolas » édition Lecoffre 1916.

(3) Gerardo Cioffari dans « Saint Nicolas l’histoire et le culte » édition du centre d’études nicolaïennes de Bari 1996.

(4) Saint Théodore Studite ( ?-826), poème, dans Pitra cité par l’abbé Marin dans « Saint Nicolas » édition Lecoffre 1916.

(5) Sainte Brigitte de Suède (1303-1373) dans « Le livre des révélations » cité par l’abbé Marin dans « Saint Nicolas » édition Lecoffre 1916.

(6) Saint Romanos le Mélode (Syrie 485-562) cité par l’abbé Marin dans « Saint Nicolas » édition Lecoffre 1916. La myrrhe (commiphora myrrha) est une gomme résineuse qui suinte du tronc d’un arbre de la famille des burseracées que l’on trouve en Abyssinie et en Erythrée.

(7) Cité par l’abbé Laroche dans « la manne de saint Nicolas » édition A. Crépin-Leblond 1897.

(8) Les informations précédentes ont été trouvées dans le « bollettino di san Nicola » n° 10/11-2002 et n° 2-2003.

(9) Antonio Pùeto dans « Déclaration » 1571. Cité dans le « bollettino di san Nicola » n° 10/11-2002.

(10) « Le pouvoir de saint Nicolas de Myre d’après les archives de l’église du saint à Marseille » par Polycarpe Kayata, imprimerie Ant.Ged, Marseille 1924.